CAA de BORDEAUX, 2ème chambre - formation à 3, 25/06/2019, 17BX02269, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre - formation à 3, 25/06/2019, 17BX02269, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX - 2ème chambre - formation à 3
- Non publié au bulletin
Audience publique du mardi 25 juin 2019
- Président
- M. REY-BETHBEDER
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...I..., agissant tant en son nom propre qu'au nom de ses trois enfants mineurs, B..., E...etA..., a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux à lui verser la somme de 80 000 euros, en réparation des préjudices que lui ont causé le décès de ses parents ainsi que trois sommes de 15 000 euros au titre du préjudice que ces décès ont causé à ses enfants.
Par un jugement n° 1502401 du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2017, et un mémoire récapitulatif, enregistré le 19 novembre 2018, M.I..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 30 juin 2017 ;
2°) de condamner le centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux à lui verser une somme de 80 000 euros en réparation des préjudices que lui ont causé le décès de ses parents ainsi que trois sommes de 15 000 euros au titre du préjudice que ces décès ont causé à ses enfants ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Charles Perrens et au bénéfice de Me D..., une somme de 2 000 euros au titre de l'article l. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le centre hospitalier Charles Perrens a commis une faute en refusant de faire droit à sa demande tendant à l'hospitalisation forcée de son père, en s'abstenant de procéder aux investigations nécessaires et en ne mettant en place aucune modalité de surveillance et de suivi de l'état de santé de ce dernier ;
- cette faute présente un lien de causalité direct et certain avec le décès de ses parents dans un incendie domestique ;
- il justifie de la réalité et du quantum des préjudices que ses enfants et lui-même ont subis.
Par un mémoire, enregistré le 12 novembre 2018, le centre hospitalier Charles Perrens, représenté par MeH..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les conditions d'une hospitalisation forcée n'étaient pas réunies et qu'en tout état de cause, il n'existe pas de lien de causalité direct et certain entre l'accident à l'origine du décès des parents de M. I...et le refus d'hospitaliser sans consentement le père de celui-ci.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.J...,
- les conclusions de M. Normand, rapporteur public,
- et les observations de MeG..., représentant M. et MmeI..., et de Me F..., représentant le centre hospitalier Charles Perrens.
Considérant ce qui suit :
1. Jeanne Sarrazin, épouseI..., alors âgée de 69 ans, a appris en décembre 2007 qu'elle souffrait d'une tumeur cérébrale pour laquelle elle a fait l'objet d'une hospitalisation à domicile. Son époux, K...I..., alors âgé de 83 ans, a été très affecté par sa maladie. À la suite d'un examen effectué par le médecin traitant de ce dernier, son fils, M. C...I..., a sollicité, le 30 janvier 2008, l'hospitalisation à la demande d'un tiers de son père au sein du centre hospitalier Charles Perrens. Le médecin référent du service d'évaluation de crise et d'orientation psychiatrique (SECOP) du centre hospitalier Charles Perrens a toutefois estimé que l'hospitalisation sans consentement d'Ange-Marie I...ne se justifiait pas et le centre hospitalier Charles Perrens a autorisé celui-ci à regagner son domicile. Le 9 mars 2008, Ange-Marie et Jeanne I...sont décédés des conséquences d'un incendie accidentel qui s'est déclaré à leur domicile. M. C...I..., agissant tant en son nom personnel qu'aux noms de ses trois enfants mineurs, demande à la cour d'annuler le jugement du 30 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux à lui verser la somme globale de 125 000 euros en réparation des préjudices que ses enfants mineurs et lui-même ont subis à raison du décès de ses parents.
2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".
3. Il résulte de l'instruction qu'à l'issue d'un entretien avec Ange-MarieI..., au cours duquel celui-ci a indiqué son refus d'une hospitalisation volontaire, le médecin référent du service d'évaluation de crise et d'orientation psychiatrique (SECOP) du centre hospitalier Charles Perrens a estimé qu'en l'absence de troubles, notamment du comportement, son hospitalisation à la demande d'un tiers n'était pas justifiée. M. I...soutient que cette décision est fautive dès lors que, selon lui, son père aurait récemment adopté un comportement narcissique et paranoïaque, serait devenu agressif et malveillant tant avec son entourage qu'avec les tiers et, par suite, dangereux pour son épouse et pour lui-même. Toutefois, s'il se prévaut également de la lettre qu'il a adressée en ce sens au médecin référent du SECOP, ces allégations ne sont assorties d'aucun élément factuel permettant de les regarder comme établies. Il ressort, de plus, du rapport établi par le médecin du SECOP que le médecin traitant d'Ange-MarieI..., joint par téléphone, a indiqué n'avoir présenté une demande d'hospitalisation à la demande d'un tiers qu'à la suite des demandes réitérées de M. I...mais qu'il ne lui semblait pas que son patient présentait des troubles justifiant une telle hospitalisation et a souligné le caractère conflictuel des relations entre le père et le fils. En outre et contrairement à ce que soutient M.I..., un soutien psychiatrique a été proposé par le médecin référent du SECOP à Ange-MarieI..., qui l'a accepté. Enfin et en tout état de cause, eu égard au caractère purement accidentel de l'incendie à l'origine du décès d'Ange-Marie et JeanneI..., M. I...n'est pas fondé à soutenir qu'il existerait un lien de causalité direct et certain entre le rejet de sa demande tendant à l'hospitalisation forcée de son père et la survenance de cet incendie.
4. Il résulte de tout ce qui précède que M. I...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses demandes indemnitaires. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. I...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...I..., au centre hospitalier Charles Perrens, au centre hospitalier universitaire de Bordeaux, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Délibéré après l'audience du 14 mai 2019 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 juin 2019.
