Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 22 septembre 2004, 03-88.040, Inédit
Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 22 septembre 2004, 03-88.040, Inédit
Cour de cassation - Chambre criminelle
- N° de pourvoi : 03-88.040
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 22 septembre 2004
Décision attaquée : cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle 2003-11-27, du 27 novembre 2003- Président
- Président : M. COTTE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant : Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON et les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour ; Vu la communication faite au Procureur général ; Statuant sur le pourvoi formé par: - X... Richard, contre l'arrêt de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, en date du 27 novembre 2003, qui, pour corruption passive, faux et usage, l'a condamné à 1 an d'emprisonnement avec sursis, 1 000 euros d'amende, 5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, à l'interdiction définitive d'exercer une fonction publique, et a prononcé sur les intérêts civils ; Vu le mémoire produit ; Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-4, 441-1, 441-2, 441-4 du Code pénal, 388, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense ; "en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Richard X... coupable de faux en écriture publique ou dans un document administratif et usage, et l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis et 1.000 euros d'amende, outre l'interdiction définitive d'exercer une fonction publique et l'interdiction d'exercer ses droits civils et civiques pendant cinq ans ; "aux motifs que, Richard X... a, le 1er avril 1999 passé un bon de commande auprès de la société Socer pour "la location d'un fondoir avec fourgon atelier plus deux agents y compris produit Accopiast E au prix de 126.000 francs hors taxes" ; que ces travaux ont été effectués en juillet - août 1999 et ont fait l'objet le 10 août 1999 d'une "liquidation de facture au vu du service fait" par Richard X... ; que selon les déclarations concordantes de M. Y... et Richard X... lui-même, c'est le subterfuge trouvé par ce dernier pour lui permettre de confier à la société Socer le colmatage de fissures alors que la société Screg était titulaire exclusive du marché ; que Richard X... a donc sciemment, il l'a d'ailleurs confirmé à l'audience en faisant valoir qu'il aurait été anormal de payer ces travaux "dix fois plus cher à la Screg", masqué en location de matériel une prestation de service qui aurait dû être faite au mètre linéaire, ce bon de commande fictif a été établi pour contourner les règles du marché public, causant ainsi un préjudice à la société Screg détentrice du marché étant rappelé au demeurant que Richard X... était avisé de l'irrégularité du bon puisque Mme Z... a refusé de signer le constat, et qu'il a donc dû le rédiger lui- même ; "alors, d'une part, que prévenu, selon la citation, de faux en écriture publique, Richard X... a été déclaré coupable par le tribunal correctionnel de l'infraction reprochée ; que la cour d'appel a énoncé que Richard X... avait été déclaré coupable par le tribunal correctionnel de faux dans un document administratif, et a confirmé le jugement déféré sur la qualification des faits ; qu'en l'état de ces énonciations laissant incertain le chef d'infraction dont Richard X... a été déclaré coupable, la Cour de cassation n'est pas en mesure d'exercer son contrôle sur la légalité de la déclaration de culpabilité ; "alors, d'autre part, qu'à supposer que la cour d'appel ait requalifié les faits reprochés à Richard X... qualifiés de faux en écriture publique par la citation, en faux dans un document administratif, il lui appartenait de constater que le prévenu avait été mis en mesure de se défendre sur cette nouvelle qualification ; qu'à défaut, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble les droits de la défense ; "alors, en outre, que constitue un faux au sens de l'article 441-4 du Code pénal l'altération de la vérité dans une écriture publique ; qu'un bon de commande de travaux passé par un agent administratif n'est pas une écriture publique au sens de ce texte ; que la cour d'appel a violé les textes susvisés ; "alors, encore, que constitue un faux au sens de l'article 441-2 du Code pénal l'altération de la vérité dans un document administratif délivré aux fins de constater un droit, une identité ou une qualité ou d'accorder une autorisation ; qu'un bon de commande de travaux qui ne constate ni droit, ni identité ni qualité, et qui n'accorde pas d'autorisation n'est pas un document administratif au sens de ce texte ; que la cour d'appel a violé les textes susvisés ; "alors, par ailleurs, qu'un bon de commande n'est entaché de faux que si les mentions qu'il comporte, et singulièrement la description des travaux commandés, ne sont pas conformes à la réalité ; que la cour d'appel qui n'établit pas que les travaux réalisés par la société Socer n'avaient pas consisté à louer un fondoir avec fourgon atelier et à mobiliser deux agents et un produit Accoplast E, et qui ne constate pas ainsi que les travaux réalisés n'étaient pas conformes à ceux décrits dans le bon de commande argué de faux, a privé sa décision de base légale ; "alors, enfin, qu'en matière de faux, l'intention coupable résulte de la conscience de l'agent d'altérer la vérité ; que la cour d'appel qui déduit l'intention frauduleuse du prévenu de sa conscience supposée de contourner les règles du marché public attribué à la société Screg, sans constater que, en passant un bon de commande auprès de la société Socer, il avait eu conscience du caractère mensonger de la location de matériel et de l'immobilisation de personnel qui y étaient mentionnées, a privé sa décision de base légale. Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 112-1, 432-11 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Richard X... coupable de corruption passive, et l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis et 1 000 euros d'amende, outre l'interdiction définitive d'exercer une fonction publique et l'interdiction d'exercer ses droits civils et civiques pendant cinq ans ; "aux motifs que la corruption passive est établie pour la somme de 5 400 francs demandée par Richard X... à M. A..., gérant d'une société fournisseur de matériaux pour l'Unité du Confluent, dont il n'est pas contesté qu'à la période de remise des fonds elle travaillait pour son compte; que M. A... a déclaré avoir été sollicité par Richard X... ; que ce dernier a reconnu l'avoir sollicité ; qu'il a expliqué que M. A... avait proposé préalablement de parrainer l'amicale, mais que finalement il avait préféré participer à celle-ci par le biais d'un cofinancement du repas; que M. A... ne pouvait donc qu'escompter des avantages de la part du responsable de cette antenne qui passait les bons de commande ; "alors, d'une part, que l'agrément d'avantages n'est punissable que s'il intervient en contrepartie d'un acte de la fonction et en exécution d'un accord de volontés entre le corrupteur et le corrompu ; que la cour d'appel qui suppose que, en participant financièrement au repas de fin d'année de l'Amicale du Confluent, M. A... ne pouvait qu'escompter des avantages de la part de l'Unité du Confluent, n'a pas constaté qu'un pacte de corruption aurait été passé entre M. A... et le prévenu à cette fin ; que l'arrêt est privé de tout fondement légal ; "alors, d'autre part, que le seul espoir, nourri par un prétendu corrupteur, d'obtenir quelque avantage, ne signifie nullement un engagement du prétendu corrompu, d'octroyer un tel avantage ; que la cour d'appel qui énonce que, en participant financièrement au repas de fin d'année de l'Amicale du Confluent, M. A... "ne pouvait qu'escompter des avantages " de la part de l'Unité du Confluent, et qui en déduit la culpabilité de Richard X..., a violé les textes susvisés ; "alors, en outre, que la cour d'appel qui constate que la société GSL/DSL travaillait pour le compte de l'Unité du Confluent à la période de remise des fonds, sans établir que les travaux réalisés par elle lui auraient été commandés par le prévenu personnellement en contrepartie de la contribution financière de M. A..., a privé sa décision de base légale ; "alors, encore, que pour caractériser la corruption prévue à l'article 432-11 du Code pénal dans sa rédaction antérieure à la loi du 30 juin 2000, les juges du fond doivent constater l'antériorité des avantages sollicités ou reçus par rapport à l'action fautive sollicitée ; que, selon la prévention, les faits auraient été commis courant novembre 1999, de sorte qu'en s'abstenant de rechercher si la contribution financière de M. A... au repas de fin d'année de l'Amicale du Confluent était antérieure à l'abus supposé par Richard X... de son influence au sein de l'Unité du Confluent, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; "alors, enfin, que le corrompu supposé doit avoir profité personnellement de la corruption ; que tel n'est pas le cas de Richard X... qui a proposé à M. A... de financer le repas de fin d'année de l'Amicale du Confluent à hauteur de 5.400 francs, alors qu'il n'en était qu'un membre ordinaire et qu'il n'est pas constaté qu'il aurait bénéficié personnellement de cette somme ; que la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision" ; Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 112-1, 432-11 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Richard X... coupable de corruption passive, et l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis et 1 000 euros d'amende, outre l'interdiction définitive d'exercer une fonction publique et l'interdiction d'exercer ses droits civils et civiques pendant cinq ans ; "aux motifs que la corruption passive est établie pour la somme de 60 000 francs versée en espèces sur le compte bancaire de Richard X... ; que ces remises d'argent faites par M. B..., directeur de la Socer, régulières (13 versements), n'ont donné lieu à aucune reconnaissance de dette, et à aucun remboursement à l'exception de l'allégation non vérifiable de la remise d'une armoire qui en tout état de cause ne représenterait que le tiers de la dette ; que ces versements ont eu lieu de 1997 à 2000, période pendant laquelle la Socer a travaillé pour le compte de l'Unité du Confluent, période pendant laquelle a notamment été établi le faux résultant du bon de commande du 1er avril 1999 au profit de la Socer ; que ces remises ont été sollicitées par Richard X..., dit-il en raison de ses dettes de jeu, sans qu'aucun intérêt, ni remboursement n'ait été demandé avant leur découverte par les enquêteurs, pour abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir à M. Y... des chantiers ; "alors, d'une part, que l'agrément d'avantages n'est punissable que s'il intervient en contrepartie d'un acte de la fonction et en exécution d'un accord de volontés entre le corrupteur et le corrompu ; que la cour d'appel qui déduit la corruption de la remise par M. Y... de sommes d'argent en l'absence de reconnaissance de dette, d'intérêt et de demande de remboursement, sans constater qu'un pacte de corruption aurait été passé entre lui et Richard X..., a privé sa décision de base légale ; "alors, d'autre part, que la cour d'appel qui constate que la société Socer travaillait pour le compte de l'Unité du Confluent de 1997 à 2000, période pendant laquelle aurait notamment été rédigé le bon de commande argué de faux, sans établir que les chantiers confiés à la société Socer l'auraient été par le prévenu personnellement en contrepartie des remises d'argent consenties par M. Y..., a privé sa décision de base légale . "alors, enfin, que pour caractériser la corruption prévue à l'article 432-11 du Code pénal dans sa rédaction antérieure à la loi du 30 juin 2000, les juges du fond doivent constater l'antériorité des avantages sollicités ou reçus par rapport à l'action fautive sollicitée ; que la cour d'appel qui s'abstient de rechercher, s'agissant des faits commis avant le 1er juillet 2000, si la remise par M. Y... de la somme litigieuse était antérieure à l'abus supposé par Richard X... de son influence au sein de l'Unité du Confluent, a privé sa décision de base légale" ; Les moyens étant réunis ; Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ; D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ; REJETTE le pourvoi ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ; Greffier de chambre : M. Souchon ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;