CAA de VERSAILLES, 3ème chambre, 27/11/2018, 18VE00395, Inédit au recueil Lebon
CAA de VERSAILLES, 3ème chambre, 27/11/2018, 18VE00395, Inédit au recueil Lebon
CAA de VERSAILLES - 3ème chambre
- Non publié au bulletin
Audience publique du mardi 27 novembre 2018
- Président
- M. BRESSE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...A...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 à 2007, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1107552 du 25 septembre 2013, le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise, après avoir prononcé au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2005 une réduction résultant de l'application de la déduction prévue à l'article L. 77 du livre des procédures fiscales, a rejeté le surplus de leur demande.
Par un arrêt n° 13VE03400 du 31 décembre 2015, contre lequel M. et Mme A...se sont pourvus en cassation, la Cour administrative d'appel de Versailles, après avoir réduit de la somme de 59 927 euros la base imposable de M. et Mme A...dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers pour l'année 2006, a déchargé les intéressés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des majorations pour manquement délibéré correspondantes dans la limite de cette réduction de leurs bases d'imposition et réformé le jugement attaqué en ce qu'il avait de contraire, a rejeté, par son
article 5, le surplus des conclusions de la requête.
Par une décision n° 397401 du 1er février 2018, le Conseil d'Etat a, à la demande de
M. et MmeA..., annulé l'article 5 de l'arrêt de la Cour et lui a renvoyé, dans cette mesure, le jugement de l'affaire, réenregistrée sous le n° 18VE00395.
Procédure devant la Cour :
Par un mémoire après cassation et renvoi, enregistré le 14 juin 2018, et un mémoire complémentaire enregistré le 20 juillet 2018, M. et MmeA..., représentés par la Selas CCPE, avocat, demandent à la Cour :
1° de réformer le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du
25 septembre 2013 en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2006, ainsi que les pénalités correspondantes ;
2° de prononcer la décharge des impositions et pénalités litigieuses établies au titre de l'année 2006 ;
3° à titre subsidiaire, de prononcer le dégrèvement de 50 % de la totalité des sommes en litige, en principal et pénalités ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors qu'il n'a pas été donné suite à leur demande de rencontrer l'interlocuteur départemental ; l'absence de saisine de l'interlocuteur départemental emporte violation du débat contradictoire et du devoir de loyauté, la réponse de l'administration à leurs observations leur ayant laissé légitimement croire que la saisine qu'ils avaient demandée de chacun des deux recours hiérarchiques était valide et suffisante et qu'il n'y avait pas lieu de renouveler cette saisine pour le second recours hiérarchique. Cette croyance légitime est également née de l'effectivité et de la rapidité du premier recours devant l'inspecteur et de celles des deux recours hiérarchiques dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société A...et Compagnie ; si l'irrégularité ainsi commise ne devait pas être qualifiée d'erreur substantielle, il y aurait lieu de faire application du 1er alinéa de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;
- le caractère tardif de la réponse du contribuable n'est pas démontré et, en tout état de cause, une telle tardiveté n'a d'incidence que sur les règles de dévolution de la charge de la preuve ;
- le service n'établit pas la surévaluation du prix de deux millions d'euros pour lequel M. A... a cédé le 31 décembre 2006 ses titres de la société A...International à la société A...et Compagnie ; l'administration n'apporte pas la preuve d'un écart significatif entre la valeur de cession et la valeur vénale, ni par le calcul de la méthode de la valeur mathématique qu'elle a retenue, ni par le rejet injustifié de la méthode des comparaisons ;
- elle n'apporte pas davantage la preuve d'une intention d'octroyer et de recevoir une libéralité ;
- en l'absence d'intention d'éluder l'impôt, les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.
