Le comité de règlement des différends et des sanctions (le CoRDiS) est saisi par la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions des faits suivants.
La SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions, respectivement domiciliées au lieu-dit Peydauchou Boulazac et route de Bauchaud Boulazac, 24750 Boulazac Isle Manoire, ayant pour même représentant M. G., ont présenté une demande visant à obtenir la liquidation, à l'encontre du Syndicat mixte d'électricité de la Martinique (ci-après : le « SMEM »), de l'astreinte prononcée par le CoRDiS dans sa décision de règlement de différend du 13 juin 2023 (n° 13-38-22 et 14-38-22) et maintenue par sa décision de liquidation d'astreinte du 1er décembre 2023 (n° 01-LA-23).
Par sa décision du 13 juin 2023, le CoRDiS a décidé que :
« Article 1er. - La jonction des procédures enregistrées sous les numéros 13-38-22 et 14-38-22 est prononcée.
« Article 2. - La demande de mise hors de cause formée par le SMEM est rejetée.
« Article 3. - Il est enjoint au SMEM de mobiliser l'ensemble de ses moyens pour obtenir les conventions de passage complétées, datées et signées par les propriétaires des parcelles AW 1238 et AW 1243, dans les formes requises pour assurer leur stabilité et leur pleine efficacité tant entre les parties qu'à l'égard des tiers.
« Article 4. - Il est enjoint à la société EDF et au SMEM :
« - de réaliser chacun, pour ce qui la ou le concerne, une étude permettant de déterminer l'opération de raccordement de référence pour chaque demande de raccordement, en transmettant tous les éléments nécessaires à la bonne et complète information de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions ;
« - d'établir une proposition de raccordement conjointe pour chaque demande de raccordement dans le respect du droit en vigueur et dans le respect des dispositions du cahier des charges de concession et des procédures du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité.
« Article 5. - Il est enjoint à la société EDF de transmettre à la SCI Garabeuf et à la SARL Aquitaine Promotions les propositions de raccordement complètes élaborées avec le SMEM.
« Article 6. - La société EDF et le SMEM exécuteront ces injonctions dans un délai de 45 jours à compter de la notification de la présente décision.
« Article 7. - La société EDF et le SMEM informeront le CoRDiS de l'exécution de ces injonctions.
« Article 8. - En tout cas, une proposition complète de raccordement, conjointe à la société EDF et au SMEM, devra être transmise à chacune des sociétés demanderesses dans les 45 jours à compter de la notification de la présente décision, à peine d'une astreinte de 400 euros par jour de retard à l'encontre de la société EDF et/ou du SMEM pendant un délai de 6 mois. Cette astreinte sera liquidée par le CoRDiS, s'il y a lieu, en fonction de la part respective prise par la société EDF et le SMEM dans le retard d'exécution des injonctions prononcées. (…) »
Cette décision a été notifiée le 17 juin 2023 à EDF et le 19 juin 2023 au SMEM.
Par sa décision du 1er décembre 2023, le CoRDiS a décidé :
« Article 1er. - Le SMEM est condamné à payer à la SCI Garabeuf et à la SARL Aquitaine Promotions, à part égale, la somme de 43 200 euros au titre de la liquidation d'astreinte pour la période allant du 4 août 2023 au 20 novembre 2023.
« Article 2. - Les injonctions sous astreintes prononcées par le CoRDiS dans sa décision du 13 juin 2023 sont maintenues à l'égard du SMEM jusqu'au terme initialement fixé dans cette décision et sous réserve de la présente décision.
« Article 3. - Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
« Article 4. - La présente décision est exécutoire dès sa notification aux parties.
« Article 5. - La présente décision sera notifiée à la SCI Garabeuf, à la SARL Aquitaine Promotions, à la société EDF et au SMEM. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française. »
Cette décision a été notifiée le 8 décembre au SMEM.
Le 17 janvier 2024, la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions ont saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d'une nouvelle demande de liquidation d'astreinte.
