Cour de Cassation, Chambre sociale, du 16 juillet 1987, 85-40.075, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

.

Sur le premier moyen :

Attendu que, licenciée le 1er septembre 1978 par la Société Nouvelle Demaria Lapierre et Molier (DLM) qui l'employait depuis le 15 octobre 1968, Mme X... a signé, le 11 septembre 1978, un reçu pour solde de tout compte qu'elle n'a pas dénoncé ;

Attendu que la Société Nouvelle Demaria Lapierre et Molier fait grief à l'arrêt attaqué (Montpellier, 11 octobre 1984) d'avoir déclaré recevable la demande de Mme X... en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse aux motifs que l'indemnité réclamée par la voie judiciaire n'était pas expressément prévue dans le solde de tout compte opposé à Mme X... alors, selon le pourvoi, qu'en signant un reçu pour solde de tout compte qui incluait expressément toutes les indemnités qui lui étaient dues au titre de l'exécution et de la cessation de son contrat de travail, Mme X... a nécessairement envisagé les dommages et intérêts auxquels aurait pu lui donner droit un licenciement sans cause réelle ni sérieuse et a renoncé sans ambiguïté à les réclamer ; qu'ainsi, la cour d'appel, en déclarant la demande recevable nonobstant l'absence de dénonciation dans les deux mois du reçu, a violé les articles 1134 du Code civil et L. 122-17 du Code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'en réponse à la demande de Mme X... du motif de son licenciement, la société DLM avait indiqué uniquement une nécessité de remplacement tandis que les absences répétées, présentées dans la procédure comme justifiant le licenciement, n'avaient pas été antérieurement reprochées à la salariée, la cour d'appel a pu en déduire que le paiement d'une indemnité fondée sur le caractère abusif de la rupture n'avait pas été envisagé par les parties lors de la signature du reçu pour solde de tout compte ; que le moyen n'est donc pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la Société Nouvelle Demaria Lapierre et Molier fait encore grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à verser à Mme X... une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le pourvoi, d'une part, que Mme X... qui, depuis 1973, était absente chaque année plusieurs mois en raison de l'affection chronique dont elle était atteinte, qui avait été absente, pour la même cause, les trois premiers mois de l'année 1978 et qui sortait d'un nouvel arrêt de travail début septembre 1978, ne pouvait ignorer que " la nécessité de la remplacer ", motif de licenciement invoqué par l'employeur, se référait nécessairement à cet absentéisme répété ; qu'ainsi, en affirmant que la société DLM ne pouvait invoquer l'absentéisme important comme motif de licenciement car Mme X... n'en avait pas eu connaissance, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14 et L. 122-14-2 du Code du travail ; d'autre part, qu'aucune règle n'impose à l'employeur de faire précéder le licenciement d'un avertissement ; qu'ainsi, la cour d'appel, en relevant, pour déclarer le licenciement de Mme X... dépourvu de cause réelle et sérieuse, que les divers avertissements qu'elle avait reçus se rapportaient à des faits autres que l'absentéisme invoqué comme motif

de son licenciement, a violé l'article L. 122-14-4 du Code du travail ; et enfin, que l'absentéisme chronique, plusieurs mois par an, pour cause de maladie d'un salarié, qui nécessite son remplacement temporaire, perturbe nécessairement le fonctionnement de l'entreprise, quelle que soit l'importance de son effectif, et justifie son licenciement ; qu'ainsi, la cour, en déclarant le licenciement irrégulier au seul motif qu'il n'était pas établi que le remplacement de Mme X... était nécessaire ou impossible, a violé l'article L. 122-14-4 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté, d'une part, que divers avertissements avaient été notifiés à Mme X... se rapportant à des erreurs, des dépassements de temps, des bavardages ou déplacements intempestifs sur les lieux du travail, alors que ses absences répétées ne lui avaient pas été reprochées et, d'autre part, qu'il n'était pas établi que les absences répétées de Mme X... exigeaient son remplacement compte tenu de l'effectif important de la société et de l'absence de preuve d'une impossibilité de faire suppléer Mme X... par un autre salarié ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, par une décision motivée, n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail en décidant que le licenciement de Mme X... ne procédait pas d'une cause répondant aux exigences de ce textes ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

Retourner en haut de la page