Cour de Cassation, Chambre civile 3, du 21 février 1979, 77-15.587, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique, en ce qu'il concerne les provisions :

Attendu qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la Société civile immobilière du ... a entrepris une construction, qui a fait l'objet d'une garantie d'achèvement donnée le 19 juillet 1973, par la Banque de l'Union Immobilière, dite UCIP, sous la forme d'une ouverture de crédit ; que les époux A..., les époux Y... et les consorts Z... ont acquis des droits dans l'ensemble immobilier, en cours de réalisation, et qu'après l'interruption des travaux survenue au mois de juillet 1974, ils ont demandé au juge des référés notamment de dire l'UCIP tenue, sous astreinte, de faire reprendre immédiatement les travaux et de la condamner à leur verser des provisions ; que demoiselle X... est intervenue à l'instance, devant le premier juge, en s'associant aux conclusions des autres demandeurs ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif de ce chef d'avoir condamné l'UCIP à payer, à titre de provisions, diverses sommes aux défendeurs au pourvoi (à l'exception de mademoiselle X...), alors, selon le moyen, que l'appel a seulement pour effet de remettre en cause les chefs du jugement critiqué expressément par l'appelant et, en tout cas, les seuls chefs lui faisant grief ; que des conclusions d'intimé ne peuvent modifier le fondement d'une demande formée en première instance ; qu'en l'espèce les défendeurs au pourvoi avaient fondé leur demande en première instance sur de prétendues fautes commises par l'UCIP dans la mise en oeuvre de la garantie d'achèvement qu'elle avait donnée à la Société civile immobilière du ... que c'est sur ce fondement que le premier juge s'etait fondé, de telle sorte que la Cour d'appel, saisie du seul appel de l'UCIP ne pouvait retenir, pour asseoir sa décision en tant qu'elle concernait l'octroi de provisions, des faits antérieurs à la mise en cause de la garantie d'achèvement donnée par l'UCIP, faits qui étaient seulement énoncés dans les conclusions d'intimé des défendeurs au pourvoi, que la Cour d'appel pouvait d'autant moins retenir les faits ainsi allégués que les défendeurs au pourvoi avaient énoncé ces faits mais n'en avaient pas tiré, semble-t-il, de conséquences, puisqu'ils demandaient seulement la confirmation de la décision du premier juge qui avait "parfaitement compris et apprécié les fautes d'UCIP qui, seul, détenteur de la reprise des travaux, était en fait le véritable nouveau promoteur", de telle sorte que la Cour d'appel a, non seulement méconnu les principes gouvernant l'effet dévolutif de l'appel, mais également les termes du litige ; qu'il est encore soutenu que la garantie d'achèvement donnée par les banques et établissements financiers, en vertu des articles 22 et 25 du décret du 22 décembre 1967 est une simple garantie financière, de telle sorte que la Cour ne pouvait mettre en cause la responsabilité de l'exposante et la condamner à des indemnités provisionnelles et à des astreintes au cas de non reprise des travaux par le seul motif qu'après que le gérant de la Société civile immobilière du Mont-Cenis avait été déclaré en liquidation, l'UCIP serait devenue pratiquement maîtresse de la reprise des travaux et n'aurait pas cherché à les accélérer et aurait toléré que le chantier reste pratiquement à l'abandon pendant de nombreux mois ; que l'UCIP reproche enfin à la Cour d'appel d'avoir omis de répondre et de ne s'être en tout cas pas expliquée suffisamment sur le moyen par lequel elle avait fait valoir qu'elle n'avait assumé par le jeu de la garantie d'achèvement de l'immeuble qu'une simple obligation financière constituant du reste une simple obligation de moyen et sur le moyen tiré de ce qu'elle n'avait jamais refusé de satisfaire à cette obligation de financement ;

Mais attendu, d'une part, que la Cour d'appel n'a relevé à l'encontre de l'UCIP que des faits postérieurs au 19 juillet 1973, date de l'acte contenant la garantie d'achèvement, et qui, étant invoqués, se trouvaient dans le débat ; que, dès lors, c'est sans modifier les termes du litige, ni excéder les limites de l'appel, qu'elle s'est prononcée sur les demandes de provisions, dont elle était saisie ;

Attendu, d'autre part, que, répondant aux conclusions prétendument délaissées, la Cour d'appel, statuant en matière de référé, a retenu, tant par motifs propres que par ceux de l'ordonnance confirmée, un manque de diligence de la part de la banque, a relevé que les retards apportés à la construction étaient imputables en grande partie à l'UCIP, et que la situation financière des acquéreurs d'appartements avait été rendue difficile par l'interruption des travaux ; qu'elle a pu en déduire que ces acquéreurs avaient sur cette banque une créance non sérieusement contestable justifiant l'attribution d'indemnités provisionnelles ; d'où il suit que, de ce chef, le moyen ne peut qu'être rejeté ;

Attendu que la garantie donnée, en vertu de ce texte, n'a pour objet que l'avance ou le paiement des sommes nécessaires à l'achèvement de l'immeuble à construire ;

Attendu qu'en confirmant la condamnation de l'UCIP à une astreinte de 1000 francs par jour de retard dans l'hypothèse où les travaux d'achèvement de l'immeuble ne seraient pas repris dans un délai de huit jours à compter de la signification de l'ordonnance, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en sa disposition condamnant l'UCIP au paiement d'une astreinte, l'arrêt rendu le 6 juin 1977, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Versailles, à ce désignée par délibération spéciale prise en la Chambre du conseil ;

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