COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 2ème chambre - formation à 3, 28/08/2012, 11LY00978, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 septembre 2011, présentée pour la SARL HOTEL LES MARQUISATS, dont le siège est situé au 400 route des Resses à Aviernoz (74540) ;

La SARL HOTEL LES MARQUISATS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900578 du 26 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, et pénalités y afférentes, dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 août 2005 ;

2°) de prononcer la décharge demandée s'élevant à un montant de 239 264 euros en droits et pénalités, et à titre subsidiaire, la décharge d'un montant de 144 322 euros, outre la majoration de 10 % ;

3°) de prononcer la restitution assortie des intérêts de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SARL HOTEL LES MARQUISATS soutient que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité ; que c'est à tort que l'administration, au terme d'une motivation laconique et manifestement déficiente concernant la procédure appliquée, a estimé qu'elle relevait, au 1er janvier 2005, non pas du régime simplifié mais du régime réel d'imposition en vertu de l'article 257-7 du code général des impôts en raison de la réalisation d'une opération de construction occasionnelle et inhabituelle semblable à celle réalisée par les promoteurs ; qu'elle a été, à tort, ainsi taxée d'office alors qu'elle n'avait jamais été placée sous le régime réel, qu'elle n'avait pas à faire de déclarations CA3 mensuelles et que l'opération n'avait pas à être déclarée avant l'expiration du délai de dépôt de la déclaration CA12 ; que c'est à tort que le Tribunal a estimé qu'elle exerçait une double activité de location de locaux nus et de promotion et d'acquisitions immobilières alors qu'elle n'exerce à titre principal que la première activité, la réalisation d'une opération immobilière isolée ne lui conférant pas le statut de promoteur ; que l'acquisition en 2005 et la cession ultérieure d'un chalet ne constituent pas une activité de marchand de biens, à titre secondaire, susceptible de la faire relever de l'article 204 quater de l'annexe II au code général des impôts ; qu'elle était en tout état de cause autorisée à évaluer provisoirement ses droits à déduction ; que le service a exclu, à tort, la déduction de taxe sur la valeur ajoutée concernant trois factures pour des motifs purement formels ; que, elle a pu légitimement ignorer que la taxe n'était pas déductible, l'administration n'établissant pas sa mauvaise foi ; qu'il n'est pas contesté que les factures en cause correspondent à des prestations réelles qui ont été incontestablement réglées aux prestataires ; que ce refus du droit à déduction porte atteinte aux principes de neutralité et d'effectivité ; qu'il est incohérent de procéder à un rappel de taxe et simultanément de mentionner un crédit de taxe pour la même période sans effectuer d'imputation lors de leur recouvrement ; que la taxe sur la valeur ajoutée collectée doit être réduite d'un montant de 21 304 euros correspondant à une prestation d'obtention d'un permis de construire qui n'a pas été obtenu, taxe qui n'avait pas lieu d'être réclamée ; que l'administration ne conteste pas l'échec de l'obtention du permis de construire et le défaut de paiement ; que cette taxe ne pouvait lui être réclamée au titre de la période visée par le contrôle ; que le rappel de taxe aurait dû ainsi être limité à la somme de 77 526 euros ; qu'à titre subsidiaire, les rappels ne peuvent faire l'objet d'une majoration de 10 % ; que cette majoration est applicable qu'en cas de défaillance déclarative ; que l'intérêt de retard constitue une sanction qui n'est pas exigible dès lors que la procédure mise en oeuvre est erronée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :
- le litige porte sur un montant de 232 988 euros dès lors que la société a obtenu une remise gracieuse des pénalités pour un montant de 6 276 euros par décision du 4 mai 2010 ;