Par deux mémoires en défense, enregistrés après cassation et renvoi, les 13 mars 2018 et 7 août 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- en application de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales, il est recevable à invoquer un nouveau moyen tiré du caractère tardif des observations des contribuables par lettre du 19 février 2010, adressées le 8 mars 2010, à la proposition de rectification du 21 décembre 2009 ;
- les requérants sont, par voie de conséquence, réputés avoir acquiescé aux rectifications objet de la proposition de rectification du 21 décembre 2009 et le recours auprès de " l'interlocuteur régional " ne leur était pas ouvert ;
- les contribuables supportent, par ailleurs, la charge d'apporter la preuve de l'exagération des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2006 en application de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales ;
- les autres moyens des requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Ribeiro-Mengoli,
- les conclusions de M. Huon, rapporteur public,
- et les observations de Me Prest, avocat de M. et MmeA.sans incidence sur la dévolution de la charge de la preuve
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, l'administration a réintégré dans les revenus imposables de M. et Mme A...au titre de l'année 2006, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts, des distributions provenant de la société A...et Compagnie, dont M. A... était dirigeant et associé. Par un jugement du 25 septembre 2013, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, après avoir prononcé au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2005 une réduction résultant de l'application de la déduction prévue à l'article L. 77 du livre des procédures fiscales, a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2006 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un arrêt 13VE03400 du
31 décembre 2015, la Cour administrative d'appel de Versailles a réduit leur base imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers pour l'année 2006 de la somme de
59 927 euros correspondant au redressement résultant de la sortie d'éléments de décoration de l'actif de la société A...et Compagnie, les a déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des majorations pour manquement délibéré correspondantes dans la limite de cette réduction, a réformé le jugement susvisé en ce qu'il avait de contraire, et, par son article 5, a rejeté le surplus des conclusions de M. et Mme A...portant sur la rectification de leur revenu imposable au titre de l'année 2006, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, à hauteur de la surélévation du prix de cession des titres de la société A...International à la société A...et Compagnie. Par une décision du 1er février 2008, le Conseil d'Etat a annulé l'article 5 de l'arrêt susvisé et renvoyé l'affaire, dans cette mesure, à la Cour administrative d'appel de Versailles.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. D'une part, aux termes de l'article 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 11, ce délai est prorogé de trente jours. (...) ". L'article R. 57-1 de ce même livre dispose : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ".
3. D'autre part, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales dans sa version alors en vigueur : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. ". Dans la partie relative à la conclusion du contrôle, en cas de désaccord avec le vérificateur, la charte des droits et obligations du contribuable vérifié prévoit, dans son texte applicable à la procédure en litige, que : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les rectifications envisagées, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur divisionnaire ou principal. / Si, après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ". En application de ces dispositions, qui assurent au contribuable qui en fait la demande la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, en cas de désaccord avec le vérificateur, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur puis avec l'interlocuteur départemental dans les conditions qu'elles précisent, l'appel à l'interlocuteur départemental ne peut être demandé par le contribuable qu'après la réponse du service à ses observations maintenant les rectifications proposées et après une rencontre avec le supérieur hiérarchique du vérificateur.
4. Les requérants soutiennent que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité dans la mesure où ils ont pu légitimement croire, compte tenu de l'attitude de l'administration et notamment des termes de la réponse aux observations du contribuable du 3 mai 2010, que la saisine de l'interlocuteur départemental du fait de la persistance du désaccord sur les redressements en litige ne supposait aucune nouvelle démarche de leur part et serait entreprise par l'administration à la suite du rendez-vous le 8 juin 2010 organisé avec l'inspecteur principal. Il résulte, toutefois, de l'instruction que la proposition de rectification du 21 décembre 2009 a été notifiée à M. et Mme A...le 28 décembre suivant et que ces derniers ayant demandé une prolongation du délai dont ils disposaient pour présenter leurs observations en application de l'article L. 57 précité du livre des procédures fiscales, celui-ci expirait le 1er mars 2010. Si les observations en réponse à la proposition de rectification ont fait l'objet d'un courrier du conseil des requérants daté du 19 février 2010, il résulte des mentions apposées sur l'enveloppe expédiée par le conseil des requérants à l'administration fiscale, et de l'avis de réception correspondant, produits par le ministre de l'action et des comptes publics, que ce courrier, reçu le 10 mars 2010, n'a été adressé à l'administration fiscale que le 8 mars 2010, au-delà du délai de soixante jours dont disposaient M. et MmeA.sans incidence sur la dévolution de la charge de la preuve Si ces derniers soutiennent que le ministre de l'action et des comptes publics n'établit pas, comme il le fait valoir, que l'enveloppe en cause, au demeurant produite tardivement, aurait contenu leur courrier du 19 février 2010,
M. et MmeA..., à qui il appartient d'apporter la preuve des formalités qui leur incombent en vertu des dispositions de l'article L. 286 du livre des procédures fiscales reconnaissent ne pas avoir conservé de document tendant à établir que la date de l'envoi de leur courrier du 19 février 2010 serait antérieure au 8 mars 2010 alors portant qu'il a fait l'objet d'un envoi en recommandé par leur conseil et se bornent à produire une attestation établie par ses soins le 1er juin 2018, insuffisamment probante, par laquelle ce dernier confirme ne pas être en possession de l'accusé réception correspondant à son courrier du 19 février 2010 et indique qu'il est selon lui peu probable que l'enveloppe produite se rattache au courrier du 19 février 2010 dans la mesure notamment où les procédures mises en oeuvre par le cabinet dans le cadre de sa certification ISO 2001 prévoient l'envoi des courriers le jour de leur signature. Au surplus, la réponse faite le
3 mai 2010 par l'administration aux observations de M. et Mme A...corrobore les dires de l'administration, le service ayant observé à cette occasion que leur courrier n'était parvenu que le 10 mars 2010, après l'expiration du délai de réponse dont ils bénéficiaient. Par suite,
M. et Mme A...sont réputés avoir accepté les redressements en litige et en l'absence de persistance d'un désaccord, l'administration n'était donc pas tenue de saisir l'interlocuteur départemental, alors même qu'elle a accepté, à titre purement gracieux, de poursuivre la procédure contradictoire en répondant aux observations du contribuable et en saisissant l'inspecteur principal. Il en résulte que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que l'administration aurait méconnu le caractère contradictoire de la procédure et le principe de loyauté et entaché la procédure d'imposition, par voie de conséquence, d'une irrégularité.