Vu la procédure suivante :
Par une saisine enregistrée le 17 janvier 2024 sous le numéro 01-LA-24, la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions, chacune représentée par leur représentant légal, demandent au comité de règlement des différends et des sanctions, dans le dernier état de leurs écritures, de :
- constater le refus persistant du SMEM d'obtempérer aux injonctions issues de la décision du CoRDiS du 13 juin 2023 ;
- retenir l'inaction et les comportements fautifs du SMEM, pour écarter toute réfaction du montant de l'astreinte ;
- liquider l'astreinte de 400 € par jour à la charge du SMEM à compter du 21 novembre 2023.
La SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions soutiennent que le SMEM n'a toujours pas obtenu les conventions de servitude de passage, ce qui justifie le maintien et la liquidation de l'astreinte prononcée à son encontre.
Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2024, la société EDF, représentée par ses représentants légaux et ayant pour avocats Mes Cabanes et Perche, cabinet Baker & McKenzie, demande au comité de règlement des différends et des sanctions de :
- rejeter les demandes de la société Aquitaine Promotions et de la SCI Garabeuf, en tant qu'elles concernent la société EDF.
La société EDF fait valoir, en substance, que :
- la requête de la SARL Aquitaine Promotions et de la SCI Garabeuf ne comporte aucune demande de liquidation d'astreinte à son encontre.
Le 25 mars 2024, le président du comité a informé les parties qu'il envisageait d'organiser la séance publique en visioconférence.
Par des courriers électroniques des 25 et 27 mars 2024, les parties ont accepté le principe de participer à la séance publique au moyen d'une communication électronique.
Par des courriers en date du 28 mars 2024, les parties ont été informées que la séance publique se tiendrait par visio-conférence le 8 avril 2024 à 17 heures.
Par un courrier électronique en date du 29 mars 2024, le SMEM a adressé au président du CoRDiS un courrier accompagné de six pièces, comprenant :
- un courrier électronique du SMEM daté du 28 mars 2024, adressé à M. G., en sa qualité de représentant de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions, l'informant de ce que le SMEM avait obtenu les conventions de passage des parcelles nos AW 1238 et AW 1243 et précisant que les travaux d'extension seront réalisés dans un délai de « 5 semaines à partir de la réception du bon de commande émis par le SMEM » ;
- la convention de passage signée par le SMEM et l'association syndicale libre de la résidence Valverde, le 19 mars 2024, pour la parcelle n° AW 1238 ;
- la convention de passage signée par le SMEM et l'association syndicale libre de la résidence Valverde, le 19 mars 2024, pour la parcelle n° AW 1243 ;
- un échange de courriers électroniques datés des 21 et 26 mars 2024 par lesquels, d'une part, le SMEM informe la société Getelec, qu'il a mandatée pour réaliser les travaux d'extension qui sont à sa charge, qu'il est en possession des conventions de servitude signées et, d'autre part, la société Getelec informe le SMEM qu'un délai de cinq semaines sera nécessaire pour la réalisation de l'ouvrage ;
- un titre exécutoire émis le 27 mars 2024 à la charge de la SARL Aquitaine Promotions, pour qu'elle s'acquitte de la somme de 5 075,38 euros pour la réalisation des travaux d'extension ;
- une convention de financement d'études et de travaux, datée du 28 mars 2023 et conclue entre le SMEM et la SARL Aquitaine Promotions concernant « l'extension du réseau public de distribution d'énergie électrique en vue d'amener ledit réseau au droit de la parcelle numéro 1493 ». Cette convention détaille les montants de l'opération d'extension du réseau jusqu'à la parcelle à relier.
Par des courriers en date du 2 avril 2024, les parties ont été informées que la séance publique du 8 avril 2024 était annulée.
Le 8 avril 2024, une mesure d'instruction a été diligentée par le rapporteur auprès du SMEM, de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions afin d'obtenir la date exacte de signature de la « convention de financement études et travaux ».
Par un courrier électronique en date du 10 avril 2024, le SMEM, par l'intermédiaire de Me Dumont, a répondu que la convention de financement étude et travaux avait bien été signée le 28 mars 2023 et a transmis une copie de l'échange de courriers électroniques actualisé au 8 avril 2024 avec M. G., prenant acte du paiement par ses soins du titre exécutoire et l'informant de l'émission du bon de commande par le SMEM.
Par un courrier électronique en date du 10 avril 2024, M. G., en sa qualité de représentant de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions, a confirmé la date de la signature de la convention de financement étude et travaux et a transmis une copie des deux courriers électroniques en date du 28 mars 2023 par lesquels, d'une part, le SMEM lui a adressé cette convention, et, d'autre part, M. G. a renvoyé le document signé.
