Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 mai 2009, 07-43.559, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 07-43.559
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
- Président
- M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... a été engagé par le Centre de formation de la profession bancaire (CFPB) en qualité de consultant par contrat à durée indéterminée à temps partiel à compter du 17 mars 1995 moyennant une rémunération brute annuelle fixe forfaitaire payable en treize mensualités pour assurer "au cours d'une année civile impérativement au moins soixante jours" d'activités ; que, licencié le 17 février 2005 pour insuffisance professionnelle, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 223-1, alinéa 1, devenu l'article L. 3141-1du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de rappel d'indemnité de congés payés sur les cinq dernières années, soit sur la période postérieure au 17 février 2000, l'arrêt retient, par motifs propres qu'il ressortait d'un courrier adressé par M. X... au CFPB le 5 février 2001 qu'il avait régulièrement pris ses congés payés au mois d'août de sorte qu'étant payé pour une somme globale de 177 900 francs pour soixante jours de travail payée en treize mensualités de 13 685 francs et ne contestant pas que dans les douze mensualités restantes (après déduction de la treizième rémunérant à compter du 29 juin 1993 la prime exceptionnelle annuelle), une d'entre elles rémunérait sa prise de congés payés du mois d'août et, par motifs adoptés, qu'il appartenait au salarié de saisir la commission de concertation compétente dans ce domaine et qu'il ne l'avait pas fait ; que la rémunération globale et forfaitaire convenue incluait implicitement mais nécessairement l'indemnité de congés payés ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'inclusion de l'indemnité de congés payés dans une rémunération forfaitaire ne peut résulter que d'un accord exprès des parties, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs inopérants, a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article L. 212-4, alinéa 1, devenu L. 3121-1 du code du travail , ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande d'indemnisation des temps de déplacement en mission sur les cinq dernières années précédant la saisine de la juridiction prud'homale, l'arrêt retient que le salarié avait effectué un décompte de la durée de ses séminaires pour les années 2000 à 2004, soit cinq ans, représentant un total de 187 jours d'animation, ainsi qu'un récapitulatif des temps de déplacement nécessaires à la tenue de ces jours d'animation pour un total de 91,30 jours, soit au total en cinq ans, formations et déplacements réunis, 278,30 jours de sorte que devant soixante jours par an de travail, il avait effectué une moyenne annuelle de 55,66 jours, soit en deçà du quota fixé au contrat de travail ; que le contrat conclu le 17 mars 1995 rémunérait entre autres "les éventuels temps de déplacement" et que M. X... avait lui-même indiqué dans un courrier du 4 décembre 2002 puis dans un courrier du 18 mars 2004 adressé à la direction du travail que les contraintes avaient été respectées et que "jusqu'à ce jour cette répartition a toujours été respectée" ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, quelles avaient été, pour chaque année, les durées de temps de déplacement du salarié excédant le temps normal de déplacement d'un travailleur se rendant de son domicile à son lieu de travail la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE et ANNULE mais seulement en ses dispositions ayant débouté M. X... de sa demande de rappel d'indemnité de congés payés sur la période non couverte par la prescription et de sa demande d'indemnisation des temps de déplacement en mission sur les cinq dernières années précédant la saisine de la juridiction prud'homale, l'arrêt rendu le 7 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne l'association CFPB aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de rappel d'indemnité de congés payés sur les cinq dernières années d'un montant de 16.238 euros.
AUX MOTIFS QU'il ressort d'un courrier adressé par Monsieur X... au CFPB le 5 février 2001 qu'il a régulièrement pris ses congés payés au mois d'août (« quant à la date de mes congés payés, elle est fixée sans changement depuis 15 années, au mois d'août »), de sorte qu'étant payé pour une somme globale de 177.900 francs pour 60 jours de travail payée en 13 mensualités de 13.685 francs et ne contestant pas que dans les 12 mensualités restantes (après déduction de la 13ème rémunérant à compter du 29 juin 1993 la prime exceptionnelle annuelle), il y en a une rémunérant sa prise de congés payés du mois d'août, il apparaît que la rémunération globale et forfaitaire convenue inclut implicitement mais nécessairement l'indemnité de congés payés ; que Monsieur X... a donc à juste titre été débouté de sa demande sur ce point.
ALORS QUE s'il n'est pas interdit aux parties de convenir d'un salaire forfaitaire incluant les congés payés, encore faut-il que cette convention soit expresse et que ses modalités n'aboutissent pas pour le salarié à un résultat moins favorable que la stricte application des dispositions légales, peu important à cet égard que le salarié ne conteste pas avoir pris des congés payés ; qu'en relevant que Monsieur X... était payé pour une somme globale de 177.900 francs pour 60 jours de travail payée en 13 mensualités de 13.685 francs et qu'il ne contestait pas que dans les 12 mensualités restantes (après déduction de la 13ème rémunérant à compter du 29 juin 1993 la prime exceptionnelle annuelle), il y en avait une rémunérant sa prise de congés payés du mois d'août, ce dont il résultait qu'il n'existait pas de convention expresse prévoyant l'inclusion des congés payés dans le salaire forfaitaire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé les articles 1134 du Code civil et L.223-1 du Code du travail.
ALORS à cet égard QU'en déduisant d'un courrier adressé par Monsieur X... à son employeur le 5 février 2001 que celui-ci avait régulièrement pris des congés payés au mois d'août, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant, et partant, a violé les articles 1134 du Code civil et L.223-1 du Code du travail.
