Décret n° 2023-367 du 13 mai 2023 pris pour l'application de l'article 62 de la loi n° 2021-1754 de financement de la sécurité sociale pour 2022 relatif à l'expérimentation du dispositif dit « d'accès direct » de certains médicaments à une prise en charge par l'assurance maladie

NOR : SPRS2300922D
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2023/5/13/SPRS2300922D/jo/texte
Alias : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2023/5/13/2023-367/jo/texte
JORF n°0112 du 14 mai 2023
Texte n° 12

Version initiale


Publics concernés : assurés sociaux, Haute Autorité de santé, entreprises exploitant des spécialités pharmaceutiques, professionnels prescrivant ou délivrant des produits de santé remboursables par l'assurance maladie, organismes d'assurance maladie.
Objet : modalités de mise en œuvre de l'expérimentation du dispositif dit « d'accès direct » de certains médicaments à une prise en charge par l'assurance maladie.
Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication.
Notice : le texte précise les modalités de mise en œuvre du dispositif expérimental mis en place par l'article 62 de la loi n° 2021-1754 de financement de la sécurité sociale pour 2022, dit « d'accès direct » de certains médicaments à une prise en charge par l'assurance maladie. Il détermine les formalités et modalités relatives à la prise en charge d'une spécialité pharmaceutique dans une ou plusieurs indications, notamment l'instruction du dossier, les remises applicables, la négociation du prix, la fin de prise en charge au titre de l'accès direct ainsi que les pénalités applicables en cas de non-respect de l'engagement de continuité de traitement pris par l'entreprise.
Références : le décret est pris pour l'application de l'article 62 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022. Il peut être consulté sur le site Légifrance (https://www.legifrance.gouv.fr).


La Première ministre,
Sur le rapport du ministre de la santé et de la prévention,
Vu la directive 89/105/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d'application des systèmes d'assurance maladie ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 modifiée de financement de la sécurité sociale pour 2022, notamment son article 62 ;
Vu l'avis du conseil de la Caisse nationale de l'assurance maladie en date du 1er mars 2023 ;
Vu l'avis du conseil central d'administration de la Mutualité sociale agricole en date du 7 mars 2023 ;
Vu l'avis du conseil d'administration de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale en date du 10 mars 2023 ;
Vu l'avis de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles en date du 10 mars 2023 ;
Vu l'avis du conseil de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie en date du 17 avril 2023 ;
Le Conseil d'Etat (section sociale) entendu,
Décrète :


  • I. - La demande tendant à obtenir la prise en charge d'une spécialité pharmaceutique dans une ou plusieurs indications au titre du dispositif dit d'« accès direct » prévu par l'article 62 de la loi du 23 décembre 2021 susvisée est adressée par voie dématérialisée par l'entreprise exploitant la spécialité pharmaceutique concernée aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.
    La date de réception de cette demande est prise en compte pour apprécier le respect des délais prévus au 1° du II du même article.
    La demande est accompagnée d'un dossier qui comporte les informations nécessaires pour apprécier le respect des conditions d'éligibilité à une prise en charge au titre de l'accès direct prévues au II du même article, ainsi que des éléments permettant d'apprécier l'impact de cet accès direct sur les dépenses d'assurance maladie. La liste des pièces composant le dossier de demande est fixée par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Elle est publiée sur le site internet du ministère chargé de la santé.
    II. - Les ministres accusent réception du dossier complet.
    Lorsque la demande n'est pas accompagnée de tous les renseignements et pièces justificatives, les ministres notifient au demandeur la liste des éléments manquants par tout moyen donnant date certaine à la réception de cette notification.
    Lorsque l'entreprise ne transmet pas ces éléments dans les vingt jours suivant la réception de la demande des ministres, la demande d'accès direct est réputée abandonnée.
    III. - La demande de prise en charge par l'assurance maladie au titre de l'accès direct d'une ou plusieurs indications d'une spécialité est appréciée, pour chacune des indications considérées, au regard des conditions prévues aux I et II de l'article 62 de la loi du 23 décembre 2021 susvisée.
    Le niveau de service médical rendu et le niveau d'amélioration du service médical rendu prévus aux 3° et 4° du II du même article sont respectivement fixés comme suit :


    - le service médical rendu est majeur ou important ;
    - l'amélioration du service médical rendu est au moins mineure.