Par des courriers en date du 11 avril 2024, les parties ont été informées que la séance publique se tiendrait par visio-conférence le 22 avril 2024 à 15 h 30.
Par un courrier électronique du 18 avril 2024, le SMEM a adressé un courrier accompagné de cinq pièces, comprenant :
- un échange de courriers électroniques entre le SMEM et la société Getelec, lauréate du marché à bons de commande, par lequel, notamment, cette société accuse bonne réception du bon de commande, émis par le SMEM, relatif aux prestations permettant de desservir en réseau public de distribution d'électricité les parcelles concernées par le présent litige ;
- le bon de commande de (travaux) (études) d'extension du réseau électrique concernant les parcelles des sociétés demanderesses ;
- un plan des travaux d'extension à effectuer ;
- la délibération en vigueur fixant la répartition du support du coût des travaux d'extension ;
- un courrier électronique daté du 17 avril 2024 adressé par le SMEM à M. G., conviant ce dernier à l'opération de piquetage.
Par un courrier électronique du 18 avril 2024, M. G., en sa qualité de représentant de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions, a transmis au comité ses conclusions récapitulatives par lesquelles il maintient ses demandes.
Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de M. Thierry Tuot, président, M. Laurent-Xavier Simonel et Mme Fanélie Ducloz, membres, qui s'est tenue par visio-conférence le 22 avril 2024 à 15 h 30, après vérification de l'identité des parties et de leurs représentants, en présence de :
- Mme Bonhomme, directrice des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché ;
- M. Giafferi, rapporteur ;
- M. G., représentant de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions ;
- les représentants de la société EDF, assistés de Me Abbouche ;
- les représentants du SMEM, assistés de Me Dumont.
Les parties ayant été informées qu'à tout moment, le président du comité peut décider de lever la séance pour qu'elle soit prorogée à une date ultérieure en cas de difficulté matérielle, notamment liée à la capacité de connexion de l'un des participants, ne permettant pas le déroulement normal de la séance.
L'ensemble des parties ayant confirmé la bonne qualité de la liaison électronique et avoir été informé des modalités de convocation à la séance publique.
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Giafferi, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
- les observations de M. G. pour la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions, ces dernières persistant dans leurs moyens et conclusions ;
- les observations de Me Abbouche pour la société EDF, cette dernière persistant dans ses moyens et conclusions ;
- les observations de Me Dumont pour le SMEM, ce dernier persistant dans ses moyens et conclusions.
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré après que les parties, le rapporteur, le public et les agents des services se sont retirés.
Vu les autres pièces du dossier :
- le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants et R. 134-7 et suivants ;
- le code des procédures civiles d'exécution, notamment ses articles L. 131-2 et L. 131-4 ;
- la décision du CoRDiS du 13 juin 2023 n° 13-38-22 et 14-38-22 ;
- la décision du CoRDiS du 1er décembre 2023 n° 01-LA-23 ;
- la décision du 13 février 2019 portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
- la décision du 8 mars 2024 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'un rapporteur pour l'instruction de la demande enregistrée sous le numéro 01-LA-24.
1. Aux termes de l'article L. 134-20 du code de l'énergie : « […] la décision du comité, qui peut être assortie d'astreintes, est motivée et précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 134-19 ou leur utilisation sont, le cas échéant, assurés. […] ».
2. Aux termes de l'article L. 131-2, alinéa 2, du code des procédures civiles d'exécution : « L'astreinte est provisoire ou définitive. L'astreinte est considérée comme provisoire, à moins que le juge n'ait précisé son caractère définitif. / Une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu'après le prononcé d'une astreinte provisoire et pour une durée que le juge détermine. Si l'une de ces conditions n'a pas été respectée, l'astreinte est liquidée comme une astreinte provisoire ». Aux termes de l'article L.131-4 du même code : « Le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter. / […] / L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère. »
3. L'astreinte prononcée par le CoRDiS, sur le fondement des dispositions de l'article L. 134-20 du code de l'énergie et de celles du code des procédures civiles d'exécution encadrant, aujourd'hui, son régime, est provisoire, de sorte que, lorsqu'il procède à sa liquidation, le CoRDiS peut l'augmenter, la modérer ou la supprimer. Dans l'exercice de son pouvoir de modulation du montant de l'astreinte, le CoRDiS tient compte de l'ensemble des circonstances pertinentes de l'espèce et, notamment, du comportement de l'opérateur à qui l'injonction a été adressée et des difficultés éventuelles qu'il a rencontrées pour l'exécuter.
