Cour de Cassation, Chambre sociale, du 18 mai 1999, 96-44.097, Inédit
Cour de Cassation, Chambre sociale, du 18 mai 1999, 96-44.097, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 96-44.097
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mardi 18 mai 1999
Décision attaquée : cour d'appel de Paris (21ème chambre, section B) 1996-06-14, du 14 juin 1996- Président
- Président : M. WAQUET conseiller
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : Sur les pourvois n° Q 96-44.097 et n° X 96-44.196 formés par : 1 / Le Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement "CIRAD-IRCA", dont le siège est ..., agissant en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège, 2 / Le Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement "CIRAD-CP", dont le siège est ..., agissant en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège, en cassation d'un arrêt rendu le 14 juin 1996 par la cour d'appel de Paris (21ème chambre, section B), au profit de M. Eric X..., demeurant 4, place du Jeu de Boules, 34600 Bédarieux, défendeur à la cassation ; LA COUR, en l'audience publique du 24 mars 1999, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen, faisant fonctions de président, M. Texier, conseiller rapporteur, M. Brissier, conseiller, M. Besson, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Texier, conseiller, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société CIRAD CP et de la société CIRAD IRCA, de la SCP Lesourd, avocat de M. X..., les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 96-44.196 et n° Q 96-44.097 ; Sur le moyen unique, commun aux deux pourvois : Attendu que M. X... a été engagé par la société CIRAD-IRCA le 4 mars 1985, en qualité d'ingénieur agro-physiologiste et affecté en Côte d'Ivoire ; que son contrat de travail prévoyait la possibilité d'une affectation ultérieure, en France et hors de France, en fonction de la nécessité du service ; que, le 10 avril 1991, le salarié a été affecté en Indonésie ; que, le 7 août 1992, n'ayant pas obtenu les avantages qu'il sollicitait, il a écrit à l'employeur en indiquant qu'il estimait que le contrat de travail était rompu et, après un échange de correspondance avec la société, il a quitté son poste le 28 octobre 1992 ; qu'il a été licencié pour faute grave le 23 novembre 1992 et qu'il a saisi la juridiction prud'homale en paiement de diverses sommes ; Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 14 juin 1996) de l'avoir condamné à payer à M. X... des sommes à titre de remboursement de frais de déménagement, d'indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, alors, selon le moyen, de première part, que la lettre d'engagement de M. X... du 6 mars 1985 comportait une clause de mobilité ainsi libellée : "Vous pourrez recevoir ultérieurement, dans le cadre des activités de CIRAD, toute autre affectation, en France ou hors de France, en fonction des nécessités du service" ; qu'il s'ensuit qu'alors qu'il n'était pas contesté que la mutation de M. X... de Côte-d'Ivoire en Indonésie était justifiée par les nécessités du service et s'imposait à l'intéressé en vertu de cette clause de mobilité, viole l'article 1134 du Code civil l'arrêt qui retient que le salarié aurait eu à "souscrire à son poste" en Indonésie à un moment donné, pour en déduire qu'à ce moment il ne connaissait pas les conditions exactes de la prise en compte de ses frais d'expatriation ; alors, de deuxième part, que, dans son courrier du 6 mai 1991, le CIRAD indiquait à M. X... à propos de son affectation en Indonésie : "Vous serez rémunéré sur les bases suivantes : En service en France ou en congés : 13 802. En service Outre-Mer : salaire de base : 13 802, indemnité d'éloignement : 6 486,92, indemnité de cherté de vie : 2 886,10, supplément familial : 1 380,20, (total) 24 552,22. Nous vous rappelons que la prise de vos nouvelles responsabilités vous permettra de présenter au Directeur général une demande de passage anticipé en catégorie 7 (ou plus tard début 1992) ; votre rémunération sera alors portée à : en service en France ou en congés : 14 823, en service Outre-mer : salaire de base : 14 823, indemnité d'éloignement : 6 966,81, indemnité de cherté de vie : 3 463,32, supplément familial : 1 482,30, (total) 26 735,43. Les clauses générales de votre contrat restent les mêmes en ce qui concerne les régimes de prévoyance, de retraite, et les conditions