5. Il résulte de ce qui précède que la procédure mise en oeuvre par l'administration n'est entachée d'aucune erreur et, en conséquence, la société requérante ne peut invoquer utilement les dispositions du 1er alinéa de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
6. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque (...) s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. ".
7. Il résulte de ce qui a été dit au point 4. que M. et Mme A...supportent la charge d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration, la circonstance que le service ait néanmoins accepté de répondre à leurs observations tardives demeurant.sans incidence sur la dévolution de la charge de la preuve
En ce qui concerne l'existence de distributions résultant de la surévaluation du prix de cession des titres de la société A...International :
8. D'une part, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ". En cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions, citées ci-dessus, du c de l'article 111 du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du cocontractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause.
9. D'autre part, la valeur vénale des actions non admises à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession ou l'apport est intervenu. Cette valeur doit être établie, en priorité, par référence à la valeur qui ressort de transactions portant, à la même époque, sur des titres de la société, dès lors que cette valeur ne résulte pas d'un prix de convenance. Toutefois, en l'absence de transactions intervenues dans des conditions équivalentes et portant sur les titres de la même société ou, à défaut, de sociétés similaires, l'administration peut légalement se fonder sur l'une des méthodes destinées à déterminer la valeur de l'actif ou sur la combinaison de plusieurs de ces méthodes.
10. M. A...a cédé le 31 décembre 2016 à la société A...et Compagnie la totalité des actions composant le capital de la société A...International, société non cotée, pour le prix de 2 000 000 euros, cette dernière ayant fait l'objet, le 1er avril 2007, d'une transmission universelle du patrimoine à la société A...et Compagnie. Le service a estimé que la valeur vénale de ces titres devait être fixée à 51 470 euros et qu'en conséquence, l'avantage consenti à M. et Mme A...était représentatif de revenus distribués à hauteur d'un montant
de 1 948 530 euros, imposable entre les mains de M. et Mme A...sur le fondement des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts.
11. Le service vérificateur a fixé la valeur vénale des titres de la société A...International à 51 470 euros, à partir de la valeur de l'actif net de la société au bilan de clôture de l'exercice clos en 2006, conformément à la méthode de la valeur mathématique. Le service vérificateur a en effet estimé que la société A...International, qui commercialisait à l'exportation les armements fabriqués par la société A...et Compagnie, dans le cadre d'un contrat d'exclusivité, qui s'adressait aux mêmes clients que cette dernière, principalement la société Dassault, pratiquait les mêmes prix de vente, et était dépourvue à la date de la cession de carnets de commande, de salariés et de locaux, constituait une simple société de facturation pour la société A...et Compagnie sans fonds de commerce propre ni autonomie par rapport à cette dernière. Le service vérificateur a également relevé que la cession ne s'était traduite par aucun flux financier, mais avait permis de solder le compte courant débiteur de M. A...dans les comptes de la société A...et Compagnie.
12. D'une part, M. et Mme A...ne peuvent valablement se prévaloir du prix de vente fixé dans le contrat de cession conclu avec une société tierce portant, après la transmission universelle du patrimoine de la société A...International à la société A...et Compagnie en avril 2007, sur l'ensemble des titres des sociétés du groupe, dont les stipulations ne permettent pas de confirmer la valorisation de la société A...International à 2 000 000 euros et qui, conclu plus d'un an après la cession en litige, le 3 juillet 2008, a de surcroît été dénoncé avant sans conclusion définitive. Par ailleurs, la valorisation des titres de l'ensemble des sociétés du groupe A...dans le cadre d'une cession intervenue en juillet 2015, neuf ans après la cession en litige, et en juin 2018, plus de dix ans après celle-ci, ne peut davantage être utilement invoquée par M. et Mme A...pour justifier le prix de vente des titres de la seule société A...International à la société A...et Compagnie le 31 décembre 2006.
