Décision n° 01-38-24 du 29 mai 2024 du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie sur le différend qui oppose la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions à la société EDF et au Syndicat mixte d'électricité de la Martinique relatif au raccordement de plusieurs installations de consommation d'électricité au réseau public de distribution d'électricité

Version initiale


  • Le comité de règlement des différends et des sanctions (le CoRDiS) est saisi par la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions des faits suivants,
    La SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions, respectivement domiciliées au lieu-dit Peydauchou Boulazac et route de Bauchaud Boulazac, 24750 Boulazac Isle Manoire, ont saisi le CoRDiS d'une demande de règlement de différends relative au raccordement de plusieurs installations de consommation d'électricité au réseau public de distribution d'électricité géré par la société EDF.
    La SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions sont, chacune, propriétaires d'une parcelle, la première cadastrée AW 1491, située (…) et la seconde cadastrée AW 1493 située (…), sur lesquelles elles ont construit quatre maisons d'habitation, conformément aux permis de construire délivrés par le maire de la commune (…) le 5 octobre 2021 sous les numéros (…) et (…).
    Le 23 février 2022, la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions, par l'intermédiaire de M. G., associé de la SCI Garabeuf, ont adressé deux demandes de raccordement définitif à la société EDF dans le but de raccorder les deux parcelles précitées au réseau public de distribution d'électricité pour une puissance unitaire de 12 kVA.
    Le 18 mars 2022, la société EDF a indiqué à la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions qu'au regard des « éléments fournis (…) une étude technique détaillée sur place » devait être réalisée, sans indiquer la date retenue.
    Le 25 avril 2022, les visites techniques sur site ont été réalisées par la société EDF qui a informé la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions qu'une extension du réseau public de distribution sous la maîtrise d'ouvrage du Syndicat mixte d'électricité de Martinique (le « SMEM ») était nécessaire avant de procéder au raccordement des constructions réalisées sur chaque parcelle.
    Le 10 août 2022, les sociétés demanderesses ont, chacune, adressé une mise en demeure à la société EDF afin que cette dernière procède au raccordement des différentes installations de consommation attendues au réseau public de distribution d'électricité pour le 15 novembre 2022 au plus tard.
    Dans ces conditions, par deux courriers électroniques reçus le 10 octobre 2022, la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions ont saisi le CoRDiS de deux demandes de règlement de différends.
    Le 13 octobre 2022, la société EDF a transmis au SMEM les avant-projets sommaires des raccordements correspondants aux demandes présentées par la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions.
    Le 7 novembre 2022, la société EDF a demandé la confirmation écrite de l'accord du SMEM, pour qu'elle puisse réaliser les travaux.
    Le 8 novembre 2022, le SMEM a donné son accord, « prenant acte de l'urgence de procéder auxdits raccordements mais aussi et surtout du fait que les retards constatés étaient imputables aux services du concessionnaire […] ».
    Le 9 novembre 2022, la société EDF a transmis à la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions deux devis de travaux en électricité n° (…) et n° (…), qui ont été acceptés sans réserve par ces deux dernières le 11 novembre 2022.
    Le 14 novembre 2022, la société EDF a accusé réception de ces devis et a informé les demandeurs que la réalisation et le suivi des travaux seront réalisés par l'un de ses agents.
    Le 15 novembre 2022, la société EDF a indiqué au SMEM que sa précédente demande du 7 novembre 2022 était en réalité « simplement consultative » et que la réalisation des travaux d'extension devait être mise en œuvre par le SMEM.
    Le 16 novembre 2022, la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions ont réglé les acomptes résultant des devis acceptés.
    Le 17 novembre 2022, le SMEM a indiqué que les dossiers des demandeurs avaient « été mis en stand by » et que leur traitement par ses services avait « été réengagé selon [ses] procédures (…) ».
    Le 6 décembre 2022, « le plan de principe avec emplacement des coffrets pour le raccordement BT » des deux parcelles précitées a été communiqué par la société EDF à M. G.
    Par une décision du 13 juin 2023 n°s13-38-22 et 14-38-22, le comité a décidé que :
    « Article 1er - La jonction des procédures enregistrées sous les numéros 13-38-22 et 14-38-22 est prononcée.
    « Article 2. - La demande de mise hors de cause formée par le SMEM est rejetée.
    « Article 3. - Il est enjoint au SMEM de mobiliser l'ensemble de ses moyens pour obtenir les conventions de passage complétées, datées et signées par les propriétaires des parcelles AW 1238 et AW 1243, dans les formes requises pour assurer leur stabilité et leur pleine efficacité tant entre les parties qu'à l'égard des tiers.
    « Article 4. - Il est enjoint à la société EDF et au SMEM :


    « - de réaliser chacun, pour ce qui la ou le concerne, une étude permettant de déterminer l'opération de raccordement de référence pour chaque demande de raccordement, en transmettant tous les éléments nécessaires à la bonne et complète information de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions ;
    « - d'établir une proposition de raccordement conjointe pour chaque demande de raccordement dans le respect du droit en vigueur et dans le respect des dispositions du cahier des charges de concession et des procédures du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité.