- la procédure d'imposition d'office en raison d'un défaut de déclaration CA 3 suivie pour les rappels afférents à la période du 1er janvier 2005 au 31 août 2005 au motif que la société était soumise au régime réel normal n'est pas entachée d'irrégularité ; que la société a en effet déclaré une activité secondaire de marchand de biens, qu'elle a acquis à ce titre un ensemble immobilier en 1991 qu'elle a revendu en 2004, qu'elle a réalisé en février 2005 une opération de vente en l'état de futur d'achèvement passible de la taxe en vertu de l'article 257-7 du code général des impôts, que cette vente relevait du régime normal d'imposition en vertu de l'article 204 quater de l'annexe II audit code, qu'elle n'était pas un redevable occasionnel mais un redevable habituel compte tenu de ce qu'elle était assujettie à la taxe pour son activité de locaux nus ayant opté pour cet assujettissement ; que la doctrine invoquée par la société 8 A-1551 n° 1 et 2, 152 et 1252 ne trouve pas à s'appliquer dès lors qu'elle concerne les personnes qui ne sont pas des redevables habituels mais qui ont réalisé des opérations visées à l'article 257-7° ; que, par ailleurs, la procédure de taxation d'office a été suivie à bon droit pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2004 dès lors que la société n'avait pas déposé de déclaration CA12 ;
- la motivation de la procédure n'est ni laconique, ni déficiente ;
- le rappel de taxe collectée figurant dans l'acte de vente s'élève à 196 000 euros ; que cette taxe était due à la signature de cet acte le 11 février 2005, la requérante n'ayant pas opté pour l'encaissement et l'assiette de cette taxe ayant été constituée par le prix de cession figurant dans cet acte ; que la société ne produit en outre aucun document corroborant la non obtention du permis de construire ;
- l'administration a admis la taxe sur la valeur ajoutée déductible dans le cadre de la vérification de comptabilité en fonction des pièces justificatives présentées ; qu'elle a admis les pièces justificatives de l'activité de loueur présentées pour l'année 2004 ; qu'hormis les deux factures Samse et Oskan, elle a admis les autres factures produites lors de ce contrôle ; qu'elle se réfère à ses écritures dans le dossier 11LY00937 concernant les trois factures dont fait état la société ; que le montant de taxe déductible de 71 695 euros n'est pas justifié ; qu'il n'est pas incompatible d'avoir effectué un rappel de taxe au titre du mois de février 2005 alors que les déclarations postérieures se trouvent créditrices et dégagent un crédit reportable, compte tenu de ce que la TVA aurait dû être acquittée mensuellement ;
- l'application de la majoration de 10 % est justifiée ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 mars 2012, présenté pour la SARL HOTEL LES MARQUISATS, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, sauf à limiter sa demande en décharge à la somme de 232 698 euros, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre qu'elle accepte la limitation de la demande en décharge à un montant de 232 698 euros à raison d'un dégrèvement de 6 276 euros prononcé par l'administration ; qu'elle n'a pas réalisé une opération de marchand de biens en état de futur d'achèvement, les deux qualifications étant incompatibles ; qu'elle a agi en tant que redevable occasionnel concernant l'opération immobilière en cause ; que l'amende de 5 % ne peut être valablement appliquée à l'acquisition d'un bâtiment qui ne peut être assimilé à un terrain à bâtir au motif qu'il serait rénové par la suite ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 mars 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Il soutient en outre que la vente du 11 février 2005 constitue une opération concourant à la production ou à la livraison d'immeubles au sens de l'article 257-7 ; qu'indépendamment de la qualification précise de l'activité secondaire, cette opération est exclue du régime simplifié en vertu de l'article 204 quater de l'annexe II ; que l'application de l'amende de 5 % est fondée dès lors que la société n'a pas déclaré la taxe sur la valeur ajoutée afférente à l'acquisition de l'immeuble alors qu'elle était redevable de la taxe ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 avril 2012, présenté pour la SARL HOTEL LES MARQUISATS, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre qu'un redevable occasionnel de la taxe sur la valeur ajoutée immobilière ne peut se trouver exclu du régime simplifié au seul motif qu'il aurait réalisé une seule opération assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée immobilière ; que la majoration de 5 % prévue à l'article 1788 septies du code général des impôts sanctionne l'absence de déclaration de taxe qui ne lui incombait pas dès lors qu'elle n'a pas acquis un terrain à bâtir et qu'en tout état de cause, l'acquéreur d'un bien immobilier ne pouvait, au regard du droit communautaire, être redevable d'une TVA au titre de cette acquisition ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2012 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;


