Cour de Cassation, Chambre sociale, du 14 décembre 2006, 05-40.844, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X... a signé avec la société France acheminement un contrat de franchise prenant effet le 2 avril 1998, pour l'exploitation d'une tournée de distribution et de ramassage de colis ;

qu'invoquant les manquements de la société à ses obligations contractuelles, le franchisé a cessé son activité le 31 décembre 2000, puis a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de la relation en contrat de travail et faire condamner les sociétés France acheminement et France acheminement exploitation à lui payer diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat ; qu'après avoir constaté que les conditions de l'article L. 781-1,2 étaient réunies et que le salarié était lié aux deux sociétés par contrat à durée indéterminée à temps complet, la cour d'appel a partiellement fait droit à ses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande de paiement d'indemnités de repos compensateurs et de congés payés afférentes aux heures supplémentaires effectuées, pour des motifs tirés d'une violation des articles L. 212-1-1 du code du travail et 455 du nouveau code de procédure civile et d'un manque de base légale au regard de l'article L. 212-5 du code du travail ;

Mais attendu que s'il résulte de l'article L. 212-1-1 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'ayant constaté qu'en l'absence d'un moyen de contrôle systématique des horaires, les éléments produits par le salarié ne permettaient pas une approche sérieuse du temps de travail effectif, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche :

Attendu que le salarié reproche à la cour d'appel de l'avoir débouté de sa demande en paiement de l'indemnité prévue par l'article L. 324-11-1 du code du travail pour des motifs tirés d'une violation de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu que sous couvert d'un défaut de réponse à conclusions, le moyen reproche à la cour d'appel une omission de statuer susceptible d'être réparée conformément aux dispositions de l'article 463 du nouveau code de procédure civile ; qu'il est dès lors irrecevable ;

Sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu que le salarié fait également grief à l'arrêt d'avoir fixé à une somme, les dommages-intérêts qui lui ont été alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors que la cassation sur le premier moyen entraînera par voie de dépendance, celle de ces dispositions, en application de l'article 625 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu que le pourvoi formé contre le premier moyen ayant été rejeté, le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence est devenu sans portée ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que le salarié fait encore grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice consécutif aux conditions de travail qui lui ont été imposées par les sociétés France acheminement et France acheminement exploitation, alors que la cassation à intervenir sur le premier moyen emportera par voie de conséquence annulation de ces dispositions, en application de l'article 625 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu que le pourvoi formé contre le premier moyen ayant été rejeté, le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence est devenu sans portée ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en toutes ses branches :

Vu les articles R. 143-2,14 et D. 223-4 du code du travail, ensemble l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'indemnités de congés payés, la cour d'appel retient que cette indemnité, substitut du salaire, ne peut se cumuler avec le salaire versé pendant cette période, sauf à pouvoir prétendre à des dommages-intérêts si le salarié établit que les congés payés n'ont pu être pris par la faute de son employeur ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, les arguments avancés relatifs aux obligations contractuelles de livrer les clients en toutes circonstances étant insuffisants pour démontrer un empêchement à cet égard imputable à l'employeur, étant observé qu'il était également prévu au contrat de franchise que le titulaire était autorisé à organiser son remplacement ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'employeur n'avait pas mis en place un système de congés payés conforme aux dispositions légales, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences des textes susvisés ;

Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles L.122-5 et L.122-14-3 du code du travail ;

Attendu que pour débouter M. X... de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité de préavis, l'arrêt énonce que la rupture étant, dans tous les cas, intervenue le 31 décembre 2000, la cessation du travail et le départ volontaire du salarié à cette date ont constitué, en l'absence de courrier de doléances à son employeur, une démission qu'il n'a pas remise en cause avant sa saisine du conseil de prud'hommes plus d'un an et demi après ;

Qu'en se déterminant par de tels motifs qui ne caractérisent pas une volonté claire et non équivoque de rompre le contrat de travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le cinquième moyen :

Vu l'article L. 143-11-1 du code du travail ;

Attendu qu'après avoir fait ressortir que le droit d'entrée de 100 000 francs ou 15 244,90 euros ne pouvait être exigé du salarié et devait lui être restitué sous forme de dommages-intérêts, l'arrêt retient que cette somme allouée en raison d'une clause illégale du contrat de travail, ne sera pas garantie par l'AGS ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que M. X... était lié à la société France acheminement par un contrat visé à l'article L. 781-1 du code du travail et bénéficiait ainsi des dispositions du code du travail, de sorte que la créance relative au remboursement du droit d'entrée se rattachait à l'exécution du contrat de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X..., déclaré démissionnaire, de ses demandes d'indemnité de congés payés, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité compensatrice de préavis et en ce qu'il a dit que la somme de 15 244,90 euros allouée à titre de dommages-intérêts, ne serait pas garantie par l'AGS, l'arrêt rendu le 9 décembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;

Condamne MM. Y... et Z..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne MM. Y... et Z..., ès qualités, à payer à M. X... la somme de 750 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille six.

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