    IV. - Pour chacune des indications faisant l'objet d'une demande de prise en charge au titre de l'accès direct, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale notifient au demandeur leur décision dans un délai de quarante-cinq jours à compter de l'accusé de réception du dossier complet, par tout moyen donnant date certaine à la réception de cette notification, avec la mention des motifs de cette décision ainsi que des voies et délais de recours qui lui sont applicables.
    Le silence gardé par les ministres pendant la durée mentionnée au premier alinéa vaut refus de la demande d'accès direct. Toutefois, si l'intéressé en fait la demande, dans les délais du recours contentieux, les ministres doivent, dans un délai d'un mois, lui en communiquer les motifs.
    V. - Lorsqu'elles ne sont pas délivrées au cours d'une hospitalisation, les spécialités faisant l'objet d'un accès direct sont délivrées par la pharmacie à usage intérieur de l'établissement de santé dans le cadre de la rétrocession.
    VI. - La prise en charge au titre de l'accès direct est accordée pour la spécialité pharmaceutique, dans la ou les indications considérées, par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale pour une durée maximale d'un an.
    Cet arrêté, ou un arrêté ultérieur, mentionne, le cas échéant :


    - les conditions particulières de prescription, de dispensation, d'utilisation, notamment de durées de prise en charge, ou de délivrance lorsque cette spécialité est prescrite sur une ordonnance de dispensation conditionnelle mentionnée à l'article L. 5121-12-1-1 du code de la santé publique ;
    - le fait que la spécialité n'est prise en charge par l'assurance maladie que si, conformément à l'article L. 162-19-1 du code de la sécurité sociale, le prescripteur mentionne sur l'ordonnance des éléments relatifs aux circonstances et aux indications de la prescription. L'arrêté précise la nature de ces éléments et les motifs pour lesquels ils doivent figurer sur l'ordonnance.


    Les ministres peuvent établir par arrêté la liste des établissements de santé pouvant délivrer ces spécialités ou les conditions et critères permettant à certains établissements de santé de le faire, au regard d'éléments relatifs à l'organisation ou à la dispensation des soins, ainsi qu'à la réalisation technique de la prise en charge du patient ou à son suivi.
    VII. - La décision portant cessation de prise en charge en application du 3° du V de l'article 62 de la loi du 23 décembre 2021 susvisée est communiquée à l'entreprise exploitant la spécialité concernée par tout moyen donnant date certaine à la réception de cette information, avec la mention des motifs de cette décision, ainsi que des voies et délais de recours qui lui sont applicables.
    VIII. - Lorsque le titulaire des droits d'exploitation souhaite obtenir le retrait de son autorisation d'accès direct, il en fait la demande auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. En ce cas, les ministres retirent l'autorisation qu'ils ont délivrée dans un délai d'un mois à compter de l'accusé de réception de la demande.
    IX. - Les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale rendent publique, sur le site internet du ministère chargé de la santé, la liste des spécialités faisant l'objet d'une prise en charge au titre de l'accès direct et des spécialités pour lesquelles cette prise en charge a pris fin. Cette publication précise, pour chaque spécialité, les indications concernées.


