Cour de cassation, Chambre civile 3, du 26 mai 1988, 87-11.062, Inédit
Cour de cassation, Chambre civile 3, du 26 mai 1988, 87-11.062, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 87-11.062
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 26 mai 1988
- Président
- Président : M. MONEGIER DU SORBIER,
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le pourvoi formé par : 1°/ Monsieur Dominique A..., 2°/ Monsieur Jacques E..., demeurant tous deux ..., 3°/ Monsieur Jacques B..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 17 décembre 1986 par la cour d'appel de Paris (23ème chambre, section B), au profit de : 1°/ La société anonyme GAN-VIE, dont le siège est ... (9ème), 2°/ La société anonyme GAN-INCENDIE-ACCIDENTS, compagnie française d'assurances et de réassurances incendie-accident et risques divers, dont le siège est ... (9ème), 3°/ Monsieur Bernard C..., pris en qualité de syndic au règlement judiciaire de la société ETUPRO, demeurant ... (3ème), 4°/ La société ETUPRO, Société d'études de prospections, dont le siège est ... (9ème), 5°/ La société anonyme GROUPE DROUOT, dont le siège est ... (9ème),
défendeurs à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 26 avril 1988, où étaient présents :
M. Monégier du Sorbier, président, M. Paulot, rapporteur, MM. Z..., D..., Y..., Didier, Cossec, Senselme, Cathala, Douvreleur, Capoulade, Beauvois, Deville, Darbon, conseillers, M. X..., Mme Cobert, conseillers référendaires, M. Sodini, avocat général, Mlle Bodey, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Paulot, les observations de Me Boulloche, avocat de MM. A..., E... et B..., de Me Baraduc-Benabent, avocat des sociétés anonymes Gan-vie et Gan-incendie-accidents, de Me Barbey, avocat de M. C..., ès qualités, de la SCP Rouvière, Lepitre et Boutet, avocat de la société anonyme Groupe Drouot, les conclusions de M. Sodini, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 décembre 1986), que la société Bijoux Fix a chargé MM. A..., E... et B..., architectes, de la construction d'un bâtiment à usage d'habitation sur un terrain dont elle était propriétaire dans le secteur sauvegardé du Marais ; qu'un permis de construire a été délivré le 24 mars 1977 mais que, statuant à la demande d'un propriétaire voisin, la SCI du ..., la cour d'appel de Paris, par arrêt du 12 mai 1981, devenu irrévocable,
a décidé que le projet devait être révisé pour le mettre en conformité avec les articles 13 et 19 du règlement d'urbanisme de la ville de Paris ; que les compagnies d'assurances Gan-vie et Gan-incendie-accidents (sociétés Gan), qui avaient acquis le terrain de la société Bijoux Fix en vue de poursuivre le projet initial, ont alors assigné les architectes en réparation de leur préjudice ; Attendu que MM. A..., E... et B... font grief à l'arrêt d'avoir retenu leur responsabilité, alors, selon le moyen, "qu'en ne recherchant pas si les architectes avaient un lien contractuel avec les sociétés Gan lors de l'établissement du projet de construction ayant fait l'objet d'un permis de construire délivré le 24 mars 1977 et modifié ultérieurement aux fins de mise en conformité avec le règlement d'urbanisme de la ville de Paris, la cour d'appel n'a pas donné de base légale, au regard de l'article 1165 du Code civil, à sa décision, retenant leur responsabilité contractuelle à leur égard" ; Mais attendu que les architectes n'ayant pas soutenu dans leurs conclusions qu'ils n'avaient pas de lien contractuel avec les sociétés Gan, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Sur le deuxième moyen : Attendu que MM. A..., E... et B... font grief à l'arrêt d'avoir décidé que leur projet n'était pas conforme au règlement d'urbanisme, alors, selon le moyen, que, "d'une part, la cour d'appel, qui ne pouvait opposer aux architectes, qui n'y avaient pas été parties, les motifs du jugement du 12 juillet 1979 et de l'arrêt du 12 mai 1981, a statué par pure affirmation en énonçant que lesdits motifs prennent appui sur une exacte appréciation de la situation des lieux et des conséquences à en tirer en matière d'urbanisme ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a violé les articles 455 du nouveau Code de procédure civile et 1351 du Code civil ; alors que, d'autre part, le règlement d'urbanisme de la ville de Paris du 6 février 1967 ayant, dans son article 13, défini
les cours d'habitation comme étant celles sur lesquelles "peuvent s'éclairer et s'aérer des locaux de séjour, c'est-à-dire des locaux dont l'usage normal implique un séjour continu de plusieurs heures, tels que pièces d'habitation et de réception, cuisines, bureaux, ateliers et toutes pièces de travail", la cour d'appel, qui se borne à affirmer que la cour litigieuse serait une cour d'habitation, sans rechercher si les pièces de l'immeuble ayant des ouvertures sur cette cour avaient le caractère de "locaux de séjour", n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ce texte, et alors qu'enfin, l'article 19 du règlement d'urbanisme de la ville de Paris du 6 février 1967 ne concerne que les gabarits des cours d'habitation, ce qui renvoie à la définition de l'article 13, l'arrêt attaqué n'a pas davantage donné de base légale à sa décision au regard de ce texte" ; Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient, sans violer l'article 1351 du Code civil, que le règlement d'urbanisme de la ville de Paris du 6 février 1967 demeurait en vigueur du fait que le document général devant le remplacer n'était pas intervenu et que le plan permanent de sauvegarde et de mise en valeur du Marais n'était pas exécutoire, que l'espace libre entre les immeubles, du fait qu'il procurait éclairage et aération de ceux-ci, était une cour d'habitation et que, dès lors, il y avait bien lieu à application des articles 13 et 19 du règlement d'urbanisme ; Attendu, d'autre part, que l'arrêt, qui retient que la distinction, proposée par l'expert, entre les jours, selon qu'ils étaient secondaires ou non n'emportait pas de conséquences, n'avait pas à procéder à une recherche que sa décision rendait inopérante ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Sur le troisième moyen : Attendu que MM. A..., E... et B... font grief à l'arrêt d'avoir retenu leur responsabilité, alors, selon le moyen, "qu'en ne s'expliquant pas sur la faute qui aurait été commise par les architectes en établissant un projet de construction ayant donné lieu à un permis de
construire du 24 mars 1977, dont la régularité n'avait pas été contestée devant la juridiction administrative et auquel ont renoncé les acquéreurs du terrain, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1142 et suivants du Code civil" ; Mais attendu que la cour d'appel, saisie de la réparation du préjudice résultant pour les acquéreurs de l'obligation où ils ont été mis de renoncer à leur projet, a légalement justifié sa décision en retenant que le projet de construction, dont MM. A..., E... et B... avaient été les maîtres d'oeuvre, n'avait pas pris en compte le problème du respect du droit des tiers ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;