Cour de cassation, Chambre criminelle, du 11 février 2004, 01-81.458 02-86.913, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze février deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de la société civile professionnelle BOUZIDI et BOUHANNA et de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et URTIN-PETIT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur les pourvois formés par :

1) - X... Louis,

- Y... Jacqueline,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 31 janvier 2001, qui, dans la procédure suivie contre eux des chefs de corruption et abus de biens sociaux, s'est déclaré incompétent pour statuer sur une demande de copie de pièces ;

2) - X... Louis,

- Y... Jacqueline, prévenus,

- LA SOCITE HELIUM,

- LA SOCIETE HELICE, parties civiles,

contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 9ème chambre, en date du 19 septembre 2002, qui, pour abus de biens sociaux, a condamné Louis X... et Jacqueline Y... à 15 mois d'emprisonnement avec sursis, 76.225 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I - Sur le pourvoi des sociétés Hélium et Hélice :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II - Sur les pourvois de Louis X... et de Jacqueline Y... :

Vu le mémoire produit ;

1°) Sur le pourvoi contre l'arrêt du 31 janvier 2001 :

Sur sa recevabilité :

Attendu que les demandeurs sont sans intérêt à critiquer l'arrêt qui s'est déclaré incompétent pour statuer sur une demande de copie de pièces auxquelles ils n'ont pas eu accès au cours de l'information, dès lors que les conclusions déposées devant les juges du fond démontrent qu'ils ont eu connaissance desdites pièces et ont été en mesure de les discuter ultérieurement ;

D'où il suit que le pourvoi doit être déclaré irrecevable ;

2°) Sur le pourvoi contre l'arrêt du 19 septembre 2002 :

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles R. 155, R. 156, 381, 460, 512, 513, 591 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article préliminaire du Code de procédure pénale, de l'article 6 par. 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

"en ce que l'arrêt attaqué, en date du 19 septembre 2002, a rejeté l'exception de nullité de la procédure d'instruction présentée par Louis X... et Jacqueline Y..., divorcée Z... ;

"aux motifs que, "sur les travaux de la demeure de Jacqueline Y..., il est constant que le magistrat instructeur, saisi le 20 septembre 1999, d'une information judiciaire ouverte contre X des chefs d'abus de biens sociaux, de recel, de corruption et recel sur la base d'une dénonciation du commissaire aux comptes des sociétés Hélice et Hélium et par réquisitoire supplétif du 18 avril 2000 des chefs d'abus de biens sociaux et recel d'abus de biens sociaux, a reçu le 21 décembre 1999 du chef de la 12ème brigade de vérification une liste des entreprises qui travaillaient au réaménagement du siège social de la SA Hélice et la copie d'une lettre, non datée, d'un aviseur de cette administration dont le nom est masqué, faisant état du fait que ces entreprises étaient susceptibles d'effectuer également des travaux dans la demeure de Jacqueline Y...-Z... dont les factures seraient acquittées par la SA Hélice ; que le magistrat instructeur a fait procéder les 22, 23 et 30 mars 2000 à l'audition des dirigeants de ces entreprises et à des perquisitions à leurs sièges ; que, toutefois, aucun élément de ces investigations n'ayant été retenu par le magistrat instructeur à charge contre Jacqueline Y...-Z..., cette dernière n'est pas fondée à soutenir que ces perquisitions et auditions ont porté atteinte aux droits de la défense ; que sur les scellés relatifs aux notes de frais de Jacqueline Y..., il ressort du procès-verbal d'interrogatoire de Jacqueline Y...-Z..., en date du 16 mai 2000, d'une part, que l'intégralité du dossier en cote fond a été mise à la disposition de ses avocats le 15 mai 2000, d'autre part, que les scellés litigieux concernent des dépenses réglées par elle, présentées par ses soins à la comptabilité et ayant donné lieu à des chèques de remboursement portant sa signature, ont été déposés au cabinet du magistrat instructeur le 15 mai 2000 en fin d'après-midi ; que, lors de son interrogatoire Jacqueline Y...-Z... a déclaré au magistrat instructeur que ces pièces avaient été saisies en sa présence et qu'elle en avait parfaitement connaissance ; que ces scellés sont sans lien avec la cote dite "en cours" dont les prévenus déclarent avoir découvert l'existence dans le dossier du tribunal quelques jours avant l'audience de fixation du 24 août 2000 et que ni Louis X..., ni Jacqueline Y...-Z..., n'ont cru devoir saisir la chambre de l'instruction, comme ils en avaient la possibilité, du refus du magistrat instructeur de donner une suite favorable à leur demande d'audition des contrôleurs fiscaux et de versement au dossier pénal de l'intégralité de leurs dossiers fiscaux ; que, dès lors, le grief de violation des droits de la défense tiré du dépôt le 15 mai 2000 en fin d'après-midi des scellés effectués suite à la perquisition au siège des sociétés

