Cour de Cassation, Chambre sociale, du 13 décembre 2006, 04-40.527, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X... a été engagée en mai 1992 en qualité de conducteur de véhicule sanitaire par la société Ambulances assistance Avignon ; que le 19 décembre 1998, elle a notifié sa "démission" à l'employeur en lui imputant un non-paiement de salaires et d'éléments s'y rapportant ; que la salariée a ensuite saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes salariales et indemnitaires ;

Sur le pourvoi incident de l'employeur, pris en son premier moyen, qui est préalable :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que la rupture du contrat de travail était imputable à la société Ambulances assistance Avignon et qu'elle produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors selon le moyen, que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; qu'un désaccord portant, pour l'essentiel, sur le calcul des heures travaillées au vu d'une réglementation complexe ne justifie pas, en lui-même, la rupture du contrat de travail, de sorte qu'en décidant que Mme X... avait pu prendre acte de la rupture de son contrat de travail en l'imputant à son employeur en raison de faits reprochés à son employeur, sans aucunement préciser en quoi ces faits, qui consistaient en un désaccord entre les parties sur le décompte des heures dans le cadre d'une réglementation complexe, justifiaient la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 121-4, L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du code du travail ;

Mais attendu que la démission d'un salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur s'analyse en une prise d'acte qui produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que la cour d'appel qui a constaté que les griefs invoqués par le salarié étaient établis, a légalement justifié sa décision ;

Sur le pourvoi principal de la salariée :

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article L.122-14-4 du code du travail ;

Attendu que l'arrêt n'a accordé à la salariée qu'une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que le salaire moyen brut de la salariée était de 2 095,11 euros, que l'entreprise employait plus de onze salariés et que la salariée avait plus de deux ans d'ancienneté, ce dont il résultait que l'intéressée avait droit à une indemnité qui ne pouvait être inférieure aux six derniers mois de salaires calculés sur la rémunération brute, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article L. 321-11- 4 du code du travail ;

Attendu que selon ce texte, le salarié auquel un employeur a eu recours en violation des dispositions de l'article L. 324-10, a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, à moins que l'application d'autres règles légales ou de stipulations contractuelles ne conduise à une solution plus favorable ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande en paiement de l'indemnité prévue en cas de travail dissimulé, la cour d'appel relève que l'application des règles légales sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse a conduit à une solution plus favorable que l'octroi de ladite indemnité ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'en tout état de cause il résultait de ses constatations qu'eu égard à son salaire mensuel de 2 095,11 euros la somme de 10 000 euros allouée à la salariée à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse était inférieure à celle à laquelle elle pouvait prétendre en application des dispositions de l'article L. 324-11-1 du code du travail, la cour d'appel a violé ce texte ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen du pourvoi incident de l'employeur :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a limité à 10 000 euros la somme devant être allouée à la salariée à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il a rejeté la demande de Mme X... en paiement d'une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, l'arrêt rendu le 21 novembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société Ambulances assistance Avignon aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de la société Ambulances assistance Avignon et la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille six.

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