Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 juin 2009, 08-15.376, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 621-46 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises et l'article 66 du décret du 27 décembre 1985 ;

Attendu que la forclusion n'est pas opposable aux créanciers titulaires d'une sûreté ayant fait l'objet d'une publication ou d'un contrat publié dès lors qu'ils n'ont pas été avisés personnellement, peu important qu'ils aient eu connaissance de l'ouverture de la procédure collective, et que seule la réception de l'avertissement prévu à l'article 66 du décret du 27 décembre 1985 fait courir le délai de deux mois à l'expiration duquel ces créanciers encourent la forclusion ;

Attendu, selon l'arrêt déféré et les productions, que la société Leroy ayant été mise en liquidation judiciaire le 1er décembre 2005, la banque Scalbert Dupont (la banque) a déclaré une créance à titre chirographaire dans le délai légal ; que la banque qui était en outre titulaire d'une créance garantie par un nantissement publié, a, le 13 juin 2006, demandé au juge-commissaire de constater que la forclusion ne lui était pas opposable en sa qualité de créancier, muni d'une sûreté, non avisé d'avoir à déclarer sa créance ;

Attendu que pour confirmer l'ordonnance du juge-commissaire et rejeter la "demande de relevé de forclusion" de la banque, l'arrêt, après avoir énoncé que dans le régime de la loi du 10 juin 1994 applicable à la cause, le juge-commissaire n'a pas d'autres recherches à faire que celle d'un avis personnellement adressé au créancier muni d'une sûreté, retient qu'à défaut d'avoir envoyé un tel avis dans la forme requise par les textes, le liquidateur n'est pas admis à démontrer la faute du créancier ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si la banque, titulaire d'une créance garantie par un nantissement publié, avait été destinataire de l'avertissement personnel prévu par l'article 66 du décret du 27 décembre 1985, peu important que celle-ci ait déclaré une autre créance, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;

Condamne la société Leroy aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille neuf.




MOYEN ANNEXE au présent arrêt ;

Moyen produit par Me Le Prado, Avocat aux Conseils, pour la société CIC Banque Scalbert Dupont ;

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :

D'AVOIR confirmé l'ordonnance rendue à ROUBAIX le 4 décembre 2006, rejetant la demande d'inopposabilité de forclusion de la BANQUE SCALBERT DUPONT ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE dans le régime issu de la loi du 10 juin 1994 et applicable à la cause, le juge-commissaire n'a pas d'autre recherche à faire que celle d'un avis personnellement adressé au créancier muni d'une sûreté ; que notamment, à défaut d'avoir envoyé un tel avis dans la forme requise, le liquidateur n'est pas admis à démontrer la faute du créancier (Corn. 16 octobre 2001 pourvoi n° 98-20.551) ; que par la suite, le premier juge était fondé à statuer comme il l'a fait et que l'intimé recevra pétition de ses frais ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le créancier ne justifie pas que sa défaillance n'est pas due à son fait ; la BANQUE SCALBERT DUPONT a déclaré sa créance dans le délai légal, elle était donc au courant de l'ouverture de la procédure ;

ALORS D'UNE PART QUE, toute décision de justice doit reposer sur des motifs intelligibles ; qu'après avoir rappelé la nécessité d'un avis personnellement adressé au créancier nanti par le liquidateur judiciaire et, en cas d'omission de cette formalité, l'impossibilité pour ce mandataire judiciaire de démontrer une faute du créancier, la Cour d'appel a confirmé l'ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté la demande qualifiée de «relevé de forclusion», quand celui-ci était saisi d'une requête en inopposabilité de la forclusion ; que la Cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART QUE la forclusion n'est opposable aux créanciers titulaires d'une créance ayant fait l'objet d'une publication ou d'un contrat de crédit bail publiés que s'ils ont été avisés personnellement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reproduisant les dispositions légales et réglementaires à observer pour la déclaration des créances ; qu'à défaut d'accomplissement de cette formalité substantielle, le délai de deux mois à l'expiration duquel ces créanciers encourent la forclusion ne court pas ; que pour rejeter la'demande en inopposabilité de la forclusion formée par la banque au titre de sa créance nantie détenue à l'encontre de la société LEROY, l'arrêt se borne à énoncer par motifs adoptés, que la banque ayant déclaré sa créance dans le délai légal était donc au courant de l'ouverture de la procédure et ne justifiait pas que sa défaillance n'était pas due à son fait ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée, si Maître X..., ès-qualités, avait avisé personnellement la banque, créancière nantie, par lettre recommandée avec accusé de réception, cette formalité substantielle étant seule susceptible de rendre opposable à la banque une quelconque forclusion, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 621-46 du Code de commerce et de l'article 66 alinéa 3 du décret du 27 décembre 1985 modifié par le décret du 21 octobre 1994 applicable en cause.




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