    « Article 5. - Il est enjoint à la société EDF de transmettre à la SCI Garabeuf et à la SARL Aquitaine Promotions les propositions de raccordement complètes élaborées avec le SMEM.
    « Article 6. - La société EDF et le SMEM exécuteront ces injonctions dans un délai de 45 jours à compter de la notification de la présente décision.
    « Article 7. - La société EDF et le SMEM informeront le CoRDiS de l'exécution de ces injonctions.
    « Article 8. - En tout cas, une proposition complète de raccordement, conjointe à la société EDF et au SMEM, devra être transmise à chacune des sociétés demanderesses dans les 45 jours à compter de la notification de la présente décision, à peine d'une astreinte de 400 euros par jour de retard à l'encontre de la société EDF et/ou du SMEM pendant un délai de 6 mois. Cette astreinte sera liquidée par le CoRDiS, s'il y a lieu, en fonction de la part respective prise par la société EDF et le SMEM dans le retard d'exécution des injonctions prononcées.
    « Article 9. - Les demandes indemnitaires de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions sont rejetées.
    « Article 10. - Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
    « Article 11. - La présente décision sera notifiée à la SCI Garabeuf, la SARL Aquitaine Promotions, à la société EDF et au SMEM. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française. »
    Le 28 juillet 2023, la société EDF a adressé au représentant de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions une proposition de raccordement, qui détaille les solutions techniques et financières liées à leur raccordement, accompagnée d'un courrier, daté du 25 juillet 2023. Ce courrier indique que « le délai de réalisation [du] branchement est de 15 jours à compter de la réalisation de l'extension du réseau » et que « les délais prévisionnels d'extension de réseau seront de 9 semaines à compter de la réception des conventions de financement et des conventions de passage dument signées ».
    Le 3 novembre 2023, l'association syndicale libre des copropriétaires du lotissement Valverde a signé une convention de servitude au profit de la société EDF pour le passage sur les parcelles AW 1238 et AW 1243 d'une canalisation souterraine permettant le raccordement des deux parcelles AW 1491 et AW 1493.
    Le 13 novembre 2023, par un courrier électronique, la société EDF a indiqué à M. G. qu'elle prévoyait de réaliser le branchement sans attendre la réalisation de l'extension, sous réserve de l'obtention de « l'état d'avancement de la pose des fourreaux entre la limite de propriété et les villas » et des « distances entre la limite de propriété et les villas ».
    Par une décision du 1er décembre 2023, le CoRDiS a condamné le SMEM à payer à la SCI Garabeuf et à la SARL Aquitaine Promotions la somme de 43 200 euros au titre de la liquidation d'astreinte, maintenu les injonctions sous astreinte prononcées à l'encontre du SMEM dans sa décision du 13 juin 2023 et rejeté le surplus des conclusions des parties.
    La SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions ont saisi le comité d'une demande de liquidation d'astreinte, enregistrée le 17 janvier sous le numéro 01-LA-24.
    C'est dans ces conditions que la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions ont saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d'une demande de règlement de différend.


    Vu la procédure suivante :
    Par une saisine, des conclusions en rejet de l'intervention de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), des conclusions récapitulatives et définitives, enregistrées sous le numéro 01-38-24, les 18 janvier, 6 février, 15 mars, 18 avril et 8 mai 2024, la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions, représentée par M. G., demandent au CoRDiS, dans le dernier état de leurs écritures, de :


    - constater le délai déraisonnable présenté par la société EDF pour le branchement voire l'absence de tout délai ;
    - constater l'illégalité de la proposition de la société EDF du 28 juillet 2023 ;
    - donner acte au SMEM d'avoir renoncé à sa demande de participation de 5 075,38 euros ;
    - condamner la société EDF à refaire sa proposition de branchement au tarif de de 1 383,17 euros l'unité, avec un délai impératif et mentionnant les acomptes déjà versés ;
    - condamner le SMEM à leur rembourser la somme de 5075,38 euros ;
    - rejeter l'ensemble du mémoire en intervention de la FNCCR en date du 1er février 2023 ;
    - pour s'assurer du respect de ce qui précède, condamner conjointement la société EDF et le SMEM à verser une astreinte de 200 € par jour et par société, du 4 février 2024 jusqu'au jour du branchement effectif et fonctionnel, compteurs ouverts inclus ;
    - retenir le comportement fautif et l'absence de difficultés subies par la société EDF et le SMEM, pour écarter toute réfaction du montant de l'astreinte ;
    - liquider l'astreinte demandée ci-dessus à compter de l'échéance de la précédente astreinte du 4 février 2024 jusqu'au jour du délibéré, en l'absence de justificatifs entre temps ;
    - condamner le SMEM et la société EDF à une sanction pécuniaire d'un montant de 6 000 euros, porté à 15 000 euros pour récidive.


    La SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions soutiennent que :


