Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 16 février 1977, 75-90.803, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

REJET DU POURVOI FORME PAR D... (GASTON) CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE TOULOUSE (CHAMBRE DES APPELS CORRECTIONNELS) EN DATE DU 27 FEVRIER 1975, QUI L'A CONDAMNE A SIX MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET 1000 FRANCS D'AMENDE POUR USAGE DE FAUX ET QUI A STATUE SUR LES CONSEQUENCES DOMMAGEABLES DE CETTE INFRACTIO.

LA COUR, VU LES MEMOIRES PRODUITS TANT EN DEMANDE QU'EN DEFENSE ;

SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 2 ET 151 DU CODE PENAL, 485, 512 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE D'USAGE DE FAUX POUR AVOIR REMIS A SON AVOCAT POUR ETRE COMMUNIQUEE A L'ADVERSAIRE DANS UNE PROCEDURE DE DIVORCE UNE PIECE FAUSSE, BIEN QU'IL AIT FAIT CONNAITRE QUELQUES JOURS PLUS TARD TANT A SON AVOCAT QU'A SON ADVERSAIRE QU'IL N'ENTENDAIT PAS S'EN SERVIR ET L'AVAIT COMMUNIQUEE PAR ERREUR ;

AUX MOTIFS, EN PREMIER LIEU, QUE LES CIRCONSTANCES DANS LESQUELLES D... A FORMULE SA DEMANDE DE RETRAIT DE LA PIECE LITIGIEUSE NE SONT PAS SUFFISAMMENT CLAIRES POUR QU'ON PUISSE EN DEDUIRE LA PREUVE D'UN DESISTEMENT VOLONTAIRE DU PREVENU PLUTOT QUE DU DESIR D'ECHAPPER A UNE POURSUITE PENALE ;

EN SECOND LIEU QU'IL RESULTE DES DISPOSITIONS COMBINEES DES ARTICLES 15 DU DECRET DU 9 SEPTEMBRE 1971 ET 67 DU DECRET DU 20 JUILLET 1972 QUE LA COMMUNICATION DES PIECES ENTRE AVOUES EST LE MOYEN REGLEMENTAIRE PAR LEQUEL CHACUNE DES PARTIES PRODUIT A L'INSTANCE LES PIECES SUR LESQUELLES ELLE ENTEND FONDER SA PRETENTION, CETTE COMMUNICATION CONSTITUANT DONC L'USAGE DE CES PIECES AU SENS DE L'ARTICLE 151 DU CODE PENAL ;

ENFIN QU'IL EST DE PRINCIPE QU'APRES LA COMMUNICATION EFFECTUEE, LA PIECE AINSI VERSEE AUX DEBATS DEVIENT COMMUNE AUX DEUX PARTIES SANS QU'IL PUISSE APPARTENIR A CELUI QUI L'A PRODUITE DE LA RETIRER ENSUITE A SON SEUL GRE ;

ET ALORS, EN TROISIEME LIEU, D'UNE PART QUE LA TENTATIVE N'EST PUNISSABLE QU'EN L'ABSENCE DE DESISTEMENT VOLONTAIRE, LA PREUVE DU CARACTERE INVOLONTAIRE DU DESISTEMENT INCOMBANT A L'ACCUSATION ET LE DOUTE PROFITANT AU PREVENU ;

ET D'AUTRE PART QUE LE MOBILE DU DESISTEMENT IMPORTE PEU, DES LORS QUE CE DERNIER N'EST PAS LE RESULTAT D'UNE INTERVENTION EXTERIEURE DONT L'EXISTENCE EN L'ESPECE N'A PAS ETE CONSTATEE ;