Hélice et Hélium manque en fait ; sur l'audition de l'aviseur de l'administration fiscale, la cote "en cours" non communiquée aux prévenus appelants, comporte trois documents non cotés adressés par l'administration fiscale au magistrat instructeur le 6 décembre 1999 : un premier document d'une page portant le titre "note interne", en date du 18 juin 1999, et signée par l'inspecteur principal H. Pierre mentionnant que "Jacqueline Y...-Z... a fait état, au cours des opérations de contrôle, du fait que les sommes détournées des sociétés Hélice et Hélium par le biais des avoirs fictifs, étaient reversées à des tiers qui intervenaient au profit des sociétés en redressement judiciaire afin d'éviter le dépôt de bilan" ; et que "lors du recours hiérarchique du 16 juin 1999 Jacqueline Y...-Z... et son avocat ont évoqué la possibilité d'une éventuelle divulgation de l'identité des tiers, mais rien de concret n'a été produit au service avant la clôture du dossier" ; un second document de trois pages, intitulé "notes non communicables", comportant le numéro 3938 à 13 dont la dernière mentionne au sujet de l'établissement de fausses factures d'avoirs que "l'aviseur de la DNEF a informé le vérificateur que le mandataire ad hoc désigné supra par. 4 était en fait le bénéficiaire final des prélèvements frauduleux" ; un troisième document de deux pages portant la mention "document non communicable" et le numéro 3938 B-9 relatif à Jacqueline Y...-Z..., mentionnant, à la dernière page, au nombre des renseignements communiqués au vérificateur par l'aviseur de la DNEF, que Jacqueline Y...-Z... "constituerait un dossier à charge sur Olivier A..., bénéficiaire final des détournements de fonds opérés au sein du groupe Hélice" ; qu'il est constant que dans une lettre, en date du 3 mai 1999, Louis X... a informé Arnaud B..., commissaire aux comptes des sociétés Hélice et Hélium, de l'existence d'avoirs fictifs et précisé que les fonds en espèces retirés par ce biais étaient destinés à Olivier A... ; qu'il est également constant qu'Arnaud B... a dénoncé ces faits au procureur de la République près le tribunal de grande Instance de Paris, dans une lettre reçue le 11 mai 1999 et qu'entendu le 30 juin 1999 par le capitaine de police Daniel C..., il a précisé que Jacqueline Y...-Z... lui avait dénoncé Olivier A... comme étant le destinataire des sommes correspondant aux avoirs fictifs ; que Michel D..., responsable de la comptabilité des sociétés Hélice et Hélium du ler août 1989 au 23 février 1996, entendu le 27 juillet 1999 par le capitaine de Police Daniel C..., a déclaré avoir été informé

