Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 12 mai 1976, 75-91.792, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

CASSATION SUR LE POURVOI DE X... (HENRI), CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE POITIERS (CHAMBRE DES APPELS CORRECTIONNELS) EN DATE DU 13 JUIN 1975 QUI, POUR FRAUDES FISCALES ET TENUE IRREGULIERE DE COMPTABILITE, L'A CONDAMNE A 5 000 FRANCS D'AMENDE, A ORDONNE LA PUBLICATION ET L'AFFICHAGE DE LA DECISION ET A FIXE AU MAXIMUM LA DUREE DE LA CONTRAINTE PAR CORPS POUR LE RECOUVREMENT DES IMPOTS DIRECTS ELUDES, DES MAJORATIONS DE DROITS ET DES PENALITES FISCALES Y AFFERENTES.

LA COUR, VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;

SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 459, 485, 512, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 1741, 1743 DU CODE GENERAL DES IMPOTS, DE L'ARTICLE 102 DU DECRET DU 20 JUILLET 1972, ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, NON-REPONSE A CONCLUSIONS, CONTRADICTION ET DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE, STATUANT SUR LES POURSUITES ENGAGEES CONTRE X..., EXPLOITANT DE MATERIEL NAUTIQUE, POUR S'ETRE SOUSTRAIT AU PAIEMENT DE LA TVA, DE L'IMPOT SUR LE REVENU ET DE LA TAXE COMPLEMENTAIRE, A INFIRME LE JUGEMENT DE RELAXE PRIS DE CE QUE : " 1° POUR LES EXERCICES DE 1969 ET 1970, LE VERIFICATEUR, POUR ETABLIR LES PRETENDUES DISSIMULATIONS DE CES DEUX EXERCICES, S'ETAIT REFERE A TORT AUX RESULTATS DE L'EXERCICE 1971 LIMITE A TROIS TRIMESTRES ET AVAIT INCLUS A TORT DANS LE VOLUME DES ACHATS LES PRODUITS DU GARDIENNAGE ;

" 2° POUR L'EXERCICE 1941 N'EXISTAIT AUCUNE DISSIMULATION ;

" AUX MOTIFS POUR 1969 ET 1970, QUE LA METHODE DE CALCUL RETENUE PAR L'ADMINISTRATION ETAIT UNE METHODE VALABLE ET QUE LE CHIFFRE DES VENTES NE COMPRENAIT PAS LES RECETTES DE GARDIENNAGE ;

POUR 1971, QUE LE JUGEMENT N'A TENU AUCUN COMPTE DE LA DISSIMULATION DONT LE CALCUL N'EST PAS CONTESTE ET QU'ENFIN LE FAIT D'AVOIR ACCEPTE LES RELEVEMENTS PROPOSES CONSTITUAIT ENCORE UNE PREUVE DE L'INFRACTION DE DISSIMULATION ;

" ALORS QUE, DANS DES CONCLUSIONS DEMANDANT LA CONFIRMATION DU JUGEMENT ET DANS UNE NOTE EN DELIBERE SOUMISE A LA DISCUSSION DES PARTIES-CONCLUSIONS ET NOTE AUXQUELLES IL N'A ETE REPONDU QUE SOUS FORME D'UNE SIMPLE DENEGATION NON ASSORTIE DE MOTIFS X... SOUTENAIT : " 1° POUR 1969 ET 1970, QUE LE VERIFICATEUR AVAIT COMPARE DES EXERCICES NON COMPARABLES EN APPLIQUANT LE POURCENTAGE DETERMINE DANS UNE PROFESSION SAISONNIERE SUR UN EXERCICE DE TROIS TRIMESTRES SEULEMENT A DES EXERCICES ANTERIEURS COMPRENANT LES QUATRE TRIMESTRES CIVILS ET D'AUTRE PART QUE LE PRODUIT DU GARDIENNAGE NE POUVAIT ENTRER DANS LE CALCUL DU BENEFICE BRUT PARCE QUE COMPLETEMENT INDEPENDANT DU VOLUME DES ACHATS ET EN AUGMENTATION SI CONSTANTE QUE DE NOUVEAUX HANGARS AVAIENT DU ETRE MIS EN SERVICE EN 1971 ;