13. D'autre part, M. et Mme A...reprochent au service vérificateur de ne pas avoir pris en compte la valeur réelle du fonds de commerce de la société A...International, alors que cette dernière, distributeur exclusif de la société A...et Compagnie, était chargée de développer les ventes d'armement à l'exportation, justifiait d'autorisations de commerce de matériels de guerre délivrées depuis sa création en 1990 et de diverses autorisations préalables pour des opérations de vente, prêt et maintenance d'armes à l'exportation. Ils soutiennent encore que c'est l'activité ainsi développée par la société A...International, dans le contexte particulier de l'armement, qui a permis à la société A...et Compagnie de finaliser, après la transmission universelle de patrimoine intervenue en avril 2007, la vente de matériels de guerre auprès de plusieurs Etats pour lesquelles la société A...International avait obtenu une autorisation préalable de vente, en particulier avec les autorités libyennes. Il n'est, toutefois, justifié, pour cette société, dépourvue de locaux et de salariés, dont le chiffre d'affaires depuis 2004 était inférieur à 500 000 euros et s'établissait en 2006 à 286 276 euros, dont les autorisations produites sont pour la plupart antérieures à 2004 et dont les prix de vente sont ceux que pratiquaient la société A...et Compagnie, d'aucun carnet de commande ni d'aucun actif incorporel immobilisé dans les comptes des exercices clos en 2005 et 2006. La réalité des perspectives d'avenir de la société A...International n'est pas davantage démontrée par la seule existence de ventes à l'export réalisées par la société A...et Compagnie après la dissolution en 2007 de la société A...International, auprès d'Etats avec lesquels cette dernière avait pu être en négociations. M. et Mme A...n'établissent ainsi pas que la valeur vénale de la société A...International devait être fixée à deux millions d'euros, soit près de 40% du chiffre d'affaires de la société A...et Compagnie dans le secteur de l'armement, et dont ils ne précisent d'ailleurs pas les modalités de calcul. Les contribuables n'apportent dès lors pas la preuve, dont ils ont la charge, par application des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, que les titres de la société A...International cédés à la société A...et Compagnie avaient, à la date de la cession, une valeur vénale excédant leur valeur mathématique, soit 51 470 euros.
14. Enfin, M. A...était dirigeant et associé des sociétés A...International et A...et Compagnie, la première étant par ailleurs économiquement dépendante de la seconde. Il est également constant que la cession litigieuse n'a donné lieu à aucun mouvement au sein de la trésorerie de la société A...et Compagnie mais a permis de solder le compte courant d'associé de M. A...débiteur à l'égard de la société A...et Compagnie à hauteur de 2 236 127 euros et de réaliser une transmission universelle de patrimoine dans la perspective de la vente des sociétés du groupe. Eu égard à cette communauté d'intérêts l'intention, pour la société A...et Compagnie, d'octroyer, et, pour M.A..., de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession est établie, sans qu'y fasse obstacle la seule circonstance qu'il a acquis le jour même de la cession une partie des titres litigieux pour un prix déterminé à partir d'une valorisation de la société A...International à deux millions d'euros. M. et Mme A...ne sont ainsi pas fondés à contester la rectification de leur revenu imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à hauteur de la surévaluation du prix de cession des titres de la société A...International à la société A...et Compagnie.
Sur les pénalités :
15. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (....) ".
16. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la société A...et Compagnie a acquis auprès de
M. A...les titres de la société A...International pour un prix massivement majoré de deux millions d'euros. Eu égard à la qualité de dirigeant de M. A...dans ces deux sociétés et aux modalités de la cession, réglée par le débit du compte courant d'associé de M. A...dans les comptes de la société A...et Compagnie, sans aucun flux financier, M. A...ne peut être regardé comme ayant ignoré l'existence d'une forte surévaluation du prix des titres cédés, laquelle constitue une distribution imposable. Ainsi, le service apporte la preuve que les omissions relevées dans les déclarations de revenus de M. et Mme A...présentaient un caractère délibéré.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande de réduction des impositions supplémentaires et des majorations établies au titre de l'année 2006 à raison de la surévaluation du prix de cession des titres de la société A...International.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent
M. et Mme A...au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A...dont le jugement a été renvoyé à la Cour administrative d'appel de Versailles par la décision du Conseil d'Etat
n° 397401 du 1er février 2018 est rejeté.