par Jacqueline Y...-Z... que les avoirs fictifs, qu'il établissait avec elle, avaient pour finalité le retrait d'espèces destinées à Olivier A... ; que le 20 septembre 1999, date de sa saisine, le magistrat instructeur a été mis en possession des lettres de Louis X... du 3 mai 1999 et d'Arnaud B... du 11 mai 1999 ainsi que des déclarations faites à la police par ce dernier et par Michel D... les 30 juin et 27 juillet 1999 ; que, dès lors, les mentions des pièces non communiquées, transmises le 6 décembre 1999 au juge d'instruction par l'administration fiscale, selon laquelle le vérificateur aurait été informé par un aviseur que les fonds issus des avoirs fictifs des sociétés Hélice et Hélium transitant par les comptes de Jacqueline Y...-Z... étaient destinés à Olivier A... s'avéraient dépourvues de portée ; que, par ailleurs, Louis X..., entendu le 6 décembre 1999 par le lieutenant de police Didier Cheneau, a déclaré qu'au cours du contrôle fiscal des sociétés Hélice et Hélium, il avait, en présence de son avocat Me E..., informé les fonctionnaires des services fiscaux du rôle d'Olivier A... dans les sorties d'argent indûment justifiées dans la comptabilité de ces sociétés au profit des comptes de Jacqueline Y...-Z... ; qu'il a précisé que les fonctionnaires des services fiscaux lui avaient répondu qu'en l'absence de preuve il ne leur était pas possible de prendre cette justification en compte ; que Jacqueline Y...-Z..., entendue le 7 décembre 1999 par le lieutenant de police Florence F..., a précisé qu'à l'occasion du contrôle fiscal de sa situation personnelle, commencé courant octobre 1998, elle avait adressé, en mai 1999, une lettre à l'administration fiscale dénonçant Olivier A... comme le destinataire des sommes d'argent qui transitaient par son compte en provenance des avoirs fictifs ; que dans ces conditions, le grief des prévenus appelants, selon lequel l'impossibilité où ils se sont trouvés de pouvoir faire entendre l'aviseur des services fiscaux constitue une atteinte aux droits de leur défense, n'est pas fondé, l'administration fiscale ayant, préalablement à la saisine du magistrat instructeur, refusé de prendre en compte, comme non établies, les déclarations orales et écrites, de Louis X... et de Jacqueline Y...-Z... selon lesquelles les avoirs fictifs des sociétés Hélice et Hélium avaient eu pour finalité la remise de fonds en espèces à Olivier A... ; qu'il convient en conséquence de

confirmer la décision des premiers juges, qui après avoir exactement constaté que la sous-chemise portant la mention "en cours" constituait un document de travail du magistrat instructeur et que les documents non cotés par le greffier qu'elle comporte n'ont eu aucune incidence sur les infractions retenues contre les prévenus dans l'ordonnance de renvoi du 7 juillet 2000, ont rejeté l'exception de nullité de la procédure d'instruction" (arrêt, pages 11 à 14) ; "1°) alors que, dans leurs conclusions d'appel, les demandeurs démontraient que l'atteinte portée aux droits de la défense, qui justifiait l'annulation de la procédure d'instruction sur le fondement de l'article préliminaire du Code de procédure pénale, ne résultait pas tant des perquisitions ordonnées par le magistrat instructeur les 22, 23 et 30 mars 2000 concernant les travaux effectués au domicile de Jacqueline Y..., mais du fait que pour refuser de faire droit à une demande d'expertise sollicitée par la demanderesse, et visant ces mêmes travaux, le magistrat instructeur avait, par ordonnance du 9 juin 2000, indiqué que cette mesure "ne rentre pas dans le champ de la saisine, apparaît étrangère à la manifestation de la vérité et serait de nature à ralentir la clôture de l'information", ce qui était de nature à établir que l'instruction avait été conduite exclusivement à charge ; qu'ainsi, en se bornant à énoncer que les perquisitions et auditions litigieuses, ordonnées par le juge d'instruction, n'avaient finalement pas été retenues à charge contre la demanderesse, pour en déduire que celle-ci n'était pas fondée à soutenir que celles-ci avaient porté atteinte aux droits de la défense, la cour d'appel, qui a dénaturé le sens et la portée des conclusions susvisées, a entaché sa décision d'une contradiction de motifs ;

