Cour de Cassation, Chambre sociale, du 8 mars 1979, 78-60.729, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches, de la violation des articles L 420-1 et suivants, L 420-5, R 420-4 du Code du travail, R 321-5 du même Code, 9 du Code civil, 455 du nouveau Code de procédure civile, défaut de motifs, manque de base légale, dénaturation des actes de la procédure et des termes du litige ; Attendu que les syndicats CGT et CFDT ayant demandé que les adresses des travailleurs à domicile soient portées sur les listes électorales établies en vue de l'élection, le 22 juin 1978, des délégués du personnel de l'établissement de Villeurbanne de la CGEE-Alsthom et cette société s'y étant opposée, le Tribunal d'instance a décidé que les adresses des travailleurs à domicile seraient communiquées aux délégués syndicaux de l'établissement ; que l'employeur reproche au tribunal d'avoir statué ainsi, alors d'une part, qu'il a dénaturé les actes de la procédure et les termes du litige, seule ayant été demandée la publication de ces adresses sur les listes électorales, alors, d'autre part que le domicile du travailleur doit être protégé comme servant à sa vie privée et qu'il ne pouvait être assimilé à un lieu dépendant de l'entreprise ou à un chantier ;

Mais attendu qu'en décidant, d'une part, que les adresses des travailleurs à domicile seraient communiquées aux délégués syndicaux, le Tribunal d'instance a statué dans les limites de la demande dont il était saisi, même si celle-ci tendait à une publication plus large ; que si, d'autre part, le Code du travail n'indique pas les memtions qui doivent figurer à la suite des noms inscrits sur les listes électorales, il est toutefois indispensable que, conformément au droit commun électoral, soient rendues possibles l'identification des inscrits et la vérification des conditions légales d'électorat et d'éligibilité ; que le juge du fond a exactement relevé à cet égard que les syndicats ont, au même titre que l'employeur, le droit d'exercer ce contrôle qui, s'il est possible sur les lieux du travail, ne le devient pour les travailleurs à domicile que par la connaissance de leurs adresses personnelles ; D'où il suit que les deux premières branches du moyen ne peuvent être accueillies ; Par ces motifs :

Les rejette ; Mais, sur la troisième branche du même moyen :

Vu l'article L 27 du Code électoral,

Attendu qu'au motif que le domicile des travailleurs dont il s'agissait avait un double caractère privé et professionnel, le Tribunal a décidé que leurs adresses seraient communiquées aux seuls délégués syndicaux ;

Qu'en statuant ainsi alors que tous les salariés de l'entreprise et non seulement les syndicats qui y sont représentatifs ont le droit de vérifier la régularité des inscriptions sur les listes électorales, le tribunal a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS :

Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a limité la communication aux délégués syndicaux de l'entreprise des adresses professionnelles des travailleurs à domicile employés par la CGEE-Alsthom, le jugement rendu entre les parties par le Tribunal d'instance de Villeurbanne, le 4 juillet 1978 ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avec ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le Tribunal d'instance de Lyon, à ce désigné par délibération spéciale prise en la Chambre du conseil ;

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