Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 1 décembre 1987, 86-12.244, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième, quatrième et cinquième branches : .

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu l'article L. 781-1 du Code de l'organisation judiciaire ;

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, le 3 juillet 1974, le directeur des services fiscaux a, sur le fondement de l'article 1741 du Code général des impôts, dans sa rédaction applicable en la cause, déposé contre M. Pantanella une plainte pour " délits de fraude fiscale en matière de taxes sur le chiffre d'affaires et d'impôts directs " ; que le procureur de la République a ouvert une information du chef de fraude fiscale qui a été clôturée par une ordonnance de non-lieu rendue le 15 mars 1977 ; qu'après que le Conseil d'Etat eut, en 1981 et 1982, accordé à M. Pantanella diverses réductions d'impositions et pénalités compte tenu de l'insuffisance de la référence choisie par l'Administration pour reconstituer le chiffre d'affaires du contribuable et ses bénéfices, ce dernier a engagé une action en dommages-intérêts devant le tribunal de grande instance contre l'agent judiciaire du Trésor en faisant valoir que l'administration fiscale avait commis des fautes lourdes en déposant une plainte pénale contre lui sur la base d'une " méthode de reconstitution excessivement sommaire aboutissant à l'exagération des bases d'imposition " ; que l'arrêt infirmatif attaqué a débouté M. Pantanella de son action au seul motif que le fait pour l'autorité judiciaire d'avoir ouvert une information clôturée par un non-lieu ne pouvait être retenu comme constitutif d'un fonctionnement défectueux du service de la justice ;

Attendu, cependant, que M. Pantanella invoquait expressément dans ses conclusions d'appel la faute commise par les services fiscaux en déposant une plainte contre lui ; que les tribunaux de l'ordre judiciaire sont compétents pour statuer sur les conséquences dommageables de la décision par laquelle une administration saisit l'autorité judiciaire d'une plainte tendant à l'engagement de poursuites pénales contre un contribuable, une telle décision n'étant pas détachable de la procédure pénale ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel devait répondre aux conclusions de M. Pantanella et rechercher si les services fiscaux n'avaient pas commis une faute lourde en déposant une plainte à son encontre, cette recherche étant nécessairement préalable à l'appréciation de la responsabilité imputée à l'autorité judiciaire ; d'où il suit qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a méconnu sa compétence et n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres branches du moyen,

CASSE ET ANNULE, en son entier, l'arrêt rendu le 24 janvier 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims

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