Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 16 octobre 1989, 87-85.015, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le seize octobre mil neuf cent quatre vingt neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller GONDRE, les observations de la société civile professionnelle CELICE et BLANCPAIN et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général RABUT ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

X... Alain,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, chambre correctionnelle, en date du 20 mai 1987, qui, pour faux en écriture de commerce et usage de faux, escroquerie et abus de biens sociaux, l'a condamné à la peine de 8 mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 147, 150 et 151, 405 du Code pénal, 271 du Code général des impôts, 437 de la loi sur les sociétés commerciales du 24 juillet 1966, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable des délits de faux en écritures de commerce et usage, abus de biens sociaux et escroquerie à la TVA au titre de la facture SEMH du 28 mai 1981 ;

" aux motifs, sur la facture SEMH, que son caractère fictif ressort des éléments suivants, outre les aveux, renouvelés à diverses reprises, passés à son sujet par Halimi :

elle a été dactylographiée non par la société émettrice, mais de l'aveu même de X..., par sa propre société,

son libellé, très général, ne mentionne ni les hôpitaux démarchés, ni le matériel vendu, contrairement aux factures correspondant à des opérations réelles, qui y sont toujours précisées, aucune facture ne regroupant des commissions sur toute une année,

s'agissant de commissions, elles correspondent à un chiffre d'affaires de 500 000 francs, alors que Vial et Halimi qui lui a succédé comme représentant à la commission, ont toujours assuré qu'ils n'avaient jamais apporté un tel chiffre d'affaires aux Etablissements Guérin ;

" que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont déclaré établi à l'encontre de X... le délit de faux en écritures de commerce et usage, au sujet de cette fausse facture de 115 836 francs, comportant des mentions inexactes et créant un droit en faveur de la société SEMH ;

" que le prévenu, connaissant la fictivité de cette facture, savait que ceux qui l'avaient émise ne reverseraient pas la taxe à la valeur ajoutée qui y était incluse, pour un montant de 17 336 francs ;

" que l'établissement de cette fausse facture ne correspondant à aucune opération réelle, et l'imputation d'un crédit fictif de TVA sur un débit réel de TVA, valent remise des espèces correspondant, en l'occurrence 17 336 francs et caractérisent, au préjudice de l'Etat, le délit d'escroquerie ;

" qu'à l'égard de la société ainsi injustement appauvrie, l'établissement et le paiement d'une facture fictive caractérisent le délit d'abus de biens sociaux ;

" alors, d'une part, que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal indépendant et impartial qui décidera du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ;

" que, dans ses conclusions, d'ailleurs relatées par l'arrêt attaqué, X... faisait valoir que la facture de 115 836 francs correspondait à des commissions versées pour des transactions qui avaient effectivement eu lieu ; soit 20 % du montant de vingt-trois commandes prises entre octobre 1979 et mai 1981 ; qu'en effet, le prévenu avait produit le détail et la copie de ces factures de ventes ouvrant droit à commissions ; qu'en se bornant essentiellement à faire état des déclarations contraires de deux coprévenus, non assorties de preuve ou de précision les juges du fond ont méconnu leur office et entaché leur décision d'un défaut de réponse à conclusions ;

" alors, d'autre part, que le délit d'abus de biens sociaux suppose que le président d'une société anonyme ait agi à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle il serait intéressé ; qu'en se bornant à constater que la société aurait été appauvrie par le paiement d'une facture fictive, sans autrement caractériser l'intérêt personnel du prévenu, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 437 de la loi du 24 juillet 1966 " ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que pour déclarer Alain X... coupable, en qualité de président de la SA Guérin, de faux en écriture de commerce et d'usage de faux au titre de la facture SEMH, d'escroquerie à la TVA et d'abus de biens sociaux, la cour d'appel a répondu comme le devait aux conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments les infractions reprochées ;

Que, dès lors, le moyen, qui tente de remettre en question l'appréciation souveraine de ces faits par les juges du fond, ne saurait être accueilli ;

Attendu, par ailleurs, que les délits susvisés justifient la peine prononcée, ainsi que les dommages-intérêts alloués au Trésor Public en réparation du préjudice résultant de l'escroquerie, sans qu'il soit besoin d'examiner le premier moyen dirigé contre d'autres chefs de la déclaration de culpabilité n'ayant pas donné lieu à octroi de dommages-intérêts ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux dépens ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Où étaient présents : M. Tacchella conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Gondre conseiller rapporteur, MM. Souppe, Hébrard, Hecquard conseillers de la chambre, M. Bayet, Mme Bregeon, M. de Mordant de Massiac conseillers référendaires, M. Rabut avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

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