Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 16 mai 1995, 93-18.216, Inédit
Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 16 mai 1995, 93-18.216, Inédit
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 93-18.216
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mardi 16 mai 1995
Décision attaquée : tribunal de grande instance de Nancy (2e chambre) 1993-06-25, du 25 juin 1993- Président
- Président : M. BEZARD
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le pourvoi formé par la société Champlor, société anonyme dont le siège social est à Merlaut, BP 44, Vitry-le-François (Marne), venant aux droits de la société Champlor 54, Usine d'Einville-au-Jard (Meurthe-et-Moselle), sise ..., absorbée, en cassation d'un jugement rendu le 25 juin 1993 par le tribunal de grande instance de Nancy (2e chambre), au profit de M. le directeur des Douanes et Droits indirects, venant aux droits du directeur des services fiscaux de Meurthe-et-Moselle, Hôtel des Finances, rue Cyfflé Co n 61 à Nancy (Meurthe-et-Moselle), défendeur à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 15 mars 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Poullain, conseiller rapporteur, MM. Nicot, Vigneron, Leclercq, Dumas, Gomez, Léonnet, Canivet, Armand Prévost, conseillers, M. Lacan, Mme Geerssen, M. Huglo, conseillers référendaires, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Poullain, les observations de Me Baraduc-Benabent, avocat de la société Champlor, de Me Foussard, avocat du directeur des Douanes et Droits indirects, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Nancy, 25 juin 1993), que la société Champlor a adressé, au cours du mois de décembre 1986, au directeur général de l'Office national interprofessionnel des céréales (l'ONIC), une demande tendant au remboursement de la taxe de stockage des céréales qu'elle avait acquittée au titre des campagnes céréalières 1976-1977 à 1984-1985 ; qu'elle a formé un recours contre le rejet implicite de sa demande devant le juge administratif qui s'est déclaré incompétent ; qu'elle a assigné le directeur des services fiscaux du département de Meurthe-et-Moselle devant la juridiction judiciaire en remboursement des sommes versées ; Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches : Attendu que la société Champlor fait grief au jugement d'avoir déclaré son action irrecevable, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'obligation de transmettre une réclamation préalable est un principe général en matière fiscale ; que cette obligation de transmission existe lorsque les autorités relèvent de la même personne publique ou sont unies par des rapports de collaboration ; que tel était le cas de l'ONIC, soumis à la tutelle de l'Etat, et des directeurs des services fiscaux, dès lors que la taxe dont est bénéficiaire l'ONIC est recouvrée comme en matière de contributions indirectes ; que le dépôt d'une requête préalable auprès de l'ONIC, compétent pour recevoir de telles déclarations, aux termes des décrets du 8 novembre 1976, 10 août 1977 et 24 septembre 1980, dont seul ce dernier a été annulé, emportait liaison du contentieux sans qu'il soit besoin de réitérer la demande préalable devant le juge compétent ; qu'en estimant qu'il n'était pas établi que le seul dépôt d'une telle requête ait pour effet automatique la liaison du contentieux, le Tribunal a violé les articles R. 190-1 et suivants du Livre des procédures fiscales ; alors, d'autre part, que l'irrecevabilité née du défaut de réclamation préalable ne pouvait porter que sur la demande en remboursement de la taxe perçue sur le fondement du décret de 1980 et annulé en 1985 ; qu'en déclarant irrecevable l'ensemble de la demande de remboursement, au motif que la société était en mesure de s'attacher les services de juristes spécialisés, alors que cette demande portait notamment sur des taxes perçues en vertu de décrets antérieurs non annulés, et qualifiant expressément le prélèvement de taxe parafiscale, le Tribunal a violé, par fausse application, l'article R. 190-1 du Livre des procédures fiscales ; alors, en outre, que la saisine d'une juridiction incompétente emporte liaison du contentieux au regard de la juridiction compétente ultérieurement saisie ; que, devant la juridiction administrative, l'Administration n'a pas soulevé le défaut de décision préalable, de sorte que cette irrégularité a été couverte en cours d'instance ; que la même instance se poursuit devant le juge judiciaire et qu'en considérant qu'il ne peut être tiré aucune conséquence devant le juge judiciaire des moyens invoqués devant le juge administratif, le Tribunal a violé, par fausse application, l'article R. 190-1 du Livre des procédures fiscales ; alors, enfin, que le justificatif du paiement avait été adressé à l'ONIC et que, devant le tribunal de grande instance, elle a fait parvenir une attestation du commissaire aux comptes du 17 novembre 1992 ; que l'article R. 197-3 consacre une possibilité de régularisation pour le justificatif du versement jusqu'à la clôture de l'instruction ; qu'en déclarant la requête irrecevable à ce titre, le Tribunal a violé l'article R. 197-3 d), alinéa 2, du Livre des procédures fiscales ; Mais attendu, en premier lieu, qu'en vertu des textes réglementaires applicables en la cause, et pour les prélèvements opérés en application des décrets du 24 septembre 1980 et du 22 août 1982 de l'article 21-III de la loi du 6 janvier 1986, la taxe sur le stockage des céréales a été constatée et recouvrée comme en matière de contributions indirectes ; qu'ainsi, la demande préalable à une procédure en contestation de la validité des prélèvements et en remboursement de sommes perçues au titre de cette taxe, exclue en vertu de l'article 7 du décret du 30 octobre 1980 du champ d'application de ses articles 8 à 10, devait être adressée à l'autorité compétente en matière de contributions indirectes ; que, par ce motif de pur droit, le jugement se trouve justifié en ce qu'il a estimé que la réclamation préalable ne pouvait pas être adressée au directeur général de l'ONIC ; Attendu, en deuxième lieu, que l'article 7 du décret du 28 novembre 1983 oblige tout établissement public de caractère administratif de l'Etat à transmettre à l'autorité compétente de l'Etat une demande dont il a été saisi à tort, mais ne vise pas les établissements publics à caractère industriel et commercial ; qu'aucun autre texte ou principe n'impose une telle transmission à l'ONIC, établissement public à caractère industriel et commercial, agissant de façon autonome en étant soumis à un simple contrôle de tutelle, et entre lequel et l'administration fiscale il n'est pas institué de liens étroits de collaboration impliquant une telle obligation ; que, par ce motif de pur droit, le jugement est justifié en ce qu'il retient que la requête déposée auprès du directeur de l'ONIC n'a pas eu l'effet d'une réclamation régulière ; Attendu, en troisième lieu, que le débat sur la compétence étant préalable à tout autre, c'est à bon droit que le Tribunal a retenu que le fait que l'Administration ait soutenu, lors d'une instance antérieure devant la juridiction administrative, une exception d'incompétence sans faire valoir une fin de non-recevoir tenant au défaut de demande préalable régulière, ne saurait la priver du droit de l'invoquer ; Attendu, enfin, que le motif critiqué à la quatrième branche du moyen est surabondant ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Champlor, envers le directeur des Douanes et Droits indirects, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du seize mai mil neuf cent quatre-vingt-quinze.