Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 16 décembre 1992, 90-18.151, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

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Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que les époux X..., qui désiraient vendre leur propriété, l'ont, sur les conseils de leur agent immobilier, le cabinet Juvisa, divisée en deux lots ; que le lot n° 1, désigné comme " un petit pavillon d'habitation composé d'une pièce principale plus dépendances, terrain de 200 m2 environ " a été acquis par les époux Y... pour le prix de 200 000 francs sur lequel ils ont payé 10 000 francs de leurs fonds propres, le surplus ayant été réglé grâce à un prêt consenti par le Comptoir des entrepreneurs ; que, sur demande des époux Y..., la cour d'appel de Paris a annulé la vente en raison d'une erreur des acheteurs sur une qualité substantielle de la chose, et le contrat de prêt pour absence de cause, condamné M. A..., notaire rédacteur de l'acte de vente et de prêt, à réparer le dommage subi par les époux Y... et le Comptoir des entrepreneurs, et condamner M. A... et M. Z..., notaire en second, à payer aux époux X... une indemnité de 10 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Sur le troisième moyen du pourvoi principal de M. A... et de M. Z... : (sans intérêt) ;

Sur le quatrième moyen du pourvoi principal de M. A... et de M. Z... et le premier moyen du pourvoi provoqué du Comptoir des entrepreneurs qui est identique :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la nullité du prêt de 190 000 francs et d'avoir en conséquence condamné les notaires in solidum avec le cabinet Juvisa à garantir les vendeurs de la restitution de cette somme au Comptoir des entrepreneurs, alors que la cause du prêt réside dans la remise du fonds ;

Mais attendu que si le financement de l'acquisition immobilière recherchée par les emprunteurs n'était pas la cause de leurs obligations au sens de l'article 1131 du Code civil, il résulte de l'article 9 de la loi du 13 juillet 1979 que le contrat de prêt s'est trouvé résolu par l'effet de l'annulation rétroactive de la vente en vue de laquelle il avait été accordé, vente qui est censée n'avoir jamais été conclue ; que le moyen n'est donc pas fondé ;

Mais sur le premier et le deuxième moyen du pourvoi principal de M. A... et de M. Z..., et sur le second moyen du pourvoi provoqué du Comptoir des entrepreneurs, qui est identique :

Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que, pour écarter la responsabilité du cabinet Juvisa vis-à-vis des acheteurs, les époux Y... et du Comptoir des entrepreneurs, l'arrêt attaqué énonce que le cabinet Juvisa, s'il a engagé sa responsabilité vis-à-vis des vendeurs, les époux X..., n'a commis aucun manquement à ses obligations, ni envers les époux Y... ni envers le Comptoir des entrepreneurs, avec lesquels il n'avait pas de relations contractuelles et dont les intérêts étaient sauvegardés par M. A... ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, alors que l'agence Juvisa est responsable du dommage subi par toutes les personnes parties à une opération dont l'échec est imputable à ses fautes professionnelles, le fondement de cette responsabilité étant contractuel à l'égard de ses clients et délictuel à l'égard des autres parties, et alors que cette responsabilité n'est pas effacée par les fautes du notaire qui a concouru à la réalisation du dommage, la cour d'appel a violé, par refus d'application le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté les époux Y... et le Comptoir des entrepreneurs de leurs demandes contre le cabinet Juvisa, l'arrêt rendu le 17 mai 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles

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