    - l'article « L. » 1231 du code civil impose un délai raisonnable dans les relations contractuelles ; l'article L. 1111-11 du code de la construction et de l'habitation impose le branchement au réseau d'électricité de tout bâtiment dûment autorisé par un permis de construire ; que ni le contenu de l'offre de raccordement fournie par la société EDF le 28 juillet 2023 ni celui du courrier du 25 juillet 2023 accompagnant cette offre, ne permettent de connaître un délai de raccordement précis ; qu'alors que la société Enedis (EDF en Martinique) s'engage à respecter un délai de raccordement de 26 semaines maximum à compter de la demande de raccordement, la demande initiale de raccordement des requérantes a été effectuée en mars 2022, soit il y a près de 105 semaines et que ces dernières ont mis en demeure la société EDF de les raccorder dès le 10 août 2022 ; que le SMEM n'a obtenu les conventions de servitude que le 19 mars 2024 ; que le SMEM indique toujours des délais approximatifs ; que malgré cette avancée, la société EDF n'a pas modifié sa proposition par un prix et un délai global précis ;
    - la société EDF s'est à nouveau saisie du dossier comme le prouvent la convention de servitude obtenue et le courrier électronique du 13 novembre 2023 ;
    - elles ont construit les logements à raccorder au réseau de distribution d'électricité dans le cadre d'une opération de défiscalisation encadrée par l'article 217 undecies du code général des impôts ; qu'au titre de cet article, elles disposent, à compter de la date d'achèvement des travaux, de douze mois pour mettre le bien en location ; qu'elles risquent autrement une reprise de l'avantage fiscal pour un montant provisoire de déficits restant à reporter au 31 décembre 2022 ; que pour ces raisons, il est demandé au CoRDiS d'enjoindre à la société EDF de s'engager sur un délai de début des travaux pour le 15 mai 2024 et sur le raccordement effectif pour le 15 novembre 2024 au plus tard, pour permettre aux pétitionnaires de rechercher des locataires avant le 19 décembre 2024 et ce, sous astreinte de 200 euros par jour par société ;
    - l'autorisation d'urbanisme a été accordée au titre de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme ; qu'en vertu de l'article L. 332-15 du même code, il revient au pétitionnaire de payer les travaux sur son terrain d'assiette jusqu'au droit de la voirie ; que selon l'article L. 342-11-1, alinéa 2, du code de l'énergie, il revient à la collectivité qui a accordé l'autorisation d'urbanisme de payer l'extension, comme en atteste une note externe de la direction technique d'Enedis ;
    - les demanderesses donnent acte au SMEM de sa décision de renoncer à percevoir la participation aux travaux d'extension de réseau et de son engagement à rembourser la somme de 5 075,38 euros ; que ce remboursement n'est cependant pas effectif et que le SMEM n'a toujours pas demandé, au jour des dernières conclusions, le RIB des demanderesses pour procéder audit remboursement ;
    - elles ne sont pas concernées par les travaux d'extension et par la répartition éventuelle du coût des travaux, des responsabilités et charges entre la société EDF et le SMEM ou la commune ; que, par conséquent, tous les documents tarifaires fournis par la société EDF sont illégaux ; qu'aucun document unique permettant de commander la prestation en toute connaissance de cause ne leur a été transmis ; que le contenu de la prestation, le prix total, le délai, la proposition de l'acception de l'offre et la mention de l'acompte déjà versé sont absents des documents fournis par la société EDF ; que le SMEM, en dépit de son engagement, n'a toujours pas remboursé la somme de 5 075,38 euros pour une prestation qui, au vu des textes en vigueur, n'aurait jamais dû être mise à la charge des demanderesses ; qu'elles ont réglé cette somme face à l'insistance du SMEM ;
    - la société EDF n'aurait jamais dû demander aux requérantes le règlement de l'extension ; qu'il est demandé au CoRDiS d'enjoindre la société EDF de revoir sa proposition en l'intitulant « proposition de branchement au tarif de 1 383,17 euros l'unité » et en supprimant toute référence au SMEM ; que la proposition du SMEM n'aurait jamais dû être communiquée aux demanderesses ; qu'il ne revient pas à celles-ci de payer l'extension de réseau ; que par conséquent, la proposition du SMEM est illégale ; que leur interlocuteur unique est la société EDF, qui peut désormais effectuer le raccordement ;
    - la FNCCR n'apporte aucune preuve de sa capacité à agir ; que les pièces exigées par les articles 5 et 9 des statuts de la FNCCR pour lui permettre d'agir en justice ne sont pas fournies ; que la FNCCR n'a pas non plus intérêt à agir dans la mesure où elle n'est pas concernée par le litige et n'a subi aucun préjudice ; que la FNCCR a déposé à tort un mémoire alors que le CoRDiS est une juridiction civile ; qu'elle a un champ d'action trop vaste pour prendre la défense de chacun de ses 500 adhérents dans chaque litige ; qu'une collectivité concédante peut assurer elle-même la réalisation des travaux, en vertu de l'article L. 2224-31-I, alinéa 6, du code général des collectivités territoriales et peut faire prendre en charge par son concessionnaire la maîtrise d'ouvrage de la demande d'électricité, en vertu du II de ce même article ;
    - la société EDF, dans ses dernières écritures, a refusé de prendre en charge leur raccordement et rejette la responsabilité des retards sur le SMEM ; qu'il revient au CoRDiS de déterminer les responsabilités respectives de la société EDF et du SMEM pour fixer l'astreinte ;
    - le délai de cinq semaines à partir de la réception du bon de commande pour la réalisation des travaux d'extension reste toujours imprécis et aléatoire ;
    - les demanderesses n'ont aucune certitude d'obtenir la fourniture de l'électricité, ni à une date précise ni à un prix conforme à la loi ; que pour s'assurer d'une réponse efficace et complète du SMEM et de la société EDF, il est demandé de prononcer une astreinte définitive contre la société EDF et le SMEM, du 4 février 2024 jusqu'à la date de fourniture effective de l'électricité aux demanderesses, dont la société EDF devra justifier par la mise en route des compteurs ; qu'aucune réfaction de l'astreinte ne saurait intervenir en raison de l'absence de difficulté et du comportement du SMEM ;
    - il est demandé au CoRDiS de condamner conjointement le SMEM et la société EDF à des sanctions pécuniaires en raison, d'une part, de la gravité de leurs manquements et, d'autre part, des frais annexes causés aux demanderesses du fait de leur résistance et délais abusifs ; qu'elles demandent une compensation forfaitaire du temps passé pour préparer, motiver, conduire et suivre les quatre demandes (deux astreintes et deux règlements de différend) auprès du CoRDiS ; que les avantages financiers historiquement tirés par le SMEM de la facturation persistante, illégale et assumée de raccordement aux maîtres d'ouvrages de la Martinique doivent être sanctionnés ;
    - les mêmes sanctions pécuniaires sont encourues en cas de refus d'obtempérer dans les délais fixés à une première décision du CoRDiS ; qu'en l'espèce la décision nos 13-38-22 et 14-38-23 du 13 juin 2023 n'a toujours pas été exécutée à ce jour, soit plus de 9 mois après son adoption ; qu'il est demandé au CoRDiS l'aggravation de la sanction retenue, soit 15 000 euros.


    Par un mémoire en intervention et un mémoire en réponse, enregistrés les 5 et 12 février 2024, la FNCCR, représentée par son représentant légal, demande au CoRDiS de déclarer irrecevable la demande de règlement de différend n° 01-38-24 en tant qu'elle est dirigée contre le SMEM.
    La FNCCR fait valoir que :