8
N° 18VE00395
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...A...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 à 2007, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1107552 du 25 septembre 2013, le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise, après avoir prononcé au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2005 une réduction résultant de l'application de la déduction prévue à l'article L. 77 du livre des procédures fiscales, a rejeté le surplus de leur demande.
Par un arrêt n° 13VE03400 du 31 décembre 2015, contre lequel M. et Mme A...se sont pourvus en cassation, la Cour administrative d'appel de Versailles, après avoir réduit de la somme de 59 927 euros la base imposable de M. et Mme A...dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers pour l'année 2006, a déchargé les intéressés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des majorations pour manquement délibéré correspondantes dans la limite de cette réduction de leurs bases d'imposition et réformé le jugement attaqué en ce qu'il avait de contraire, a rejeté, par son
article 5, le surplus des conclusions de la requête.
Par une décision n° 397401 du 1er février 2018, le Conseil d'Etat a, à la demande de
M. et MmeA..., annulé l'article 5 de l'arrêt de la Cour et lui a renvoyé, dans cette mesure, le jugement de l'affaire, réenregistrée sous le n° 18VE00395.
Procédure devant la Cour :
Par un mémoire après cassation et renvoi, enregistré le 14 juin 2018, et un mémoire complémentaire enregistré le 20 juillet 2018, M. et MmeA..., représentés par la Selas CCPE, avocat, demandent à la Cour :
1° de réformer le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du
25 septembre 2013 en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2006, ainsi que les pénalités correspondantes ;
2° de prononcer la décharge des impositions et pénalités litigieuses établies au titre de l'année 2006 ;
3° à titre subsidiaire, de prononcer le dégrèvement de 50 % de la totalité des sommes en litige, en principal et pénalités ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors qu'il n'a pas été donné suite à leur demande de rencontrer l'interlocuteur départemental ; l'absence de saisine de l'interlocuteur départemental emporte violation du débat contradictoire et du devoir de loyauté, la réponse de l'administration à leurs observations leur ayant laissé légitimement croire que la saisine qu'ils avaient demandée de chacun des deux recours hiérarchiques était valide et suffisante et qu'il n'y avait pas lieu de renouveler cette saisine pour le second recours hiérarchique. Cette croyance légitime est également née de l'effectivité et de la rapidité du premier recours devant l'inspecteur et de celles des deux recours hiérarchiques dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société A...et Compagnie ; si l'irrégularité ainsi commise ne devait pas être qualifiée d'erreur substantielle, il y aurait lieu de faire application du 1er alinéa de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;
- le caractère tardif de la réponse du contribuable n'est pas démontré et, en tout état de cause, une telle tardiveté n'a d'incidence que sur les règles de dévolution de la charge de la preuve ;
- le service n'établit pas la surévaluation du prix de deux millions d'euros pour lequel M. A... a cédé le 31 décembre 2006 ses titres de la société A...International à la société A...et Compagnie ; l'administration n'apporte pas la preuve d'un écart significatif entre la valeur de cession et la valeur vénale, ni par le calcul de la méthode de la valeur mathématique qu'elle a retenue, ni par le rejet injustifié de la méthode des comparaisons ;
- elle n'apporte pas davantage la preuve d'une intention d'octroyer et de recevoir une libéralité ;
- en l'absence d'intention d'éluder l'impôt, les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.
