CAA de PARIS, 3ème chambre, 16/05/2023, 22PA01580, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 12 mars 2021 par laquelle la ministre chargée des sports a refusé de reconnaître l'équivalence de son diplôme avec le brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport, spécialité " activité sports collectifs ", mention " volley-ball ".

Par un jugement n° 2109348/6-3 du 29 septembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 avril 2022, M. B..., représenté par Me Gungor, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 29 septembre 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 12 mars 2021 de la ministre chargée des sports ;



3°) d'enjoindre à la ministre chargée des sports de reconnaître l'équivalence de son diplôme avec le brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport, spécialité " activité sports collectifs ", mention " volley-ball " ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'est pas suffisamment motivé, les premiers juges n'ayant pas vérifié l'existence et les motivations de l'avis de la commission mentionnée à l'article R. 212-84 du code des sports ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la décision litigieuse n'était pas entachée d'erreur d'appréciation ; son diplôme répond aux objectifs visés par l'arrêté du 7 juillet 2016 ; les enseignements qu'il a reçus durant sa formation de quatre années correspondent aux enseignements requis pour " la conduite et l'animation de sports collectifs ", " conduire une animation sportive de volley-ball ", " concevoir des projets d'animation sportive dans le champ des sports collectifs ", tels que détaillés à l'annexe 2 de l'arrêté du 7 juillet 2016 ; il maîtrise l'ensemble des compétences permettant de conduire une animation sportive de volley-ball et est en mesure de concevoir des projets d'animation sportive dans le champ des sports collectifs ; son expérience professionnelle ainsi que les attestations délivrées par la fédération internationale de volley-ball et le centre " ENIC-NARIC France " doivent être pris en compte.


Par un mémoire en défense enregistré le 4 novembre 2022, la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par le requérant sont irrecevables dès lors qu'ils reposent sur des pièces qui n'ont été communiquées ni à l'administration, ni aux premiers juges ;
- en tout état de cause, ces moyens ne sont pas fondés.


Vu les autres pièces du dossier.


M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris du 24 janvier 2022.


La clôture de l'instruction a été fixée au 3 mars 2023.

Vu :

- le code des sports,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,
- l'arrêté ministériel du 7 juillet 2006 portant création du brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport spécialité " activités sports collectifs ",
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique.


Considérant ce qui suit :


1. M. B... a obtenu en 2011 le diplôme algérien du baccalauréat. Il a ensuite obtenu en Algérie un diplôme d'éducateur principal des activités physiques et sportives, délivré le 27 octobre 2015 par l'institut national de la formation supérieure des cadres de la jeunesse et des sports de Constantine, à l'issue d'une formation théorique et pratique de quatre années. De 2015 à 2018, il a exercé le métier d'éducateur sportif au sein de l'office omnisport de la ville de Constantine, enseignant le volley-ball. Le 8 novembre 2020, il a déposé auprès de la ministre chargée des sports une demande d'équivalence de son diplôme algérien avec le brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport (BPJEPS), spécialité " activités sports collectifs ", mention " volley-ball ". Par une décision du 12 mars 2021, la ministre chargée des sports a rejeté sa demande, après avoir consulté pour avis la commission de reconnaissance des qualifications, qui s'est réunie le 2 mars 2021. M. B... demande à la cour d'annuler le jugement du 29 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 mars 2021.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Contrairement à ce que soutient M. B..., les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement en répondant précisément à l'unique moyen soulevé devant eux, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la décision du 12 mars 2021. S'ils ont mentionné l'avis émis par la commission de reconnaissance des qualifications prévue par les dispositions de l'article R. 212-84 du code du sport, auquel faisait référence la ministre chargée des sports, ils n'étaient pas tenus de solliciter la production dudit avis dès lors que son existence et sa régularité n'était pas contestées devant eux, M. B... n'ayant soulevé aucun moyen de légalité externe en première instance. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 212-1 du code du sport : " I.- Seuls peuvent, contre rémunération, enseigner, animer ou encadrer une activité physique ou sportive ou entraîner ses pratiquants, à titre d'occupation principale ou secondaire, de façon habituelle, saisonnière ou occasionnelle, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa du présent article et de l'article L. 212-2 du présent code, les titulaires d'un diplôme, titre à finalité professionnelle ou certificat de qualification professionnelle : / 1° Garantissant la compétence de son titulaire en matière de sécurité des pratiquants et des tiers dans l'activité considérée ; / 2° Et enregistré au répertoire national des certifications professionnelles dans les conditions prévues à l'article L. 6113-5 du code du travail. / Peuvent également exercer contre rémunération les fonctions mentionnées au premier alinéa ci-dessus les personnes en cours de formation pour la préparation à un diplôme, titre à finalité professionnelle ou certificat de qualification professionnelle conforme aux prescriptions des 1° et 2° ci-dessus, dans les conditions prévues par le règlement de ce diplôme, titre ou certificat. / II.- Le diplôme mentionné au I peut être un diplôme étranger admis en équivalence. (...) ". Aux termes de l'article R. 212-84 du même code : " Les diplômes étrangers sont admis en équivalence aux diplômes mentionnés à l'article L. 212-1 par le ministre chargé des sports après avis de la commission de reconnaissance des qualifications, dont la composition, comprenant notamment des représentants de l'administration, des employeurs et des personnels techniques, est fixée conformément à l'article D. 212-84-1. ". Par ailleurs, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative du 7 juillet 2006 portant création du brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport spécialité " activités sports collectifs " : " La possession du diplôme mentionné à l'article 1er confère à son titulaire les compétences suivantes qu'il assure en autonomie pédagogique : / - la conception de projets d'animations sportives dans le champ des sports collectifs visant notamment à favoriser le développement de compétences relationnelles par le respect d'autrui et des règlements sportifs ; / - la conduite de séances et de cycles d'initiation, de découverte et d'animation sportive des sports collectifs qui nécessitent notamment des notions d'arbitrage ; / - la conduite en autonomie d'une séance d'entraînement dans la mention concernée ; / - la participation aux actions de communication et de promotion de la structure employeuse ; / - la participation au fonctionnement de la structure employeuse ; / - l'accueil de différents publics. ". Et selon l'article 4 de cet arrêté, les référentiels professionnels et de certification figurent respectivement aux annexes I et II dudit arrêté.

