Cour Administrative d'Appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 28/06/2007, 04MA01561, Inédit au recueil Lebon
Cour Administrative d'Appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 28/06/2007, 04MA01561, Inédit au recueil Lebon
Cour Administrative d'Appel de Marseille - 1ère chambre - formation à 3
- Non publié au bulletin
Audience publique du jeudi 28 juin 2007
- Président
- M. ROUSTAN
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu, 1°), sous le n° 04MA01561, la requête transmise par télécopie, enregistrée le 20 juillet 2004, présentée pour la COMMUNE DU LAVANDOU, représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par une délibération du conseil municipal du 17 mars 2001, par la SCP d'avocats Coulombie-Gras-Cretin-Becquevort ; La COMMUNE DU LAVANDOU demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 99-03444 en date du 13 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a annulé, à la demande de l'Association de Défense de l'Environnement de Bormes et du Lavandou, l'arrêté en date du 2 juin 1999 par lequel le maire de la COMMUNE DU LAVANDOU a délivré à M. X et à la société «Les Demeures de Méditerranée» un permis de construire en vue de la réalisation de deux logements sur un terrain cadastré section BH n° 161, sis au lieu-dit Saint-Clair, sur le territoire de ladite commune;
2°/ de condamner l'Association de Défense de l'Environnement de Bormes et du Lavandou à lui verser une somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
.
Vu, 2°), sous le n° 04MA01628, la requête, enregistrée le 27 juillet 2004, présentée pour la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE (SCI) VALRON, représentée par ses gérants en exercice, M. et Mme X, par Me Bauducco, avocate ; La SCI VALRON demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 99-03444 en date du 13 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a annulé, à la demande de l'Association de Défense de l'Environnement de Bormes et du Lavandou, l'arrêté en date du 2 juin 1999 par lequel le maire de la COMMUNE DU LAVANDOU a délivré à M. X et à la société «Les Demeures de Méditerranée» un permis de construire en vue de la réalisation de deux logements sur un terrain cadastré section BH n° 161, sis au lieu-dit Saint-Clair, sur le territoire de ladite commune;
2°/ de condamner l'Association de Défense de l'Environnement de Bormes et du Lavandou à lui verser une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2007:
- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur ;
- les observations de Mme Lafontaine, présidente de l'Association de Défense de l'Environnement de Bormes et du Lavandou et de Me Bauducco pour la SCI VALRON et M. X ;
- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par la requête n° 04MA01561, la COMMUNE DU LAVANDOU relève appel du jugement susvisé en date du 13 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a annulé, à la demande de l'Association de Défense de l'Environnement de Bormes et du Lavandou, l'arrêté en date du 2 juin 1999 par lequel le maire de la COMMUNE DU LAVANDOU a accordé, à M. X et à la société «Les Demeures de Méditerranée», un permis de construire en vue de la réalisation de deux logements avec garages, parkings et piscine sur un terrain cadastré section BH n° 161, issu de la division de la parcelle BH n° 20, et situé au lieu-dit Saint-Clair sur le territoire de ladite commune ; que, par la requête n° 04MA01628, la SCI VALRON, venant aux droits de la société «Les Demeures de Méditerranée» , relève appel dudit jugement ;
Sur la jonction des requêtes :
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant, en premier lieu, que si la SCI VALRON soutient que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé en ce qu'il serait fondé sur le procès-verbal de la visite des lieux effectuée le 29 avril 2003 par les membres du Tribunal administratif de Nice, qui ne mentionnerait pas le terrain d'assiette du projet en litige, il ressort de l'examen du jugement querellé que ce dernier ne fait aucunement référence au procès-verbal de la visite des lieux du 29 avril 2003 ; que, par suite, ce moyen doit, en tout état de cause, être écarté ; que si la société appelante fait valoir que les premiers juges se seraient fondés sur des données de faits erronées, communiquées par l'ADEBL, cette argumentation qui tend à remettre en cause le bien-fondé du jugement attaqué est sans influence sur sa régularité ;
Considérant, en deuxième lieu, que la société appelante fait valoir que les premiers juges auraient omis de statuer sur le moyen qu'elle avait invoqué en première instance, et tiré de la nécessité pour la juridiction de prendre en compte deux jugements du 15 juin 2000 par lesquels le Tribunal administratif de Nice a rejeté deux recours dirigés à l'encontre de l'autorisation de lotir du lotissement «Plein Sud», dans lequel se situe le projet contesté, et d'un permis de construire délivré sur un lot voisin ; qu'il ressort, toutefois, de l'examen des mémoires de première instance, produits en appel par la SCI VALRON, que, si cette dernière a évoqué l'existence de ces deux jugements, elle n'en a tiré aucune conséquence juridique et n'a pas ainsi évoqué de moyen auquel les premiers juges n'auraient pas répondu ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué à raison d'une prétendue omission à statuer sur un moyen doit être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que, pour retenir le moyen tiré de la violation par le permis de construire en litige des dispositions de l'article L.146-4 I du code de l'urbanisme, les premiers juges ont caractérisé la situation du terrain d'assiette lui-même et non pas seulement de la zone UFa dans lequel il s'insère pour déterminer si le terrain en cause était situé en continuité avec une agglomération ou un village existants ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la société appelante, le jugement querellé est suffisamment motivé sur ce point ;