" 2° POUR 1971, QU'IL NE CONTESTAIT PAS LE CALCUL DE LA PRETENDUE DISSIMULATION MAIS SON EXISTENCE MEME ET LA QUALIFICATION DONNEE A CETTE PREVENTION DE DISSIMULATION ET D'INTENTION FRAUDULEUSE, LE RETARD DANS LE DEPOT DE LA DECLARATION ETANT, NON SON FAIT, MAIS CELUI DE SON COMPTABLE ;

" QUE SI DES REDRESSEMENTS AVAIENT ETE ACCEPTES, LADITE ACCEPTATION NE POUVAIT CONSTITUER LA PREUVE DES MINORATIONS DE RECETTES CAR ELLE AVAIT ETE DONNEE DANS LA CROYANCE DE L'EXACTITUDE DES CALCULS OPERES PAR LE VERIFICATEUR A PARTIR DES DONNEES REMISES PAR LE COMPTABLE ET QU'EN TOUTE HYPOTHESE LA PREUVE DE LA CULPABILITE NE PEUT PAS RESULTER D'UN PAIEMENT CONSENTI ANTERIEUREMENT AUX POURSUITES " ;

VU LESDITS ARTICLES ;

ATTENDU QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT CONTENIR LES MOTIFS PROPRES A JUSTIFIER LA DECISION ;

QUE L'INSUFFISANCE DES MOTIFS EQUIVAUT A LEUR ABSENCE ;

ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE X..., QUI EXPLOITE A ROYAN UN FONDS DE COMMERCE DE VENTE D'APPAREILS NAUTIQUES, DE GARDIENNAGE DE BATEAUX, D'ENTRETIEN ET DE REPARATION DE MOTEURS, A FAIT L'OBJET, EN JUIN 1972, D'UNE VERIFICATION DE SA COMPTABILITE POUR LA PERIODE COMPRISE ENTRE LE 1ER JANVIER 1968 ET LE 30 SEPTEMBRE 1971 ;

QUE CETTE VERIFICATION A REVELE L'ABSENCE DE LIVRE-JOURNAL, DE LIVRE D'INVENTAIRES, DE JOURNAUX AUXILIAIRES DE VENTES ET DE CAISSE ET A PERMIS DE CONSTATER QU'A LA DATE DU 20 JUIN 1972, X... N'AVAIT PAS ENCORE DEPOSE LES DECLARATIONS DE SES REVENUS ET DE SES BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX POUR L'EXERCICE CLOS LE 30 SEPTEMBRE 1971 ;

ATTENDU QUE LES JUGES ENONCENT ENSUITE QUE LA COMPTABILITE PRESENTEE AYANT ETE REJETEE COMME NON PROBANTE, LE VERIFICATEUR FISCAL A RECONSTITUE " LES BENEFICES IMPOSABLES " POUR LES EXERCICES 1969 ET 1970 ET A TAXE D'OFFICE " LES RESULTATS " DE L'EXERCICE CLOS LE 30 SEPTEMBRE 1971 ;

QUE CES OPERATIONS ONT FAIT RESSORTIR, POUR LES TROIS EXERCICES CONSIDERES, UNE DISSIMULATION DE " BENEFICES IMPOSABLES " ATTEIGNANT AU TOTAL 267 578 FRANCS ;

QU'IL S'EN DEDUIT UNE DISSIMULATION " DE CHIFFRE D'AFFAIRES " DE 582 934 FRANCS CORRESPONDANT A UN MONTANT DE TAXE A LA VALEUR AJOUTEE DE 65 808 FRANCS ;

ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL EN CONCLUT QUE LES ELEMENTS DU DELIT DE FRAUDES FISCALES SUR LA TAXE A LA VALEUR AJOUTEE, L'IMPOT SUR LE REVENU ET LA TAXE COMPLEMENTAIRE AINSI QUE LES ELEMENTS DU DELIT DE TENUE IRREGULIERE DE COMPTABILITE PREVU PAR L'ARTICLE 1743 DU CODE GENERAL DES IMPOTS SONT REUNIS CONTRE LE PREVENU ;