Considérant que la SARL HOTEL LES MARQUISATS, qui exerçait une activité de location de locaux nus pour laquelle elle avait opté à l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée et qui avait déclaré une activité secondaire de marchand de biens, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2002 au 31 août 2005 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration a proposé, au titre de cette période, des rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 239 264 euros en droits et pénalités ; que ces rappels ont été notifiés suivant la procédure de taxation d'office prévue au 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales aux motifs que la société n'avait pas déposé la déclaration CA 12 de taxe sur la valeur ajoutée concernant la période du 1er janvier au 31 décembre 2004 et qu'elle n'avait déposé aucune déclaration CA 3 concernant la période du 1er janvier au 31 août 2005 alors que toutes les opérations relatives à cette période relevaient du régime réel normal ; que la société relève appel du jugement du 26 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis en recouvrement le 10 avril 2006 ;


Sur l'étendue du litige :

Considérant que la SARL HOTEL LES MARQUISATS, qui demandait initialement à la Cour de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, et pénalités y afférentes, dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 août 2005, à hauteur d'un montant de 239 264 euros en droits et pénalités, déclare, dans le dernier état de ses écritures, qu'elle accepte la limitation de sa demande en décharge à raison d'un dégrèvement prononcé le 4 mai 2010 par l'administration à hauteur de 6 276 euros ; que, dans ces conditions, la société doit être regardée comme se désistant de ses conclusions à hauteur de cette somme de 6 276 euros ; que ce désistement est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;

Sur le surplus des conclusions :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition d'office :

Considérant que la SARL HOTEL LES MARQUISATS soutient qu'elle n'était pas soumise à l'obligation de déposer des déclarations mensuelles CA3 à compter du 1er janvier 2005 et qu'elle ne pouvait pas ainsi être imposée suivant la procédure de taxation d'office pour défaut de dépôt de ces déclarations dès lors qu'elle relevait encore du régime simplifié d'imposition, n'étant pas un marchand de biens, ne s'étant pas livrée de manière habituelle à des opérations visées au 7° de l'article 257 du code général des impôts mais ayant réalisé qu'une opération isolée, et n'étant ainsi qu'une redevable occasionnelle à la taxe sur la valeur ajoutée immobilière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 257 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " Sont également soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 6° Les opérations qui portent sur des immeubles, des fonds de commerce ou des actions ou parts de sociétés immobilières et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels ou commerciaux ; 7° Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles " ; qu'aux termes de l'article 204 quater de l'annexe II au code général des impôts alors applicable : " Ne peuvent bénéficier des modalités simplifiées de liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée : - les importations ; - les opérations visées aux 6°, 7° et 7° bis de l'article 257 du code général des impôts ; - les opérations effectuées à titre occasionnel " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SARL HOTEL LES MARQUISATS exerçait au cours de la période du 1er janvier au 31 août 2005, une activité principale de location de locaux nus pour laquelle elle avait opté pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ; que la société a, par ailleurs, déclaré au centre des impôts d'Annecy, le 10 décembre 1991 qu'elle étendait son objet social à l'exercice d'une activité secondaire de marchand de biens ; que la société requérante, qui avait revendu le 28 septembre 2004 un premier bien immobilier acquis le 15 novembre 1991, a acheté le 11 février 2005 un chalet d'habitation avec sol et terrain autour pour un montant de 457 347 euros, la taxe devant être acquittée par ses soins comme le précisait l'acte d'acquisition ; qu'elle a revendu ledit bien " en état de complète restructuration " pour un montant de 1 196 000 euros, dont 196 000 euros de taxe sur la valeur ajoutée ; que la vente portait sur " un chalet d'habitation en état de complète restructuration, avec son sol et terrains " ; que, contrairement à ce qu'allègue la requérante, il s'agissait d'une opération concourant à la production ou à la réalisation d'immeubles relevant des dispositions du 7° de l'article 257 du code général des impôts ; qu'enfin, il résulte des termes mêmes de l'acte de vente que la société s'est constituée comme redevable habituelle de ladite taxe et qu'elle était identifiée en cette qualité au centre des impôts ; que, dans ces conditions, l'administration a fait une exacte application des dispositions précitées du 7° de l'article 257 du code général des impôts et de l'article 204 quater de l'annexe II audit code, en estimant que la société ne relevait pas du régime simplifié d'imposition ; que les termes des documentations administratives de base référencées 8 A-152 et 8 A-1551 dont se prévaut la société ne comportent pas d'interprétation contraire à celle dont il est ainsi fait application ; que, dès lors, la société requérante, qui ne saurait se prévaloir des modalités de déclaration afférentes à ce régime simplifié d'imposition, et qui n'a pas respecté ses obligations de souscrire, dans le cadre du régime normal, des déclarations mensuelles de taxe sur la valeur ajoutée pour la sous-période vérifiée du 1er janvier au 31 août 2005, ne saurait soutenir que la procédure d'imposition d'office suivie à son égard au titre de cette sous-période serait entachée d'irrégularité au motif que l'absence de dépôt de ces déclarations mensuelles ne pouvait lui être reprochée ;