Par deux mémoires en défense, enregistrés après cassation et renvoi, les 13 mars 2018 et 7 août 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- en application de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales, il est recevable à invoquer un nouveau moyen tiré du caractère tardif des observations des contribuables par lettre du 19 février 2010, adressées le 8 mars 2010, à la proposition de rectification du 21 décembre 2009 ;
- les requérants sont, par voie de conséquence, réputés avoir acquiescé aux rectifications objet de la proposition de rectification du 21 décembre 2009 et le recours auprès de " l'interlocuteur régional " ne leur était pas ouvert ;
- les contribuables supportent, par ailleurs, la charge d'apporter la preuve de l'exagération des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2006 en application de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales ;
- les autres moyens des requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Ribeiro-Mengoli,
- les conclusions de M. Huon, rapporteur public,
- et les observations de Me Prest, avocat de M. et MmeA.sans incidence sur la dévolution de la charge de la preuve
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, l'administration a réintégré dans les revenus imposables de M. et Mme A...au titre de l'année 2006, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts, des distributions provenant de la société A...et Compagnie, dont M. A... était dirigeant et associé. Par un jugement du 25 septembre 2013, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, après avoir prononcé au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2005 une réduction résultant de l'application de la déduction prévue à l'article L. 77 du livre des procédures fiscales, a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2006 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un arrêt 13VE03400 du
31 décembre 2015, la Cour administrative d'appel de Versailles a réduit leur base imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers pour l'année 2006 de la somme de
59 927 euros correspondant au redressement résultant de la sortie d'éléments de décoration de l'actif de la société A...et Compagnie, les a déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des majorations pour manquement délibéré correspondantes dans la limite de cette réduction, a réformé le jugement susvisé en ce qu'il avait de contraire, et, par son article 5, a rejeté le surplus des conclusions de M. et Mme A...portant sur la rectification de leur revenu imposable au titre de l'année 2006, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, à hauteur de la surélévation du prix de cession des titres de la société A...International à la société A...et Compagnie. Par une décision du 1er février 2008, le Conseil d'Etat a annulé l'article 5 de l'arrêt susvisé et renvoyé l'affaire, dans cette mesure, à la Cour administrative d'appel de Versailles.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. D'une part, aux termes de l'article 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 11, ce délai est prorogé de trente jours. (...) ". L'article R. 57-1 de ce même livre dispose : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ".
3. D'autre part, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales dans sa version alors en vigueur : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. ". Dans la partie relative à la conclusion du contrôle, en cas de désaccord avec le vérificateur, la charte des droits et obligations du contribuable vérifié prévoit, dans son texte applicable à la procédure en litige, que : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les rectifications envisagées, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur divisionnaire ou principal. / Si, après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ". En application de ces dispositions, qui assurent au contribuable qui en fait la demande la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, en cas de désaccord avec le vérificateur, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur puis avec l'interlocuteur départemental dans les conditions qu'elles précisent, l'appel à l'interlocuteur départemental ne peut être demandé par le contribuable qu'après la réponse du service à ses observations maintenant les rectifications proposées et après une rencontre avec le supérieur hiérarchique du vérificateur.
4. Les requérants soutiennent que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité dans la mesure où ils ont pu légitimement croire, compte tenu de l'attitude de l'administration et notamment des termes de la réponse aux observations du contribuable du 3 mai 2010, que la saisine de l'interlocuteur départemental du fait de la persistance du désaccord sur les redressements en litige ne supposait aucune nouvelle démarche de leur part et serait entreprise par l'administration à la suite du rendez-vous le 8 juin 2010 organisé avec l'inspecteur principal. Il résulte, toutefois, de l'instruction que la proposition de rectification du 21 décembre 2009 a été notifiée à M. et Mme A...le 28 décembre suivant et que ces derniers ayant demandé une prolongation du délai dont ils disposaient pour présenter leurs observations en application de l'article L. 57 précité du livre des procédures fiscales, celui-ci expirait le 1er mars 2010. Si les observations en réponse à la proposition de rectification ont fait l'objet d'un courrier du conseil des requérants daté du 19 février 2010, il résulte des mentions apposées sur l'enveloppe expédiée par le conseil des requérants à l'administration fiscale, et de l'avis de réception correspondant, produits par le ministre de l'action et des comptes publics, que ce courrier, reçu le 10 mars 2010, n'a été adressé à l'administration fiscale que le 8 mars 2010, au-delà du délai de soixante jours dont disposaient M. et MmeA.sans incidence sur la dévolution de la charge de la preuve Si ces derniers soutiennent que le ministre de l'action et des comptes publics n'établit pas, comme il le fait valoir, que l'enveloppe en cause, au demeurant produite tardivement, aurait contenu leur courrier du 19 février 2010,
M. et MmeA..., à qui il appartient d'apporter la preuve des formalités qui leur incombent en vertu des dispositions de l'article L. 286 du livre des procédures fiscales reconnaissent ne pas avoir conservé de document tendant à établir que la date de l'envoi de leur courrier du 19 février 2010 serait antérieure au 8 mars 2010 alors portant qu'il a fait l'objet d'un envoi en recommandé par leur conseil et se bornent à produire une attestation établie par ses soins le 1er juin 2018, insuffisamment probante, par laquelle ce dernier confirme ne pas être en possession de l'accusé réception correspondant à son courrier du 19 février 2010 et indique qu'il est selon lui peu probable que l'enveloppe produite se rattache au courrier du 19 février 2010 dans la mesure notamment où les procédures mises en oeuvre par le cabinet dans le cadre de sa certification ISO 2001 prévoient l'envoi des courriers le jour de leur signature. Au surplus, la réponse faite le
3 mai 2010 par l'administration aux observations de M. et Mme A...corrobore les dires de l'administration, le service ayant observé à cette occasion que leur courrier n'était parvenu que le 10 mars 2010, après l'expiration du délai de réponse dont ils bénéficiaient. Par suite,
M. et Mme A...sont réputés avoir accepté les redressements en litige et en l'absence de persistance d'un désaccord, l'administration n'était donc pas tenue de saisir l'interlocuteur départemental, alors même qu'elle a accepté, à titre purement gracieux, de poursuivre la procédure contradictoire en répondant aux observations du contribuable et en saisissant l'inspecteur principal. Il en résulte que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que l'administration aurait méconnu le caractère contradictoire de la procédure et le principe de loyauté et entaché la procédure d'imposition, par voie de conséquence, d'une irrégularité.
