Cour de Cassation, Chambre sociale, du 28 novembre 2006, 04-19.623, Inédit
Cour de Cassation, Chambre sociale, du 28 novembre 2006, 04-19.623, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 04-19.623
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mardi 28 novembre 2006
Décision attaquée : cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section) 2004-09-16, du 16 septembre 2004- Président
- Président : M. SARGOS
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : Vu la connexité joint les pourvois n° N 04-19.623 et n° C 04-47.674 ; Attendu que M. X... engagé à compter du 2 novembre 1979 par la société Roussel Y..., aux droits de laquelle vient la société Aventis Pharma, a été placé par lettre du 18 mars 1980 en position de détachement au sein d'une filiale brésilienne, la société Sarsa ; que le 2 février 1992, il a été rapatrié en France et licencié le 2 novembre 1992 ; qu'une transaction a été conclue le 17 février 1993 entre M. X... et la société Roussel Y... ; que le 23 juin 2000 M. X... a demandé à la société Aventis Pharma le versement de sommes au titre de la participation et de l'intéressement et s'étant vu opposé un refus, a saisi le tribunal de grande instance ; Sur le premier moyen, commun aux deux pourvois : Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ; Sur le deuxième moyen, commun aux deux pourvois : Attendu que la société Aventis Pharma fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 16 septembre 2004) de l'avoir condamné à verser à M. X... une provision à valoir sur les sommes dues au titre de la participation et au titre de l'intéressement pour les exercices 1979 à 1993, alors, selon le moyen : 1 / qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ; qu'en l'espèce, la lettre du 18 mars 1980 indiquait que M. X... serait détaché auprès de la "filiale SARSA" et qu'il travaillerait "sous l'autorité du Directeur général de Sarsa (...) son supérieur hiérarchique" ; que pour retenir cependant que M. X... serait resté sous la subordination de la société Roussel Y... pendant la durée de la période d'expatriation, la cour d'appel s'est essentiellement déterminée par la considération qu'"aucun élément justifiant de la réalité de cette subordination propre à caractériser la qualité de salarié de la filiale étrangère n'est produit aux débats" ; que, ce faisant, la cour d'appel a manifestement inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article L. 121-1 du code du travail ; 2 / que le salarié détaché dans une filiale qui se trouve placé sous le pouvoir de subordination de cette dernière ne peut prétendre bénéficier des régimes d'intéressement et de participation mis en place dans l'entreprise d'origine dans laquelle il n'exerce plus aucune activité ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que la lettre du 18 mars 1980 indiquait que M. X... serait détaché auprès de la "filiale Sarsa" et qu'il travaillerait "sous l'autorité du directeur général de Sarsa (...) son supérieur hiérarchique" et lui rappelait en outre qu'il ne pouvait fournir de renseignements concernant son activité (planification et contrôle de gestion) "qu'aux personnes désignées par (son) supérieur hiérarchique", ce dont il se déduisait l'existence d'un lien de subordination effectif entre M. X... et la société Sarsa ; qu'en retenant néanmoins que M. X... serait resté sous la subordination de la société Roussel Y... pendant la durée du détachement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant a violé les articles L. 121-1, L. 441-2 et L. 442-4 du code du travail ; 3 / que le critère de rattachement d'un salarié à une entreprise est exclusivement fonction de l'autorité que celle-ci exerce de manière effective sur son préposé ; qu'en se fondant dès lors sur des considérations inopérantes tirées de l'absence de production d'un contrat de travail établi au nom de la société Sarsa, le paiement d'une rémunération complémentaire par Roussel Y... et l'établissement de bulletins de salaires pour décider que M. X... serait demeuré rattaché à la société Roussel Y..., la cour d'appel a violé l'article L. 121-1 du code du travail ; 4 / que si le détachement d'un salarié dans une filiale étrangère entraîne la suspension du contrat de travail vis-à-vis de l'entreprise initiale, cela ne fait pas obstacle à la subsistance d'obligations accessoires telles que les obligations de confidentialité et de non