Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 7 avril 2004, 03-86.121, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept avril deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL, les observations de la société civile professionnelle DELAPORTE, BRIARD, TRICHET, Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Michel,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, en date du 19 septembre 2003, qui, pour fraude fiscale et passation irrégulière d'écritures comptables, l'a condamné à 8 mois d'emprisonnement et 2 250 euros d'amende, a ordonné la publication et l'affichage de la décision, et a prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1741, 1743 et 1750 du Code général des impôts, 50, paragraphe 1, de la loi n° 52-401 du 14 avril 1952, L. 123-12, l. 123-13 et L. 123-14 du Code de commerce, 121-1 du Code pénal, 2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Michel X... coupable de soustraction à l'établissement et au paiement de l'impôt, omission de déclaration, fraude fiscale et passation d'écriture inexacte ou fictive dans un document comptable ;

"aux motifs que "Michel X... conteste la qualité de gérant de fait de la société Soddes que retient l'administration fiscale et le ministère public ; qu'il a été relevé que Michel X... qui était employé comme directeur technique salarié par la société en cause disposait d'une procuration sur les comptes ouverts par la société à la Société Générale et à la Caisse Régionale de Crédit Agricole du Pas de Calais ; que Michel X... accomplissait de nombreuses formalités incombant à la société ; déclaration d'accident du travail, attestation d'ASSEDIC, entretiens d'embauches ; que le vérificateur a constaté que Michel X... était son principal interlocuteur lors du contrôle de comptabilité et répondait aux questions sur la comptabilité alors que la gérante de droit était épisodiquement présente ; qu'au surplus, il apparaît que Michel X... avait pouvoir d'engager la société pour avoir signé au nom de la société une convention d'achat exclusif de boissons avec la société "Normil" ; que si le prévenu fait valoir que la procuration lui a été donnée antérieurement à la période visée par la poursuite, il n'en demeure pas moins qu'il en disposait et pouvait en faire usage ;

que la convention susvisée a elle été signée en 1998 le 15 juin, Michel X... y apparaissant comme ayant pouvoir d'engager la société ; que l'ensemble de ces éléments attestent que le prévenu avait tout pouvoir de direction et gestion de la société et ce en toute indépendance ; que ceci résulte d'une part de ce qu'il signait les contrats engageant la vie de la société et assurait la gestion quotidienne de l'activité, la gérante de droit qui travaillait à mi-temps au cabinet médical de son père à Cambrai et était de surcroît gérante de droit de 3 autres sociétés (SOFES, SODDEM, Garance Beauty), dont le siège était dans des départements différents n'étant pas en mesure d'accomplir effectivement ces fonctions de gérante ; que le rôle exercé par Michel X... qui englobait tous les domaines de la vie sociale de la personne morale comprenait nécessairement le pouvoir de tenir la comptabilité et veiller à ce que les déclarations fiscales et paiement de taxes et impôts soient faits régulièrement, Sigrid Y... n'étant pas en mesure d'y procéder constamment ;

que de par les pouvoirs qu'il exerçait de fait le prévenu ne pouvait ignorer les obligations fiscales incombant à la société ; que de même lui seul pouvait par sa présence effective veiller à la tenue régulière de la billetterie et des stocks ; que c'est à juste titre que le tribunal a retenu sa qualité de gérant de fait ; que s'agissant des éléments constitutifs des délits de soustraction frauduleuse à l'établissement et au paiement de l'impôt, et relatifs à la tenue de la comptabilité, la Cour se référera aux motifs de la prévention visant Sigrid Y... ; que par des motifs pertinents que la Cour fait siens, le tribunal a exactement exposé, analysé et qualifié les faits et qu'il en a déduit à bon droit que Michel X... et Sigrid Y... s'étaient rendus coupables des délits tels que visés par les préventions susrappelées ; qu'à l'issue des débats devant la Cour, les faits demeurent tels qu'ils ont été analysés et qualifiés par le tribunal qui a retenu à bon droit Sigrid Y... et Michel X... dans les liens de la prévention ; qu'il échet en conséquence de confirmer le jugement déféré sur le principe de la culpabilité et la relaxe de Michel X... du chef de violation d'interdiction de gérer résultant du jugement du 4 décembre 1996" (arrêt, pages 12 et 13) ;

"alors que la participation personnelle du dirigeant de droit à des faits constitutifs de fraude fiscale caractérise une immixtion dans les fonctions déléguées et, partant, rend inefficace la délégation de pouvoirs ; que dès lors, en estimant que le demandeur avait la qualité de dirigeant de fait de la société Soddes, pour en déduire qu'il doit être tenu pénalement responsable des faits de fraude fiscale visés à la prévention, tout en déclarant Sigrid Y..., gérante de droit de la même société, coupable des mêmes faits, ce dont il résulte que cette dernière avait conservé le contrôle effectif du respect, par l'entreprise, de ses obligations vis à vis de l'administration fiscale et, par conséquent, que Michel X... ne pouvait être tenu responsable des manquements constatés, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé, par fausse application, les textes susvisés" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Samuel conseiller rapporteur, M. Challe conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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