Considérant, enfin, que la COMMUNE DU LAVANDOU soutient que les premiers juges auraient omis de statuer sur le moyen qu'elle avait invoqué en première instance et tiré de l'autorité de chose jugée qui s'attachait à un précédent jugement du 15 juin 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté une demande d'annulation de la délibération du conseil municipal du 5 novembre 1998 décidant l'application anticipée du POS en cours de révision ; que, toutefois, le litige ayant fait l'objet dudit jugement du 15 juin 2000, au demeurant annulé par la Cour de céans, présentait un objet distinct de celui faisant l'objet du jugement ici contesté, relatif à un acte administratif distinct alors même qu'à l'appui du recours dirigé contre le permis de construire en litige, l'exception d'illégalité de la délibération du 5 novembre 1998 avait été invoquée ; qu'en l'absence d'identité d'objet entre les deux litiges, le jugement précité du 15 juin 2000 n'était pas revêtu de l'autorité relative de la chose jugée ; que, par suite, le moyen invoqué par la COMMUNE DU LAVANDOU était, en tout état de cause, inopérant ; que, dès lors, les premiers juges ont pu, sans entacher leur jugement d'irrégularité, s'abstenir d'y répondre explicitement ;
Sur la légalité du permis de construire du 2 juin 1999 :
Considérant que, pour annuler le permis de construire susvisé, le tribunal administratif a, d'une part, retenu par voie d'exception, le moyens tiré de l'illégalité, au regard des dispositions de l'article L.146-4 I du code de l'urbanisme, de la zone UFa de Saint-Clair du POS appliqué par anticipation en vertu d'une délibération du 5 novembre 1998 et, d'autre part, retenu comme fondé le moyen de la violation par le permis de construire en litige des dispositions du même article ;
En ce qui concerne le motif d'annulation tiré de la violation par le permis de construire contesté des dispositions de l'article L. 46-4 I du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes du I de l'article L.146-4 du code de l'urbanisme : «L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations ou villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement.» ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 3 janvier 1986 dont elles sont issues, que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les zones déjà urbanisées, caractérisées par une densité significative des constructions, mais qu'aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité avec d'autres constructions, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées des agglomérations ; qu'ainsi, les premiers juges, après avoir relevé que le terrain d'assiette du projet en litige était situé dans une zone d'urbanisation diffuse, éloignée de l'agglomération lavandouraine, n'ont commis ni erreur de droit ni erreur dans la qualification juridique des faits de l'espèce en estimant que le permis de construire en litige avait été délivré en violation des dispositions précitées ; que les premiers juges n'ont, ce faisant, ni outrepassé leurs pouvoirs, ni statuer en opportunité ni ne se sont substitués à l'autorité administrative compétente ; que, par suite, ces moyens doivent être écartés ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des documents photographiques versées en appel par la SCI VALRON, que le terrain d'assiette du projet contesté, qui est excentré par rapport au centre ville du Lavandou, sis dans le prolongement de la zone naturelle, constituée au Nord par les terrasses agricoles de Saint-Clair dont elle n'est séparé que par le chemin rural du Pataras, se situe au sein de constructions éparses, qui ne sauraient constituer, une agglomération ou villages existants au sens des dispositions législatives précitées ; que le projet en litige ne peut davantage être regardé comme constituant un hameau nouveau intégré à l'environnement au sens desdites dispositions ; que, par suite, c'est à juste titre que les premiers juges, qui n'ont pas entaché leur jugement d'une erreur de fait, ont estimé que le permis de construire contesté, qui avait pour effet d'autoriser une extension de l'urbanisation, avait été délivré en violation des dispositions de l'article L.146-4 I du code de l'urbanisme ; qu'un lotissement ne constituant ni une agglomération ni un village existant au sens de ces dispositions, la circonstance que le terrain d'assiette soit compris dans un lotissement est sans incidence sur le bien-fondé du jugement attaqué et du motif d'annulation retenu par les premiers juges ;