    - selon l'article 9 de ses statuts, son président est habilité à la représenter en justice sans qu'il soit nécessaire d'obtenir l'autorisation préalable de son assemblée générale ni de s'assurer que l'adhérent impliqué est à jour de ses cotisations ;
    - la FNCCR justifie d'un intérêt pour intervenir à la présente affaire impliquant le SMEM, dans la mesure où ce dernier exerce la maîtrise d'ouvrage des extensions de réseau à réaliser pour le raccordement des utilisateurs en sa qualité d'autorité organisatrice de la distribution d'énergie (AODE) et qu'elle a pour objet, conformément à l'article 2 de ses statuts, la défense des intérêts généraux des AODE ;
    - aux termes de l'article L. 322-6 du code de l'énergie, les AODE, qui sont propriétaires des réseaux publics de distribution d'électricité, peuvent conserver la maîtrise d'ouvrage de certains travaux sur leurs réseaux et les modalités d'exercice de cette compétence sont précisées à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales ; que dans ces conditions, une AODE ne saurait être assimilée à un gestionnaire de réseau lorsqu'elle exerce la maîtrise d'ouvrage des extensions ; que l'article L. 134-19 du code de l'énergie n'habilite pas le CoRDiS à se prononcer sur les conditions dans lesquelles les AODE exercent leur compétence ; que le CoRDiS méconnaîtrait par conséquent le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales en s'immisçant dans l'exercice, par une AODE, de la compétence qui lui est reconnue par la loi ;
    - aux termes de l'article 33 du cahier des charges de la concession du SMEM, les litiges opposant le syndicat à la société EDF concernant l'exécution de cette concession doivent, avant l'engagement de toute procédure juridictionnelle, donner lieu à une tentative de conciliation ; que par conséquent, la présente demande ne pourrait relever que de cette procédure de conciliation ;
    - en tout état de cause, la demande tendant à contester la proposition de chiffrage établie par le SMEM ne doit pas conduire le CoRDiS à se prononcer sur la répartition de la maîtrise d'ouvrage convenue entre le syndicat et son concessionnaire pour le raccordement des sociétés requérantes dans la mesure où cette répartition de la maîtrise d'ouvrage des travaux sur le réseau est prévue dans le contrat de concession de chaque AODE avec son concessionnaire, et, en l'espèce, selon les modalités définies par le contrat de concession qui lie le SMEM et la société EDF, à l'article 4 de l'annexe 1 du cahier des charges ;
    - enfin, aux termes de l'article L. 111-91 du code de l'énergie, c'est au gestionnaire de réseau de distribution d'électricité, et non à l'AODE, de garantir aux utilisateurs un droit d'accès au réseau qu'il exploite.


    Par des observations en défense enregistrées le 6 février 2023, le SMEM, représenté par son représentant légal et ayant pour avocat Me Dumont, demande au CoRDiS, dans le dernier état de ses écritures de :


    - se déclarer incompétent pour connaître de la demande en tant qu'elle vise le SMEM ;
    - rejeter la demande en tant qu'elle vise le SMEM.


    Le SMEM fait siennes les écritures en intervention de la FNCCR et sollicite pour son propre compte que la demande des sociétés soit déclarée irrecevable en tant qu'elle vise le SMEM. Il fait également valoir que :


    - le CoRDiS est incompétent concernant la mise en cause du SMEM, dans la mesure où ce dernier est une AODE ;
    - si le CoRDiS a cru pouvoir s'arroger des compétences à ce titre dans de précédentes décisions, cette création prétorienne ne saurait être pérenne ;
    - M. G., qui prétendait précédemment ne pas avoir de convention de passage en sa possession, justifie de l'existence d'une telle convention négociée par la société EDF en janvier 2023, soit bien antérieurement à la décision du CoRDiS du 13 juin 2023 ; que c'est le CoRDiS qui, s'étant mêlé incompétemment des relations entre l'AODE et son concessionnaire, a, par l'article 5 de la décision du 13 juin 2023 précitée, demandé à la société EDF de porter à son devis la part financière relevant des travaux à la charge du SMEM, ce que la société EDF a exécuté dès le 23 juillet 2023.


    Par des observations en défense, enregistrées le 12 mars 2024, la société EDF, représentée par son représentant légal et ayant pour avocats Mes Perche et Cabanes, cabinet Baker & McKenzie, demande au CoRDiS, dans le dernier état de ses écritures, de :


    - rejeter l'intervention de la FNCCR ;
    - rejeter les demandes de la FNCCR et du SMEM en tant qu'elles critiquent la recevabilité des demandes présentées par la société Aquitaine Promotions et la SCI Garabeuf ;
    - rejeter les demandes de la société Aquitaine Promotions et de la SCI Garabeuf, en tant qu'elles concernent la société EDF.


    La société EDF fait valoir que :


    - la FNCCR ne justifie pas en quoi la mise en cause du SMEM lui causerait un préjudice ;
    - au regard des travaux parlementaires de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, de laquelle sont issues les dispositions de l'article L. 134-19 du code de l'énergie et dès lors que, quand une autorité organisatrice décide d'exercer elle-même, une partie de la maîtrise d'ouvrage des travaux de raccordement dont la partie d'extension des ouvrages de distribution, elle est bien acteur du litige relatif au réseau concerné, le CoRDiS est fondé à retenir sa compétence dans le cas d'un litige opposant un utilisateur à une AODE ayant décidé d'exercer directement la maîtrise d'ouvrage des travaux d'extension nécessaire au raccordement ;
    - s'agissant du délai de raccordement, le courrier d'accompagnement du 25 juillet 2023 transmis par la société EDF aux requérantes contient bien un délai prévisionnel d'achèvement des travaux d'extension - de 9 semaines à compter de la réception des conventions de financement et des conventions de passage signées - et des travaux de branchement - de 15 jours à compter de la mise à disposition de l'extension ; qu'il ressort de l'article 6.2.2 de la procédure de la société Enedis n° PRO-RAC_21E dans sa version applicable du 1er décembre 2016 au 14 juin 2018 que la proposition de raccordement doit indiquer « un délai prévisionnel de réalisation des travaux » ; que le délai indicatif de raccordement figurant sur le site de la société Enedis, qui concerne les raccordements réalisés en métropole, est inopposable à la société EDF SEI et au SMEM ;
    - s'agissant de la prétendue reprise en main du dossier par la société EDF, cette dernière avait cru utile de mandater une société pour l'étude de raccordement, ainsi que l'obtention des conventions de servitude, en vue d'anticiper l'hypothèse où elle aurait finalement dû assurer elle-même les travaux d'extension ; que par conséquent, la société EDF avait transmis au SMEM le dossier technique de la demande de raccordement des requérantes en octobre 2022 ; que le SMEM avait donné son accord le 7 novembre 2022 à la réalisation, le cas échéant, des travaux d'extension par la société EDF ; que celle-ci n'a finalement pas donné suite en raison de la confirmation par le SMEM, en novembre 2022, de sa compétence exclusive pour prendre en charge l'instruction de la demande de raccordement, conformément au contrat de concession ; que la société EDF a demandé à la société 2DRD Ingénierie de suspendre sa mission, y compris pour l'obtention d'une convention de servitude signé de la part de l'association syndicale « Libre Résidence Valverde », compte tenu de la reprise de l'instruction des demandes de raccordement par le SMEM et de l'instruction en cours devant le CoRDiS ; que c'est donc à la suite d'un malentendu que la société 2DRD Ingénierie a quand même transmis le 10 janvier 2023 une convention de servitude, qui a été signée par l'association syndicale « Libre Résidence Valverde » en novembre 2023 ; que la société EDF n'a appris la signature de cette convention qu'à l'occasion de la production, par les requérantes, de celle-ci dans le cadre de leur demande de liquidation d'astreinte n° 01-LA-24 ; que les propriétaires voisins étant désormais identifiés et leur accord aux travaux d'extension sur leur terrain ne faisant plus aucun doute, il appartient au SMEM, de commencer les démarches pour obtenir les conventions de servitude ;
    - il est nécessaire de réaliser les travaux d'extension d'abord, puis les travaux de branchement ; que si la société EDF a proposé le 13 novembre 2023 de réaliser les travaux de branchement sans attendre la réalisation des travaux d'extension, cette proposition visait à accélérer la réalisation du raccordement pour la partie incombant à la société EDF mais celle-ci n'a toutefois jamais entendu reprendre l'intégralité de la réalisation du raccordement ; que la société EDF pourrait certes d'ores et déjà implanter le câble de branchement sans attendre l'installation par le SMEM du coffret réseau mais cette anticipation serait sans incidence sur le délai de raccordement de la propriété au réseau ; que les articles 1231 du code civil et 217 undecies du code général des impôts invoqués par les requérantes sont inopérants ;
    - conformément à la procédure de la société Enedis n° PRO-RAC_21E, la société EDF n'est pas l'interlocuteur des demandeurs lorsqu'est en jeu le suivi des travaux dont la maîtrise d'ouvrage doit être assurée par le SMEM, à qui incombe la mise en œuvre et l'obtention des conventions de servitude nécessaires aux travaux d'extension ;
    - s'agissant du coût du raccordement, conformément à l'article 5.6.2 de la procédure de la société Enedis précitée, la répartition des travaux entre l'AODE et la société EDF intéresse directement les requérantes, à qui il appartient de s'adresser, le cas échéant, au SMEM pour la partie des travaux qui lui incombe ; que le coût des travaux d'extension à hauteur de 22 550 euros correspond au coût global, comprenant les sommes à la charges du SMEM et celles à la charge de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions ; que les requérantes ont déjà été informées par le SMEM qu'elles ne seront redevables que de 20 % de celui-ci ; que l'offre conjointe de raccordement et le courrier d'accompagnement, qui forment un tout indissociable, contiennent bien les informations relatives au contenu de la prestation, au délai et aux acomptes déjà versés.


