Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 5 juillet 1976, 75-93.347, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre criminelle
- N° de pourvoi : 75-93.347
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation
- Président
- M. Combaldieu
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
CASSATION SUR LE POURVOI FORME PAR LA DIRECTION GENERALE DES IMPOTS, CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX, CHAMBRE DES APPELS CORRECTIONNELS, DU 18 DECEMBRE 1975 QUI, DANS LES POURSUITES EXERCEES CONTRE X... (ROGER) DES CHEFS DE FRAUDES FISCALES ET DE TENUE IRREGULIERE DE COMPTABILITE, A, AVANT-DIRE DROIT, SURSIS A STATUER SUR LESDITES POURSUITES JUSQU'A CE QUE LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES, APPELEES A SE PRONONCER SUR LA REGULARITE ET LE BIEN-FONDE DES REDRESSEMENTS OPERES PAR L'ADMINISTRATION, AIENT RENDU DES DECISIONS DEFINITIVES.
LA COUR, VU LA REQUETE EN DATE DU 19 DECEMBRE 1975 PRESENTEE PAR M LE DIRECTEUR GENERAL DES IMPOTS ;
VU L'ORDONNANCE DE M LE PRESIDENT DE LA CHAMBRE CRIMINELLE DU 7 JANVIER 1976 DECLARANT LE POURVOI IMMEDIATEMENT RECEVABLE ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 1741 DU CODE GENERAL DES IMPOTS, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE ;
" EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE, SAISI D'UNE POURSUITE CONTRE UN REDEVABLE PREVENU DE FRAUDE FISCALE, A DECIDE DE SURSEOIR A STATUER JUSQU'A CE QUE LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES, SAISIES DE CONTESTATIONS SUR LE BIEN-FONDE DE REDRESSEMENTS OPERES PAR L'ADMINISTRATION, AIENT RENDU DES DECISIONS DEFINITIVES, PAR LES MOTIFS QUE CE SURSIS ETAIT CONFORME A LA LOI ET OPPORTUN ALORS QUE LE JUGE REPRESSIF, SAISI D'INFRACTIONS PREVUES ET REPRIMEES PAR L'ARTICLE 1741 SUSVISE N'A PAS A SURSEOIR A STATUER JUSQU'A CE QUE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE AIT DECIDE SUR L'ASSIETTE ET L'ETENDUE DES IMPOSITIONS CONTESTEES, PUISQUE SON ROLE EST DE RECHERCHER SI LE REDEVABLE A ECHAPPE, OU TENTE D'ECHAPPER, A L'IMPOT PAR DES MANOEUVRES REPREHENSIBLES, ET POUR DES SOMMES EXCEDANT LA TOLERANCE LEGALE " ;
VU LEDIT ARTICLE, ENSEMBLE L'ARTICLE 520 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
ATTENDU QUE, D'UNE PART, LES POURSUITES PENALES INSTAUREES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 1741 DU CODE GENERAL DES IMPOTS POUR SOUSTRACTION FRAUDULEUSE A L'ETABLISSEMENT ET AU PAIEMENT DE L'IMPOT ET LA PROCEDURE ADMINISTRATIVE TENDANT A LA FIXATION DE L'ASSIETTE ET DE L'ETENDUE DES IMPOSITIONS SONT, PAR LEUR NATURE ET PAR LEUR OBJET, DIFFERENTES ET INDEPENDANTES L'UNE DE L'AUTRE ;
QU'IL S'ENSUIT QUE LA DECISION DU JUGE DE L'IMPOT APPELE A STATUER SUR LA PROCEDURE ADMINISTRATIVE N'AYANT PAS L'AUTORITE DE LA CHOSE JUGEE A L'EGARD DU JUGE REPRESSIF, CE DERNIER N'A PAS A SURSEOIR A STATUER SUR LA POURSUITE PENALE JUSQU'A CE QUE CETTE DECISION SOIT INTERVENUE ;
ATTENDU QUE, D'AUTRE PART, SI, AUX TERMES DES ARTICLES 509 ET 505 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, LA FACULTE D'APPELER N'APPARTIENT A LA PARTIE CIVILE QUE POUR SES INTERETS CIVILS SEULEMENT, IL N'EN EST AINSI QU'A L'EGARD DES DECISIONS PAR LESQUELLES LES PREMIERS JUGES ONT STATUE AU FOND ;
