Conseil d'État, Juge des référés, 24/06/2015, 390705, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, Juge des référés, 24/06/2015, 390705, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - Juge des référés
- ECLI:FR:CEORD:2015:390705.20150624
- Non publié au bulletin
Audience publique du mercredi 24 juin 2015
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
1° Sous le n° 390705, par une requête enregistrée le 3 juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département des Yvelines, représenté par le président du conseil départemental, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) d'ordonner la suspension de l'exécution du décret n° 2015-525 du 12 mai 2015 portant dissolution au 31 décembre 2015 des établissements publics fonciers des Hauts-de-Seine, du Val-d'Oise et des Yvelines et modifiant le décret n° 2006-1140 du 13 septembre 2006 portant création de l'établissement public foncier d'Ile-de-France ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la condition d'urgence est remplie, dès lors que le décret contesté préjudicie gravement et immédiatement à ses intérêts et qu'en toute hypothèse la dissolution d'un établissement public crée par elle-même une situation d'urgence ;
- l'abrogation, à la suite de la question prioritaire de constitutionnalité posée dans la présente instance, du 1° du I et du II de l'article 17 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 privera de base légale le décret contesté ;
- le décret est intervenu à l'issue d'une procédure ayant méconnu les exigences issues de l'article L. 321-2 du code de l'urbanisme, les consultations organisées n'ayant été qu'apparentes, puisque la loi avait d'ores et déjà arrêté le principe de la création d'un unique établissement public foncier régional, des établissements publics de coopération intercommunale qui n'auraient pas dû être consultés l'ayant été, le document envoyé à la consultation comportant deux versions différentes du projet de décret et des erreurs de rédaction l'ayant rendu partiellement incompréhensible ;
- le décret méconnaît le principe d'égalité en ce qu'il attribue à la métropole du Grand Paris quatre sièges au conseil de l'établissement, cependant que la totalité des autres établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ne disposera au maximum que de quatre sièges.
Par un mémoire distinct, enregistré le 3 juin 2015, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, le département des Yvelines demande au juge des référés du Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 1° du I et du II de l'article 17 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.
Il soutient que :
- les dispositions contestées sont applicables au litige ;
- elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ;
- la question est sérieuse, le législateur ayant empiété sur le domaine du pouvoir réglementaire en prévoyant lui-même le regroupement des établissements publics foncier d'Ile-de-France en un seul établissement et cet empiètement ayant eu pour effet de porter atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales, dès lors qu'il prive d'effectivité la procédure de consultation des collectivités locales prévue par l'article L. 321-2 du code de l'urbanisme pour la création d'un établissement public foncier.
Par une intervention, enregistrée le 17 juin 2015, le département des Hauts-de-Seine, représenté par le président du conseil départemental, demande que le juge des référés du Conseil d'Etat fasse droit aux conclusions du département des Yvelines, mette à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et renvoie au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée.
Il reprend les moyens soulevés par le département des Yvelines et soutient en outre que :
- son intervention est recevable ;
- le décret est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, la création du futur établissement public foncier mettant à mal les politiques conduites dans le cadre départemental.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2015, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité concluent au rejet de la requête et à ce que le juge des référés du Conseil d'Etat ne renvoie pas la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.
Elles soutiennent que la condition d'urgence n'est pas remplie, que les moyens soulevés par le département des Yvelines ne sont pas fondés et, en outre, que :
- la requête est irrecevable dès lors que le président du conseil départemental n'est pas habilité à agir au nom du département des Yvelines, lequel n'a pas intérêt à agir ;
- la question de constitutionnalité soulevée ne présente pas un caractère sérieux.
Par un mémoire enregistré le 18 juin 2015, le Premier ministre s'associe aux observations présentées par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée au ministre des finances et des comptes publics ainsi qu'au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire ;
2° Sous le n° 390736, par une requête enregistrée le 4 juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département du Val-d'Oise, représenté par le président du conseil départemental, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) d'ordonner la suspension de l'exécution du décret n° 2015-525 du 12 mai 2015 portant dissolution au 31 décembre 2015 des établissements publics fonciers des Hauts-de-Seine, du Val-d'Oise et des Yvelines et modifiant le décret n° 2006-1140 du 13 septembre 2006 portant création de l'établissement public foncier d'Ile-de-France ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il invoque les mêmes moyens que ceux présentés par le département des Yvelines dans la requête n° 390705.
Par un mémoire distinct, enregistré le 4 juin 2015, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, le département du Val-d'Oise demande au juge des référés du Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 1° du I et du II de l'article 17 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.
Il invoque les mêmes moyens que ceux présentés à l'appui de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée sous le n° 390705.
Par une intervention, enregistrée le 17 juin 2015, le département des Hauts-de-Seine, représenté par le président du conseil départemental, demande que le juge des référés du Conseil d'Etat fasse droit aux conclusions à fins de suspension du département du Val-d'Oise, mette à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et renvoie au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée.
