Cour Administrative d'Appel de Versailles, 5ème chambre, 29/11/2012, 12VE01024, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 20 mars 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Aurélio A, demeurant ..., par Me Cohen , avocat à la Cour ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103976 en date du 1er mars 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation des décisions ministérielles portant retrait de points de son permis de conduire à la suite des infractions commises les 1er février 2009 (4 points), 20 mai 2009 (1 point), 14 mars 2009 (4 points), 28 mars 2010 (6 points), ainsi que la décision " 48 SI " du 26 novembre 2010 portant invalidation de son permis de conduire pour solde de points nul ;

2°) d'ordonner la restitution des points du permis de conduire ;

3°) de condamner l'Etat à verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 761-1 du Code de justice administrative ;

Il soutient :
- que l'administration a méconnu l'obligation d'information prévue par l'article L. 223-3 du code de la route lors de la constatation des infractions ;
- qu'il n'a jamais reçu l'avis de contravention pour l'infraction du 20 mai 2009 constatée par radar automatique et ne s'être pas acquitté de l'amende dont il n'a pas reçu le titre exécutoire ;
- que le ministre ne produit aucune preuve de la réception de cet avis ni une quelconque attestation de la trésorerie mentionnant effectivement un paiement ou une consignation acquittée ;
- que les avis de contravention en date des 1er février 2009, 14 mars 2009 et 28 mars 2010 n'ont pas été signés et qu'il n'a dès lors pas pris connaissance des informations préalables aux retraits de points ;
- que le seul fait de mentionner la perte de points n'apporte nullement la preuve de la communication au contrevenant des informations préalables ;
- qu'il n'a jamais payé les amendes forfaitaires et que, par voie de conséquence, la réalité des infractions n'est pas établie ; que les points ont été retirés dans le cadre de la procédure de l'amende forfaitaire majorée alors que les titres exécutoires correspondant n'ont jamais été portés à sa connaissance ;
- que s'agissant des infractions commises les 20 mai 2009, 14 mars 2009, 28 mars 2010, il a adressé des réclamations au tribunal de police ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience dans la présente instance ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2012, le rapport de Mme Mégret, premier conseiller ;


Considérant que M. A relève régulièrement appel du jugement en date du 1er mars 2012 par lequel le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation des décisions ministérielles portant retrait de quinze points de son permis de conduire à la suite des infractions commises les 1 février 2009 (4 points), 20 mai 2009 (1 point), 14 mars 2009 (4 points), 28 mars 2010 (6 points), ensemble de la décision " 48 SI " du 26 novembre 2010 portant invalidation de son permis de conduire pour solde de points nul ;

Sur les conclusions à fins de non lieu à statuer :

Considérant qu'il ressort du relevé intégral d'information relatif au permis de conduire de M. A, édité le 6 novembre 2012 et produit par le ministre de l'intérieur que la décision " 48 SI " du 26 novembre 2010 et les décisions de retrait de points afférentes aux infractions constatées les 14 mars 2009 et 28 mars 2010, n'y figurent plus ; que par suite, les conclusions à fin d'annulation de ces décisions sont devenues sans objet ; qu'il n'y a donc plus lieu d'y statuer ;

Sur la légalité des décisions restant en litige :

S'agissant de l'infraction du 20 mai 2009 (1 point) constatée par radar automatique :

Considérant qu'en vertu des articles R. 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale, quand est constatée une infraction au code de la route à laquelle est applicable la procédure d'amende forfaitaire, un avis de contravention et une carte de paiement dont le modèle est fixé par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice sont remis immédiatement au conducteur ou adressés postérieurement au titulaire du certificat d'immatriculation ; qu'il résulte des arrêtés pris pour l'application des articles R. 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale, notamment de leurs dispositions codifiées à l'article A. 37-8 de ce code, que lorsqu'une contravention mentionnée à l'article L. 121-3 du code de la route est constatée sans interception du véhicule et à l'aide d'un système de contrôle automatisé enregistrant les données en numérique, le service verbalisateur adresse à l'intéressé un formulaire unique d'avis de contravention, qui comprend en bas de page la carte de paiement et comporte, d'une part, les références de l'infraction dont la connaissance est matériellement indispensable pour procéder au paiement de l'amende forfaitaire et, d'autre part, une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; qu'il suit de là que lorsqu'il est établi que le titulaire du permis de conduire a payé l'amende forfaitaire prévue à l'article 529 du code de procédure pénale au titre d'une infraction constatée par radar automatique, il découle de cette seule constatation qu'il a nécessairement reçu l'avis de contravention ; qu'eu égard aux mentions dont cet avis doit être revêtu, la même constatation conduit également à regarder comme établi que l'administration s'est acquittée envers lui de son obligation de lui délivrer, préalablement au paiement de l'amende, les informations requises en vertu des dispositions précitées, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre avoir été destinataire d'un avis inexact ou incomplet ;

Considérant que si le ministre de l'intérieur soutient que le contrevenant a reçu à son domicile l'avis de contravention consécutif à l'infraction commise le 20 mai 2009 constatée à Neuilly sur Seine par radar automatique, il ne produit pas cet avis ; que si le relevé d'information intégral mentionne qu'un titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée a été émis pour cette infraction, il ressort de l'attestation du trésorier principal de la trésorerie du contrôle automatisé que M. A n'a pas payé l'amende forfaitaire majorée ; que par suite, l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, qu'elle a rempli son obligation d'information préalable ; qu'ainsi, M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a refusé d'annuler le retrait de point consécutif à la commission de cette infraction et à demander, dans cette mesure, l'annulation du jugement attaqué ;

S'agissant de l'infraction commise le 1er février2009 :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : " La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission d'un titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive " ; qu'il ressort des mentions du relevé d'information intégral que, l'infraction susmentionnée a fait l'objet du paiement d'une amende forfaitaire ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la réalité de cette infraction ne serait pas établie ;

Considérant, d'autre part, que le ministre produit au dossier le procès-verbal établi par un agent de police judiciaire signé du contrevenant ; que ce document, qui est établi sur le formulaire type du centre d'enregistrement et de révision des formulaires administratifs (CERFA) comporte les mentions exigées par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route et est conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut d'information préalable manque en fait ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à demander l'annulation de la décision de retrait de points pour l'infraction commise le 20 mai 2009 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

Considérant qu'il ressort de ce qui précède, que le présent arrêt implique nécessairement que l'administration reconnaisse à M. A le bénéfice d'un point illégalement retiré en le rétablissant dans le traitement automatisé mentionné à l'article L. 225-1 du code de la route ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions de M. A tendant à ce que soit mis à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;


DECIDE :


Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A tendant à l'annulation de la décision " 48 SI " du 26 novembre 2010 et des décisions de retrait de points afférentes aux infractions constatées les 14 mars 2009 et 28 mars 2010.
Article 2 : La décision ministérielle portant retrait d'un point du capital de points du permis de conduire de M. A consécutivement à l'infraction du 20 mai 2009 est annulée.
Article 3 : Le jugement n° 1103976 en date du 1er mars 2012 du Tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. A est rejeté.
Article 5 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à M. A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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