QUE, LORSQUE SUR L'APPEL DE LA PARTIE CIVILE SEULE, LA COUR D'APPEL DOIT ANNULER UN JUGEMENT QUI A ORDONNE, A TORT, LE SURSIS A STATUER ET A RENVOYE L'AFFAIRE A UNE DATE INDETERMINEE, ELLE SE TROUVE INVESTIE, EN VERTU DE L'EVOCATION QUI S'IMPOSE A ELLE, DU POUVOIR DE STATUER, COMME LES PREMIERS JUGES, MEME EN L'ABSENCE D'APPEL DU MINISTERE PUBLIC ET DU PREVENU, TANT SUR L'ACTION PUBLIQUE QUE SUR L'ACTION CIVILE ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE, SAISI DES POURSUITES EXERCEES CONTRE X... POUR TENUE IRREGULIERE DE COMPTABILITE ET POUR SOUSTRACTION FRAUDULEUSE A L'ETABLISSEMENT ET AU PAIEMENT DE L'IMPOT PAR OMISSIONS VOLONTAIRES DE DECLARATIONS ET DISSIMULATIONS VOLONTAIRES DE SOMMES SUJETTES A LA TAXE A LA VALEUR AJOUTEE, A L'IMPOT SUR LES SOCIETES, A LA TAXE COMPLEMENTAIRES ET A L'IMPOT SUR LE REVENU, LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL A, AVANT-DIRE DROIT, SURSIS A STATUER SUR CES POURSUITES JUSQU'A CE QUE LE CONSEIL D'ETAT AIT RENDU SON ARRET SUR L'APPEL INTERJETE PAR L'ADMINISTRATION D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE BORDEAUX EN DATE DU 13 DECEMBRE 1974 ET JUSQU'A CE QUE CE MEME TRIBUNAL ADMINISTRATIF AIT STATUE AU FOND SUR LES CONTESTATIONS RELATIVES AUX IMPOTS DUS PAR LES SOCIETES GEREES PAR LE PREVENU AU TITRE DES EXERCICES 1969, 1970 ET 1971 ;
ATTENDU QUE SUR APPEL DE LA DIRECTION GENERALE DES IMPOTS, PARTIE CIVILE, LA COUR D'APPEL, TOUT EN RAPPELANT QUE LES PREMIERS JUGES N'ETAIENT PAS LEGALEMENT TENUS D'ATTENDRE QUE CES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES SE SOIENT PREALABLEMENT PRONONCEES, ENONCE QU'ILS AVAIENT, EN REVANCHE, LA POSSIBILITE DE SURSEOIR A STATUER AFIN D'ETRE EN MESURE DE PUISER DANS LES PROCEDURES ADMINISTRATIVES ENGAGEES DES INDICES PROPRES A FONDER LEUR INTIME CONVICTION ;
QU'IL Y A LIEU, EN CONSEQUENCE, DE CONFIRMER PUREMENT ET SIMPLEMENT LE JUGEMENT ENTREPRIS ;
QUE, D'AILLEURS, S'IL N'EN ALLAIT PAS AINSI, LA COUR NE POURRAIT, ELLE-MEME, APRES AVOIR REFORME ET EVOQUE, QUE PRONONCER AUSSI UN SURSIS A STATUER SUR L'ACTION DE LA PARTIE CIVILE PUISQUE LADITE ACTION EST SUBORDONNEE A L'EXERCICE DE L'ACTION PUBLIQUE, LAQUELLE A FAIT L'OBJET D'UN SURSIS A STATUER DEVENU DEFINITIF EN L'ABSENCE D'APPEL DU PREVENU ET DU MINISTERE PUBLIC ;
MAIS ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, LA COUR D'APPEL A MECONNU LES PRINCIPES CI-DESSUS RAPPELES ;
QU'EN EFFET, LE MOTIF PRIS PAR LES JUGES DU FOND DE L'OPPORTUNITE DE RECUEILLIR EN L'ESPECE DE NOUVEAUX ELEMENTS D'INFORMATION NE SAURAIT JUSTIFIER EN TOUT ETAT DE CAUSE LE SURSIS A STATUER JUSQU'A DECISIONS DEFINITIVES DES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES SUR L'ASSIETTE ET L'ETENDUE DES IMPOSITIONS ;
QU'EN ORDONNANT CEPENDANT UN TEL SURSIS, LA COUR D'APPEL A, EN REALITE, ADMIS A TORT UNE EXCEPTION PREJUDICIELLE QUI, N'ETANT PAS DE NATURE A RETIRER AUX FAITS SERVANT DE BASE A LA POURSUITE PENALE LE CARACTERE D'UNE INFRACTION, N'ETAIT PAS RECEVABLE SELON LES TERMES MEMES DE L'ARTICLE 386, ALINEA 2, DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
QU'IL S'ENSUIT QUE, DES LORS, LA COUR D'APPEL ETAIT TENUE, EN VERTU DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 520 DU MEME CODE DONT LES TERMES NE SONT PAS LIMITATIFS, D'ANNULER LE JUGEMENT QUI AVAIT MAL STATUE SUR CET INCIDENT ET, EVOQUANT, DE STATUER FUT-CE EN ORDONNANT LE SUPPLEMENT D'INFORMATION DONT IL LUI APPARTENAIT SOUVERAINEMENT D'APPRECIER L'UTILITE AU REGARD DES SEULS ELEMENTS CONSTITUTIFS DES INFRACTIONS POURSUIVIES TANT SUR L'ACTION PUBLIQUE QUE SUR L'ACTION CIVILE ;
QUE L'ARRET ENCOURT LA CASSATION DE CE CHEF ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET PRECITE DE LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX DU 18 DECEMBRE 1975 ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE TOULOUSE.