Il invoque les mêmes moyens que ceux présentés dans son intervention sous le n° 390705
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2015, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité concluent au rejet de la requête et à ce que le juge des référés du Conseil d'Etat ne renvoie pas la question soulevée au Conseil constitutionnel.
Elles invoquent les mêmes moyens que ceux présentés par elles sous le n° 390705.
Par un mémoire enregistré le 18 juin 2015, le Premier ministre s'associe aux observations présentées par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée au ministre des finances et des comptes publics ainsi qu'au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire;
Vu le décret dont la suspension de l'exécution est demandée ;
Vu la copie des requêtes à fin d'annulation de ce décret ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la Constitution, notamment son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le département des Yvelines et le département du Val-d'Oise ainsi que le département des Hauts-de-Seine, d'autre part, le Premier ministre, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, le ministre des finances et des comptes publics, le ministre de l'intérieur, la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 23 juin 2015 à 8 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Boucard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du département des Yvelines et du département du Val-d'Oise ;
- Me Molinié, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du département des Hauts-de-Seine ;
- les représentants du département des Hauts-de-Seine ;
- les représentants de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;
- les représentants de la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;
1. Considérant que les requêtes du département des Yvelines et du département du Val-d'Oise tendent à ce que soit ordonnée la suspension de l'exécution du même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule ordonnance ;
2. Considérant que le département des Hauts-de-Seine a intérêt à la suspension de l'exécution du décret contesté ; que ses interventions sont par suite recevables ;
3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ; qu'il résulte de ces dispositions que le prononcé de la suspension d'un acte administratif est subordonné notamment à une condition d'urgence ; que l'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;
4. Considérant que la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles a modifié l'article L. 321-1 du code de l'urbanisme pour prévoir que " la région d'Ile-de-France compte un seul établissement public foncier de l'Etat " ; que cette même loi dispose, à son article 17 : " Au plus tard le 31 décembre 2015, l'établissement public foncier de l'Etat de la région d'Ile-de-France dont le périmètre est le plus large est substitué aux autres établissements publics fonciers de l'Etat de la région dans leurs droits et obligations " ; qu'en application de ces dispositions, le décret du 12 mai 2015, dont les requérants demandent que soit ordonnée la suspension de son exécution, prévoit la dissolution des établissements publics fonciers des Hauts-de-Seine, du Val-d'Oise et des Yvelines, modifie le décret du 13 septembre 2006 portant création de l'établissement public foncier d'Ile-de-France et organise les modalités de la substitution de ce dernier établissement aux trois établissements dissous ;
5. Considérant que pour justifier de la condition d'urgence les départements requérants font valoir, d'une part, que la substitution à compter du 1er janvier 2016 d'un établissement foncier unique, compétent pour l'ensemble de la région Ile-de-France, aux trois établissements publics fonciers dont le périmètre d'intervention coïncide avec leurs limites géographiques aura pour conséquences que les politiques d'aménagement conduites dans ces départements seront remises en cause, que le nouvel établissement régional ne sera pas à même de prendre en compte les spécificités territoriales et, d'autre part, que des opérations préliminaires à la fusion ont déjà été engagées ; que, cependant, il ressort des pièces du dossier, ainsi que des indications données au cours de l'audience de référé, que la dissolution des trois établissements concernés ne sera effective qu'au 31 décembre 2015, que les activités de ces établissements se poursuivront jusqu'à cette date, et que si, à compter de cette même date, les programmes pluriannuels d'intervention de ces établissements seront remplacés par le programme pluriannuel d'intervention de l'établissement régional, les conventions d'intervention passées entre ces trois établissements et les collectivités locales seront reprises par l'établissement régional, sans rupture de continuité, ainsi que le prévoit expressément le deuxième alinéa de l'article 2 du décret contesté ; qu'en outre, et contrairement à ce que soutiennent les départements requérants, la dissolution des établissements concernés ne crée pas par elle-même une situation d'urgence à leur égard ; qu'ainsi il n'apparaît pas que l'urgence justifie que soit ordonnée la suspension de l'exécution du décret contesté ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, les conclusions à fins de suspension des requêtes ne peuvent qu'être rejetées ;
6. Considérant que la présente ordonnance rejetant les conclusions à fin de suspension pour défaut d'urgence, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de renvoi au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée ;
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que des sommes soient mises sur leur fondement à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : Les interventions du département des Hauts-de-Seine sont admises.
Article 2 : Les requêtes du département des Yvelines et du département du Val-d'Oise sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au département des Yvelines, au département du Val-d'Oise, au département des Hauts-de-Seine, au Premier ministre, à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, au ministre des finances et des comptes publics, au ministre de l'intérieur et à la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Copie de la présente ordonnance sera transmise au Conseil Constitutionnel.