5. Il résulte de ce qui précède que la procédure mise en oeuvre par l'administration n'est entachée d'aucune erreur et, en conséquence, la société requérante ne peut invoquer utilement les dispositions du 1er alinéa de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
6. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque (...) s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. ".
7. Il résulte de ce qui a été dit au point 4. que M. et Mme A...supportent la charge d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration, la circonstance que le service ait néanmoins accepté de répondre à leurs observations tardives demeurant.sans incidence sur la dévolution de la charge de la preuve
En ce qui concerne l'existence de distributions résultant de la surévaluation du prix de cession des titres de la société A...International :
8. D'une part, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ". En cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions, citées ci-dessus, du c de l'article 111 du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du cocontractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause.
9. D'autre part, la valeur vénale des actions non admises à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession ou l'apport est intervenu. Cette valeur doit être établie, en priorité, par référence à la valeur qui ressort de transactions portant, à la même époque, sur des titres de la société, dès lors que cette valeur ne résulte pas d'un prix de convenance. Toutefois, en l'absence de transactions intervenues dans des conditions équivalentes et portant sur les titres de la même société ou, à défaut, de sociétés similaires, l'administration peut légalement se fonder sur l'une des méthodes destinées à déterminer la valeur de l'actif ou sur la combinaison de plusieurs de ces méthodes.
10. M. A...a cédé le 31 décembre 2016 à la société A...et Compagnie la totalité des actions composant le capital de la société A...International, société non cotée, pour le prix de 2 000 000 euros, cette dernière ayant fait l'objet, le 1er avril 2007, d'une transmission universelle du patrimoine à la société A...et Compagnie. Le service a estimé que la valeur vénale de ces titres devait être fixée à 51 470 euros et qu'en conséquence, l'avantage consenti à M. et Mme A...était représentatif de revenus distribués à hauteur d'un montant
de 1 948 530 euros, imposable entre les mains de M. et Mme A...sur le fondement des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts.
11. Le service vérificateur a fixé la valeur vénale des titres de la société A...International à 51 470 euros, à partir de la valeur de l'actif net de la société au bilan de clôture de l'exercice clos en 2006, conformément à la méthode de la valeur mathématique. Le service vérificateur a en effet estimé que la société A...International, qui commercialisait à l'exportation les armements fabriqués par la société A...et Compagnie, dans le cadre d'un contrat d'exclusivité, qui s'adressait aux mêmes clients que cette dernière, principalement la société Dassault, pratiquait les mêmes prix de vente, et était dépourvue à la date de la cession de carnets de commande, de salariés et de locaux, constituait une simple société de facturation pour la société A...et Compagnie sans fonds de commerce propre ni autonomie par rapport à cette dernière. Le service vérificateur a également relevé que la cession ne s'était traduite par aucun flux financier, mais avait permis de solder le compte courant débiteur de M. A...dans les comptes de la société A...et Compagnie.
12. D'une part, M. et Mme A...ne peuvent valablement se prévaloir du prix de vente fixé dans le contrat de cession conclu avec une société tierce portant, après la transmission universelle du patrimoine de la société A...International à la société A...et Compagnie en avril 2007, sur l'ensemble des titres des sociétés du groupe, dont les stipulations ne permettent pas de confirmer la valorisation de la société A...International à 2 000 000 euros et qui, conclu plus d'un an après la cession en litige, le 3 juillet 2008, a de surcroît été dénoncé avant sans conclusion définitive. Par ailleurs, la valorisation des titres de l'ensemble des sociétés du groupe A...dans le cadre d'une cession intervenue en juillet 2015, neuf ans après la cession en litige, et en juin 2018, plus de dix ans après celle-ci, ne peut davantage être utilement invoquée par M. et Mme A...pour justifier le prix de vente des titres de la seule société A...International à la société A...et Compagnie le 31 décembre 2006.