4. Par une décision du 13 juin 2023 nos 13-38-22 et 14-38-22, le CoRDiS a prononcé les injonctions suivantes à l'encontre de la société EDF et du SMEM :
« Article 3. - Il est enjoint au SMEM de mobiliser l'ensemble de ses moyens pour obtenir les conventions de passage complétées, datées et signées par les propriétaires des parcelles AW 1238 et AW 1243, dans les formes requises pour assurer leur stabilité et leur pleine efficacité tant entre les parties qu'à l'égard des tiers.
« Article 4. - Il est enjoint à la société EDF et au SMEM :
« - de réaliser chacun, pour ce qui la ou le concerne, une étude permettant de déterminer l'opération de raccordement de référence pour chaque demande de raccordement, en transmettant tous les éléments nécessaires à la bonne et complète information de la SCI Garabeuf et de la SARL Aquitaine Promotions ;
« - d'établir une proposition de raccordement conjointe pour chaque demande de raccordement dans le respect du droit en vigueur et dans le respect des dispositions du cahier des charges de concession et des procédures du gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité.
« Article 5. - Il est enjoint à la société EDF de transmettre à la SCI Garabeuf et à la SARL Aquitaine Promotions les propositions de raccordement complètes élaborées avec le SMEM.
« Article 6. - La société EDF et le SMEM exécuteront ces injonctions dans un délai de 45 jours à compter de la notification de la présente décision.
« Article 7. - La société EDF et le SMEM informeront le CoRDiS de l'exécution de ces injonctions.
« Article 8. - En tout cas, une proposition complète de raccordement, conjointe à la société EDF et au SMEM, devra être transmise à chacune des sociétés demanderesses dans les 45 jours à compter de la notification de la présente décision, à peine d'une astreinte de 400 euros par jour de retard à l'encontre de la société EDF et/ou du SMEM pendant un délai de 6 mois. Cette astreinte sera liquidée par le CoRDiS, s'il y a lieu, en fonction de la part respective prise par la société EDF et le SMEM dans le retard d'exécution des injonctions prononcées. »
5. Par une décision du 1er décembre 2023 notifiée le 8 décembre au SMEM, le CoRDiS a maintenu à l'égard du SMEM les injonctions sous astreinte prononcées le 13 juin 2023 jusqu'au terme initialement fixé dans cette décision, lequel est de six mois à compter du premier jour de retard dans l'exécution, par le SMEM, des obligations mises à sa charge, soit le 4 février 2024.
6. Il résulte de l'instruction que le SMEM n'a obtenu les conventions de servitudes en litige que le 19 mars 2024. Il n'a, par suite, pas exécuté les obligations mises à sa charge par l'article 3 de la décision du CoRDiS du 13 juin 2023 dans le délai dont il disposait pour s'exécuter, et a retardé l'exécution des autres injonctions prescrites par cette même décision.
7. Il y a lieu, au regard des circonstances particulières de l'espèce et de l'enjeu du litige, de fixer le montant de l'astreinte à la somme totale de 10 000 euros que le SMEM devra verser, par deux parts égales, respectivement à la SCI Garabeuf et à la SARL Aquitaine Promotions, créancières de l'obligation.
Décide :Liens relatifs
Le SMEM est condamné à payer à la SCI Garabeuf et à la SARL Aquitaine Promotions, à part égale, la somme de 10 000 euros au titre de la liquidation d'astreinte.
Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
La présente décision est exécutoire dès sa notification aux parties.
La présente décision sera notifiée à la SCI Garabeuf, à la SARL Aquitaine Promotions, à la société EDF et au SMEM. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 16 mai 2024.
Pour le comité de règlement des différends et des sanctions :
Le président,
T. Tuot
En conséquence, il est prescrit à tout commissaire de justice sur ce requis de mettre la présente décision à exécution.