Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 30 septembre 2008, 07/02061
Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 30 septembre 2008, 07/02061
Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion - Ct0173
- N° de RG : 07/02061
Audience publique du mardi 30 septembre 2008
Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Saint-Pierre, du 20 novembre 2007Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AFFAIRE : N RG 07 / 02061
Code Aff. : CF / JBM ARRÊT N
ORIGINE : JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes de ST PIERRE en date du 20 Novembre 2007
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2008
APPELANTE :
SOCIETE R P (RUN PRESSE) représentée par son Directeur Général
1 Rue Lislet Geoffroy
97712 ST DENIS MESSAG CEDEX 9
Représentant : la SCP CHICAUD-LAW YEN (avocats au barreau de SAINT DENIS)
INTIMÉE :
Madame Odette X...épouse Y...
...
...
97429 PETITE ILE
Représentant : Mme Clara DERFLA (Délégué syndical ouvrier)
DÉBATS : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Juillet 2008, en audience publique devant Christian FABRE, Conseiller chargé d'instruire l'affaire, assisté d'Eric LEPINAY, adjoint administratif, faisant fonction de greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 30 SEPTEMBRE 2008 ;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Hervé B...,
Conseiller : Christian FABRE,
Conseiller : Jean Luc RAYNAUD,
Qui en ont délibéré
ARRÊT : mise à disposition des parties le 30 SEPTEMBRE 2008
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LA COUR :
La société RP (RUN PRESSE) a interjeté appel d'un jugement rendu le 20 novembre 2007 par le conseil des prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion dans une affaire l'opposant à Madame Odette Y..., née X....
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Le 22 novembre 2002, la société RP a embauché Madame Y...en qualité de porteur-livreur à temps partiel (2h / jour) pour une durée déterminée en remplacement de Monsieur Roland Y...(son époux) en congés maladie.
Madame Y...a saisi la juridiction prud'homale en paiements de rappels salariaux. Le jugement déféré a condamné la société RP au paiement des sommes suivantes :
-1. 244, 20 euros pour un rappel de salaire de mai 2006 à septembre 2007,
-3. 311, 20 euros pour complément de salaire sur horaire de nuit,
-762, 62 euros pour les frais irrépétibles.
La remise sous astreinte des bulletins de paye rectifiés de mai 2006 à septembre 2007 a de plus été ordonnée.
Vu les conclusions déposées au greffe :
le 04 mars 2008 par la société RP,
le 16 juin 2008 par Madame Y...,
les parties ayant développé oralement leurs écritures auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits et des moyens.
MOTIFS DE LA DECISION :
Alors que le contrat de travail ne stipule qu'une durée de deux heures par jour et que de fait la salariée travaillait tous les jours de la semaine et était payée en conséquence, la société RP lui a imposé une journée de repos hebdomadaire à compter de mai 2006. Le salaire a été diminué d'autant.
Sur le principe, la mise en conformité de la relation salariale avec le repos hebdomadaire obligatoire est légitime. Pour autant, il en résulte une diminution du salaire qui ne l'est pas.
Dès lors que le contrat n'est pas conforme aux prescriptions légales (article L. 3123-14 du Code du travail) imposant la mention de la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail et que les règles de la mensualisation sont applicables aux contrats à durée déterminée (article L. 3242-1 du Code du travail : " La rémunération des salariés est mensuelle et indépendante, pour un horaire de travail effectif déterminé, du nombre de jours travaillés dans le mois... "), Madame Y...est fondée à se prévaloir d'une rémunération mensuelle forfaitaire et consécutivement de refuser une diminution de sa rémunération. Dans cette hypothèse, l'employeur n'avait comme possibilité que de modifier la répartition des horaires de travail.
Madame Y...a actualisé sa demande jusqu'à mai 2008 pour la somme de 1. 802, 47 euros correspondant à la mensualisation de son salaire. Il est donc fait droit à la demande et la remise des bulletins de paye rectifiés est ordonnée.
