Cour de Cassation, Chambre sociale, du 11 juillet 1991, 89-10.825, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

.

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que la société IBM Europe ayant remboursé au titre des frais professionnels aux cadres d'origine étrangère faisant l'objet auprès d'elle d'un détachement de longue durée un ensemble de dépenses consécutives à leur mutation en France, l'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations dues par la société, pour la période du 1er septembre 1979 au 31 décembre 1983, la part de ces dépenses qui résultait de la situation familiale des intéressés ; que l'URSSAF fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 4 novembre 1988) d'avoir annulé ce redressement alors, d'une part, que ne peuvent être exclues de l'assiette des cotisations au titre des frais professionnels que les sommes allouées aux salariés pour les couvrir des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi, que ne sauraient être considérées comme telles les sommes versées aux salariés expatriés en remboursement des frais engagés par ceux-ci non pas pour leur propre compte mais exclusivement pour celui de leur famille comme, par exemple, les frais de scolarité et cela quand bien même ces dépenses seraient liées à la décision d'expatriation prise par l'employeur, qu'en excluant de telles sommes de l'assiette des cotisations, la cour d'appel a violé l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale et l'article 1er de l'arrêté du 26 mai 1975 ; alors, d'autre part, que l'URSSAF peut décider d'appliquer la loi qui s'impose à elle sans tenir compte des dispositions des circulaires de l'ACOSS et ce, d'autant plus lorsque la circulaire en cause n'est intervenue que plusieurs années après l'adoption par le cotisant de la pratique litigieuse admise par la circulaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait donc annuler le redressement effectué par l'URSSAF conformément aux dispositions légales et afférent à la période du 1er septembre 1979 au 31 décembre 1983 en se retranchant derrière les dispositions d'une circulaire du 19 avril 1988, sans violer les articles précités ; alors enfin que, s'il existe une difficulté sérieuse sur la portée et la légalité d'une instruction émanant de l'autorité de tutelle de l'URSSAF, les juridictions ne peuvent se prononcer sur la validité de l'acte en cause mais doivent surseoir à statuer jusqu'à l'intervention d'une décision des juridictions administratives sur cette question ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui, en l'appliquant aux faits de l'espèce, a décidé de se prononcer sur la validité de la circulaire du 19 avril 1988 adressée à l'ACOSS par le secrétaire d'Etat chargé de la sécurité sociale, a violé l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Mais attendu qu'un salarié envoyé en détachement de longue durée hors de son pays d'origine peut avoir à exposer, du fait de cette mutation, en raison de sa situation familiale, un surcroît de dépenses qui, même s'il n'est pas engagé dans son seul intérêt mais aussi dans celui des membres de sa famille, correspond à des charges de caractère spécial inhérentes à l'emploi au sens de l'article 1er de l'arrêté interministériel du 26 mai 1975 ; que, sans se fonder sur la lettre-circulaire du secrétaire d'Etat chargé de la sécurité sociale en date du 19 avril 1988, diffusée par l'ACOSS, la cour d'appel a exactement retenu que les dépenses litigieuses entraient dans les prévisions dudit article, quand bien même leur prise en charge par l'employeur aurait bénéficié à la fois au salarié lui-même et aux membres de sa famille soumis à des contraintes provoquées par l'expatriation ; que sa décision est dès lors légalement justifiée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident, auquel a déclaré renoncer la société IBM Europe ;

REJETTE le pourvoi principal ;

DONNE acte à la société IBM Europe de son désistement du pourvoi incident

Retourner en haut de la page