Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 juin 2009, 08-41.037, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1245-2 du code du travail ;

Attendu , selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société BEP 93 par contrat à durée déterminée de douze mois à compter du 22 mars 2004, en qualité de plombier, sans indication du motif de recours à un tel contrat ; que le contrat étant arrivé à échéance le 21 mars 2005, M. X... a saisi, le 22 avril 2005, la juridiction prud'homale d'une demande tendant à la requalification du contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée et à la condamnation de l'employeur à lui verser diverses indemnités au titre de la rupture abusive de son contrat de travail ;

Attendu qu'après avoir requalifié en contrat à durée indéterminée le contrat à durée déterminée conclu en méconnaissance de l'article L. 1242-12 du code du travail, la cour d'appel a alloué l' indemnité de requalification mais a débouté le salarié de ses demandes au titre de la rupture de ce contrat à durée indéterminée en retenant que l'employeur a, en cours d'instance, proposé au salarié de le réintégrer et que ce dernier a refusé ce dont elle a déduit que la rupture lui était imputable ;

Attendu, cependant, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 122-3-13, alinéa 2, phrases 1 et 3, devenu L. 1245-2 du code du travail, que lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande de requalification du contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire sans préjudice de l'application des dispositions du titre III du présent livre relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée ;

Qu'en statuant comme elle a fait, alors, d'une part, que lorsqu'un contrat de travail à durée déterminée est requalifié en un contrat de travail à durée indéterminée, la rupture du contrat par la seule survenance de l'échéance du terme s'analyse en un licenciement abusif, et, d'autre part, que la rupture étant acquise, le salarié n'était pas tenu d'accepter la proposition de réintégration qui lui était faite, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement abusif et non-respect de la procédure de licenciement et de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, l'arrêt rendu le 10 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société BEP 93 à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Rachid X... de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement abusif et non respect de la procédure de licenciement et d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents ;

Aux motifs que «attendu que par lettre recommandée du 18 mai 2005 avec accusé réception signé le 19 mai 2005 la SARL BEP 93 a accepté de réintégrer M. X... dans ses effectifs à compter du 22 mars 2005 et proposé à l'intéressé de reprendre son poste le lendemain de la réception de son courrier soit le 20 mai 2005.

Attendu que cette proposition est intervenue dans le délai d'un mois à compter de la saisine directe par le salarié du bureau de jugement.

Que M. X... toutefois n'a pas répondu à cette proposition et n'a jamais réintégré son poste, Qu'il y a lieu dès lors de constater que la rupture du contrat de travail lui est imputable et de confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de ses demandes en dommages et intérêts pour licenciement abusif et pour non respect de la procédure de licenciement et d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents. » ;

Alors, d'une part, que, lorsque le contrat à durée déterminée est arrivé à son terme et est ultérieurement requalifié en contrat à durée indéterminée, le salarié peut prétendre au versement des indemnités pour non respect de la procédure de licenciement et licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, en décidant que la rupture était imputable au salarié pour le débouter de ses demandes consécutives à la rupture du contrat de travail, quand le contrat à durée déterminée était arrivé à échéance avant la saisine par le salarié du bureau de jugement du conseil de prud'hommes d'une demande en requalification, la cour d'appel a violé l'article L.122-3-13 du code du travail ;

Alors, d'autre part, que en cas de saisine du conseil de prud'hommes d'une demande de requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, l'affaire est portée directement devant le bureau de jugement qui doit statuer au fond dans le délai d'un mois suivant sa saisine ; que la proposition de l'employeur visant à réintégrer le salarié dans ses anciennes fonctions dans ce délai d'un mois est nécessairement sans effet, quand le contrat à durée déterminée a d'ores et déjà été rompu par l'effet de l'échéance du terme ; qu'en retenant pourtant que la rupture était imputable au salarié qui n'avait pas donné suite à la proposition de son ancien employeur, formulée postérieurement à l'échéance du contrat à durée déterminée, la cour d'appel a violé l'article L.122-3-13 du code du travail ;

Alors, en tout état de cause, que la rupture du contrat de travail ne peut être imputable au salarié que s'il est relevé de sa part une manifestation de volonté non équivoque de démissionner ; que la cour d'appel a décidé que la rupture du contrat de travail était imputable au salarié sans relever l'existence d'une telle manifestation de volonté, violant ainsi les articles 1134 du code civil et L.122-3-13 du code du travail.

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