    Par une décision du 8 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 mars 2024 à 12 heures.
    Le 25 mars 2024, le président du comité a informé les parties qu'il envisageait d'organiser la séance publique en visioconférence.
    Par des courriers électroniques des 25 et 27 mars 2024, les parties ont accepté le principe de participer à la séance publique au moyen d'une communication électronique.
    Par des courriers en date du 28 mars 2024, les parties ont été informées que la séance publique se tiendrait par visio-conférence le 8 avril 2024 à 17 heures.


    Par un courrier électronique en date du 29 mars 2024, le SMEM a adressé au président du CoRDiS un courrier accompagné de six pièces, comprenant :


    - un courrier électronique daté du 28 mars 2024, adressé à M. G., en sa qualité de représentant de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions, informant ce dernier de l'obtention par le SMEM des conventions de passage des parcelles nos AW 1238 et AW 1243 et précisant que les travaux d'extension seront réalisés dans un délai de « 5 semaines à partir de la réception du bon de commande émis par le SMEM » ;
    - la convention de passage signée par le SMEM et l'association syndicale libre de la résidence Valverde le 19 mars 2024 pour la parcelle n° AW 1238 ;
    - la convention de passage signée par le SMEM et l'association syndicale libre de la résidence Valverde le 19 mars 2024 pour la parcelle n° AW 1243 ;
    - un échange de courriers électroniques datés des 21 et 26 mars 2024 par lesquels le SMEM informe la société Getelec, qu'il a mandatée pour réaliser les travaux d'extension qui sont à sa charge, qu'il est en possession des conventions de servitude signées. La société Getelec l'informe à cette occasion qu'un délai de cinq semaines sera nécessaire pour la réalisation de l'ouvrage ;
    - un titre exécutoire émis le 27 mars 2024 et adressé à la SARL Aquitaine Promotions, qui doit s'acquitter d'un montant de 5 075,38 euros envers le SMEM ;
    - une convention de financement études et travaux, datée du 28 mars 2023 et conclue entre le SMEM et la SARL Aquitaine Promotions concernant « l'extension du réseau public de distribution d'énergie électrique en vue d'amener ledit réseau au droit de la parcelle numéro 1493 ». Cette convention détaille les montants de l'opération d'extension du réseau jusqu'à la parcelle à relier.


    Par des courriers en date du 2 avril 2024, les parties ont été informées que la séance publique était annulée.
    Par une décision du 2 avril 2024, l'instruction a été rouverte et la clôture d'instruction a été fixée au 19 avril 2024 à 12 heures.


    Le 8 avril 2024, une mesure d'instruction a été diligentée auprès du SMEM, de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions afin d'obtenir la date exacte de signature de la « convention de financement études et travaux ».
    Par un courrier électronique en date du 10 avril 2024, le SMEM a répondu que cette convention avait bien été signée en mars 2023 et a transmis une copie de l'échange de courriers électroniques actualisé au 8 avril 2024 avec M. G., prenant acte du paiement par ses soins du titre exécutoire et l'informant de l'émission du bon de commande par le SMEM. Par un courrier électronique en date du 10 avril 2024, M. G., en sa qualité de représentant de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions, a confirmé la date de la signature de la même convention et a transmis une copie des deux courriers électroniques en date du 28 mars 2023 par lesquels, d'une part, le SMEM lui a adressé cette convention, et, d'autre part, M. G. a renvoyé le document signé.


    Par des courriers en date du 11 avril 2024, les parties ont été informées que la séance publique se tiendrait par visio-conférence le 22 avril 2024 à 16 h 30.


