Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 22 octobre 2008, 06-44.446, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 22 octobre 2008, 06-44.446, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 06-44.446
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 22 octobre 2008
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 30 novembre 2005- Président
- M. Texier (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 novembre 2005), que M. X... a été engagé en qualité d'agent d'exploitation du parc de stationnement de la gare de Vigneux à compter du 19 janvier 1989 par la SAVEM, puis est devenu salarié de la société Les Fils de Madame Géraud à compter du 1er février 1996 selon contrat à durée indéterminée avec reprise de l'ancienneté au 19 janvier 1989 ; qu'il a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable fixé au 27 septembre 2002 reporté au 28 octobre suivant ; qu'il a été licencié par lettre du 30 octobre 2002 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à ce que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse et à ce que diverses sommes lui soient allouées en conséquence ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal du salarié :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir dit son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que le licenciement pour faute d'un salarié doit être fondé sur des éléments objectifs ; que nul ne peut se constituer une preuve à lui-même ; qu'en l'espèce, pour justifier le licenciement, l'employeur s'est borné à produire une partie d'un «audit» établi par un de ses salariés, sans même avoir entendu le salarié, rapport qui établirait que celui-ci aurait maintenu ouvert les barrières automatiques du parc de stationnement laissant ainsi le passage gratuit de certains véhicules ; que, dans ses conclusions d'appel, il a demandé la production de l'ensemble de l'audit, notamment celle concernant les trois autres salariés, ainsi que des disquettes informatiques sur lesquelles auraient été enregistrées les entrées et sorties des véhicules, du cahier manuscrit rédigé par les salariés sur lequel sont consignés les événements relatifs à chaque journée de travail et les cassettes vidéo de façon à vérifier les allégations du rapport ; qu'en considérant que le fait que les barrières aient été ouvertes le 5 août 2002 pendant 26 minutes, le 9 août pendant 21 minutes et le 14 septembre pendant une heure constituait pour lui une faute constitutive d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, alors qu'il n'est pas démontré par des éléments objectifs qu'à supposer ces faits établis, ils aient été commis par le salarié licencié, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil ;
2°/ que tout jugement doit être suffisamment motivé ; qu'en l'espèce, dans ses écritures d'appel, il faisait valoir que son licenciement ne reposait sur aucun élément objectif et a été licencié sur la base d'un «audit» établi par l'employeur lui-même nécessairement partial et a demandé la production de l'ensemble de l'audit, notamment celle concernant les trois autres salariés, ainsi que des disquettes informatiques sur lesquelles auraient été enregistrées les entrées et sorties des véhicules, du cahier manuscrit rédigé par les salariés sur lequel sont consignés les événements relatifs à chaque journée de travail et les cassettes vidéo de façon à vérifier les allégations du rapport ; qu'en se bornant à considérer que le fait que les barrières aient été ouvertes le 5 août 2002 pendant 26 minutes, le 9 août pendant 21 minutes et le 14 septembre pendant une heure constituait pour M. X... une faute constitutive d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, alors qu'il n'est pas démontré par des éléments objectifs qu'à supposer ces faits établis, ils aient été commis par le salarié licencié, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que les juges du fond ont l'obligation de vérifier la cause exacte du licenciement ;que, dans ses écritures d'appel, il faisait valoir que la véritable cause de son licenciement se trouvait dans le fait «que M. X..., qui s'est fait le porte-parole des employés de la société à plusieurs reprises, n'hésitant pas à poursuivre la SA Les Fils de Madame Géraud en justice pour obtenir paiement d'heures supplémentaires et d'heures de nuit, commençait à déranger ses employeurs. En arrêt maladie suite à un accident du travail survenu en septembre 2002, la SA Les Fils de Madame Géraud n'avait d'autre solution que de le licencier pour faute grave» ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'il lui était demandé, la véritable cause du licenciement , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation a, appréciant souverainement la portée et la valeur des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, retenu qu'en l'absence de toute explication, les ouvertures anormales de barrière du parc de stationnement du 5 août, 9 août et 14 septembre 2002, imputables à M. X... et établies par les relevés informatiques dont l'exactitude ne pouvait être sérieusement mise en doute, constituaient des fautes qui justifiaient le licenciement ; qu'elle a ainsi, effectuant la recherche prétendument omise, et écartant le moyen suivant lequel le licenciement procéderait d'une autre cause, légalement justifié sa décision ;
Sur le pourvoi incident de l'employeur :
Attendu que la société Géraud et associés, venant aux droits de la société Les Fils de Madame Géraud, fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le licenciement du salarié ne reposait pas sur une faute grave, alors, selon le moyen, que la faute grave, privative des indemnités de licenciement et de préavis, résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que le manquement du salarié à son obligation de loyauté et de probité envers son employeur est constitutif d'une faute grave ; que la cour d'appel, qui a relevé que le salarié, gardien-chef du parc de stationnement de la ville de Vigneux-sur-Seine, avait volontairement laissé ouvertes les barrières automatiques de ce parc pendant 26 minutes le 5 août 2002, 28 minutes et 21 minutes le 21 août 2002 et pendant une heure le 14 septembre 2002, ce qui avait nécessairement permis le passage de nombreux véhicules, sans que M. X... ne justifie que les conducteurs aient ensuite réglé le coût du péage, aurait du déduire de ses propres constatations que le salarié avait manqué à son obligation de loyauté et de probité envers son employeur, ce dont il s'évinçait qu'il avait commis une faute grave ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu que les seuls faits constitués par les ouvertures permanentes de barrière des 5 et 9 août et du 14 septembre 2002 ne constituaient pas, au regard de l'ancienneté du salarié et de l'absence d'énonciations d'antécédents dans la lettre de licenciement, une faute grave ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille huit.