En ce qui concerne la régularité de la proposition de rectification :

Considérant que la proposition de rectification du 12 décembre 2005, qui précise en outre les bases et éléments servant au calcul des impositions d'office ainsi que leurs modalités de détermination conformément aux dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, mentionne la procédure d'imposition d'office suivie pour chacune des deux sous-périodes ayant donné lieu à rectifications, et expose clairement les motifs pour lesquels la contribuable relevait desdites procédures et ne relevait plus du régime simplifié pour la sous-période du 1er janvier au 31 août 2005 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la proposition de rectification serait insuffisamment motivée concernant les procédures d'imposition suivies doit être écarté ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; et qu'aux termes de l'article R.* 193-1 de ce livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient au redevable de démontrer que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge seraient exagérés ou erronés ;

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée :

Considérant que, comme il a été dit précédemment, la société requérante a vendu le 11 février 2005 un chalet, avec sol et terrain, " en état de complète restructuration ", pour un montant de 1 196 000 euros, dont 196 000 euros de taxe sur la valeur ajoutée ; que cette vente constituait une opération concourant à la production ou à la réalisation d'immeubles relevant des dispositions du 7° de l'article 257 du code général des impôts ; que, comme le mentionnait d'ailleurs cet acte de vente, l'administration a regardé la société requérante comme redevable de ladite taxe en vertu des dispositions du 2° de l'article 285, alors en vigueur, du code général des impôts ; qu'elle a estimé, en vertu des dispositions du c. du 1. de l'article 269 du code général des impôts et du a. du 2. dudit article, que cette taxe était exigible à la date de signature dudit acte, en l'absence de toute option pour le paiement de ladite taxe au fur et à mesure des encaissements ; qu'elle a alors constaté que la société n'avait pas déclaré la taxe ainsi collectée et a prononcé, en conséquence, un rappel correspondant à cette taxe omise ;

Considérant que la société requérante soutient que la taxe sur la valeur ajoutée collectée en litige doit être réduite d'un montant de 21 304 euros au motif que cette somme correspondrait à la taxe afférente à une prestation relative à une obtention d'un permis de construire de 130 000 euros figurant dans l'acte de vente, que le montant de 1 196 000 euros figurant sur cet acte de vente comprenait le montant de cette prestation, que la taxe afférente à cette prestation n'était ainsi due qu'à l'encaissement dès lors qu'il s'agissait d'une prestation de services, et de ce que ce permis de construire n'a pas été obtenu ; que, toutefois, comme le fait valoir l'administration, il résulte des termes mêmes de l'acte de vente que le prix de vente s'élève à un montant total de 1 196 000 euros, et que s'il était convenu par les parties qu'en cas de non obtention par l'acquéreur du permis de construire sur le terrain acquis, la somme de 130 000 euros taxe sur la valeur ajoutée comprise ne serait pas due, cette dernière somme constitue cependant un élément du prix de cession constituant l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée et la société ne produit aucun élément établissant que le permis de construire en cause n'aurait pas été obtenu ; que, par suite, la SOCIETE HOTEL LES MARQUISATS n'est pas fondée à soutenir que le montant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée pour la période du 1er janvier au 31 août 2005 serait exagéré ;

S'agissant de la taxe déductible :

Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code, applicables aux périodes d'imposition en litige, la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'opérations imposables est déductible, dans le cas de services facturés à l'entreprise, de la taxe à laquelle celle-ci est assujettie à raison des opérations en cours, à condition que les factures mentionnent ladite taxe, qu'elles aient été établies au nom du redevable par son fournisseur, qu'elles correspondent effectivement à l'exécution de la prestation de service dont elles font état, et que le prix indiqué soit réellement celui qui doit être acquitté par l'entreprise ;

Considérant que l'administration a refusé à la SARL HOTEL LES MARQUISATS le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée pour un montant total de 17 269 euros grevant une facture " Suorant'alp " établie le 10 janvier 2005, un devis de fournitures établi par l'entreprise " Alex menuiseries " daté du 28 mai 2005, et une facture " Ets Oskan " du 10 mai 2005 ; que la SARL HOTEL LES MARQUISATS soutient qu'elle devait bénéficier du droit à déduction concernant ces trois " factures " dès lors que les mentions qui y étaient portées étaient suffisantes pour bénéficier de ce droit et qu'elle ignorait les irrégularités de facturation dont fait état l'administration ;

Considérant que le " devis de fournitures " de l'entreprise " Alex menuiserie " ne constitue pas une facture et la société requérante ne produit aucune facture répondant aux exigences de l'article 289 du code général des impôts concernant ces achats ; que s'agissant de la facture " Suorant'alp ", celle-ci mentionne un numéro de Siret qui concerne une autre société, la Sarl Savoie en liquidation judiciaire et dont le co-gérant est M. Pierre qui est aussi gérant de la société requérante, ladite société ayant une activité de " fabrication de charpentes " qui ne correspond pas aux prestations facturées qui font notamment état de prestations d'agencement ; que cette facture ne détaille pas en outre le prix unitaire hors taxe et le taux de taxe sur la valeur ajoutée pour chacun des services rendus et ne contient pas de dénomination précise desdites prestations ; que, s'agissant de la facture établie par l'établissement Oskan, cette entreprise n'est connue ni du registre du commerce et des sociétés, ni de l'administration fiscale, la facture produite par la société requérante ne mentionne aucun numéro de SIRET et ne détaille pas le prix unitaire hors taxe et le taux de taxe sur la valeur ajoutée pour chacun des services rendus ; que la société n'apporte aucun autre élément concernant la réalisation de ces prestations par ces sociétés ; qu'ainsi, la société n'établit pas que c'est à tort que l'administration a regardé les sommes relatives à ces deux factures comme ne constituant pas la contrepartie de prestations réellement fournies par ces sociétés et comme ne constituant pas ainsi des dépenses nécessaires à l'exploitation au sens de l'article 230 de l'annexe ; qu'au surplus, la société requérante, qui ne produit aucune pièce concernant le règlement desdites factures, ne démontre pas qu'elle aurait acquitté les factures " Suorant'alp " et " Oksan " ; qu'il s'ensuit que la SARL HOTEL LES MARQUISATS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration lui a refusé, au regard des dispositions susmentionnées du code général des impôts, la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur ces deux factures et sur le devis établi par l'entreprise " Alex menuiseries " ; que la société requérante ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de ce que la non-conformité des documents aux exigences formelles prescrites par les dispositions de l'article 242 nonies de l'annexe II au code général des impôts en raison des anomalies recensées par l'administration fiscale, constituerait un formalisme excessif portant atteinte à la neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée, ni soutenir qu'elle ignorait le caractère non déductible des taxes figurant sur ces trois documents ;

Considérant, en second lieu, que si la société requérante a entendu se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle faite à M. Francou, sénateur, publiée le 1er juin 1979, qui indique que " Dans la mesure où la bonne foi des parties n'est pas contestée, il est cependant admis que la personne qui a facturé la taxe sur la valeur ajoutée au titre d'opérations non passibles de cette taxe puisse, dans les conditions fixées à l'article 272 du code général des impôts, opérer l'imputation ou obtenir la restitution de la taxe acquittée à tort ", la SARL HOTEL LES MARQUISATS ne rentre pas, en tout état de cause, dans les prévisions de cette doctrine dès lors que le caractère non déductible de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur les trois documents en cause ne résulte pas du fait que les opérations n'étaient pas passibles de cette taxe ;

