Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 14 novembre 2007, 06-13.806, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu que, par acte notarié du 24 janvier 1970, les époux X... ont fait donation de leurs biens aux deux enfants issus de leur mariage, Andrée et Jean-Louis, à titre de partage anticipé ; que Marguerite X... est décédée le 28 juillet 1994 en laissant pour lui succéder, d'une part, les deux enfants issus de son mariage et, d'autre part, M. Henry Y..., né pendant le mariage, et reconnu comme étant son fils naturel par jugement du 24 novembre 1983 ; que, le 5 janvier 1998, M.Y... a assigné Mme Andrée X..., épouse Z..., et M. Jean-Louis X... en réduction de la donation-partage ;

Attendu que M.Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Montpellier,14 février 2006), d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen :

1° / qu'une loi peut être abrogée tacitement lorsqu'il existe une incompatibilité entre elle et un texte plus récent ; que l'article 14, alinéa 2, de la loi du 3 janvier 1972 instituait une discrimination entre les enfants légitimes, qui pouvaient remettre en cause les donations faites entre vifs lorsqu'elles portaient atteinte à leur part réservataire, et les enfants adultérins qui en étaient empêchés ; que la loi du 3 décembre 2001 permet aux enfants adultérins de bénéficier immédiatement, à défaut de décisions judiciaires définitives ou d'accords amiables déjà intervenus, d'un partage égalitaire des successions ; qu'en déclarant que l'abrogation tacite de l'article 14 ne s'évinçait pas des termes de la loi nouvelle, la cour d'appel a violé les dispositions de la loi du 3 décembre 2001 ;

2° / qu'en outre, par application du droit européen, est sanctionnée toute législation qui réduit la vocation successorale de l'enfant adultérin ; qu'en affirmant que les dispositions de l'article 14, alinéa 2, de la loi du 3 janvier 1972 présentaient une justification objective et raisonnable au regard du but légitime poursuivi, c'est-à-dire garantir une certaine paix des rapports familiaux en sécurisant les droits acquis dans ce cadre, la cour d'appel a violé les articles 1er du Protocole n° 1 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 25 II 2°, de la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001, dans sa rédaction alors applicable, que, sous réserve des accords amiables déjà intervenus et des décisions judiciaires irrévocables, les dispositions relatives aux nouveaux droits successoraux des enfants naturels dont le père ou la mère était, au temps de la conception, engagé dans les liens du mariage, ne sont applicables qu'aux successions ouvertes au 4 décembre 2001 et n'ayant pas donné lieu à partage avant cette date ; que la cour d'appel a constaté que les biens composant le patrimoine de Marguerite X... avaient été attribués aux deux enfants issus de son mariage par l'effet de la donation-partage du 24 janvier 1970 et qu'elle était décédée le 28 juillet 1994 ; qu'il en résulte qu'un partage successoral s'étant réalisé par le décès de Marguerite X..., soit avant le 4 décembre 2001, les dispositions précitées n'étaient pas applicables ; que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués dans les conditions de l'article 1015 du nouveau code de procédure civile, la décision déférée se trouve légalement justifiée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M.Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille sept.
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