  • I. - Lorsque la spécialité est déjà prise en charge au titre de l'une des listes mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 162-17 ainsi qu'aux articles L. 162-22-7 et L. 162-23-6 du code de la sécurité sociale, au titre du premier alinéa de l'article L. 5123-2 du code de la santé publique ou au titre de l'article L. 162-16-5-2 du code de la sécurité sociale et dispensée en établissement de santé ou en pharmacie à usage intérieur, la prise en charge au titre de l'accès direct s'effectue, pour chaque indication considérée, selon le prix de cession au public, mentionné à l'article L. 162-16-5 du même code, selon le tarif de responsabilité et le prix limite de vente aux établissements, mentionnés à l'article L. 162-16-6 du même code, selon le prix de vente fixé en application de l'article L. 162-16-5-2 du même code ou selon le prix maximal de vente aux établissements de santé mentionné à l'article L. 162-16-4-3 de ce même code, s'ils existent, pour la ou les indications de ces spécialités pour lesquelles un tel prix ou tarif ont été fixés.
    II. - Lorsque la spécialité qui bénéficie d'un accès direct ne fait l'objet ni d'un prix maximal de vente aux établissements de santé en application de l'article L. 162-16-4-3 du code de la sécurité sociale, ni d'une prise en charge au titre du deuxième alinéa de l'article L. 162-17 ou de l'article L. 162-22-7 du même code dans au moins l'une de ses indications, l'exploitant déclare au Comité économique des produits de santé le montant de l'indemnité maximale qu'il réclame aux établissements de santé pour la spécialité. Le comité rend publiques ces déclarations.
    III. - La participation de l'assuré mentionnée au I de l'article L. 160-13 du code de la sécurité sociale est supprimée pour les spécialités prises en charge au titre de l'accès direct dans la ou les indications concernées par ce dispositif.


  • I. - Les remises dues en application des dispositions du 3° du IV de l'article 62 de la loi du 23 décembre 2021 susvisée sont versées annuellement par l'entreprise exploitant la spécialité concernée, pour chaque indication considérée, au titre de la période d'accès direct de chaque année civile. Ces remises sont assises sur le chiffre d'affaires hors taxes facturé aux établissements de santé au titre de l'indication faisant l'objet d'un accès direct, en fonction du nombre d'unités vendues, lequel est apprécié notamment à l'aide des données de facturation et de codage disponibles, et de leur prix de vente hors taxes.
    Le taux de remise applicable à chaque tranche de chiffre d'affaire est défini selon un barème progressif fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Ce barème tient compte, pour fixer le taux applicable à chaque tranche, de la durée de prise en charge de la spécialité au titre de l'accès direct au cours de l'année considérée.
    II. - Le Comité économique des produits de santé communique à l'entreprise exploitant la spécialité concernée, par tout moyen donnant date certaine à la réception de cette information, le montant des remises qu'il envisage de fixer au titre du I, pour chaque indication considérée. L'entreprise dispose d'un délai de vingt jours à compter de cette notification pour présenter des observations écrites au comité et d'un délai de huit jours suivant cette même notification pour demander, le cas échéant, à être entendu par lui. Dans ce cas, l'audition a lieu à une date fixée par le comité, au plus tard quarante-cinq jours après la réception de la demande.
    Au terme du délai de vingt jours mentionné ci-dessus, ou le cas échéant après l'audition, le Comité économique des produits de santé fixe le montant des remises dues et le notifie à l'entreprise et à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, en indiquant les motifs qui le justifient, le délai de règlement ainsi que les voies et délais de recours applicables.
    III. - Lorsqu'il envisage, en application des dispositions du VII ou du VIII de l'article 62 de la loi du 23 décembre 2021 susvisée, de fixer le prix net de référence d'une spécialité ayant fait l'objet d'un accès direct le Comité économique des produits de santé en informe par tout moyen donnant date certaine à la réception de cette information l'entreprise exploitant la spécialité concernée. Il l'informe également du montant des remises ou de la restitution qu'il envisage de fixer en application du A du VII du même article. L'entreprise dispose d'un délai de vingt jours à compter de cette notification pour présenter des observations écrites au comité et d'un délai de huit jours suivant cette même notification pour demander, le cas échéant, à être entendue par celui-ci. Dans ce cas, l'audition a lieu à une date fixée par le comité, au plus tard quarante-cinq jours après la réception de la demande.
    Au terme du délai de vingt jours mentionné ci-dessus, ou le cas échéant après l'audition, le Comité économique des produits de santé fixe le montant des remises ou de la restitution dues et le notifie à l'entreprise et à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, en indiquant les motifs qui le justifient, le délai de règlement ainsi que les voies et délais de recours applicables.
    IV. - En cas d'application du IX de l'article 62 de la loi du 23 décembre 2021 susvisée, l'article R. 162-20-8 du code de la sécurité sociale s'applique.