ECLI:FR:CEORD:2015:390705.20150624
1° Sous le n° 390705, par une requête enregistrée le 3 juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département des Yvelines, représenté par le président du conseil départemental, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) d'ordonner la suspension de l'exécution du décret n° 2015-525 du 12 mai 2015 portant dissolution au 31 décembre 2015 des établissements publics fonciers des Hauts-de-Seine, du Val-d'Oise et des Yvelines et modifiant le décret n° 2006-1140 du 13 septembre 2006 portant création de l'établissement public foncier d'Ile-de-France ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la condition d'urgence est remplie, dès lors que le décret contesté préjudicie gravement et immédiatement à ses intérêts et qu'en toute hypothèse la dissolution d'un établissement public crée par elle-même une situation d'urgence ;
- l'abrogation, à la suite de la question prioritaire de constitutionnalité posée dans la présente instance, du 1° du I et du II de l'article 17 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 privera de base légale le décret contesté ;
- le décret est intervenu à l'issue d'une procédure ayant méconnu les exigences issues de l'article L. 321-2 du code de l'urbanisme, les consultations organisées n'ayant été qu'apparentes, puisque la loi avait d'ores et déjà arrêté le principe de la création d'un unique établissement public foncier régional, des établissements publics de coopération intercommunale qui n'auraient pas dû être consultés l'ayant été, le document envoyé à la consultation comportant deux versions différentes du projet de décret et des erreurs de rédaction l'ayant rendu partiellement incompréhensible ;
- le décret méconnaît le principe d'égalité en ce qu'il attribue à la métropole du Grand Paris quatre sièges au conseil de l'établissement, cependant que la totalité des autres établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ne disposera au maximum que de quatre sièges.
Par un mémoire distinct, enregistré le 3 juin 2015, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, le département des Yvelines demande au juge des référés du Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 1° du I et du II de l'article 17 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.
Il soutient que :
- les dispositions contestées sont applicables au litige ;
- elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ;
- la question est sérieuse, le législateur ayant empiété sur le domaine du pouvoir réglementaire en prévoyant lui-même le regroupement des établissements publics foncier d'Ile-de-France en un seul établissement et cet empiètement ayant eu pour effet de porter atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales, dès lors qu'il prive d'effectivité la procédure de consultation des collectivités locales prévue par l'article L. 321-2 du code de l'urbanisme pour la création d'un établissement public foncier.
Par une intervention, enregistrée le 17 juin 2015, le département des Hauts-de-Seine, représenté par le président du conseil départemental, demande que le juge des référés du Conseil d'Etat fasse droit aux conclusions du département des Yvelines, mette à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et renvoie au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée.
Il reprend les moyens soulevés par le département des Yvelines et soutient en outre que :
- son intervention est recevable ;
- le décret est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, la création du futur établissement public foncier mettant à mal les politiques conduites dans le cadre départemental.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2015, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité concluent au rejet de la requête et à ce que le juge des référés du Conseil d'Etat ne renvoie pas la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.
Elles soutiennent que la condition d'urgence n'est pas remplie, que les moyens soulevés par le département des Yvelines ne sont pas fondés et, en outre, que :
- la requête est irrecevable dès lors que le président du conseil départemental n'est pas habilité à agir au nom du département des Yvelines, lequel n'a pas intérêt à agir ;
- la question de constitutionnalité soulevée ne présente pas un caractère sérieux.
Par un mémoire enregistré le 18 juin 2015, le Premier ministre s'associe aux observations présentées par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée au ministre des finances et des comptes publics ainsi qu'au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire ;
2° Sous le n° 390736, par une requête enregistrée le 4 juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département du Val-d'Oise, représenté par le président du conseil départemental, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) d'ordonner la suspension de l'exécution du décret n° 2015-525 du 12 mai 2015 portant dissolution au 31 décembre 2015 des établissements publics fonciers des Hauts-de-Seine, du Val-d'Oise et des Yvelines et modifiant le décret n° 2006-1140 du 13 septembre 2006 portant création de l'établissement public foncier d'Ile-de-France ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il invoque les mêmes moyens que ceux présentés par le département des Yvelines dans la requête n° 390705.
Par un mémoire distinct, enregistré le 4 juin 2015, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, le département du Val-d'Oise demande au juge des référés du Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 1° du I et du II de l'article 17 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.
Il invoque les mêmes moyens que ceux présentés à l'appui de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée sous le n° 390705.
Par une intervention, enregistrée le 17 juin 2015, le département des Hauts-de-Seine, représenté par le président du conseil départemental, demande que le juge des référés du Conseil d'Etat fasse droit aux conclusions à fins de suspension du département du Val-d'Oise, mette à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et renvoie au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée.
