Cour de Cassation, Chambre sociale, du 7 mai 1998, 95-41.585, Inédit
Cour de Cassation, Chambre sociale, du 7 mai 1998, 95-41.585, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 95-41.585
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du jeudi 07 mai 1998
Décision attaquée : Chambre sociale de la cour d'appel de Nîmes, 1995-02-08 1996-03-29, du 01 janvier 2999- Président
- Président : M. CARMET conseiller
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : I - Sur le pourvoi N° P 95-41.585 formé par Mme Michelle X..., demeurant ..., II - Sur le pourvoi N° M 95-41.648 formé par la société Derivot immobilier, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., III - Sur le pourvoi N° Q 96-42.809 formé par la société Derivot, en cassation des arrêts rendus entre eux par la chambre sociale de la cour d'appel de Nîmes en date des 8 février 1995 et 29 mars 1996 ; LA COUR, en l'audience publique du 4 mars 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Le Roux-Cocheril, Chagny, conseillers, Mme Lebée, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Carmet, conseiller, les observations de Me Guinard, avocat de la société Derivot immobilier, de Me Jacoupy, avocat de Mme X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu leur connexité, joint les pourvois n° P 95-41.585, 95-41.648 et Q 96-42.809 ; Attendu que Mlle X... a été engagée par la société Derivot Immobilier le 1er mars 1990 en qualité de négociateur de 2e échelon ; qu'elle a été licenciée le 10 juillet 1991 pour faute lourde, son employeur lui faisant grief d'avoir négocié à son insu la vente d'un immeuble appartenant aux consorts Z... au bénéfice de M. Y...; que par deux arrêts des 8 février 1995 et 29 mars 1996, la cour d'appel a statué sur les indemnités de rupture puis sur le rappel de salaires ; Sur le premier moyen du pourvoi de la salariée dirigé contre l'arrêt du 8 février 1995 : Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que le licenciement était justifié par une faute lourde, alors, selon le moyen, que d'une part, la cour d'appel a laissé sans réponse les conclusions dans lesquelles Mlle X... soutenait que les consorts Z... n'avaient pas donné à la société Derivot Immobilier mandat exclusif de vente et que l'acquéreur avait eu connaissance de l'affaire et visité l'immeuble avant son intervention, ce qui constitue la violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; alors, d'autre part, qu'en s'abstenant de rechercher si, ainsi qu'il l'était soutenu, l'acquéreur n'avait pas déjà été présenté au vendeur lorsque Mlle X... était intervenue, ce qui, en l'absence d'exclusivité conférée par le vendeur à la société Derivot Immobilier, ne permettait pas à cette dernière de prétendre à commission, et partant excluait qu'elle eût pu subir un préjudice du fait de la participation de Mlle X... à l'opération, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'intention de nuire de la salariée, n'a pas donné de base légale à sa décision ce qui constitue le manque de base légale au regard des articles L. 122-8, L. 122-14.4 et L. 223-11 du Code du travail ; Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties, a retenu que Mlle X..., en prêtant son concours à la transaction litigieuse à l'insu de son employeur quand bien même elle n'aurait perçu aucune rémunération occulte pour cette intervention a causé volontairement un préjudice à celui-ci : qu'elle a ainsi caractérisé l'intention de nuire; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le moyen unique du pourvoi de l'employeur dirigé conte le même arrêt : Attendu que l'employeur fait grief au même arrêt d'avoir dit que le salaire minimum conventionnel devait s'entendre hors frais professionnels, que les parties sont convenues de fixer les frais professionnels à 30 % du salaire versé et dit en conséquence que Mlle X... avait droit à des rappels de salaire et de congés payés, alors, selon le moyen, que toutes les sommes perçues par le salarié en contrepartie ou à l'occasion de son travail doivent être prises en considération pour apprécier s'il perçoit le salaire minimum institué par la convention collective, sauf exception expressément prévue par celle-ci; que pour dire que Mme X... avait droit à un rappel de salaire et de congés payés, la cour d'appel a énoncé qu'il résulte de la Convention collective nationale de l'immobilier, que le salaire minimum conventionnel s'entend hors frais professionnels; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé la Convention collective nationale de l'immobilier; et alors que, dans ses conclusions d'appel (du 16 novembre 1994), la SARL Derivot Immobilier faisait valoir que la déduction de 30 % de frais professionnels figurant sur les bulletins de salaire n'avait d'effet que pour le calcul des cotisations sociales et n'entrait pas en compte dans la détermination du salaire minimum conventionnel; qu'en décidant dès lors que la lecture des bulletins de salaire faisait apparaître que l'agence versait mensuellement une rémunération comprenant une somme forfaitaire égale à 30 % de ce salaire, représentant les frais professionnels, sans répondre à ces conclusions déterminantes pour l'issue du litige, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que la cour d'appel avait, d'une part, relevé que le contrat de travail de la salariée prévoyait que celle-ci serait rémunérée à la commission sans que son salaire puisse être inférieur au salaire prévu à la convention collective applicable; que, d'autre part, l'employeur versait à la salariée une rémunération comprenant une somme forfaitaire égale à 30 % de ce salaire minimum conventionnel garanti; qu'elle en a exactement déduit, répondant ainsi aux conclusions de l'employeur, que le remboursement des frais professionnels ne constituait pas un élément du salaire et que pour atteindre le salaire minimum conventionnel l'employeur aurait dû majorer le salaire versé du montant des frais professionnels qu'il avait fixé à 30 % dudit salaire, dès lors que les commissions versées n'excédaient pas ce salaire minimum; que le moyen n'est pas fondé ; Et sur le moyen unique du pourvoi de l'employeur dirigé contre l'arrêt du 29 mars 1996 : Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer des rappels de salaire avec les intérêts au taux légal à compter de la demande, alors, selon le moyen, que la cassation d'un jugement entraîne l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire; que la cassation à intervenir de l'arrêt du 8 février 1995 par lequel la cour d'appel de Nîmes a dit que le salaire minimum conventionnel devait s'entendre hors frais professionnel entraînera par voie de conséquence, l'annulation de l'arrêt du 29 mars 1996 condamnant l'employeur au paiement de rappels de salaire calculés sur cette base ; Mais attendu que le pourvoi de l'employeur contre cet arrêt ayant été rejeté, le présent moyen est sans objet ; Mais sur le second moyen du pourvoi de la salariée dirigé contre l'arrêt du 8 février 1995 : Vu l'article 1147 du Code civil ; Attendu qu'après avoir énoncé que le comportement déloyal de la salariée avait privé la société d'une chance de percevoir le montant de la commission qui lui était due sur la transaction immobilière, la cour d'appel a condamné la salariée à lui payer le montant intégral de cette commission ; qu'en statuant ainsi alors qu'il doit être tenu compte dans la réparation du degré de probabilité de la chance ainsi perdue, ce dont il résulte que la somme allouée ne peut être égale à la totalité du gain espéré, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement dans celles de ces dispositions condamnant la salariée à payer à l'employeur la somme de 37 500 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 8 février 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ; Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.