Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 mai 2009, 07-44.245, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le troisième moyen :

Vu les articles L. 122-14-5 et R. 122-2-1 devenus L. 1235-5 et R. 1232-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., qui avait été engagée le 1er juin 2001 en qualité de comptable par le GIE MN, a été licenciée le 17 mai 2002 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de paiement de diverses sommes au titre de la rupture ;

Attendu que pour la débouter de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, l'arrêt énonce que le seul fait que le lieu de l'entretien préalable ne figure pas dans la lettre de convocation à l'entretien préalable ne peut en aucun cas avoir causé un préjudice à la salariée, dès lors que le GIE n'a qu'un seul établissement où sont concentrées toutes ses activités ;

Qu'en statuant ainsi, alors que toute irrégularité de la procédure de licenciement entraîne pour le salarié un préjudice que l'employeur doit réparer et qu'il appartient au juge d'évaluer, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux autres moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, l'arrêt rendu le 31 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;

Condamne le GIE MN aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le GIE MN à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'employeur rapporte la preuve de la faute grave commise par Madame X... et d'avoir rejeté les demandes de Madame X... tendant à obtenir le paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre une indemnité de préavis, un rappel de salaire pour la période de mise à pied et le paiement d'un arriéré au titre des congés payés ;

AUX MOTIFS QUE la faute grave, dont la preuve incombe à l'employeur, résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée limitée du préavis ; quand bien même Catherine X... aurait disposé d'une grande latitude dans la gestion de son emploi du temps hebdomadaire, il n'a jamais été soutenu qu'elle était libre de ne pas venir travailler une semaine, voir même plusieurs semaines d'affilé, au surplus sans en aviser son employeur ; aux termes d'attestations rédigées en la forme légale, précises et circonstanciées, des collaborateurs permanents ou occasionnels de l'intimée témoignent de ce que : Yves Y... (responsable financiers) « Mme Catherine X... n'est pas venu travailler de sa propre initiative au mois de mars et au mois d'avril 2002 (du 1er au 28/04). Je sais que cette absence a énormément désorganisé les services et a causé beaucoup de retard dans la remise des documents comptables à l'expert » ; Anne Z... (comptable) : « Pendant la présence de Catherine X... au GIE, il a été difficile de mettre une organisation de travail en place car elle nous imposait des horaires différents des nôtres (le matin ou l'après-midi, un jour je viens, l'autre pas). Surtout durant les mois de mars et avril elle n'est pas venue travailler au GIE. D'où une désorganisation de notre travail et l'embauche d'une intérimaire pour la remplacer » ; Eric A... (contrôleur de gestion et associé) : « Catherine X... a fait partie de l'effectif de la société entre juin 2001 et mai 2002, liée par un CDI à mi-temps de 20 heures par semaine. Sa plage horaire a été définie l'après-midi en raison de son indisponibilité du matin (déjà employée par la société CARRE D'AS). Madame Catherine X... a été présente normalement tous les après-midi jusqu'en mars 2002. Ses horaires sont justifiés par ses fiches de salaire » ; ces témoignages, dont la sincérité et la force probante ne sont pas sérieusement discutables, ni discutés, établissent l'absence de Catherine X... aux temps et heures de travail de mars et avril 2002 ; force est de constater que la salariée ne rapporte pas la preuve des motifs qu'elle avance pour justifier ses absences, autre que la maladie pour la période du 22 au 28 avril, alors que la charge de la preuve pèse sur elle ; notamment, elle s'abstient de justifier qu'elle se serait tenue à la disposition de son employeur pendant la période contestée ou qu'elle aurait travaillé, à sa demande ou non, auprès d'un tiers employeur ; il est du reste remarquable que ses griefs à l'égard de l'entreprise aient été exprimés en réponse à la sommation de l'employeur de réintégrer son travail ou de s'exprimer sur son absence et qu'ils n'aient pas précédés cette sommation ; il se déduit de ce qui précède que Catherine X... a effectivement été absente de son travail pendant plusieurs semaines, sans autorisation de l'employeur et sans même que celui-ci n'ait été informé des raisons de cette absence, que ce soit pendant son cours ou à l'issue de celle-ci ; un tel comportement caractérise bien une faute grave, qui a persisté malgré la reprise du travail et a justifié en conséquence le licenciement immédiat, toute relation contractuelle devenant impossible, même pendant la durée limitée du préavis ; si l'on peut s'étonner que l'employeur n'ait pas été plus réactif, le seul fait qu'il n'ait pas réagi dès les premiers jours de l'absence injustifiée ne peut en aucun cas diminuer la faute et encore moins la faire disparaître ; les demandes en paiement d'indemnités de rupture doivent en conséquence être rejetées ;

ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que dans la lettre de licenciement, l'employeur avait fait état des absences de Madame X... depuis la fin du mois de mars 2002 et du fait que lors de la reprise de son travail le 29 avril, elle n'avait pas été en mesure de fournir un justificatif valable de son absence ; que la Cour d'appel, pour considérer que le licenciement était fondé, a relevé que la salariée avait été absente sans autorisation de son employeur en mars et avril 2002 et que son comportement avait persisté malgré la reprise du travail ; qu'en se fondant sur la persistance du comportement de la salariée « malgré la reprise du travail », pourtant non invoquée dans la lettre de licenciement, la Cour d'appel a violé l'article L 122-14-2 du Code du Travail ;

ALORS QUE Madame X... avait contesté avoir été absente en mars 2002 et avait critiqué les témoignages de Madame B... et de Monsieur Y... ; qu'en se fondant sur ces témoignages en affirmant que leur « sincérité et (leur) force probante ne sont pas sérieusement discutables, ni discutés », la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du NCPC ;

ALORS encore QUE la preuve de la faute grave incombe à l'employeur et le salarié n'a rien à démontrer ; qu'en se fondant sur l'absence de preuve apportée par la salariée pour considérer qu'une faute grave était caractérisée, la Cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-3, L. 122-14-4 du Code du travail et 1315 du Code civil ;

Et ALORS enfin QUE la faute grave est celle qui implique une rupture immédiate du contrat de travail ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'employeur n'a pas sanctionné immédiatement le comportement de la salariée ; qu'en refusant de tirer les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, la Cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du Code du travail ;

ALORS surtout QUE la faute grave est celle qui revêt une réelle importance, caractérisant une volonté délibérée de la part du salarié de méconnaître les obligations qui lui incombent et rendant impossible la poursuite du contrat de travail même pendant la durée limitée du préavis; que le fait, pour un salarié, de s'absenter sans fournir un justificatif de son absence ne constitue pas une faute grave ; qu'en considérant néanmoins que la salariée aurait commis une faute grave, la Cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Madame X... tendant à obtenir le paiement de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice subi du fait des circonstances vexatoires ayant accompagné la rupture ;

AUX MOTIFS visés dans le premier moyen ;

ALORS QUE même lorsqu'il est fondé sur une faute grave ou sur une cause réelle et sérieuse, le licenciement peut causer au salarié, en raison des circonstances qui l'ont accompagné, un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi et dont il est fondé à demander réparation ; que la Cour d'Appel, qui s'est abstenue de rechercher si le licenciement de l'exposante n'avait pas été entouré de circonstances de nature à lui causer un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1382 du Code Civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Madame X... fondée sur l'irrégularité de la procédure de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE le seul fait que le lieu de l'entretien préalable ne figure pas dans la lettre de convocation du 2 mai 2002 ne peut en aucun cas avoir causé un préjudice au salarié dès lors que le GIE n'a qu'un seul établissement où sont concentrés toutes ses activités ;

ALORS QU'en application de l'article R 122-2-1 du Code du Travail la lettre prévue à l'article L 122-14 précise le lieu de l'entretien ; que le non respect d'une formalité de la procédure de licenciement entraîne nécessairement pour le salarié un préjudice que le juge doit réparer ; qu'en rejetant la demande d'indemnisation de la salariée après avoir constaté que le lieu de l'entretien préalable ne figurait pas dans la lettre de convocation, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14, R. 122-2-1 et L. 122-14-4 et L. 122-14-5 du Code du travail.

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