En ce qui concerne le motif d'annulation tiré, par voie d'exception, de l'illégalité au regard des dispositions de l'article L.146-4 I du code de l'urbanisme des dispositions du POS appliqué par anticipation concernant la zone UFa de Saint-Clair :
Considérant, en premier lieu, que la COMMUNE DE LAVANDOU soutient que, par un jugement du 9 juillet 2003, statuant sur la légalité des délibérations relatives à des délibérations des 18 septembre 2000 et 21 décembre 2000 décidant l'application anticipée de projets de POS ainsi que de la délibération du 19 septembre 2001 approuvant le POS révisé de la commune, le tribunal administratif aurait méconnu l'autorité de chose jugée qui s'attachait à un précédent jugement du même tribunal du 15 juin 2000 et qu'ainsi le jugement ici contesté devrait être annulé par voie de conséquence dudit jugement ; qu'elle fait valoir, également, que la contradiction existant entre ces deux jugements des 15 juin 2000 et 9 juillet 2003, caractérisant une situation de «déni de justice», doit conduire à l'application de la procédure dite du «règlement des juges» ; que, toutefois, ces moyens doivent, en tout état de cause, être écartés dès lors que le jugement ici contesté ne se fonde pas sur le jugement du 9 juillet 2003 ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la zone UFa de Saint-Clair se situe dans un secteur excentré du l'agglomération du Lavandou et ne comporte qu'une urbanisation diffuse ; qu'eu égard, au caractère diffus de ladite urbanisation, les auteurs du POS ont autorisé, dans ce secteur, une extension l'urbanisation qui ne peut être regardée comme située en continuité avec une agglomération ou un village existant ; que la zone en litige ne saurait davantage être regardée comme se développant en un hameau nouveau intégré à l'environnement ; que, par suite, c'est également à bon droit que les premiers juges ont estimé que les dispositions du POS appliqué par anticipation en vertu de la délibération du 5 novembre 1998 étaient entachées d'illégalité au regard des dispositions de l'article L.146-4 I du code de l'urbanisme ; qu'au demeurant, la Cour de céans, par un jugement du 21 octobre 2004, devenu définitif, a annulé les dispositions de ce POS en ce qui concerne la zone UFa de Saint-Clair sur le même motif ;
Considérant, en troisième lieu, que si la COMMUNE DU LAVANDOU conteste le jugement attaqué en ce qu'il a prononcé l'annulation du permis de construire en litige par voie de conséquence de l'illégalité de la zone UFa du POS en litige, sur le fondement duquel ledit permis de construire a été délivré, elle n'établit pas, comme elle le soutient, que les dispositions du POS antérieur, qui aurait classé le projet en litige en zone UC, permettaient la réalisation du projet en cause ; que le permis de construire contesté n'ayant pu être délivré qu'à la faveur des dispositions illégales du POS appliqué par anticipation , c'est à bon droit que les premiers juges ont annulé, par voie de conséquence , le permis de construire du 2 juin 1999 ; que les moyens tirés de ce que d'autres dispositions d'urbanisme auraient pu servir de base au permis en cause ne peuvent qu'être écartés ;
Considérant, en quatrième lieu, que les jugements du 15 juin 2000 par lesquels le Tribunal administratif de Nice a rejeté les recours pour excès de pouvoir dirigés contre l'autorisation de lotir relative au Lotissement «Plein Sud» ainsi qu'à l'encontre d'un permis de construire délivré sur l'un des lots du lotissement, en l'absence d'identité d'objet avec le présent litige relatif à un acte administratif distinct, ne sont pas revêtus de l'autorité relative de la chose jugée ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de la chose jugée ne peut qu'être écarté ; que, pour le même motif, le moyen tiré de la rupture d'égalité devant les charges publiques, qui résulterait de ce que le tribunal a jugé deux situations de faits identiques de manière opposée, est sans influence sur le bien-fondé des motifs d'annulation retenus par les premiers juges dans le jugement ici contesté ; que si la SCI VALRON fait valoir, enfin, qu'elle supporte de ce fait une charge injustifiée et inégale par rapport aux autres membres du lotissement et de la zone concernée, une telle argumentation est sans portée, dans le cadre d'un litige d'excès de pouvoir ;
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit, que ni la SCI VALRON ni la COMMUNE DU LAVANDOU ne sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 13 mai 2004, le Tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté en date du 2 juin 1999 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de la SCI VALRON et de la COMMUNE DU LAVANDOU le paiement, pour chacune d'entre elles, d'une somme de 1.000 euros, à l'Association de Défense de l'Environnement de Bormes et du Lavandou au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes susvisées de la SCI VALRON et de la COMMUNE DU LAVANDOU sont rejetées.
Article 2 : La SCI VALRON et de LA COMMUNE DU LAVANDOU verseront à l'Association de Défense de l'Environnement de Bormes et du Lavandou, pour chacune d'entre elles, une somme de 1.000 euros (mille euros) sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI VALRON, à la COMMUNE DU LAVANDOU, à l'Association de Défense de l'Environnement de Bormes et du Lavandou, à M. X et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.
N°s 04MA01561 - 04MA01628 2