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 novembre 2005), que M. X... a été engagé en qualité d'agent d'exploitation du parc de stationnement de la gare de Vigneux à compter du 19 janvier 1989 par la SAVEM, puis est devenu salarié de la société Les Fils de Madame Géraud à compter du 1er février 1996 selon contrat à durée indéterminée avec reprise de l'ancienneté au 19 janvier 1989 ; qu'il a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable fixé au 27 septembre 2002 reporté au 28 octobre suivant ; qu'il a été licencié par lettre du 30 octobre 2002 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à ce que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse et à ce que diverses sommes lui soient allouées en conséquence ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal du salarié :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir dit son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que le licenciement pour faute d'un salarié doit être fondé sur des éléments objectifs ; que nul ne peut se constituer une preuve à lui-même ; qu'en l'espèce, pour justifier le licenciement, l'employeur s'est borné à produire une partie d'un «audit» établi par un de ses salariés, sans même avoir entendu le salarié, rapport qui établirait que celui-ci aurait maintenu ouvert les barrières automatiques du parc de stationnement laissant ainsi le passage gratuit de certains véhicules ; que, dans ses conclusions d'appel, il a demandé la production de l'ensemble de l'audit, notamment celle concernant les trois autres salariés, ainsi que des disquettes informatiques sur lesquelles auraient été enregistrées les entrées et sorties des véhicules, du cahier manuscrit rédigé par les salariés sur lequel sont consignés les événements relatifs à chaque journée de travail et les cassettes vidéo de façon à vérifier les allégations du rapport ; qu'en considérant que le fait que les barrières aient été ouvertes le 5 août 2002 pendant 26 minutes, le 9 août pendant 21 minutes et le 14 septembre pendant une heure constituait pour lui une faute constitutive d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, alors qu'il n'est pas démontré par des éléments objectifs qu'à supposer ces faits établis, ils aient été commis par le salarié licencié, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil ;
2°/ que tout jugement doit être suffisamment motivé ; qu'en l'espèce, dans ses écritures d'appel, il faisait valoir que son licenciement ne reposait sur aucun élément objectif et a été licencié sur la base d'un «audit» établi par l'employeur lui-même nécessairement partial et a demandé la production de l'ensemble de l'audit, notamment celle concernant les trois autres salariés, ainsi que des disquettes informatiques sur lesquelles auraient été enregistrées les entrées et sorties des véhicules, du cahier manuscrit rédigé par les salariés sur lequel sont consignés les événements relatifs à chaque journée de travail et les cassettes vidéo de façon à vérifier les allégations du rapport ; qu'en se bornant à considérer que le fait que les barrières aient été ouvertes le 5 août 2002 pendant 26 minutes, le 9 août pendant 21 minutes et le 14 septembre pendant une heure constituait pour M. X... une faute constitutive d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, alors qu'il n'est pas démontré par des éléments objectifs qu'à supposer ces faits établis, ils aient été commis par le salarié licencié, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que les juges du fond ont l'obligation de vérifier la cause exacte du licenciement ;que, dans ses écritures d'appel, il faisait valoir que la véritable cause de son licenciement se trouvait dans le fait «que M. X..., qui s'est fait le porte-parole des employés de la société à plusieurs reprises, n'hésitant pas à poursuivre la SA Les Fils de Madame Géraud en justice pour obtenir paiement d'heures supplémentaires et d'heures de nuit, commençait à déranger ses employeurs. En arrêt maladie suite à un accident du travail survenu en septembre 2002, la SA Les Fils de Madame Géraud n'avait d'autre solution que de le licencier pour faute grave» ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'il lui était demandé, la véritable cause du licenciement , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation a, appréciant souverainement la portée et la valeur des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, retenu qu'en l'absence de toute explication, les ouvertures anormales de barrière du parc de stationnement du 5 août, 9 août et 14 septembre 2002, imputables à M. X... et établies par les relevés informatiques dont l'exactitude ne pouvait être sérieusement mise en doute, constituaient des fautes qui justifiaient le licenciement ; qu'elle a ainsi, effectuant la recherche prétendument omise, et écartant le moyen suivant lequel le licenciement procéderait d'une autre cause, légalement justifié sa décision ;
Sur le pourvoi incident de l'employeur :
Attendu que la société Géraud et associés, venant aux droits de la société Les Fils de Madame Géraud, fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le licenciement du salarié ne reposait pas sur une faute grave, alors, selon le moyen, que la faute grave, privative des indemnités de licenciement et de préavis, résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que le manquement du salarié à son obligation de loyauté et de probité envers son employeur est constitutif d'une faute grave ; que la cour d'appel, qui a relevé que le salarié, gardien-chef du parc de stationnement de la ville de Vigneux-sur-Seine, avait volontairement laissé ouvertes les barrières automatiques de ce parc pendant 26 minutes le 5 août 2002, 28 minutes et 21 minutes le 21 août 2002 et pendant une heure le 14 septembre 2002, ce qui avait nécessairement permis le passage de nombreux véhicules, sans que M. X... ne justifie que les conducteurs aient ensuite réglé le coût du péage, aurait du déduire de ses propres constatations que le salarié avait manqué à son obligation de loyauté et de probité envers son employeur, ce dont il s'évinçait qu'il avait commis une faute grave ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu que les seuls faits constitués par les ouvertures permanentes de barrière des 5 et 9 août et du 14 septembre 2002 ne constituaient pas, au regard de l'ancienneté du salarié et de l'absence d'énonciations d'antécédents dans la lettre de licenciement, une faute grave ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille huit.