Madame Y...demande la somme actualisée à mai 2008 de 6. 829, 58 euros pour la majoration des heures de nuit au motif que son horaire de travail est de 04 à 06 heures.
Le travail de nuit est celui réalisé entre 21 et 06 heures. Il n'est pas contesté que Madame Y..., sur la base de deux heures quotidiennes soit au minimum 10 heures hebdomadaires (6 puis 5 jours / semaine) a accompli sur douze mois consécutifs plus de 270 heures de travail de 04 à 06 heures. Elle doit alors être considérée comme un travailleur de nuit.
Aux termes de l'article L. 3122-39 du Code du travail, le travailleur de nuit bénéficie d'une contrepartie, le principe étant le repos compensatoire " et, le cas échéant, sous forme de compensation salariale ". L'article suivant renvoie la fixation de la compensation à un accord collectif qui, en l'espèce, fait défaut.
La compensation étant de droit, il y lieu de la fixer. Madame Y...demande une majoration de salaire de 25 %. Celle-ci est équitable. Il est alors fait droit à la demande soit la somme de 6. 829, 58 euros.
La demande portant sur les futures heures de nuit aussi doit être accueillie mais sous condition de caducité en cas d'accord d'entreprise sur ce point.
Madame Y...demande encore la somme de 430, 36 euros au titre des frais de déplacement stipulés pour 14, 61 euros forfaitaires par jour (payé 16, 80 euros en mars 2008) alors que l'employeur l'a diminué de moitié à compter d'avril 2008. La société RP n'a pas répondu à cette demande.
Il convient de relever que le contrat précise à ce propos " Mme Y...sera indemnisée pour l'utilisation de son véhicule personnel, pour les besoins de son employeur, au tarif forfaitaire de 14, 64 euros par jour de livraison pour un parcours quotidien de 60 km ". A supposer que la tournée quotidienne soit effectivement réduite à 31 km (courrier de la société RP du 20 mars 2008), le caractère forfaitaire de l'indemnité fait obstacle à sa minoration. La société RP est donc condamnée au paiement de la somme demandée, arrêtée à mai 2008.
L'indemnité de 16, 80 euros par jour, selon le dernier taux appliqué par l'employeur, est due pour les mois postérieurs à mai 2008.
Madame Y...demande la somme de 10. 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice subi. En l'absence du moindre élément produit de ce chef, il doit être retenu que ce préjudice n'est prouvé ni dans son principe, ni dans son montant. La demande est alors rejetée.
Eu égard à l'actualisation des sommes allouées, le jugement n'est confirmé que sur la remise des bulletins de paye sous astreinte, les frais et les dépens.
Succombant partiellement, les parties conservent la charge de leurs frais irrépétibles d'appel. En revanche les dépens d'appel sont à la charge de l'appelante dès lors que son recours n'est pas fondé.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu en matière sociale et en dernier ressort,
Confirme le jugement quant à la remise sous astreinte des bulletins de paye rectifiés, les frais et les dépens,
L'infirme pour le reste et statuant à nouveau,
Condamne la société RUN PRESSE à payer à Madame Odette Y...les sommes suivantes :
-1. 802, 47 euros bruts à titre de rappel de salaire de mai 2006 à mai 2008,
-6. 829, 58 euros bruts à titre de compensation des heures de nuit arrêtée à mai 2008,
-430, 36 euros nets à titre rappel d'indemnité forfaitaire d'utilisation de véhicule personnel arrêtée à mai 2008,
Dit que le salaire de Madame Odette Y...est mensualisé sur la base de 60, 66 heures,
Dit que les heures de nuit réalisées sont majorées de 25 % jusqu'à un accord d'entreprise définissant la compensation applicable,
Dit que l'indemnité forfaitaire d'utilisation du véhicule personnel est de 16, 80 euros nets par jour travaillé,
Dit que la remise sous astreinte des bulletins de paye rectifiés vaut aussi pour les bulletins d'octobre 2007 à mai 2008,
Rejette toute autre demande,
Condamne la société RUN PRESSE aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Hervé PROTIN, Président, et Madame Jeanne C..., greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
signature