ALORS EN PREMIER LIEU QUE L'USAGE DE FAUX CONSISTE EN L'APPLICATION DE L'ACTE A L'EMPLOI DUQUEL IL EST DESTINE ET, S'AGISSANT D'UN USAGE EN JUSTICE, SUPPOSE QUE LA PIECE FAUSSE SOIT EFFECTIVEMENT PORTEE A LA CONNAISSANCE DES JUGES SAISIS DE LA CAUSE OU A EUX REMISE, SANS QUE LES TEXTES INVOQUES PAR LA COUR PERMETTENT DE DEROGER A CES PRINCIPES, L'ARTICLE 15 DU DECRET DU 9 SEPTEMBRE 1971, SELON LEQUEL LES PARTIES DOIVENT SE FAIRE CONNAITRE EN TEMPS UTILE LES MOYENS DE FAIT ET DE DROIT ET LES ELEMENTS DE PREUVE QU'ELLES PRODUISENT, ETANT RELATIF AUX ACTES DE PROCEDURE ET L'ARTICLE 67 DU DECRET DU 20 JUILLET 1972, AUX TERMES DUQUEL LA PARTIE QUI FAIT ETAT D'UNE PIECE S'OBLIGE A LA COMMUNIQUER A TOUTE AUTRE PARTIE A L'INSTANCE DISTINGUANT LE FAIT DE FAIRE ETAT D'UNE PIECE ET DONC DE LA PRODUIRE, DE CELUI DE LA COMMUNIQUER, SI BIEN QUE LA COMMUNICATION DES PIECES, SI ELLE EST L'ACCOMPAGNEMENT OBLIGE DE LA PRODUCTION, EN EST POURTANT DISTINCTE ET NE CONSOMME PAS LE DELIT D'USAGE DE FAUX LORSQU'EN FAIT IL EST CONSTANT QUE LA PIECE FAUSSE N'A ETE NI VISEE DANS LES ACTES DE PROCEDURE NI REMISE AUX JUGES, MAIS RETIREE VOLONTAIREMENT DE L'INSTANCE ;

ALORS, EN SECOND LIEU, QUE LE PRETENDU PRINCIPE SELON LEQUEL UNE PIECE COMMUNIQUEE NE POURRAIT ETRE RETIREE SANS L'ACCORD DE LA PARTIE A QUI ELLE A ETE COMMUNIQUEE ET QUI NE VAUDRAIT, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE POUR LES PIECES DEJA VERSEES AUX DEBATS, NE SAURAIT S'OPPOSER AU RETRAIT D'UNE PIECE RECONNUE FAUSSE PAR LES DEUX PARTIES ET NE POUVANT FONDER UNE DECISION DE JUSTICE ;

ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE QUE D..., QUI AVAIT ENGAGE CONTRE SA FEMME, JACQUELINE C..., UNE INSTANCE EN DIVORCE, A FAIT COMMUNIQUER PAR SON AVOCAT A CELUI DE SON EPOUSE, A TITRE DE PIECE DESTINEE A FAIRE PREUVE DE CERTAINES DE SES ALLEGATIONS, UNE LETTRE MISSIVE QUI PARAISSAIT AVOIR ETE ADRESSEE PAR UN TIERS A JACQUELINE C..., ALORS QUE CETTE LETTRE AVAIT, EN REALITE, ETE FABRIQUEE PAR LE PREVENU LUI-MEME ;

QUE LES JUGES PRECISENT QUE LA COMMUNICATION DE CE DOCUMENT AVAIT ETE FAITE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 15 DU DECRET DU 9 SEPTEMBRE 1971, ALORS EN VIGUEUR, AUX TERMES DUQUEL LES PARTIES DOIVENT SE FAIRE CONNAITRE MUTUELLEMENT EN TEMPS UTILE LES ELEMENTS DE PREUVE QU'ELLES PRODUISENT ;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS, DESQUELLES IL RESULTE QUE LA PIECE INCRIMINEE A ETE PRODUITE PAR D..., A L'APPUI DES PRETENTIONS DE CELUI-CI, AU COURS D'UNE INSTANCE CIVILE, LES JUGES DU FOND ONT CARACTERISE CONTRE LE PREVENU TOUS LES ELEMENTS DU DELIT POURSUIVI ;

QU'EN EFFET, EST CONSTITUTIVE D'UN USAGE DE FAUX LA PRODUCTION EN JUSTICE D'UN DOCUMENT CONTREFAIT DE NATURE A AVOIR UNE VALEUR PROBATOIRE ET A ENTRAINER DES EFFETS JURIDIQUES ;

QU'IL N'IMPORTE, DES LORS, QUE, SELON LES CONSTATATIONS DE LA COUR D'APPEL, D... AIT, PLUSIEURS JOURS APRES AVOIR PRODUIT LA LETTRE INCRIMINEE, EXPRIME, DANS DES CONDITIONS QUI N'ONT PAS PU ETRE DETERMINEES, SON INTENTION DE RENONCER A L'UTILISATION DE CE DOCUMENT ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE REJETE ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;

REJETTE LE POURVOI.

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