La Commission régulièrement convoquée et constituée, réunie le 18 octobre 2023,
Après en avoir délibéré,
Considérant que le bien pour lequel le certificat d'exportation est demandé constitue un remarquable modèle sculpté de Sainte Marie-Madeleine, conçu dans le milieu strasbourgeois des années 1470-1480, sans doute produit dans la période entre le départ de Nicolas de Leyde (vers 1430-1473) pour Vienne en 1467 et l'affirmation de l'art de Nicolas de Haguenau (1445/1460-1538), sculpteur strasbourgeois le plus influent autour de 1500 et auteur de la partie sculptée du retable d'Issenheim ; que cette sculpture, publiée en 1972 après sa découverte, qui est réputée provenir de l'abbaye cistercienne de Lucelle (Haut-Rhin), a été attribuée au « Maître du retable de Lautenbach » par sa proximité stylistique et le traitement caractéristique du visage, malgré une notable différence d'échelle, avec les figures du retable, notamment la Vierge, du maître-autel réalisé vers 1483 dans l'église de pèlerinage de Lautenbach-im-Renchtal du pays de Bade ; que cet exemplaire s'avère proche également de celui d'une statuette de sainte non identifiée et de mêmes proportions, conservée à Berlin et donnée par les spécialistes à l'un des sculpteurs actifs dans le même milieu ; que cette œuvre de dimensions modestes, animée d'une grande force plastique et issue d'un corpus réduit de sculptures religieuses en bois de ce type et de cette époque, était probablement destinée à la dévotion privée et intégrée au sein d'un petit retable ; que cette statuette, d'une exécution virtuose, présente une coiffure et d'amples drapés aux plis cassés de conception sophistiquée, dans une relation spatiale complexe entre le volume du corps et l'enveloppement du vêtement, qui, par des effets tridimensionnels et leur intrication très maîtrisée avec le jeu des mains, concourt à valoriser le pot à onguent ; que cette sculpture, qui présente de minimes lacunes et quelques infestations anciennes, et qui a perdu sa polychromie d'origine, masquée par une cire teintée sombre qui ne permet pas de connaître le contenu des deux écus correspondant peut-être aux commanditaires, est en bon état général de conservation ; que cette œuvre rare, due au ciseau talentueux d'un artiste ayant travaillé dans l'atelier ou dans le proche entourage de Nicolas de Leyde, considéré comme le plus grand sculpteur de la fin du Moyen Âge au Nord des Alpes, en ayant contribué à forger un nouveau langage formel, apparaît essentielle pour l'histoire de la sculpture du « gothique tardif » dans la région du bassin du Rhin supérieur ;
Qu'en conséquence, cette œuvre présente un intérêt majeur pour le patrimoine national du point de vue de l'histoire et de l'art et doit être considéré comme un trésor national ;
Emet un avis favorable au refus du certificat d'exportation demandé.