d'emploi. L'ensemble des avantages liés à l'expatriation vous étant déjà connus, il n'est pas nécessaire de les reprendre et vous voudrez bien nous préciser la date exacte de votre départ" ; que dans son courrier du 18 juin à M. X..., le CIRAD écrivait : "Nous vous transmettons officiellement la décision de votre classement et nous avons le plaisir de vous préciser qu'à titre exceptionnel, votre départ en Indonésie sera réservé en classe "Affaires" pour vous et votre famille" ; qu'il résultait de ces deux courriers que plus d'un mois avant de partir en Indonésie, M. X... connaissait le détail des conditions précises de la prise en compte de ses frais d'expatriation ; que M. X... n'a pas reçu d'autre courrier lui donnant le détail de ses conditions de rémunération et d'indemnisation ; qu'il s'ensuit que ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil et des articles L. 122-8, L. 122-9 et L. 122-14-4 du Code du travail l'arrêt qui fonde sa solution au motif qu'au moment où il avait "souscrit son poste" le salarié "ne connaissait pas les conditions exactes de la prise en compte de ses frais d'expatriation" et que "le document non précisé qui lui a été adressé en cours d'exécution de sa mission ne saurait remédier à cette carence" ; que, de plus, viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile l'arrêt qui fonde sa solution au visa d'un "document" adressé en cours d'exécution de la mission du salarié, sans en préciser la nature ni le contenu, ce qui interdit à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle ; alors, de troisième part, que viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile l'arrêt qui fonde sa solution sur la simple affirmation que l'employeur a augmenté unilatéralement les charges de travail et les contraintes de transport du salarié, qui s'est vu imposer, au détriment de sa vie familiale et sans avantages complémentaires, l'exercice de ses fonctions sur une surface pratiquement doublée ; alors, de quatrième part, que ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil et des articles L. 122-8, L. 122-9 et L. 122-4-4 du Code du travail l'arrêt qui retient que le licenciement de M. X... n'était justifié nii par une faute grave ni par une cause réelle et sérieuse au motif que le salarié s'était trouvé dans l'impossibilité de "négocier" utilement l'attribution d'un véhicule du fait de la rigidité des positions du CIRAD, faute de s'être expliqué sur le moyen des conclusions d'appel faisant valoir, ce qui n'était pas contesté, que l'intéressé disposait d'un véhicule de fonction pour son usage professionnel et que, s'il n'avait pas été possible de lui allouer un second véhicule à usage personnel en raison du refus des partenaires industriels du CIRAD, l'employeur avait proposé d'accorder un prêt au salarié pour lui permettre d'acquérir un véhicule pour son usage personnel ; que, de plus, viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile l'arrêt qui fonde sa solution sur la simple affirmation que "les documents versés aux débats" démontraient amplement que le véhicule qui n'avait pas été attribué au salarié s'avérait indispensable, l'arrêt ayant en outre omis de préciser la nature et le contenu desdits "documents versés aux débats", ce qui interdit à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle ; et alors, de cinquième part, que viole encore l'article 455 du nouveau Code de procédure civile l'arrêt qui, procédant par simple affirmation, fonde sa solution au motif que le successeur de M. X... a bénéficié des moyens qui avaient été refusés à ce dernier ; Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas méconnu l'existence d'une clause de mobilité, a relevé que la mutation de M. X... s'accompagnait d'une modification du contrat de travail en ce qui concerne la charge du travail et les contraintes imposées au salarié que celui-ci était en droit de refuser ; qu'elle a constaté en outre que l'employeur avait agi avec une légèreté blâmable en refusant au salarié les moyens indispensables à sa mission ; qu'ainsi, sans encourir les griefs du moyen, elle a légalement justifié sa décision ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société CIRAD - IRCA et la société CIRAD - CP aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société CIRAD-IRCA, la société CIRAD-CP à payer à M. X... la somme de 12 000 francs ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.