    Par un courrier électronique du 18 avril 2024, le SMEM a adressé à la rapporteure un courrier accompagné de cinq pièces, comprenant :


    - un échange de courriers électroniques entre le SMEM et la société Getelec, lauréate du marché à bons de commande, par lequel, notamment, cette société accuse bonne réception du bon de commande, émis par le SMEM, relatif aux prestations permettant de desservir en réseau public de distribution d'électricité les parcelles concernées par le présent litige ;
    - le bon de commande de « travaux études » d'extension du réseau électrique concernant les parcelles des sociétés demanderesses ;
    - un plan des travaux d'extension à effectuer ;
    - la délibération du conseil syndical du SMEM du 23 mars 2012 fixant la répartition du support du coût des travaux d'extension ;
    - un courrier électronique daté du 17 avril 2024 adressé par le SMEM à M. G., conviant ce dernier à l'opération de piquetage.


    Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de M. Tuot, président, Mme Ducloz et M. Simonel, membres, qui s'est tenue par visio-conférence le 22 avril 2024, après vérification de l'identité des parties et de leurs représentants, en présence de :


    - Mme Bonhomme, directrice des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché ;
    - Mme Gridel, rapporteure ;
    - M. G., représentant la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions ;
    - Les représentants de la société EDF, assistés de Me Abbouche ;
    - Les représentants du SMEM, assistés de Me Dumont ;
    - La FNCCR, représentée par Mme F.


    Les parties ayant été informées qu'à tout moment, le président du comité peut décider de lever la séance pour qu'elle soit prorogée à une date ultérieure en cas de difficulté matérielle, notamment liée à la capacité de connexion de l'un des participants, ne permettant pas le déroulement normal de la séance ;
    L'ensemble des parties ayant confirmé la bonne qualité de la liaison électronique et avoir été informé des modalités de convocation à la séance publique.
    Après avoir entendu :


    - le rapport de Mme Gridel, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
    - les observations de M. G. pour la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions, ces dernières persistent dans leurs moyens et conclusions. Elles ajoutent que le bon de commande émis par le SMEM le 16 avril 2024 est erroné dans la mesure où celui-ci indique un montant de 20 696,81 euros TTC ;
    - les observations de Me Abbouche pour la société EDF, cette dernière persiste dans ses moyens et conclusions. Elle précise que le branchement ne pourra être complet que lorsque les travaux d'extension seront achevés et qu'elle fera appel à la société Getelec pour la réalisation des travaux de branchement ;
    - les observations de Me Dumont pour le SMEM, ce dernier persiste dans ses moyens et conclusions. Il indique que le taux de participation du demandeur aux travaux d'extension a été appliqué de manière erronée au regard de la délibération de son conseil syndical du 23 mars 2012 et qu'il aurait dû appliquer un taux de 50 % et non de 20 % ;
    - les observations de Mme F. pour la FNCCR, cette dernière persiste dans ses moyens et conclusions.


    Le comité a décidé d'interrompre la séance publique et d'adresser une mesure d'instruction aux parties.


    Par une décision du 23 avril 2024, l'instruction a été rouverte et la clôture d'instruction a été fixée au 10 mai 2024 à 12 heures.


    Le 23 avril 2024, une mesure d'instruction a été diligentée auprès de la SCI Garabeuf, de la SARL Aquitaine Promotions, de la société EDF et du SMEM afin que ceux-ci produisent leurs observations quant à l'application dans le temps des dispositions du 3e alinéa de l'article L. 342-11 du code de l'énergie et, en particulier, quant à son applicabilité au litige ainsi qu'aux conséquences d'une éventuelle application des dispositions susmentionnées sur la délibération de 2012 produite par le SMEM le 18 avril 2024 et, par conséquent, sur la répartition du montant des travaux d'extension liés au raccordement des parcelles AW 1491 et AW 1493 des sociétés demanderesses.
    Par un courrier électronique du 25 avril 2024, la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions ont répondu que :


    - en produisant la délibération du conseil syndical du SMEM du 23 mars 2012 fixant la répartition du support du coût des travaux d'extension, le SMEM reconnaît à l'évidence :
    1) Qu'il est en relation permanente avec les communes pour recouvrer leur participation aux travaux d'extension de réseaux ;
    2) Que cette procédure est toujours en vigueur ;
    - elles maintenaient leurs demandes.


    Par un courrier électronique du 26 avril 2024, la société EDF a répondu que :


    - la mesure d'instruction concerne exclusivement le SMEM, auteur de la délibération contestée et maître d'ouvrage des travaux d'extension et non la société EDF à qui incombe les seuls travaux de branchement ;
    - la société EDF n'a pas d'observations à formuler.


    Par un courrier électronique du 26 avril 2024, le SMEM a répondu que :


    - il a transmis à M. G. un titre exécutoire portant annulation du titre de recettes, précédant le remboursement effectif de la somme avancée par ce dernier ;
    - il a émis ce titre après avoir pris connaissance de la mesure d'instruction ainsi que de la délibération de la CRE n° 2023-300 du 22 septembre 2023 et des autres pièces techniques du dossier ;
    - et ce, sans préjudice de la question de la compétence du CoRDiS tant à l'égard du SMEM lui-même, que quant à l'appréciation de la légalité d'un titre de recettes émis par une collectivité locale et de sa propre base légale.


    Par un courrier électronique du 26 avril 2024, la FNCCR a produit des observations et souligné que :


    - la mesure d'instruction aux parties le 23 avril courant impliquerait pour le CoRDiS de se prononcer sur la légalité de la délibération du SMEM en date du 23 mars 2012, en méconnaissance des règles relatives au contrôle de légalité des actes pris par les collectivités territoriales telles qu'elles résultent de l'article 72 de la Constitution ;
    - qu'elle persistait dans ses précédentes écritures.


    Par un courrier électronique du 2 mai 2024, le SMEM a adressé à la rapporteure un courrier accompagné d'une pièce comprenant le compte-rendu des opérations de piquetage réalisées le 26 avril 2024 dans le cadre des travaux d'extension.


    Par des courriers en date du 2 mai 2024, les parties ont été informées que la séance publique se tiendrait par visio-conférence le 15 mai 2024 à 15 h 30.


    Par un courrier électronique du 10 mai 2024, le SMEM a adressé à la rapporteure un courrier accompagné du dernier état du calendrier d'exécution des travaux d'extension, sous maîtrise d'ouvrage SMEM.
    Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de M. Tuot, président, Mme Ducloz et M. Simonel, membres, qui s'est tenue par visio-conférence le 15 mai 2024, après vérification de l'identité des parties et de leurs représentants, en présence de :


    - Mme Bonhomme, directrice des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché ;
    - Mme Gridel, rapporteure ;
    - M. G., représentant la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions ;
    - Les représentants de la société EDF, assistés de Me Guillaume ;
    - Les représentants du SMEM, assistés de Me Dumont ;
    - La FNCCR, représentée par Mme F.


