Cour de Cassation, Chambre sociale, du 14 mai 1997, 95-42.245, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société France véhicules industriels, société anonyme, dont le siège est ..., La Part-Dieu, 69431 Lyon Cedex 03, en cassation d'un arrêt rendu le 28 mars 1995 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14e chambre sociale), au profit de M. Majid X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 mars 1997, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Carmet, conseiller rapporteur, M. Chagny, conseiller, Mmes Pams-Tatu, Lebée, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Carmet, conseiller, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société France véhicules industriels, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu que M. X... était salarié de la société France véhicules industriels depuis 1959; que le 9 septembre 1991, alors qu'il était en détention provisoire, il a reçu une lettre de son employeur prenant acte de la rupture du contrat de travail motif pris de l'impossibilité d'exécution de sa prestation de travail ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 mars 1995) de l'avoir condamné à payer au salarié des indemnités de rupture et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, qu'en cas d'incarcération du salarié, l'employeur est en droit de prendre acte sans délai de la rupture du contrat de travail pour cause de force majeure, dès lors qu'à la date de sa décision les faits portés à sa connaissance, par le salarié ou par tout autre moyen, notamment ceux relatifs aux chefs de prévention, font apparaître comme nécessairement longue la détention de l'intéressé; qu'ainsi en se déterminant comme elle l'a fait, après avoir constaté qu'au moment de la prise d'acte de la rupture l'employeur était informé de l'inculpation du salarié pour proxénétisme hôtelier, ce qui laissait supposer une longue détention, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé ensemble les articles L. 122-14. L. 122-6, L. 122-9, L. 122-14.3, L. 122-14.4 et L. 223-14 du Code du travail; alors, encore, qu'en s'abstenant de préciser comment, par quels moyens et auprès de qui l'employeur aurait pu "s'assurer" de la réalité des chefs de prévention à l'origine de la détention du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés; alors, enfin, qu'en rendant impossible, pour une durée prévisiblement longue, l'exécution des obligations découlant du contrat de travail, l'incarcération du salarié constitue en elle-même et à elle seule une cause réelle et sérieuse de licenciement;

qu'ainsi en statuant comme elle l'a fait, au motif qu'il n'aurait été fait état d'aucun préjudice subi par l'entreprise, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14.3 et L. 122-14.4 du Code du travail ;

Mais attendu que la mise en détention provisoire du salarié ne constitue pas, en soi, un cas de force majeure ;

Et attendu que l'employeur n'ayant pas invoqué d'autre motif de rupture que la force majeure, la cour d'appel n'avait pas à rechercher s'il existait une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société France véhicules industriels. aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société France véhicules industriels ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.

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