Cour de Cassation, Chambre sociale, du 22 octobre 1996, 95-40.266, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Jean-Claude Y..., demeurant Doornzele X... 75 9940 Evergem (Belgique),

en cassation d'un arrêt rendu le 17 novembre 1994 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre sociale), au profit de la société Techma export, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 2 juillet 1996, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Desjardins, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Ferrieu, Monboisse, Mme Ridé, MM. Merlin, Finance, conseillers, MM. Frouin, Boinot, Mmes Bourgeot, Trassoudaine-Verger, MM. Richard de la Tour, Soury, conseillers référendaires, M. Martin, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre;

Sur le rapport de M. Desjardins, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. Y..., les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé à compter du 24 février 1992, en qualité d'agent technique tuyauteur-soudeur par le bureau de Creil de la société Techma export, pour effectuer des travaux en déplacement à partir de son domicile, situé en Belgique; qu'à partir du 9 octobre 1992, la société a cessé de lui confier des missions et de lui verser sa rémunération; qu'après avoir reçu son dernier bulletin de paie, établi le 15 novembre 1992, et protesté, par lettre du 15 décembre 1992, contre la rupture des relations contractuelles, il a saisi la juridiction prud'homale;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 122-3-1 du Code du travail ;

Attendu, selon ce texte, que le contrat de travail à durée déterminée doit être établi par écrit; qu'à défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée;

Attendu que, pour débouter M. Y... de ses demandes tendant au paiement d'un rappel de salaire pour la période du 9 octobre au 15 décembre 1992, outre les accessoires, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de préavis et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt énonce que l'intéressé avait été engagé par un contrat à durée déterminée du 25 février 1992 au 9 octobre 1992, ainsi qu'il résultait des lettres adressées par lui au chef du personnel du bureau de Creil; que, s'il soutenait ne pas avoir signé le contrat établi le 25 février 1992, il était constant qu'il avait connaissance des conditions d'exécution et de rémunération, parce que cela résultait des lettres qu'il avait adressées pour obtenir la régularisation du règlement de jours calendaires ;

que, par un courrier en date du 13 septembre 1992, une copie du contrat lui avait été envoyée; qu'il produisait une enveloppe tendant à démontrer que ce courrier n'avait été expédié que le 14 octobre 1992, mais que, s'il estimait que ce contrat n'était pas valable, il lui appartenait de protester immédiatement, ou, au moins, à partir de la réception de son bulletin de paie établi le 15 novembre 1992; qu'en fait, il n'avait protesté que le 15 décembre 1992 contre la rupture, intervenue le 9 octobre 1992;

Qu'en se déterminant par des motifs inopérants, tirés de faits postérieurs à la conclusion du contrat, et même à sa rupture, alors que, faute de comporter la signature de l'intéressé, le contrat à durée déterminée invoqué par l'employeur ne pouvait être considéré comme ayant été établi par écrit et qu'il était, par suite, réputé conclu pour une durée indéterminée, la cour d'appel a violé le texte susvisé;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 1315 du Code civil ;

Attendu que, pour rejeter les demandes de M. Y... tendant au paiement d'indemnités de déplacement, de jours fériés et d'indemnités de congés payés, l'arrêt, confirmatif sur ce point, s'est borné, par motifs adoptés, à énoncer qu'il avait perçu des jours fériés et des frais de déplacement et qu'il n'apportait pas d'éléments comptables permettant de dire qu'il manquait bien les règlements réclamés;

Qu'en statuant ainsi, alors que la charge de la preuve incombait à l'employeur, qui prétendait s'être acquitté de son obligation, la cour d'appel, qui n'a, en outre, fourni aucune explication sur le rejet de la demande d'indemnités de congés payés pour la période antérieure à la rupture, a violé le texte susvisé;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 novembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai;

Condamne la société Techma export aux dépens ;

Dit que sur les diligences de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre mil neuf cent quatre-vingt-seize.

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