Cour Administrative d'Appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 04/08/2011, 10NC01233, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 juillet 2010, présentée pour M. Lies A, domicilié à la CIMADE au 13 Quai Saint-Nicolas à Strasbourg (67 000), par Me Mengus, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0905532 du 11 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Bas-Rhin en date du 28 octobre 2009 lui refusant la délivrance de son certificat de résidence, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de saisir le médecin de l'Agence régionale de la Santé et de produire tout élément justifiant de l'accessibilité des soins en Algérie, et au titre des dispositions de l'article L. 911-1 du Code de justice administrative, de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;



Il soutient que :

* Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un certificat de résidence :

- la décision lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence est entachée d'un défaut de motivation au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

- la procédure est irrégulière compte tenu de l'absence de motivation de l'avis du médecin inspecteur de santé publique attestant de la réalité de l'accessibilité à des soins adaptés à son état de santé en Algérie, en particulier à Barika dont il est originaire ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 6-5° de l'accord franco-algérien et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à ses attaches familiales en France avec ses soeurs et sa mère malade qui se rend fréquemment sur le territoire français pour y voir ses enfants et s'y faire soigner ;

- elle méconnaît les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien compte tenu de l'absence d'accessibilité à des soins adaptés à son état de santé en Algérie qui n'a pas été établie par le préfet et qui ne saurait être démontrée à l'appui de la fiche pays sur l'Algérie datée de 2006, alors que ses soins sont entièrement pris en charge en France où il bénéficie de l'aide médicale d'Etat et du soutien financier de ses deux soeurs ;

- elle est illégale dès lors que le préfet a purement et simplement entendu se conformer à l'avis du médecin inspecteur de la santé publique sans exercer son pouvoir d'appréciation ;

- le préfet du Bas-Rhin a commis une erreur de droit en omettant d'instruire sa demande de titre de séjour assortie d'une promesse d'embauche, en application de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au regard des éléments d'appréciation définis par les dispositions de l'article R. 5221-21 du Code du travail ;

- en tout état de cause, une expertise médicale pourra déterminer son état sanitaire ;

* Sur la légalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français :

- la décision est entachée d'un défaut de motivation au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance de son certificat de résidence ;

* Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance de son certificat de résidence ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales


Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 septembre 2010, présenté par le préfet du Bas-Rhin ; le préfet conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé ;

Vu la décision en date du 25 juin 2010 du président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nancy (section administrative) accordant à M. A l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 juin 2011 :

- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de Me Boukara, conseil de M. A ;


Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un certificat de résidence :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance de motivation :

Considérant que si M. A soutient que la décision lui refusant la délivrance de son certificat de résidence est insuffisamment motivée, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ; que, par suite, le moyen susvisé ne peut qu'être écarté ;


En ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 5221-21 du code du travail :

Considérant que M. A soutient que le préfet a commis une erreur de droit en omettant d'examiner sa demande de certificat de résidence pour activité salariée sur le fondement des dispositions susvisées alors que celles-ci lui sont applicables à l'exception des conditions relatives à la situation de l'emploi et à la zone géographique déterminée ; que toutefois, les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que par suite, M. A ne peut utilement se prévaloir des dispositions des articles L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 5221-21 du code du travail ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'étendue de sa compétence par le préfet :

Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet s'est livré à un examen individuel de la situation de M. A tant au regard de son état de santé qu'au regard de sa situation familiale et professionnelle ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet ne s'est pas, à tort, estimé lié par l'avis du médecin inspecteur de la santé ; qu'il n'a, dès lors, pas méconnu l'étendue de sa compétence ;

En ce qui concerne les autres moyens :

Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure, de la méconnaissance des stipulations des articles 6-5° de l'accord franco-algérien et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de la violation des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, repris en appel par M. A qui ne comportent aucun élément de faits ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée par l'intéressé à l'appui de ces moyens devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;


Sur la légalité des décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence :

Considérant que dès lors que l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence opposé à M. A n'est pas établie, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ladite décision doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de motivation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable : (...) L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) ; que le moyen tiré de l'absence de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit ainsi être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant que le moyen susvisé n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise médicale demandée par M. A que ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Bas-Rhin susvisé ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;


D É C I D E :


Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Lies A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N°10NC01233



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