concurrence ; qu'en considérant que la subsistance de telles obligations au profit de la société Roussel Y... permettait de retenir que M. X... continuait d'être rattaché à cette dernière, la cour d'appel a violé là encore l'article L. 121-1 du code du travail ; 5 / qu'ayant constaté que M. X... serait directement placé sous l'autorité hiérarchique du directeur général de Sarsa, la cour ne pouvait conclure au maintien d'un lien de subordination entre ce salarié et Roussel Y... sans caractériser la confusion des activités entre la société mère et sa filiale ; qu'en l'espèce, la cour s'est bornée à relever que M. X... se voyait confier les fonctions de responsable de la planification et de contrôle de gestion pour l'ensemble des activités de Roussel Y... au Brésil, qu'il informerait le groupe Roussel sur l'évolution du marché local, que ses études, recherches et résultats resteraient la propriété de l'entreprise ; que ce descriptif des activités et fonctions d'un cadre dirigeant de la société Roussel était significatif de ce que la filiale avait vocation à agir dans l'intérêt de la société mère mais nullement d'une confusion entre ces deux sociétés ; qu'en concluant au maintien du lien de subordination entre M. X... et Roussel Y..., la cour a derechef violé l'article L. 121-1 du code du travail ; Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que la lettre du 18 mars 1980, valant avenant au contrat de travail de M. X..., emportait novation du contrat initial et prévoyait le maintien de liens et d'obligations contractuelles entre le salarié et la société Roussel Y... , a par ce seul motif légalement justifié sa décision ; Sur le troisième moyen, commun aux deux pourvois : Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir condamné la société Aventis Pharma à verser à M. X... une somme à titre de provision sur l'intéressement et la participation, alors, selon le moyen : 1 / qu'en prévoyant que l'intéressement ne se substituait à aucun élément de salaire ayant cours actuellement dans l'entreprise, les accords d'intéressement et de participation visés par la cour d'appel ne concernaient que le cas des salariés en poste dans la société Roussel Y... et non celui de ceux qui se trouvaient en détachement dans une filiale étrangère ; qu'en considérant que cette stipulation garantissait aux salariés en détachement à l'étranger un cumul entre le bénéfice des accords de participation et d'intéressement avec la prime spécialement destinée à les indemniser pour la "perte de participation aux fruits de l'expansion", la cour d'appel a violé les articles L. 121-1, L. 132-1, L. 441-2 et L. 442-4 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ; 2 / que la cour constatait l'octroi d'une "indemnité de pénibilité" destinée à compenser la perte d'avantages métropolitains, dont "la participation aux fruits de l'expansion", méconnaissait les règles d'ordre public relatives à la participation des salariés ainsi que les accords d'entreprise relatifs à leur intéressement ; qu'elle constatait ainsi la nullité du système de compensation dont M. X... avait bénéficié, de sorte qu'admettant en conséquence que ce dernier puisse bénéficier rétroactivement des sommes dues au titre de l'intéressement et de la participation, elle devait dans le même temps admettre que Aventis Pharma puisse rétroactivement et dans la même mesure obtenir la restitution des indemnités de pénibilité, et la compensation entre celles-ci et les primes d'intéressement et de participation ; qu'en refusant le principe de cette compensation, la cour a violé les articles L. 135-2, L. 441-2 et L. 442-1 du code du travail, ensemble l'article 1304 du code civil ; Mais attendu que les accords d'intéressement et de participation doivent bénéficier à tous les salariés de l'entreprise, sans que les salariés détachés à l'étranger puissent en être exclus ; Et attendu que la cour d'appel qui a constaté que les primes versées au salarié détaché à l'étranger étaient destinées soit à compenser les sujétions liées à l'expatriation, soit répondaient à d'autres critères à la discrétion de l'employeur, a pu en déduire que ces primes ne pouvaient compenser ou substituer les avantages dus au titre de la participation et de l'intéressement ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois ; Condamne la société Aventis Pharma aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille six.