S'agissant de l'existence d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'alors que la taxe devait être acquittée mensuellement, le rappel de taxe effectué au titre du mois de février 2005 ne saurait être regardé, comme l'allègue la requérante, comme " incompatible " avec l'existence de crédits de taxe sur la valeur ajoutée reportables constatés au vu de déclarations de taxe postérieures à ce mois de février ;

En ce qui concerne les pénalités :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1788 septies du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur à la date des opérations en cause et dont les dispositions ont été reprises au 4. de l'article 1788 A : " Lorsqu'au titre d'une opération donnée le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est autorisé à la déduire, le défaut de mention de la taxe exigible sur la déclaration prévue au 1 de l'article 287, qui doit être déposée au titre de la période concernée, entraîne un rappel de droits correspondant assorti d'une amende égale à 5 p. 100 du rappel pour lequel le redevable bénéficie d'un droit à déduction (...) " ; qu'aux termes de l'article 285 dudit code alors en vigueur: " Pour les opérations visées au 7° de l'article 257, la taxe sur la valeur ajoutée est due : (...) 3° Par l'acquéreur, la société bénéficiaire de l'apport, ou le débiteur de l'indemnité, lorsque la mutation ou l'apport porte sur un immeuble qui, antérieurement à ladite mutation ou audit apport, n'était pas placé dans le champ d'application du 7° de l'article 257 " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, comme il a été dit précédemment, la société requérante a acquis le 11 février 2005 un chalet d'habitation avec sol et terrain autour pour un montant de 457 347 euros ; que l'acte précisait que la taxe devait être acquittée par ses soins, la société ne contestant pas que cet immeuble n'était pas placé antérieurement à cette mutation dans le champ d'application du 7° de l'article 257 ; que cette taxe, d'un montant de 89 640 euros, était ainsi due par la société requérante en vertu des dispositions précitées du 3° de l'article 285 ; qu'il est constant que la taxe sur la valeur ajoutée afférente à cette acquisition n'a pas été déclarée par la société ; que l'administration, qui n'a pas procédé à des rappels de taxe concernant cette omission de déclaration dès lors qu'elle a décidé que la taxe déductible afférente à cette opération, qui s'élevait à ce même montant de 89 640 euros, s'imputait dans le cadre de cette procédure de rectification, a cependant infligé à la requérante l'amende prévue par l'article 1788 septies précité concernant cette taxe exigible non déclarée ; qu'en se bornant à soutenir que l'acquéreur d'un bien immobilier ne pouvait, au regard du droit communautaire, être redevable d'une taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette acquisition, sans préciser les règles communautaires qui auraient été méconnues, la société ne met pas en mesure la Cour d'apprécier le bien-fondé ni même la " pertinence " de ce moyen ; que, dès lors, et alors même que l'opération portait sur l'acquisition d'un bâtiment qui devait être ensuite rénové, c'est à bon droit que l'administration a infligé à la société requérante, en l'absence d'une telle déclaration, cette seule amende égale à 5 p. 100 du montant de cette taxe que la société avait ainsi omis de déclarer, en application des dispositions précitées de l'article 1788 septies du code général des impôts ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Lorsqu'une personne physique ou morale ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s'abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter cet acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 10 p. 100 (...) " ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, il résulte de l'instruction que la société requérante n'a pas souscrit dans les délais qui lui étaient impartis les déclarations CA 3 et CA 12 relatives aux activités de location de locaux nus et de promotion et d'acquisition immobilière qu'elle poursuit ; que c'est, dès lors, à bon droit que l'administration a assorti les rappels litigieux de l'intérêt de retard visé à l'article 1727, lequel ne constitue pas une sanction, et de la majoration de 10 % prévue à l'article 1728 du code général des impôts ;


Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL HOTEL LES MARQUISATS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions et pénalités restant en litige et à la restitution desdites sommes ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que celles, en tout état de cause, tendant au versement d'intérêts moratoires, doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement de la SARL HOTEL LES MARQUISATS de ses conclusions tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, en droits et pénalités, au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 août 2005 à hauteur de 6 276 euros.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL HOTEL LES MARQUISATS est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL HOTEL LES MARQUISATS et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 3 juillet 2012, où siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,
MM. Segado et Lévy Ben-Cheton.

Lu en audience publique, le 28 août 2012.


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N° 11LY00978




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