Cour de Cassation, Chambre sociale, du 14 décembre 2005, 04-41.097, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X... a été engagée par la société SEA le 22 juillet 1997 en qualité de secrétaire-réceptionniste ; qu'elle a été licenciée pour faute grave le 7 avril 1998 ; que par arrêt du 19 novembre 2003, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a dit que le licenciement n'était fondé ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de la salariée :

Attendu que la salariée fait grief l'arrêt attaqué de ne pas avoir déclaré nul le licenciement et de l'avoir en conséquence déboutée de sa demande en réparation du préjudice subi à ce titre, alors, selon le moyen :

1 / qu'est nul tout licenciement jugé non fondé sur une faute grave par le juge prud'homal et notifié pendant la période de suspension du contrat de travail du salarié par un employeur avisé que l'absence de ce salarié a pour cause un accident du travail, ceci quand bien même l'employeur en aurait eu uniquement connaissance après l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'en l'espèce, il s'évince du certificat médical établi le 15 janvier 1998 que Mme X... était en arrêt de travail pour cause d'accident du travail, comme coché par le praticien, fondé sur un "état dépressif sévère en rapport avec deux agressions avec armes" survenues pour l'une en octobre 1997 ; que l'employeur savait donc à cette date qu'il ne s'agissait pas d'un simple arrêt-maladie ; qu'en considérant pourtant qu'il résultait de ce document que l'employeur avait uniquement été avisé postérieurement au licenciement notifié le 7 avril 1998 de la relation faite entre l'arrêt de travail de Mme

X... et un accident du travail remontant au mois d'octobre 1997, la cour d'appel a dénaturé le contenu de ce document en violation de l'article 1134 du Code du travail ;

2 / qu'en considérant qu'il ressortait du certificat médical daté du 15 janvier 1998 que la société SEA avait été avisée postérieurement au licenciement du fait que l'arrêt de travail de sa salariée avait pour cause un accident du travail survenu au mois d'octobre 1997, tout en constatant que le licenciement de Mme X... lui avait été notifié le 7 avril 1998 et donc après que son employeur eut été avisé de l'origine professionnelle de l'arrêt de travail par ce certificat médical, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 122-32-2 du Code du travail ;

3 / que la connaissance par l'employeur, antérieurement à la date de notification du licenciement, de l'absence de Mme X... pour cause d'accident du travail résultait aussi des courriers adressés par lui à sa salariée les 23 janvier et 5 mars 1998 dans lesquels il contestait son arrêt de travail pour cause d'accident du travail survenu le 22 octobre 1997 ; qu'en considérant qu'à la date du licenciement de Mme X... le 7 avril 1998, son employeur ignorait que son arrêt de travail avait pour cause un accident du travail survenu au mois d'octobre 1997, sans rechercher comme il lui était demandé si ces courriers ne rapportaient pas la preuve du contraire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 122-32-2 du Code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte des constatations de la cour d'appel qu'à la date du licenciement le contrat de travail n'était plus suspendu par un arrêt de travail provoqué par un accident du travail survenu le 22 octobre 1997 ; que le moyen manque en fait ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident du mandataire liquidateur :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le second moyen du pourvoi principal de la salariée :

Vu les articles 1134 du Code civil, L. 122-32-1 du Code du travail et L. 122-6 du Code du travail ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande en paiement de l'indemnité de préavis, la cour d'appel a estimé qu'elle ne justifie pas d'une ancienneté de services continus de six mois en raison d'une embauche du 22 juillet 1997 et d'un arrêt maladie du 15 janvier 1998 ; qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, qu'il résulte des indications portées par le Docteur Y... sur le certificat médical qu'il a établi le 15 janvier 1998 que l'arrêt de travail jusqu'au 30 janvier 1998 était justifié par un accident du travail, et d'autre part, que par application du deuxième des textes susvisés, la durée des périodes de suspension du contrat de travail d'un salarié victime d'un accident du travail est pris en compte pour la détermination de tous les avantages légaux liés à l'ancienneté dans l'entreprise, que la salariée justifiait à la date du licenciement d'une ancienneté de services antérieurs supérieur à 6 mois de sorte que, par application du troisième des textes susvisés elle devait bénéficier d'une indemnité compensatrice de préavis égale à un mois, la cour d'appel a dénaturé le certificat médical établi le 15 janvier 1998 et violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'en application de l'article 627 du nouveau Code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure, le montant de la somme réclamée par la salariée n'étant pas discuté par l'employeur à titre subsidiaire devant la cour d'appel, de mettre fin au litige, par application de la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions déboutant Mme X... de sa demande à titre d'indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt rendu le 19 novembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Fixe la créance de Mme X... au titre de l'indemnité compensatrice de préavis à 2 683,36 euros avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de pru'hommes jusqu'à la date d'ouverture de la procédure collective ;

Déclare le présent arrêt oppposable au CGEA Toulouse dans les conditions, limites et plafonds prévus par les articles L. 143-11-8 et D. 143-2 du Code du travail ;

Condamne Mme Z..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne Mme Z..., ès qualités à payer à Mme X... la somme de 2 400 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille cinq.

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