Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 30 octobre 2007, 06-13.852, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Denis B qui exploitait à Sélestat un dépôt vente sous franchise de la société Seconde Main a conclu le 29 décembre 1997 avec le Crédit industriel d'Alsace Lorraine (la banque) une convention de compte-courant assortie d'une autorisation de découvert dont son gérant M. X... s'est rendu caution ;

que par courrier du 18 mai 2000 intitulé "dénonciation de concours avec préavis" et adressé à la "sarl Denis B/société Seconde Main" au siège de cette dernière à Obernai, la banque a dénoncé l'autorisation de découvert, et a assigné la société Denis B et M. X... ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir retenu sa faute alors, selon le moyen :

1 / qu'en l'absence de disposition de la loi bancaire imposant à un établissement de crédit de notifier la dénonciation d'une autorisation de découvert à durée indéterminée consentie à une personne morale au siège social de celle-ci, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre du banquier qui envoie la lettre de rupture à l'adresse indiquée par le représentant légal de cette société comme étant celle à laquelle devaient parvenir les relevés de compte "par désir de discrétion vis-à-vis des employés" ; qu'en retenant néanmoins une faute commise par la banque dans la dénonciation de ses concours qualifiée "d'irrégulière", la cour d'appel a violé les articles L. 313-12 du code monétaire et financier et 1382 du code civil ;

2 / que l'article 10 de la convention de compte signée le 29 décembre 1997 par la société Denis B stipulait que "le client élisait domicile à l'adresse qu'il a indiquée" ; qu'en retenant néanmoins une faute commise par la banque dans la notification de la dénonciation de ses concours bien que celle-ci n'ait fait que se conformer à la demande de sa cliente en envoyant les documents bancaires, dont le courrier litigieux, à l'adresse qui lui avait été indiquée dans le fax du 16 mars 2000, la cour d'appel a dénaturé la convention de compte et violé l'article 1134 du code civil ;

3 / que le siège statutaire n'est pas opposable aux tiers par la société lorsque le siège réel est situé en un autre lieu ; qu'en l'espèce il ressortait du fax du 16 mars 2000 que la demande d'envoi des relevés de compte de la société Denis B à Obernai était fondée sur le désir de la société Denis B de conserver toute discrétion à l'égard de ses salariés, peu important que cette société ait choisi d'envoyer un fax le 12 mai 2000 et un courrier le 10 mai 2000 destiné à la banque à partir de son siège statutaire ; qu'en se fondant néanmoins sur ces deux correspondances pour affirmer que la banque avait irrégulièrement dénoncé ses concours en notifiant leur rupture à une autre adresse que celle du siège social de sa cliente, la cour d'appel a violé l'article 1837 du code civil ;

Mais attendu que ces griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1 et R. 313-2 du code de la consommation ;

Attendu qu'en cas d'ouverture de crédit en compte courant, l'obligation de payer des agios conventionnels par application du taux effectif global exige non seulement que ce taux soit porté à titre indicatif sur un document écrit préalable, mais également que le taux appliqué soit porté sur les relevés périodiques reçus par l'emprunteur sans protestation ni réserve ; qu'à défaut de la première exigence, les agios ne sont dus qu'à compter de l'information régulièrement reçue, valant seulement pour l'avenir ; qu'à défaut de la seconde, la seule mention indicative de ce taux ne vaut pas, s'agissant d'un compte-courant, reconnaissance d'une stipulation d'agios conventionnels ;

Attendu que pour dire que la société Denis B doit les intérêts au taux légal, l'arrêt retient qu'il n'est mentionné aucun taux correspondant à des exemples chiffrés figurant à titre indicatif dans la convention d'ouverture de crédit ou tout autre document reçu par la société Denis B préalablement à la perception des agios, que la simple référence aux conditions générales dans la convention de compte prévoyant uniquement la rémunération des services rendus au client par la perception d'intérêts ou de commissions, et la référence au taux de base de la banque sont insuffisantes ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la banque produisait des facturations d'arrêté de compte trimestriel pour 1999 et début 2000 laissant apparaître un taux effectif global variant entre 12,98 % et 15,75 %, ce dont il résultait qu'à défaut de protestation ou réserve de la société Denis B à leur réception, le taux effectif global porté sur ces documents valait pour l'avenir jusqu'à notification d'un nouveau taux effectif global, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que la société Denis B devait les intérêts au taux légal sur le solde débiteur du compte-courant et que les commissions et frais n'étaient pas dus, l'arrêt rendu le 10 mars 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société Denis B aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande du Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente octobre deux mille sept.

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