    Les parties ayant été informées qu'à tout moment, le président du comité peut décider de lever la séance pour qu'elle soit prorogée à une date ultérieure en cas de difficulté matérielle, notamment liée à la capacité de connexion de l'un des participants, ne permettant pas le déroulement normal de la séance ;
    L'ensemble des parties ayant confirmé la bonne qualité de la liaison électronique et avoir été informé des modalités de convocation à la séance publique.
    Après avoir entendu :


    - le rapport de Mme Gridel, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
    - les observations de M. G. pour la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions, ces dernières persistent dans leurs moyens et conclusions ;
    - les observations de Me Dumont pour le SMEM, ce dernier persiste dans ses moyens et conclusions. Il précise que les travaux d'extension doivent être achevés le 15 mai 2024, que les plans signés par le SMEM devraient être transmis à la société EDF le 26 mai 2024 au plus tard et que la société EDF pourra, par conséquent, commencer les travaux de branchement à compter de cette date. Il ajoute que le CoRDiS ne peut prononcer une sanction dans le cadre d'une procédure de règlement de différend et que le remboursement de la somme de 5 075,38 euros aura lieu à la fin du mois ;
    - les observations de Me Guillaume pour la société EDF, cette dernière persiste dans ses moyens et conclusions. Il précise que les travaux de branchement seront finalisés au plus tard la semaine du 20 mai 2024, qu'un délai de prévenance de deux semaines est nécessaire afin d'effectuer une coupure sur le réseau en vue de la pose des compteurs, que cette coupure interviendra donc dans la semaine du 17 juin 2024 et que les compteurs seront en principe posés dans la semaine du 24 juin 2024 ;
    - les observations de Mme F. pour la FNCCR, cette dernière persiste dans ses moyens et conclusions.


    Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré après que les parties, la rapporteure, le public et les agents des services se sont retirés.
    Vu les autres pièces du dossier :
    Vu :


    - le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants et R. 134-7 et suivants ;
    - le code général des collectivités territoriales ;
    - le code de procédure civile ;
    - la décision du 13 février 2019 portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
    - la décision du 8 mars 2024 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'une rapporteure pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 01-38-24.