  • Lorsque les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale envisagent de prononcer la pénalité financière prévue au B du X de l'article 62 de la loi du 23 décembre 2021 susvisée, ils en informent l'entreprise exploitante concernée par tout moyen permettant de conférer une date certaine à la réception de cette information, en lui précisant les motifs pour lesquels une pénalité est envisagée. L'entreprise dispose d'un délai de vingt jours à compter de cette notification pour présenter des observations écrites aux ministres et d'un délai de huit jours suivant cette même notification pour demander, le cas échéant, à être entendue par eux. Dans ce cas, l'audition a lieu à une date fixée par les ministres, au plus tard quarante-cinq jours après la réception de la demande.
    L'entreprise est tenue de déclarer aux ministres, dans un délai de vingt jours après réception de l'information qu'une pénalité est envisagée, les éléments de son chiffre d'affaires hors taxes pour la spécialité en cause, nécessaires à la fixation de la pénalité. Passé ce délai, à défaut d'avoir reçu les renseignements complets requis, les ministres mettent en demeure l'entreprise de déférer à leur demande sous quinze jours.
    Le montant de la pénalité est fixé dans la limite prévue au B du X de l'article mentionné au premier alinéa en fonction de la gravité du manquement constaté, des risques pour la santé publique qu'il a entraînés ou pourrait entraîner et de leurs conséquences pour les dépenses d'assurance maladie.
    La pénalité est notifiée à l'entreprise, par tout moyen permettant de conférer date certaine à la réception de cette information, par une décision précisant les motifs qui justifient le principe et le montant de la pénalité, les modalités et le délai de règlement ainsi que les voies et délais de recours.
    Les ministres transmettent leur décision à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Les pénalités sont recouvrées par les organismes mentionnés à l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale désignés par son directeur selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations prévues aux articles L. 137-3 et l'article L. 137-4 du code de la sécurité sociale.
    L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale informe les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale des montants perçus au titre du présent décret.


  • Pour l'application du présent décret, les hôpitaux des armées sont regardés comme des établissements de santé.


  • Le rapport d'évaluation du dispositif « d'accès direct » mentionné au XII de l'article 62 de la loi du 23 décembre 2021 susvisée comporte notamment les éléments suivants :


    - le nombre de demandes déposées pour bénéficier du dispositif et les caractéristiques des médicaments concernés, notamment les évaluations de la Haute Autorité de santé relatives aux comparateurs, à l'amélioration du service médical rendu ainsi que leur population cible, les aires thérapeutiques visées et la gravité ou rareté des pathologies concernées ;
    - le nombre de demandes déposées au titre de l'accès direct qui ont ou auraient pu également bénéficier d'un examen au titre de l'accès précoce au titre de l'article L. 5121-12 du code de la santé publique et leur temporalité ;
    - la durée des « accès directs », le nombre de patients traités pendant cet accès anticipé, les dépenses engagées par l'assurance maladie à ce titre, le passage ou non dans le remboursement de droit commun, les modalités et les conditions tarifaires de cet éventuel passage dans le droit commun, notamment au regard de spécialités comparables n'ayant pas bénéficié du dispositif, les conditions dans lesquelles est assurée la continuité de traitement pour les spécialités qui n'ont pas accédé au remboursement de droit commun.


    Le rapport étudie l'éventualité d'une pérennisation du dispositif au terme de l'expérimentation au regard de ces éléments et des impacts estimés sur les dépenses d'assurance maladie.


  • Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et le ministre de la santé et de la prévention sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait le 13 mai 2023.


Élisabeth Borne
Par la Première ministre :


Le ministre de la santé et de la prévention,
François Braun


Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique,
Bruno Le Maire

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