"2°) alors que, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ; que cette exigence implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce ou observation présentée au juge en vue d'influencer sa décision ; qu'en estimant qu'étaient dépourvues de portée les mentions des pièces non communiquées qui, figurant dans la cote "en cours", avaient été transmises le 6 décembre 1999 au juge d'instruction par l'administration fiscale, selon laquelle le vérificateur aurait été informé par un aviseur que les fonds issus des avoirs fictifs des sociétés Hélice et Hélium transitant par les comptes de Jacqueline Y...-Z... étaient destinées à Olivier A..., tout en constatant par ailleurs, sur le fond, que faute, par les prévenus, de démontrer que la somme de 1 813 660,60 francs prélevée à partir d'avoirs fictifs avait été remise à Olivier A..., ladite somme devait être considérée comme détournée par les dirigeants à des fins personnelles, ce dont il résultait que loin d'être dépourvues de portée, les informations fournies par l'aviseur et consignées dans la pièce litigieuse dont la communication aux parties a été refusée, étaient de nature à emporter la relaxe des demandeurs, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé les textes susvisés" ;

Attendu que, pour rejeter la demande tendant à l'annulation de la procédure d'instruction au motif que certaines pièces du dossier n'avaient pas été soumises à la discussion des parties pendant le cours de l'information, la cour d'appel énonce qu'il ne s'agissait que de documents de travail du magistrat instructeur, non cotés par le greffier, et qu'il résultait de leur analyse qu'ils n'avaient eu aucune incidence sur les infractions retenues contre les prévenus dans l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations relevant de son appréciation souveraine, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3, L. 242-6 et L. 242-30 du Code de commerce, 2, 3, 388, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, en date du 19 septembre 2002, a déclaré Louis X... et Jacqueline Y..., divorcée Z..., coupables d'abus de biens sociaux ;

"aux motifs que, "sur les délits de corruption, s'il ressort suffisamment de l'information qu'Olivier A... a perçu de 1993 au 12 avril 1999 des rémunérations occultes de la part de Louis X... et de Jacqueline Y...-Z..., aucun élément du dossier et des débats ne permet toutefois d'en fixer le montant exact, de déterminer la date à laquelle ces rémunérations ont été proposées ou sollicitées, ni si elles ont été proposées ou sollicitées en vue de l'accomplissement par Olivier A... des actes de ses mandats ad hoc et préalablement à l'exécution de ses missions ; que sur les délits d'abus de biens sociaux, il ressort de l'information que Louis X... et Jacqueline Y...-Z..., respectivement président directeur général et directrice générale des sociétés anonymes Hélice et Hélium, ont, d'une part, de 1993 au 12 avril 1999, remis à Olivier A... de l'argent provenant des comptes de ces sociétés, pour un montant égal à 120.000 francs français au minimum, et lui ont fait des cadeaux onéreux payés par les sociétés Hélice et Hélium, sans nécessité pour ces sociétés, d'autre part, de 1994 à 1997, encaissé sur leurs comptes personnels, sans contrepartie, le premier deux chèques d'un montant total de 111.168,19 francs français, la seconde 42 chèques d'un montant total de 1.702.492,40 francs français prélevés de façon occulte sur les fonds sociaux des sociétés Hélice et Hélium par l'établissement d'avoirs fictifs ; que ces faits caractérisent les délits d'abus des biens ou du crédit d'une société par actions par un dirigeant à des fins personnelles qui leurs sont reprochés ; que Louis X... et Jacqueline Y...-Z... affirment avoir remis à Olivier A... une somme totale de 1.772.500 francs français frauduleusement prélevée sur les fonds de la SA Hélice et de la SA Hélium ; que toutefois le montant total des 44 chèques encaissés à partir des avoirs fictifs sur les comptes personnels de Louis X... et de Jacqueline Y...-Z... s'élèvent à 1.813.660,60 francs français ; qu'en outre sur ces 44