Il invoque les mêmes moyens que ceux présentés dans son intervention sous le n° 390705
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2015, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité concluent au rejet de la requête et à ce que le juge des référés du Conseil d'Etat ne renvoie pas la question soulevée au Conseil constitutionnel.
Elles invoquent les mêmes moyens que ceux présentés par elles sous le n° 390705.
Par un mémoire enregistré le 18 juin 2015, le Premier ministre s'associe aux observations présentées par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée au ministre des finances et des comptes publics ainsi qu'au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire;
Vu le décret dont la suspension de l'exécution est demandée ;
Vu la copie des requêtes à fin d'annulation de ce décret ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la Constitution, notamment son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le département des Yvelines et le département du Val-d'Oise ainsi que le département des Hauts-de-Seine, d'autre part, le Premier ministre, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, le ministre des finances et des comptes publics, le ministre de l'intérieur, la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 23 juin 2015 à 8 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Boucard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du département des Yvelines et du département du Val-d'Oise ;
- Me Molinié, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du département des Hauts-de-Seine ;
- les représentants du département des Hauts-de-Seine ;
- les représentants de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;
- les représentants de la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;
1. Considérant que les requêtes du département des Yvelines et du département du Val-d'Oise tendent à ce que soit ordonnée la suspension de l'exécution du même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule ordonnance ;
2. Considérant que le département des Hauts-de-Seine a intérêt à la suspension de l'exécution du décret contesté ; que ses interventions sont par suite recevables ;
3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ; qu'il résulte de ces dispositions que le prononcé de la suspension d'un acte administratif est subordonné notamment à une condition d'urgence ; que l'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;
4. Considérant que la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles a modifié l'article L. 321-1 du code de l'urbanisme pour prévoir que " la région d'Ile-de-France compte un seul établissement public foncier de l'Etat " ; que cette même loi dispose, à son article 17 : " Au plus tard le 31 décembre 2015, l'établissement public foncier de l'Etat de la région d'Ile-de-France dont le périmètre est le plus large est substitué aux autres établissements publics fonciers de l'Etat de la région dans leurs droits et obligations " ; qu'en application de ces dispositions, le décret du 12 mai 2015, dont les requérants demandent que soit ordonnée la suspension de son exécution, prévoit la dissolution des établissements publics fonciers des Hauts-de-Seine, du Val-d'Oise et des Yvelines, modifie le décret du 13 septembre 2006 portant création de l'établissement public foncier d'Ile-de-France et organise les modalités de la substitution de ce dernier établissement aux trois établissements dissous ;
5. Considérant que pour justifier de la condition d'urgence les départements requérants font valoir, d'une part, que la substitution à compter du 1er janvier 2016 d'un établissement foncier unique, compétent pour l'ensemble de la région Ile-de-France, aux trois établissements publics fonciers dont le périmètre d'intervention coïncide avec leurs limites géographiques aura pour conséquences que les politiques d'aménagement conduites dans ces départements seront remises en cause, que le nouvel établissement régional ne sera pas à même de prendre en compte les spécificités territoriales et, d'autre part, que des opérations préliminaires à la fusion ont déjà été engagées ; que, cependant, il ressort des pièces du dossier, ainsi que des indications données au cours de l'audience de référé, que la dissolution des trois établissements concernés ne sera effective qu'au 31 décembre 2015, que les activités de ces établissements se poursuivront jusqu'à cette date, et que si, à compter de cette même date, les programmes pluriannuels d'intervention de ces établissements seront remplacés par le programme pluriannuel d'intervention de l'établissement régional, les conventions d'intervention passées entre ces trois établissements et les collectivités locales seront reprises par l'établissement régional, sans rupture de continuité, ainsi que le prévoit expressément le deuxième alinéa de l'article 2 du décret contesté ; qu'en outre, et contrairement à ce que soutiennent les départements requérants, la dissolution des établissements concernés ne crée pas par elle-même une situation d'urgence à leur égard ; qu'ainsi il n'apparaît pas que l'urgence justifie que soit ordonnée la suspension de l'exécution du décret contesté ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, les conclusions à fins de suspension des requêtes ne peuvent qu'être rejetées ;
6. Considérant que la présente ordonnance rejetant les conclusions à fin de suspension pour défaut d'urgence, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de renvoi au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée ;
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que des sommes soient mises sur leur fondement à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;
O R D O N N E :
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Article 1er : Les interventions du département des Hauts-de-Seine sont admises.
Article 2 : Les requêtes du département des Yvelines et du département du Val-d'Oise sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au département des Yvelines, au département du Val-d'Oise, au département des Hauts-de-Seine, au Premier ministre, à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, au ministre des finances et des comptes publics, au ministre de l'intérieur et à la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Copie de la présente ordonnance sera transmise au Conseil Constitutionnel.