    Sur l'intervention de la FNCCR :
    1. Il y a lieu, en l'absence de dispositions prévoyant des règles spécifiques d'intervention des tiers dans les instances de règlement de différend ouvertes devant le comité, et à défaut de précision contraire, d'appliquer les règles générales d'intervention issues du code de procédure civile.
    2. Il résulte de l'article 330 de ce code qu'une intervention volontaire accessoire, laquelle se borne à appuyer les prétentions d'une partie, est recevable si son auteur a intérêt, pour la préservation de ses droits, à soutenir cette partie.
    3. L'article 2 des statuts de la FNCCR prévoit que : « L'Association a pour but de représenter les élus et d'aider les personnes morales adhérentes : 1) à défendre et représenter les intérêts généraux et particuliers de ces collectivités et organismes du chef tant des services publics - quel qu'en soit l'objet, le régime et le mode d'exploitation - dont l'organisation et la gestion leur incombent, que de leur domaine public ou privé en général. 2) à perfectionner et développer les services publics, à améliorer la gestion des services publics et du domaine public ou privé de ces mêmes collectivités et organismes ». Il en résulte que la FNCCR a intérêt à intervenir au soutien des prétentions du SMEM dans le présent litige, celui-ci exerçant la maîtrise d'ouvrage des extensions de réseau à réaliser pour le raccordement des utilisateurs. Son intervention volontaire accessoire au soutien du SMEM est, en conséquence, recevable.
    Sur la compétence du CoRDiS pour connaître de la demande de règlement de différend en tant qu'elle vise le SMEM :
    4. Aux termes de l'article L. 134-19 du code de l'énergie : « Le comité de règlement des différends et des sanctions peut être saisi en cas de différend : 1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité ou de réseaux fermés de distribution d'électricité ; […] Ces différends portent sur l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 111-97, L. 321-11 et L. 321-12, ou des contrats relatifs aux opérations de transport et de stockage géologique de dioxyde de carbone mentionnés à l'article L. 229-49 du code de l'environnement. La saisine du comité est à l'initiative de l'une ou l'autre des parties. […] ».
    5. Il ressort des dispositions précitées qu'un différend n'entre dans la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions, laquelle est une compétence d'attribution, qu'à une double condition, tenant, l'une à la qualité des personnes qu'un différend oppose, et l'autre, à l'objet du différend.
    6. D'une part, le SMEM soutient que la demande de règlement de différend présentée par la SCI Garabeuf et par la SARL Aquitaine Promotions est irrecevable en tant qu'elle est dirigée contre lui dans la mesure où une AODE n'est pas un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité et où, lorsqu'une AODE exerce la maîtrise d'ouvrage des travaux sur les réseaux de distribution, celle-ci le fait au titre de sa compétence d'AODE et non en sa qualité de gestionnaire de réseau.
    7. Aux termes des dispositions de l'article L. 121-4 du code de l'énergie, « I. - La mission de développement et d'exploitation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité consiste à assurer : 1° La desserte rationnelle du territoire national par les réseaux publics de transport et de distribution, dans le respect de l'environnement, et l'interconnexion avec les pays voisins ; 2° Le raccordement et l'accès, dans des conditions non discriminatoires, aux réseaux publics de transport et de distribution. II. - Sont chargées de cette mission, conformément à leurs compétences respectives, […] la société gestionnaire de réseaux publics de distribution issue de la séparation des activités d'Electricité de France en application de l'article L. 111-57, […] et les autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité. Elles accomplissent cette mission conformément aux dispositions du présent code relatives au transport et à la distribution d'électricité ainsi qu'au raccordement aux réseaux et, s'agissant des réseaux publics de distribution, à celles des cahiers des charges des concessions ou des règlements de service des régies mentionnés au II de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales. Les charges en résultant sont réparties dans les conditions prévues aux articles L. 121-9 à L. 121-31 ».
    8. L'article L. 322-1 de ce code dispose : « Les autorités organisatrices d'un réseau public de distribution sont définies à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales ». Aux termes du premier alinéa de cet article L. 2 24-31 : « I.- Sans préjudice des dispositions de l'article L. 111-54 du code de l'énergie, les collectivités territoriales ou leurs établissements publics de coopération, en tant qu'autorités concédantes de la distribution publique d'électricité et de gaz en application des articles L. 321-1, L. 322-1, L. 324-2 et L. 432-1 du code de l'énergie et des articles L. 322-6 et L. 432-5 du code de l'énergie, négocient et concluent les contrats de concession, et exercent le contrôle du bon accomplissement des missions de service public fixées, pour ce qui concerne les autorités concédantes, par les cahiers des charges de ces concessions ».
    9. L'article L. 322-6 du même code prévoit, enfin : « Les autorités organisatrices du réseau public de distribution d'électricité ont la faculté de faire exécuter en tout ou en partie à leur charge, les travaux de premier établissement, d'extension, de renforcement et de perfectionnement des ouvrages de distribution. Les dispositions relatives à la maîtrise d'ouvrage par ces autorités sont énoncées aux articles L. 2224-31 et L. 3232-2 du code général des collectivités territoriales ».
    10. En vertu des dispositions du code de l'énergie et du code général des collectivités territoriales précitées et de celles du cahier des charges des concessions ou des règlements de service des régies, une AODE peut choisir de déléguer ses missions de développement et d'exploitation du réseau public de distribution d'électricité ou de conserver la compétence d'exécution d'une partie des compétences qui peuvent faire l'objet de la délégation. En tant qu'elle exerce des compétences de développement et d'exploitation du réseau public de distribution d'électricité qui pourraient relever de l'activité du gestionnaire de réseau de distribution, et dans la stricte limite de l'exercice des compétences qu'elle n'a pas déléguées, une telle autorité doit être regardée, au sens et pour l'application de l'article L. 134-19 du code de l'énergie, comme agissant en qualité de gestionnaire de réseau de distribution.
    11. En l'espèce, d'une part, conformément aux stipulations de l'article 9 du cahier des charges joint à la convention de concession pour le service public de distribution d'énergie électrique pour la Martinique conclue le 4 juillet 2003 entre la société EDF et le SMEM et à celles de l'article 4 de l'annexe 1 de ce cahier des charges, lorsque la solution technique retenue nécessite de réaliser des travaux d'extension du réseau public de distribution d'électricité, la maîtrise d'ouvrage relève de la compétence du SMEM, ce qu'il ne conteste pas. Par conséquent, le SMEM, en tant qu'il exerce la maîtrise d'ouvrage des travaux d'extension du réseau public d'électricité pour le raccordement litigieux, doit être regardé comme agissant en qualité de gestionnaire de réseau de distribution.
    12. D'autre part, si le SMEM soutient que le CoRDiS n'est pas compétent pour se prononcer sur la répartition de la maîtrise d'ouvrage convenue entre le SMEM et son concessionnaire, celle-ci étant convenue par le contrat de concession, le présent différend ne porte pas sur la répartition de la maîtrise d'ouvrage convenue entre le SMEM et son concessionnaire, la société EDF, mais sur la réalisation de travaux de raccordement de deux parcelles au réseau public de distribution d'électricité.
    13. Il en résulte que l'exception d'incompétence soulevée par le SMEM doit être rejetée.
    Sur la demande de la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions relative au raccordement de leurs installations de consommation :
    14. Il résulte des déclarations des parties lors de la séance publique du 15 mai 2024, que les travaux d'extension dont le SMEM a la maîtrise d'ouvrage seront achevés le 15 mai 2024, que les données requises seront déposées par le SMEM sur la plateforme de la société EDF au plus tard le 23 mai 2024, que les plans signés par le SMEM seront transmis à la société EDF le 26 mai 2024 au plus tard et qu'un délai de prévenance de deux semaines à compter du 26 mai 2024 étant nécessaire avant de procéder à une coupure sur le réseau permettant la pose des compteurs, cette coupure interviendra dans la semaine du 17 juin 2024, en vue de la pose des compteurs prévue pendant la semaine du 24 juin 2024.
    15. Dans ces circonstances, il n'existe plus, en l'état de l'instruction et au vu des engagements pris par les représentants du SMEM et de la société EDF lors de la séance publique du 15 mai 2024, de différend entre les parties portant sur le raccordement des installations en litige.
    Sur la demande de la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions tendant au remboursement par le SMEM de la somme de 5 075,38 euros :
    16. Il résulte de l'instruction que le SMEM a émis, le 25 avril 2024, un titre exécutoire portant annulation du titre de recettes d'un montant de 5 075,38 euros, permettant ainsi le remboursement de la participation au financement des travaux d'extension versée indûment par les sociétés demanderesses. Il résulte, par ailleurs, des déclarations du SMEM lors de la séance publique du 15 mai 2024, que le remboursement de la somme de 5 075,38 euros interviendra à brève échéance, à l'issue des diligences comptables nécessaires.
    17. Il n'y a donc pas lieu d'enjoindre sous astreinte au SMEM de procéder au remboursement demandé.
    Sur la demande de la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions tendant au prononcé et à la liquidation d'une astreinte :
    18. Au regard de ce qui précède, cette demande ne peut qu'être rejetée.
    Sur la demande de la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions tendant à la condamnation du SMEM et de la société EDF à une sanction pécuniaire :
    19. Il ne revient pas au comité, statuant en matière de règlement de différend dans le cadre prévu par les dispositions de l'article L. 134-19 du code de l'énergie, de statuer sur une demande de sanction. La demande présentée à ce titre par les sociétés demanderesses ne peut donc qu'être rejetée.


    Décide :


  • L'intervention volontaire de la FNCCR est admise.


  • L'exception d'incompétence soulevée par le SMEM est rejetée.


  • Les conclusions des sociétés Garabeuf et Aquitaine Promotions sont rejetées.


  • La présente décision sera notifiée à la SCI Garabeuf, à la SARL Aquitaine Promotions, à la société EDF, au SMEM et à la FNCCR. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 29 mai 2024.


Pour le comité de règlement des différends et des sanctions :
Le président,
T. Tuot

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