chèques, seuls 18 pour un montant total de 636.390,73 francs français ont été encaissés par Louis X... et Jacqueline Y...-Z... pendant des périodes où Olivier A... exerçait des fonctions d'administrateur ad hoc ; que de surcroît Louis X... et Jacqueline Y...-Z... ne s'accordent ni sur le montant, ni sur l'origine de la dernière remise d'espèces faite par Louis X... à Olivier A... ; que Louis X... a par ailleurs constamment déclaré avoir ignoré tant la fréquence que le montant précis des remises d'argent liquide faites par Jacqueline Y...-Z... à Olivier A... ; que, dès lors, son affirmation selon laquelle l'intégralité des sommes encaissées par lui et Jacqueline Y...-Z... a été remise à Olivier A... est dépourvue de force probante ; que, pour sa part, Olivier A... reconnaît avoir reçu de Louis X... et de Jacqueline Y...-Z..., outre les cadeaux, une somme de 120.000 francs français ; que dans ces conditions, en l'absence d'éléments objectifs corroborant l'affirmation de Jacqueline Y...-Z... selon laquelle la totalité des sommes irrégulièrement prélevées par elle et Louis X... au moyen des avoirs fictifs a été remise à Olivier A..., il y a lieu d'arrêter à 120.000 francs français la somme remise à ce dernier" (arrêt, pages 24, 25, 26 à 28) ;

"1°) alors que les juridictions correctionnelles ne peuvent ajouter aux faits de la prévention, lesquels doivent rester tels qu'ils ont été retenus dans l'acte de saisine, à moins que le prévenu ait accepté d'être jugé sur des faits nouveaux ; qu'en l'espèce, il résulte des mentions de l'ordonnance de renvoi du 7 juillet 2000, qui seule fixe l'étendue de la saisine de la juridiction de jugement, que les demandeurs étaient poursuivis du chef d'abus de biens sociaux pour avoir, d'une part, détourné une somme de 1.800.000 francs pour corrompre le mandataire ad hoc, d'autre part, détourné une somme d'environ 3.000.000 francs dépensée dans des restaurants, dans l'achat d'objets (bijoux, fleurs...), de cadeaux inutiles à la bonne marche des sociétés, dans des frais divers et dans des augmentations de salaires non approuvées en assemblée générale ; qu'il est par ailleurs constant, d'une part, que les prévenus n'ont pas été reconnus coupables de cette seconde série de faits, d'autre part, que la somme de 1.800.000 francs, relative à la première série de faits dont ils ont au demeurant été relaxés, était censée avoir été utilisée à seule fin de corrompre le mandataire ad hoc, de sorte qu'il n'a pas été reproché auxdits prévenus d'avoir détourné la somme susvisée dans leur propre intérêt ; que, dès lors, en estimant néanmoins que les chèques encaissés par les prévenus sur leurs comptes personnels, pour une somme globale de 1.813.660,60, sans contrepartie pour les sociétés Hélice et Hélium, caractérisaient un abus des biens ou du crédit des sociétés susvisées, la cour d'appel, qui a retenu à la charge desdits demandeurs des faits non visés à la prévention, et sur lesquels il n'apparaît pas qu'ils aient accepté d'être jugés, a violé l'article 388 du Code de procédure pénale ;

"2°) alors qu'il résulte des mentions de l'ordonnance de renvoi du 7 juillet 2000, qui seule fixe l'étendue de la saisine de la juridiction de jugement, que la somme de 1.800.000 francs destinée à la corruption du mandataire ad hoc englobe nécessairement celle de 120.000 francs ainsi que les cadeaux faits à celui-ci ; qu'ainsi, il n'était pas reproché aux demandeurs, poursuivis du chef d'abus de biens sociaux, d'avoir offert des cadeaux à Olivier A... ou de lui avoir versé une somme de 120.000 francs en sus de celle de 1.800.000 francs destinée à la corruption dudit mandataire ad hoc ; que, dès lors, en estimant que les cadeaux faits à l'intéressé, d'une part, et la somme de 120.000 francs provenant des comptes des sociétés Hélice et Hélium et versée à Olivier A..., d'autre part, caractérisaient le délit d'abus de biens sociaux à la charge de Louis X... et de Jacqueline Y...-Z..., après avoir énoncé que la somme de 1.813.660,60 francs, également détournée, correspondait à des prélèvements occultes effectués au seul profit desdits demandeurs, ce dont il résultait que cette somme n'avait ni permis le versement de celle de 120.000 francs, ni permis le financement des cadeaux offerts à Olivier A..., la cour d'appel qui a retenu à la charge des demandeurs des faits non visés à la prévention, a violé l'article 388 du Code de procédure pénale ;

