Cour de Cassation, Chambre sociale, du 10 juin 1982, 80-40.929, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

SUR LE MOYEN UNIQUE, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES L 122-33 DU CODE DU TRAVAIL, 1134 DU CODE CIVIL ET 455 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE : ATTENDU QU'UNE CLAUSE DU REGLEMENT INTERIEUR DE LA SOCIETE DES EDITIONS QUO VADIS DISPOSE QUE DES CONJOINTS NE PEUVENT ETRE EMPLOYES SIMULTANEMENT DANS L'ENTREPRISE ;

QUE MME X... Z... AUDRAN A ETE LICENCIEE EN APPLICATION DE CETTE CLAUSE ENSUITE DE SON MARIAGE AVEC UN CAMARADE DE TRAVAIL ;

QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LA CLAUSE NULLE ET A CONDAMNE LA SOCIETE A LUI VERSER DES DOMMAGES-INTERETES POUR LICENCIEMENT SANS CAUSE REELLE ET SERIEUSE ;

ATTENDU QUE LA SOCIETE FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'AVOIR AINSI STATUE ALORS QUE L'INOBSERVATION PAR LE SALARIE DU REGLEMENT INTERIEUR, QUI EST L'EXPRESSION DU POUVOIR REGLEMENTAIRE ATTRIBUE A L'EMPLOYEUR POUR LA BONNE MARCHE DE L'ENTREPRISE, EST UNE CAUSE REELLE ET SERIEUSE DE LICENCIEMENT LORSQU'ELLE PORTE COMME EN L'ESPECE SUR UN ELEMENT DETERMINANT DU CONTRAT DE TRAVAIL ;

QUE LA CLAUSE LITIGIEUSE NE STIPULANT PAS UNE PROHIBITION ABSOLUE, ET SA VALIDITE N'ETANT PAS CONTESTEE EN CE QU'ELLE EXCLUAIT EGALEMENT L'EMPLOI D'ASCENDANTS ET DE DESCENDANTS, L'ARRET ATTAQUE NE POUVAIT Y TROUVER UNE ATTEINTE A LA VIE PRIVEE D'EMPLOYES MODESTES DEVENANT CONJOINTS SANS S'EXPLIQUER PREALABLEMENT SUR LES CONSEQUENCES DE L'INOBSERVATION D'UNE OBLIGATION IMPOSEE DANS LE CONTRAT ET COMMISE EN CONNAISSANCE DE CAUSE ;

MAIS ATTENDU QUE LES SALARIES NE SONT PAS TENUS D'OBSERVER UNE CLAUSE ILLICITE D'UN REGLEMENT INTERIEUR MEME S'ILS EN ONT EU CONNAISSANCE LORS DE LEUR ENGAGEMENT ;

QUE LA COUR D'APPEL, QUI N'AVAIT PAS A APPRECIER LA VALIDITE DE LA CLAUSE EN CE QUI CONCERNAIT LES ASCENDANTS ET DESCENDANTS, A EXACTEMENT ENONCE QU'IL NE PEUT ETRE PORTE ATTEINTE A LA LIBERTE DU MARIAGE PAR UN EMPLOYEUR HORMIS LES CAS TRES EXCEPTIONNELS OU LES NECESSITES DES FONCTIONS L'EXIGENT IMPERIEUSEMENT ;

QU'APRES AVOIR RELEVE QUE SI LA CLAUSE CRITIQUEE N'INTERDISAIT PAS TOUT DROIT AU MARIAGE, ELLE Y APPORTAIT CEPENDANT UNE SERIEUSE ATTEINTE PUISQU'ELLE ENTRAINAIT LA PERTE PAR L'UN DES EPOUX DE SA SITUATION, ELLE A CONSTATE QUE LA SOCIETE N'INVOQUAIT POUR LA JUSTIFIER QUE LE RISQUE D'INCIDENTS ENTRE CONJOINTS DUS A LA MEDISANCE, QUI POUVAIENT AUSSI BIEN SE PRODUIRE EN CAS D'UNION LIBRE ;

QUE, S'ETANT AINSI EXPLIQUEE SUR LES CONSEQUENCES QUE POUVAIENT ENTRAINER LA VIOLATION DE LA CLAUSE, ELLE A A BON DROIT ESTIME QU'ELLES N'ETAIENT PAS DE NATURE A LA RENDRE LICITE, ET QUE L'EMPLOYEUR NE POUVAIT DONC S'EN PREVALOIR POUR LICENCIER MME Y... ;

QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 31 JANVIER 1980 PAR LA COUR D'APPEL DE RENNES.

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