Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 24 octobre 2006, 04-16.706, Publié au bulletin
Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 24 octobre 2006, 04-16.706, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 04-16.706
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation.
Audience publique du mardi 24 octobre 2006
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 2004-06-10, du 10 juin 2004- Président
- M. Ancel.
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche : Vu les articles 9 du code civil et 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Attendu que dans son numéro daté du 7 juin 2001, l'hebdomadaire l'Express a publié, au sein d'un dossier intitulé "Lille. Les réseaux qui comptent", un article titré "Francs-maçons, le ménage s'impose" ; que, relatant la mise en examen pour faux en écriture publique, favoritisme et prise illégale d'intérêts de M. Michel X..., maire de Ronchin (Nord), le journal fait état de l'appartenance de l'intéressé et de huit membres nominativement désignés du conseil municipal à la franc-maçonnerie ; Attendu que pour condamner la société Groupe Express-Expansion, éditrice, et M. Denis Y..., directeur de la publication, à dommages-intérêts envers les personnes ainsi mentionnées, l'arrêt retient que l'appartenance à la franc-maçonnerie relève de la vie privée, que l'article n'apporte aucune révélation sur le lien entre l'activité des plaignants et leur affiliation divulguée, ni sur la solidarité ayant pu en résulter dans la commission invoquée des faits délictueux, et que la mention litigieuse avait donc été purement gratuite, sans nécessité au regard ni de la teneur générale des développements, ni de la mise en examen intervenue, ni du devoir d'informer le public ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait observé que le contexte général de la publication était la mise au jour, légitime dans une société démocratique, de réseaux d'influence, et que l'appartenance à la franc-maçonnerie suppose un engagement, de sorte que la révélation litigieuse, qui s'inscrivait dans le contexte d'une actualité judiciaire, était justifiée par l'information du public sur un débat d'intérêt général, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et par suite a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur les autres branches du moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 juin 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Condamne les défendeurs aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de la société Groupe Express-Expansion et de M. Y..., ès qualités ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille six.