Le rapporteur,
Manuel J...
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°17BX02269
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...I..., agissant tant en son nom propre qu'au nom de ses trois enfants mineurs, B..., E...etA..., a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux à lui verser la somme de 80 000 euros, en réparation des préjudices que lui ont causé le décès de ses parents ainsi que trois sommes de 15 000 euros au titre du préjudice que ces décès ont causé à ses enfants.
Par un jugement n° 1502401 du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2017, et un mémoire récapitulatif, enregistré le 19 novembre 2018, M.I..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 30 juin 2017 ;
2°) de condamner le centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux à lui verser une somme de 80 000 euros en réparation des préjudices que lui ont causé le décès de ses parents ainsi que trois sommes de 15 000 euros au titre du préjudice que ces décès ont causé à ses enfants ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Charles Perrens et au bénéfice de Me D..., une somme de 2 000 euros au titre de l'article l. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le centre hospitalier Charles Perrens a commis une faute en refusant de faire droit à sa demande tendant à l'hospitalisation forcée de son père, en s'abstenant de procéder aux investigations nécessaires et en ne mettant en place aucune modalité de surveillance et de suivi de l'état de santé de ce dernier ;
- cette faute présente un lien de causalité direct et certain avec le décès de ses parents dans un incendie domestique ;
- il justifie de la réalité et du quantum des préjudices que ses enfants et lui-même ont subis.
Par un mémoire, enregistré le 12 novembre 2018, le centre hospitalier Charles Perrens, représenté par MeH..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les conditions d'une hospitalisation forcée n'étaient pas réunies et qu'en tout état de cause, il n'existe pas de lien de causalité direct et certain entre l'accident à l'origine du décès des parents de M. I...et le refus d'hospitaliser sans consentement le père de celui-ci.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.J...,
- les conclusions de M. Normand, rapporteur public,
- et les observations de MeG..., représentant M. et MmeI..., et de Me F..., représentant le centre hospitalier Charles Perrens.
Considérant ce qui suit :
1. Jeanne Sarrazin, épouseI..., alors âgée de 69 ans, a appris en décembre 2007 qu'elle souffrait d'une tumeur cérébrale pour laquelle elle a fait l'objet d'une hospitalisation à domicile. Son époux, K...I..., alors âgé de 83 ans, a été très affecté par sa maladie. À la suite d'un examen effectué par le médecin traitant de ce dernier, son fils, M. C...I..., a sollicité, le 30 janvier 2008, l'hospitalisation à la demande d'un tiers de son père au sein du centre hospitalier Charles Perrens. Le médecin référent du service d'évaluation de crise et d'orientation psychiatrique (SECOP) du centre hospitalier Charles Perrens a toutefois estimé que l'hospitalisation sans consentement d'Ange-Marie I...ne se justifiait pas et le centre hospitalier Charles Perrens a autorisé celui-ci à regagner son domicile. Le 9 mars 2008, Ange-Marie et Jeanne I...sont décédés des conséquences d'un incendie accidentel qui s'est déclaré à leur domicile. M. C...I..., agissant tant en son nom personnel qu'aux noms de ses trois enfants mineurs, demande à la cour d'annuler le jugement du 30 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux à lui verser la somme globale de 125 000 euros en réparation des préjudices que ses enfants mineurs et lui-même ont subis à raison du décès de ses parents.
2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".
3. Il résulte de l'instruction qu'à l'issue d'un entretien avec Ange-MarieI..., au cours duquel celui-ci a indiqué son refus d'une hospitalisation volontaire, le médecin référent du service d'évaluation de crise et d'orientation psychiatrique (SECOP) du centre hospitalier Charles Perrens a estimé qu'en l'absence de troubles, notamment du comportement, son hospitalisation à la demande d'un tiers n'était pas justifiée. M. I...soutient que cette décision est fautive dès lors que, selon lui, son père aurait récemment adopté un comportement narcissique et paranoïaque, serait devenu agressif et malveillant tant avec son entourage qu'avec les tiers et, par suite, dangereux pour son épouse et pour lui-même. Toutefois, s'il se prévaut également de la lettre qu'il a adressée en ce sens au médecin référent du SECOP, ces allégations ne sont assorties d'aucun élément factuel permettant de les regarder comme établies. Il ressort, de plus, du rapport établi par le médecin du SECOP que le médecin traitant d'Ange-MarieI..., joint par téléphone, a indiqué n'avoir présenté une demande d'hospitalisation à la demande d'un tiers qu'à la suite des demandes réitérées de M. I...mais qu'il ne lui semblait pas que son patient présentait des troubles justifiant une telle hospitalisation et a souligné le caractère conflictuel des relations entre le père et le fils. En outre et contrairement à ce que soutient M.I..., un soutien psychiatrique a été proposé par le médecin référent du SECOP à Ange-MarieI..., qui l'a accepté. Enfin et en tout état de cause, eu égard au caractère purement accidentel de l'incendie à l'origine du décès d'Ange-Marie et JeanneI..., M. I...n'est pas fondé à soutenir qu'il existerait un lien de causalité direct et certain entre le rejet de sa demande tendant à l'hospitalisation forcée de son père et la survenance de cet incendie.
4. Il résulte de tout ce qui précède que M. I...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses demandes indemnitaires. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. I...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...I..., au centre hospitalier Charles Perrens, au centre hospitalier universitaire de Bordeaux, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Délibéré après l'audience du 14 mai 2019 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 juin 2019.
Le rapporteur,
Manuel J...
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°17BX02269