Cour de cassation, Chambre civile 3, du 27 mars 1991, 89-16.443, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Daniel, Ernest, Auguste A...,

2°/ Mme C..., Marguerite, Aimée Derache, épouse A...,

demeurant ensemble à Persan (Val-d'Oise), ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 20 mars 1989 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), au profit de :

1°/ M. Marcel B..., demeurant à Paris (18e), ...,

2°/ M. René Z...,

3°/ Mme Yvonne X..., épouse Z...,

demeurant ensemble à Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise), avenue Wilson, Les Quatre Vents,

défendeurs à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 27 février 1991, où étaient présents :

M. Senselme, président, Mme Giannotti, rapporteur, MM. Paulot, Chevreau, Cathala, Valdès, Douvreleur, Capoulade, Beauvois, Deville, Darbon, Mlle Fossereau, conseillers, Mme Y..., M. Chapron, conseillers référendaires, M. Mourier, avocat général, Mme Prax, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme le conseiller Giannotti, les observations de la SCP Jean et Didier Le Prado, avocat des époux A..., de la SCP Hubert et Bruno Le Griel, avocat de M. B..., les conclusions de M. Mourier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 20 mars 1989), que les époux Z..., après avoir procédé à la division de leur terrain en deux parcelles cadastrées n°s 101 et 102, ont vendu, le 20 octobre 1978, la parcelle n° 101, disposant d'un accès à la voie publique, aux époux A..., et le 18 novembre 1985, l'autre parcelle, en état d'enclave, à M. B... :

Attendu que les époux A... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur demande tendant à voir prononcer la nullité de la vente consentie par les époux Z... à M. B..., alors, selon le moyen, "d'une part, que l'arrêt attaqué a, par erreur, considéré comme irrecevable la demande des époux A..., les époux A... et M. B... n'étant pas entre eux ayants cause particuliers ; qu'en effet, puisque M. A... a visé le certificat d'urbanisme faisant droit à la demande des époux Z... qui sollicitaient l'autorisation de vendre la parcelle n° 1 pour la construction d'un

pavillon et de vendre la parcelle n° 2 à M. D..., propriétaire voisin attenant par le fonds de la parcelle, que ledit certificat d'urbanisme a expressément autorisé la réalisation de l'opération exposée dans la demande et a été annexé à l'acte de vente notarié intervenu entre les époux Z... et les époux A..., les époux A... avaient intérêt et étaient donc recevables à demander que soit déclarée nulle la vente de la parcelle n° 2 consentie par les époux Z... à M. B... et non M. D..., et cela sans qu'il y ait lieu de se demander si les époux A... étaient ayants cause particuliers de M. B... ou vice versa ; d'autre part, que l'arrêt a, par erreur, considéré comme mal fondée la demande des époux A..., puisque, en premier lieu, aux termes des dispositions d'ordre public de l'article R. 315-54 du Code de l'urbanisme, "les divisions de terrains... qui ne constituent pas des lotissements... doivent... être précédés de la délivrance d'un certificat d'urbanisme portant sur chacun des terrains devant provenir de la division", que la délivrance d'un certificat d'urbanisme conditionne donc à la fois la division d'un fonds et la vente de chacun des terrains devant provenir de la division, que la validité d'une vente de la parcelle 2 par les époux Z... à M. B... était donc subordonnée à la délivrance d'un certificat d'urbanisme autorisant cette vente à M. B..., et puisque, en second lieu, en énonçant que l'Administration n'avait pas exigé le rattachement de la parcelle n° 2 au fonds Neutre, l'arrêt a dénaturé les termes clairs et précis de la demande de certificat d'urbanisme formulée par les époux Z... et ceux du certificat d'urbanisme lui-même autorisant "la réalisation de l'opération exposée dans la demande", les époux Z... ayant précisément, dans leur demande, sollicité la "vente de la parcelle 2 à M. D..., propriétaire voisin attenant par le fond de la parcelle" ; Mais attendu que relevant que les époux A... agissaient en annulation d'une vente à l'égard de laquelle ils se trouvaient dans une situation de tiers, la cour d'appel a, sans dénaturation, légalement justifié sa décision de ce chef en retenant que l'Administration s'était bornée à dire réalisable l'opération soumise à son agrément, laquelle consistait, après division de la parcelle en deux lots, à vendre le lot numéro 2 à un propriétaire voisin, et que la circonstance que le projet de vente initial du lot numéro 2 ait échoué n'impliquait pas qu'il ne puisse plus être vendu à une autre personne ; Sur le second moyen :

Attendu que les époux A... font grief à l'arrêt d'avoir dit qu'en application de l'article 684, alinéa 1er du Code civil, M. B..., propriétaire de la parcelle cadastrée n° 102, pourra bénéficier, sur la parcelle cadastrée n° 101, appartenant aux époux A..., d'un passage de 2,50 mètres afin de lui assurer un accès à la voie publique, alors, selon le moyen, "qu'en cas d'état d'enclave consécutif à la division d'un fonds, l'enclavé, qui a un droit légal à obtenir le passage sur les fonds ayant fait l'objet de la division, peut y renoncer tacitement ou expressément, que l'acquéreur d'un bien immobilier ne peut avoir plus de droits que son auteur et qu'en

l'espèce, ayant constaté que les époux Z..., demeurés propriétaires après division du fonds de la parcelle enclavée, avaient renoncé à exercer leur droit de passage sur la parcelle vendue aux époux A..., la cour d'appel ne pouvait refuser auxdits époux A... d'invoquer cette renonciation à l'encontre de l'acquéreur de la parcelle enclavée, M. B..., et qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 684, alinéa 1er, du Code civil" ; Mais attendu que la servitude pour cause d'enclave consécutive à la division d'un fonds ayant un fondement légal, la cour d'appel, qui a retenu que les époux A... ne sauraient invoquer, pour refuser à M. B... l'exercice sur leur fonds de la servitude de passage, une renonciation de leur auteur commun au bénéfice de cette servitude, a légalement justifié sa décision de ce chef ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

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