4. Pour rejeter la demande de reconnaissance d'équivalence de diplôme présentée par M. B..., la ministre chargée des sports a estimé que les éléments produits par l'intéressé étaient très éloignés du diplôme visé, le contenu des enseignements suivis ne permettant pas d'une part " d'expertiser " la partie spécifique de la formation dispensée pour l'obtention du BPJEPS spécialité " activités sports collectifs ", mention " volley-ball " et, d'autre part, ne démontrant pas la compétence du demandeur " sur la démarche projet ", considérée comme un élément essentiel de la formation.

5. Si M. B... produit en appel de nouveaux documents relatifs au contenu des formations dont il a bénéficié en Algérie et aux notes qu'il a obtenues, il ne ressort ni de ces éléments, ni des documents soumis aux premiers juges, qu'il aurait suivi des enseignements portant sur l'ensemble des compétences visées à l'article 3 de l'arrêté susmentionné du
7 juillet 2006 et sur les " unités capitalisables " figurant à l'annexe II de cet arrêté pour la mention " volley-ball et beach-volley ", notamment en ce qui concerne la prise en compte des caractéristiques des publics, la préparation et l'évaluation de projet, l'encadrement de groupe, ou le fonctionnement de la structure employeuse. L'attestation relative à la formation qu'il a suivie en 2016 auprès de la fédération internationale de volley-ball (FIVB) n'apporte pas davantage d'éléments sur ces points. M. B... ne peut par ailleurs utilement se prévaloir de son expérience professionnelle, dont les dispositions légales et réglementaires précitées, qui impliquent une comparaison entre des formations, ne prévoient pas la prise en compte. Enfin, comme l'ont à bon droit relevé les premiers juges, l'attestation de comparabilité délivrée par le centre " ENIC-NARIC France ", qui en tout état de cause ne compare que les niveaux des formations et non leur contenu, ne saurait se substituer à l'appréciation de la ministre, seule compétente après avis de la commission de reconnaissance des qualifications pour admettre les diplômes étrangers en équivalence aux diplômes mentionnés à l'article L. 212-1 du code du sport. Par suite, la ministre chargée des sports n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en rejetant, par sa décision du 12 mars 2021, la demande de reconnaissance d'équivalence présentée par M. B....

6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir opposée en défense, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 mars 2021 de la ministre chargée des sports. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent donc être rejetées.


D É C I D E :


Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques.
Délibéré après l'audience du 14 avril 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère,
- Mme Gaëlle Dégardin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.


La rapporteure,
G. A...Le président,
I. LUBEN
La greffière,
N. DAHMANI
La République mande et ordonne à la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 22PA01580



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