13. D'autre part, M. et Mme A...reprochent au service vérificateur de ne pas avoir pris en compte la valeur réelle du fonds de commerce de la société A...International, alors que cette dernière, distributeur exclusif de la société A...et Compagnie, était chargée de développer les ventes d'armement à l'exportation, justifiait d'autorisations de commerce de matériels de guerre délivrées depuis sa création en 1990 et de diverses autorisations préalables pour des opérations de vente, prêt et maintenance d'armes à l'exportation. Ils soutiennent encore que c'est l'activité ainsi développée par la société A...International, dans le contexte particulier de l'armement, qui a permis à la société A...et Compagnie de finaliser, après la transmission universelle de patrimoine intervenue en avril 2007, la vente de matériels de guerre auprès de plusieurs Etats pour lesquelles la société A...International avait obtenu une autorisation préalable de vente, en particulier avec les autorités libyennes. Il n'est, toutefois, justifié, pour cette société, dépourvue de locaux et de salariés, dont le chiffre d'affaires depuis 2004 était inférieur à 500 000 euros et s'établissait en 2006 à 286 276 euros, dont les autorisations produites sont pour la plupart antérieures à 2004 et dont les prix de vente sont ceux que pratiquaient la société A...et Compagnie, d'aucun carnet de commande ni d'aucun actif incorporel immobilisé dans les comptes des exercices clos en 2005 et 2006. La réalité des perspectives d'avenir de la société A...International n'est pas davantage démontrée par la seule existence de ventes à l'export réalisées par la société A...et Compagnie après la dissolution en 2007 de la société A...International, auprès d'Etats avec lesquels cette dernière avait pu être en négociations. M. et Mme A...n'établissent ainsi pas que la valeur vénale de la société A...International devait être fixée à deux millions d'euros, soit près de 40% du chiffre d'affaires de la société A...et Compagnie dans le secteur de l'armement, et dont ils ne précisent d'ailleurs pas les modalités de calcul. Les contribuables n'apportent dès lors pas la preuve, dont ils ont la charge, par application des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, que les titres de la société A...International cédés à la société A...et Compagnie avaient, à la date de la cession, une valeur vénale excédant leur valeur mathématique, soit 51 470 euros.
14. Enfin, M. A...était dirigeant et associé des sociétés A...International et A...et Compagnie, la première étant par ailleurs économiquement dépendante de la seconde. Il est également constant que la cession litigieuse n'a donné lieu à aucun mouvement au sein de la trésorerie de la société A...et Compagnie mais a permis de solder le compte courant d'associé de M. A...débiteur à l'égard de la société A...et Compagnie à hauteur de 2 236 127 euros et de réaliser une transmission universelle de patrimoine dans la perspective de la vente des sociétés du groupe. Eu égard à cette communauté d'intérêts l'intention, pour la société A...et Compagnie, d'octroyer, et, pour M.A..., de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession est établie, sans qu'y fasse obstacle la seule circonstance qu'il a acquis le jour même de la cession une partie des titres litigieux pour un prix déterminé à partir d'une valorisation de la société A...International à deux millions d'euros. M. et Mme A...ne sont ainsi pas fondés à contester la rectification de leur revenu imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à hauteur de la surévaluation du prix de cession des titres de la société A...International à la société A...et Compagnie.
Sur les pénalités :
15. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (....) ".
16. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la société A...et Compagnie a acquis auprès de
M. A...les titres de la société A...International pour un prix massivement majoré de deux millions d'euros. Eu égard à la qualité de dirigeant de M. A...dans ces deux sociétés et aux modalités de la cession, réglée par le débit du compte courant d'associé de M. A...dans les comptes de la société A...et Compagnie, sans aucun flux financier, M. A...ne peut être regardé comme ayant ignoré l'existence d'une forte surévaluation du prix des titres cédés, laquelle constitue une distribution imposable. Ainsi, le service apporte la preuve que les omissions relevées dans les déclarations de revenus de M. et Mme A...présentaient un caractère délibéré.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande de réduction des impositions supplémentaires et des majorations établies au titre de l'année 2006 à raison de la surévaluation du prix de cession des titres de la société A...International.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent
M. et Mme A...au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A...dont le jugement a été renvoyé à la Cour administrative d'appel de Versailles par la décision du Conseil d'Etat
n° 397401 du 1er février 2018 est rejeté.
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N° 18VE00395