Cour de Cassation, Chambre civile 3, du 19 octobre 2005, 04-15.828, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 avril 2004), que le 6 janvier 1994, le mur mitoyen séparant l'immeuble appartenant aux époux X... de celui appartenant à M. Y... et dans lequel Mme Z... exploitait un fonds de commerce, s'est effondré ; qu'après expertise, Mme Z... a assigné les époux X... et leur assureur, la société Assurances mutuelles de Seine-et-Marne, aux droits de laquelle vient la société Thélem assurances, ainsi que M. Y... et son assureur, la compagnie Uni Europe, aux droits de laquelle vient la compagnie Axa courtage, afin d'obtenir l'indemnisation de son préjudice ; que les époux X... ont assigné M. Y... et son assureur ;

Attendu que la société Thélem assurances fait grief à l'arrêt de dire qu'elle est tenue à garantir les époux X... des dommages occasionnés aux tiers et que la charge finale des condamnations reposera sur elle, alors, selon le moyen :

1 / que la réparation et la reconstruction du mur mitoyen sont à la charge de tous ceux qui y ont droit, et proportionnellement au droit de chacun, à moins qu'elles ne soient rendues nécessaires par le fait de l'un d'eux ; que la cour d'appel qui, pour retenir la responsabilité des époux X..., a retenu que la cause du sinistre se trouvait dans la configuration même de l'immeuble situé au n° 3 de la rue Carnot, sans qu'il soit nécessaire de démontrer à la charge des époux X..., propriétaires de cet immeuble, ni un acte se trouvant directement à l'origine de l'effondrement, ni un défaut d'entretien de l'immeuble, a violé l'article 655 du Code civil ;

2 / que la responsabilité du gardien d'une chose inanimée est subordonnée à la condition que la victime ait rapporté la preuve que la chose a été en quelque manière et ne fût-ce que pour partie, l'instrument du dommage, sauf au gardien à prouver qu'il n'a fait que subir l'action d'une cause étrangère, une chose inerte ne pouvant être l'instrument d'un dommage si la preuve n'est pas rapportée qu'elle occupait une position anormale ou qu'elle était en mauvais état ; que la cour d'appel qui, pour retenir la responsabilité des époux X..., a retenu que la cause du sinistre se trouvait dans la configuration même de l'immeuble situé au n° 3 de la rue Carnot, sans qu'il soit nécessaire de démontrer à la charge des époux X..., propriétaires de cet immeuble, ni un acte se trouvant directement à l'origine de l'effondrement ni un défaut d'entretien de l'immeuble, a violé l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

3 / que la compagnie MRA avait contesté devoir le coût de la réparation du mur mitoyen, dont étaient propriétaires indivis les époux X..., qui ne pouvaient prétendre à aucune garantie pour les dommages subis par eux du fait d'un effondrement de leur immeuble, en faisant valoir que si la cour d'appel accordait à M. Y... une indemnisation au titre de ses débours à l'encontre des époux X... au titre de la réfection du mur mitoyen, la garantie ne serait due que pour la moitié de ces frais, l'autre moitié aboutissant à la reconstruction du mur à hauteur des droits dont les époux X... étaient titulaires ; que la cour d'appel qui, pour condamner la MRA in solidum avec les époux X... au titre de la reconstruction du mur mitoyen, s'est fondée sur les obligations des époux X... à l'égard de M. Y..., sans s'expliquer sur celles de leur assureur, tout en retenant la garantie de la compagnie MRA au titre des seuls dommages causés aux tiers, à l'exclusion des dommages causés au bien assuré par un effondrement dont la cause se trouve dans la structure même dudit bâtiment, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / que la réparation et la reconstruction du mur mitoyen sont à la charge de tous ceux qui y ont droit, et proportionnellement au droit de chacun ; que, toutefois, le propriétaire d'un mur mitoyen doit supporter seul les frais de reconstruction lorsque celle-ci est rendue nécessaire par son fait ; que la cour d'appel qui, pour condamner la MRA in solidum avec les époux X... au titre de la reconstruction du mur mitoyen, s'est fondée sur les obligations des époux X... à l'égard de M. Y..., sans s'expliquer sur celles de leur assureur, et tout en retenant la garantie de la compagnie MRA au titre des seuls dommages causés aux tiers, à l'exclusion des dommages causés au bien assuré par un effondrement dont la cause se trouve dans la structure même dudit bâtiment, a violé les articles 655 et 1134 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que le copropriétaire d'un mur mitoyen doit supporter seul les frais de réparation ou de reconstruction de ce mur lorsque la réparation ou la reconstruction est rendue nécessaire par son propre fait ou par le fait des choses qu'il a sous sa garde ;

qu'ayant relevé que la configuration des lieux et l'ancienneté des remblais sur lesquels s'appuyaient les fondations démontraient que les caves faisaient partie d'un ensemble homogène, les poussées horizontales des voûtes s'équilibrant les unes les autres, et que la voûte de la cave de l'immeuble des époux X... avait été supprimée et remplacée par un plancher situé au-dessus des voûtes, ce qui avait eu pour effet de laisser la poussée horizontale de la voûte de l'immeuble de M. Y... s'exercer sur le seul mur mitoyen qui s'était effondré, la cour d'appel a pu en déduire que la cave de l'immeuble des époux X... avait été l'instrument du dommage et retenir que ceux-ci étaient responsables du sinistre ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu à bon droit que la circonstance que les époux X... et M. Y... se trouvaient conjointement et indivisément propriétaires du mur ne pouvait priver M. Y... du droit à obtenir réparation de ce mur par le propriétaire responsable du sinistre, la cour d'appel en a exactement déduit, répondant aux conclusions, que la société Thélem assurances, assureur de responsabilité des époux X..., devait garantir ces derniers de l'intégralité des dommages qu'ils avaient causés aux tiers ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Thélem assurances aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Thélem assurances à payer à la société Axa France IARD la somme de 2 000 euros ; rejette la demande de la société Thélem assurances ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille cinq.

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