QU'EN EFFET, PRECISE L'ARRET, LA PREUVE QUE LA DISSIMULATION DE REVENUS ET DE RECETTES A DEPASSE, POUR 1969 ET 1970, LA SOMME DE 1 000 FRANCS, A ETE RAPPORTEE PAR L'ADMINISTRATION SELON UNE METHODE DE CALCUL VALABLE EN L'ABSENCE D'UNE COMPTABILITE PROBANTE ;

QUE LE CALCUL DE LA DISSIMULATION DE BENEFICES POUR 1971 N'A PAS ETE CONTESTE ;

QU'AUSSI BIEN LA TENUE IRREGULIERE DE LA COMPTABILITE QUE LES DISSIMULATIONS DE SOMMES SUJETTES A L'IMPOT ONT ETE SCIEMMENT ET VOLONTAIREMENT COMMISES PAR LE PREVENU QUI NE SAURAIT EN REJETER LA RESPONSABILITE SUR SON COMPTABLE ;

MAIS ATTENDU QUE SI CES ENONCIATIONS ETABLISSENT, D'UNE PART, QUE X... A OMIS VOLONTAIREMENT DE FAIRE, POUR 1971, DANS LES DELAIS PRESCRITS, LES DECLARATIONS QUI LUI INCOMBAIENT ET D'AUTRE PART, QU'IL A SCIEMMENT TENU OU FAIT TENIR UNE COMPTABILITE IRREGULIERE ET INCOMPLETE, ELLES NE SAURAIENT, EN REVANCHE, JUSTIFIER LA CONDAMNATION DU PREVENU DU CHEF DES DISSIMULATIONS VOLONTAIRES DE SOMMES SUJETTES A L'IMPOT QUE, POUR LES TROIS EXERCICES CONSIDERES, LA COUR D'APPEL A RETENUES CONTRE LUI ;

QU'EN EFFET, LA POURSUITE PENALE POUR SOUSTRACTION FRAUDULEUSE A L'ETABLISSEMENT ET AU PAIEMENT DE L'IMPOT ET LA PROCEDURE ADMINISTRATIVE TENDANT A LA FIXATION DE L'ASSIETTE DES IMPOSITIONS ETANT, PAR LEUR NATURE ET LEUR OBJET, DIFFERENTES ET INDEPENDANTES L'UNE DE L'AUTRE, LE JUGE REPRESSIF NE SAURAIT, EN L'ABSENCE DE TOUTE CONSTATATION PUISEE PAR LUI DANS LES ELEMENTS DE PREUVE QUI ONT ETE SOUMIS AUX DEBATS CONTRADICTOIRES, FONDER L'EXISTENCE DE DISSIMULATIONS VOLONTAIRES DE SOMMES SUJETTES A L'IMPOT SUR LES SEULES EVALUATIONS QUE L'ADMINISTRATION A ETE AMENEE A FAIRE, SELON SES PROCEDURES PROPRES, POUR ETABLIR LES VALEURS D'ASSIETTE EN VUE DE REHAUSSEMENTS D'OFFICE ;

ATTENDU QU'EN STATUANT COMME ELLE L'A FAIT, DANS LA MECONNAISSANCE DE CE PRINCIPE, LA COUR D'APPEL N'A PAS MIS LA COUR DE CASSATION EN MESURE D'ASSURER SON CONTROLE SUR LA LEGALITE DE SA DECISION TANT EN CE QUI CONCERNE L'ACTION PUBLIQUE QU'AU REGARD DES DISPOSITIONS PAR LESQUELLES ELLE A FAIT DROIT AUX DEMANDES DE L'ADMINISTRATION RELATIVES A LA CONTRAINTE PAR CORPS ;

QUE L'ARRET ENCOURT LA CASSATION DE CE CHEF ;

PAR CES MOTIFS, ET SANS QU'IL Y AIT LIEU DE STATUER SUR LE SECOND MOYEN DE CASSATION ;

CASSE ET ANNULE L'ARRET PRECITE DE LA COUR D'APPEL DE POITIERS, DU 13 JUIN 1975, ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX.

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