ALORS en toute hypothèse QU'à supposer même que l'on puisse opposer à Monsieur X... la circonstance qu'il ait pris des congés payés au mois d'août, la Cour d'appel ne pouvait déduire l'absence de convention de forfait afférente aux congés payés du fait que Monsieur X... reconnaissait dans un courrier adressé à son employeur le 5 février 2001 avoir pris ses congés sans changement au mois d'août depuis 15 ans, alors même que sa demande concernait la période non couverte par la prescription quinquennale, soit postérieure au 17 février 2000, de sorte seule la prise de congés rémunérés au mois d'août 2000 était acquise sur la période considérée ; qu'en relevant qu'il ressortait d'un courrier adressé par Monsieur X... au CFBP le 5 février 2001 qu'il avait régulièrement pris ses congés payés au mois d'août, la Cour d'appel a statué par un motif erroné, en violation des articles 1134 du Code civil et L.223-1 du Code du travail.
ALORS enfin QUE l'article 12-4 de l'accord d'entreprise du CFBP en date du 29 juin 1993 dispose qu'une commission de concertation constituée de représentants de la direction et de représentants des salariés est créée pour instruire les litiges qui pourraient surgir entre un salarié et son responsable hiérarchique à l'occasion des évaluations et des promotions et qu'au terme de cette instruction, elle décidera soit de classer l'affaire sans suite, soit de transmettre le dossier avec son avis à la Direction générale ; qu'il en résulte que, d'une part, sa saisine, facultative, n'est pas prévue dans le cas d'un litige concernant les congés payés et que, d'autre part, son avis est purement consultatif ; qu'en considérant, pour débouter Monsieur X... de sa demande de rappel de congés payés sur les cinq dernières années, qu'il appartenait à Monsieur X... de saisir la Commission de Concertation dans ce domaine et qu'il ne l'a pas fait, le Conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande tendant à faire dire et juger que les temps de déplacement en mission devaient faire l'objet d'une indemnisation sur les cinq dernières années précédant la saisine et en conséquence débouté de sa demande de rappel de salaire de ce chef d'un montant de 49.529 euros, outre les congés payés y afférents d'un montant de 4.952 euros.
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... effectue un décompte de la durée de ses séminaires pour les années 2000 à 2004, soit 5 ans, représentant un total de 187 jours d'animation, ainsi qu'un récapitulatif des temps de déplacement nécessaires à la tenu de ces jours d'animation pour un total de 91,30 jours, soit au total en 5 ans, formations et déplacements réunis, 278,30 jours de sorte que devant 60 jours par an de travail, il apparaît qu'il a effectué une moyenne annuelle de 55,66 jours soit en deçà du quota fixé au contrat de travail de sorte que sans qu'il y ait même lieu de rechercher si Monsieur X... a effectué des temps de trajet dérogeant au temps normal de trajet d'un travailleur se rendant de son domicile à son lieu de travail habituel et ne pouvant être contesté que le contrat conclu le 17 mars 1995 rémunérait entre autres « les éventuels temps de déplacement » et Monsieur X... ayant lui même indiqué dans des courriers du 4 décembre 2002 et dans un courrier du 18 mars 2004 adressé à la Direction du Travail que les contraintes avaient été respectées et que « jusqu'à ce jour cette répartition a toujours été respectée », il y a lieu de constater que malgré certains déplacements lointains ceux-ci n'ont pas débordé sur les 60 jours annuels pour lesquels Monsieur X... a été rémunéré ; qu'il y a lieu de débouter Monsieur X... de sa demande à ce titre.
ALORS tout d'abord QUE la seule fixation d'une rémunération forfaitaire, sans que soit déterminé le nombre d'heures incluses dans cette rémunération, ne permet pas de caractériser une convention de forfait, même avec l'accord du salarié ; qu'en considérant, pour débouter Monsieur X... de sa demande de paiement des temps de déplacement, qu'il ne pouvait être contesté que le contrat conclu le 17 mars 1995 rémunérait entre autres « les éventuels temps de déplacement » et que Monsieur X... avait lui-même indiqué dans des courriers du 4 décembre 2002 et dans un courrier du 18 mars 2004 adressé à la Direction du travail que les contraintes avaient été respectées, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé les articles 1134 du Code civil et L.212-4 du Code du travail.
ALORS ensuite QUE la rémunération forfaitaire n'est licite que pour autant qu'elle permet au salarié de percevoir, au moins, la rémunération à laquelle il peut légalement prétendre ; que, si le temps habituel du trajet entre le domicile et le lieu du travail ne constitue pas en soi un temps de travail effectif, il en est autrement lorsque, s'agissant d'un formateur itinérant, ce temps déroge au temps normal de trajet d'un travailleur se rendant de son domicile à son lieu de travail habituel, de sorte que ses temps de trajet doivent être rémunérés comme du travail effectif ; qu'en relevant que Monsieur X... avait effectué entre 2000 et 2004, formations et déplacements réunis, 278,30 jours, de sorte que, devant 60 jours de travail par an, il avait effectué une moyenne annuelle de 55,66 jours en deçà du quota fixé au contrat de travail, tout en se bornant à affirmer péremptoirement que les déplacements de Monsieur X... n'avaient pas débordé sur les 60 jours annuels pour lesquels il avait été rémunéré, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, quelle était la durée des temps de déplacement, et si, ajoutés aux jours d'intervention, ils n'excédaient pas la durée forfaitaire convenue, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du Code civil et L.212-4 du Code du travail.