Cour de Cassation, Chambre civile 2, du 5 avril 2007, 06-10.797, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte aux consorts X... de ce qu'ils se sont désistés de leur pourvoi en tant que dirigé contre la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1384, alinéa 1er, du code civil ;

Attendu que la faute de la victime n'exonère totalement le gardien de sa responsabilité que si elle constitue un cas de force majeure ;

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, qu'un véhicule automobile immobilisé sur un passage à niveau après la fermeture des barrières a été heurté par un train ; que son conducteur, Guy Y..., a été mortellement blessé ; que Mme Germaine X... et sa fille Mme Catherine X... (les consorts X...) ont assigné la SNCF en responsabilité et réparation, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde ;

Attendu que pour débouter les consorts X... de leurs demandes, l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que Guy Y... a commis une faute en s'engageant sur le passage à niveau compte tenu des conditions de circulation alors que la prudence élémentaire impose, nonobstant l'impatience de certains automobilistes, de ne s'engager sur un passage à niveau que lorsque le véhicule précédent l'a complètement traversé et dégagé au-delà un espace suffisant pour le placement d'un véhicule ; que l'article R. 422-3-1 du code de la route dispose qu'aucun conducteur ne doit s'engager sur un passage à niveau si son véhicule risque, du fait de ses caractéristiques techniques ou des conditions de circulation, d'y être immobilisé ; que, selon les éléments du procès-verbal de police, le passage à niveau était muni d'une signalisation automatique lumineuse et de demi-barrières à fonctionnement automatique annonçant aux usagers de la route l'approche des trains ; que ce dispositif a parfaitement fonctionné lors de l'accident ; qu'à l'arrivée du train, le signal lumineux s'est allumé et les barrières automatiques se sont abaissées ; que le conducteur du train, voyant le véhicule de Guy Y... immobilisé sur la voie, a actionné le signal sonore et le système de freinage ; que Guy Y..., malgré ce signal sonore, n'a pas quitté son véhicule et tenté de s'échapper ; que c'est à l'évidence sans s'assurer que le véhicule qui le précédait, après avoir traversé le passage à niveau, lui laissait suffisamment de place pour ne pas risquer de se trouver immobilisé sur le passage à niveau que Guy Y... s'est engagé sur le passage à niveau ; que Guy Y... a commis une incontestable faute et violé les dispositions de l'article R. 422-3-1 du code de la route ; que la faute d'imprudence grave de Guy Y... a été la cause exclusive de l'accident et a présenté pour la SNCF un caractère anormalement irrésistible, les seules dispositions que le conducteur du train pouvait prendre, à savoir déclencher le freinage d'urgence et l'avertisseur ayant été prises ; qu'il résulte de ces éléments qu'aucun caractère anormal dans le fonctionnement du train ou du système de sécurité du passage à niveau ne peut être relevé et que ce dommage ne trouve sa cause que dans le fait insurmontable de la victime ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la présence, entre les barrières ou demi-barrières autorisant le passage prioritaire du train, d'un véhicule automobile circulant sur la voie routière traversée à niveau par la voie ferrée, était imprévisible, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 juin 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;

Condamne la SNCF et la CPAM de la Gironde aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la SNCF à payer aux consorts X... la somme globale de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille sept.

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