Cour de Cassation, Chambre sociale, du 15 avril 1999, 97-15.594, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la Société chimique basco-landaise, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 3 avril 1997 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), au profit de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Bayonne, dont le siège est 64113 Bayonne Cedex,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 11 mars 1999, où étaient présents : M. Favard, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Ollier, conseiller rapporteur, MM. Gougé, Thavaud, Mme Ramoff, M. Dupuis, conseillers, MM. Petit, Liffran, Mme Guilguet-Pauthe, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Ollier, conseiller, les observations de Me Luc-Thaler, avocat de la Société chimique basco-landaise, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu qu'à la suite d'un contrôle portant sur la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1992, l'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations dues par la Société chimique basco-landaise les primes d'intéressement versées en exécution d'un accord du 29 mars 1990 et la différence entre le SMIC et les rémunérations versées à deux VRP ; qu'elle a délivré à la société, le 22 novembre 1993, une mise en demeure de 41 861 francs, outre majorations de retard, puis, le 24 décembre 1993, une contrainte du même montant ; que l'arrêt attaqué a rejeté le recours de la société ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la Société chimique basco-landaise fait grief à la cour d'appel d'avoir admis la validité du redressement relatif aux rémunérations des représentants, alors, selon le moyen, d'une part, qu'un VRP exclusif, libre d'organiser son activité sans être soumis à un horaire déterminé, n'est pas fondé à prétendre au SMIC ; qu'en faisant droit, en l'espèce, à l'argumentation de l'URSSAF qui avait procédé à un redressement de cotisations en estimant que l'application de l'abattement forfaitaire de 30 % pour frais professionnels effectué sur les rémunérations d'un représentant avait pour effet de faire passer la base de cotisations en dessous du plancher, c'est-à-dire en dessous du SMIC, cependant qu'il était constant que le VRP en cause n'était soumis à aucun horaire de travail et était libre d'organiser son activité, la cour d'appel a violé les articles L. 751-1 et suivants du Code du travail ; alors, d'autre part, et en toute hypothèse, que, si l'employeur ne peut s'abriter derrière les seules dispositions du contrat, la cour d'appel ne pouvait pas davantage considérer que, du seul fait que le contrat stipulait que le VRP devait exercer de façon constante et exclusive sa profession, celui-ci devait être regardé comme engagé à plein temps ; qu'en s'abstenant de rechercher les conditions de travail effectives du VRP, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 5-1 de l'accord national interprofessionnel des VRP ;

Mais attendu que la cour d'appel, après avoir relevé que le contrat de travail des représentants stipulait que ceux-ci devaient exercer leur profession de façon constante et exclusive, donc à temps plein, a fait ressortir que l'employeur n'apportait pas la preuve de ses allégations selon lesquelles ces salariés ne travaillaient qu'à temps partiel ; qu'elle en a déduit à bon droit que le redressement portant sur la différence entre le SMIC et le salaire effectivement perçu par les représentants, compte tenu de l'abattement de 30 % représentant les frais professionnels, devait être réintégré dans l'assiette des cotisations ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles 2 et 4 de l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986, dans leur rédaction alors en vigueur ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, les accords d'intéressement doivent, pour ouvrir droit aux exonérations de cotisations sociales prévues par le second, instituer soit un intéressement des salariés lié aux résultats ou à l'accroissement de productivité, soit tout autre mode de rémunération collective contribuant à réaliser l'intéressement des salariés à l'entreprise ;

Attendu que, pour rejeter le recours de la société contre la décision de réintégrer les primes d'intéressement dans l'assiette des cotisations sociales, l'arrêt attaqué retient que la clause de l'accord d'intéressement du 29 mars 1990 prévoyant que la masse à partager serait calculée à partir de "la valeur ajoutée telle qu'elle est retenue pour déterminer l'écrêtement de la taxe professionnelle (c'est-à-dire la différence entre la marge brute et les charges externes)" ne permet pas le jeu de l'aléa, car elle ne peut aboutir à un intéressement nul en l'absence de profit pour l'entreprise ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'intéressement litigieux, variant en fonction de la valeur ajoutée, liée à l'activité de l'entreprise, présentait un caractère aléatoire prenant en compte le risque économique, et constituait un mode de rémunération collective contribuant à réaliser l'intéressement des salariés à l'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a statué sur la réintégration des primes d'intéressement, l'arrêt rendu le 3 avril 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.

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