"3°) alors qu'un acte illicite n'est pas nécessairement contraire à l'intérêt social ; que, dès lors, en se déterminant par la seule circonstance que les demandeurs avaient remis à Olivier A... de l'argent provenant des comptes des sociétés Hélice et Hélium pour un montant égal à 120.000 francs au minimum, ainsi que des cadeaux onéreux payés par ces sociétés sans nécessité pour ces dernières, pour en déduire que ces faits caractérisaient le délit d'abus de biens sociaux, sans rechercher si les sommes d'argent et avantages en nature attribués à Olivier A... ne constituaient pas la contrepartie de l'activité que celui-ci avait exercée au profit des sociétés susvisées, et partant sans vérifier s'ils n'étaient pas conformes à l'intérêt social, alors surtout que l'arrêt constate qu'il était constant qu'Olivier A..., désigné en qualité mandataire ad hoc, avait - conformément à la mission à lui confiée par le tribunal de commerce - entrepris diverses démarches et négociations auprès des organismes sociaux et des banques en vue d'assurer la pérennité des entreprises et qu'après expiration de sa mission il avait continué à conseiller les demandeurs et à effectuer diverses démarches pour le compte des deux sociétés auprès d'organismes sociaux et administratifs, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale ;

"4°) alors qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre au chef péremptoire des conclusions d'appel des demandeurs faisant valoir que les démarches confiées par eux à Olivier A... et rémunérées par des sommes d'argent et par l'offre de cadeaux n'avaient d'autre fin que d'éviter le dépôt de bilan des deux sociétés qu'ils dirigeaient, ce dont il résultait que les dépenses faites au profit d'Olivier A... n'étaient pas contraires à l'intérêt social des sociétés Hélice et Hélium, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale ;

"5°) alors que, pour caractériser un abus de biens sociaux, l'usage, par le dirigeant, des biens ou du crédit de la société doit être fait à des fins personnelles, directes ou indirectes ; que, dès lors, en se déterminant par la seule circonstance que les demandeurs avaient remis à Olivier A... de l'argent provenant des comptes des sociétés Hélice et Hélium, pour un montant égal à 120.000 francs au minimum, ainsi que des cadeaux onéreux payés par ces sociétés, sans nécessité pour ces dernières, pour en déduire que ces faits caractérisaient le délit d'abus de biens sociaux, sans rechercher si lesdits dirigeants avaient pris un intérêt personnel, direct ou indirect, dans la remise de sommes d'argent et de cadeaux attribués à Olivier A..., et alors surtout que l'arrêt constate qu'il est constant que ce dernier, désigné en qualité mandataire ad hoc, avait - conformément à la mission à lui confiée par le tribunal de commerce - entrepris diverses démarches et négociations auprès des organismes sociaux et des banques en vue d'assurer la pérennité des entreprises et qu'après expiration de sa mission, il avait continué à conseiller les demandeurs et à effectuer diverses démarches pour le compte des deux sociétés auprès d'organismes sociaux et administratifs, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions des parties et, dans les limites de sa saisine, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'abus de biens sociaux dont elle a déclaré les prévenus coupables ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs,

I - Sur le pourvoi des sociétés Helium et Hélice :

Le REJETTE ;

II - Sur les pourvois de Louis X... et de Jacqueline Y... :

- Sur le pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 31 janvier 2001 :

Le Déclare IRRECEVABLE ;

- Sur le pourvoi contre l'arrêt de la même cour d'appel du 19 septembre 2002 :

Le REJETTE ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Dulin conseiller rapporteur, M. Challe conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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