ECLI:FR:CECHR:2022:462438.20220718
ASSEMBLÉE DE LA PROVINCE DES ÎLES LOYAUTÉ
Le Conseil d'Etat (section du contentieux, 10e et 9e chambres réunies),
Sur le rapport de la 10e chambre de la section du contentieux,
Vu la procédure suivante :
Le Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a déféré au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie la délibération n° 2020-46/API du 30 juin 2020 relative au code de l'environnement de la province des îles Loyauté, ainsi que la décision du 16 octobre 2020 rejetant le recours gracieux qu'il avait formé le 19 août 2020 à l'encontre de cette délibération. Par un jugement du 17 mai 2021, le tribunal administratif a fait droit à sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de cette délibération et de cette décision. Par un arrêt du 17 mars 2022, enregistré le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de la province des îles Loyauté, annulé ce jugement et transmis au Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article 205 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, le dossier du déféré du Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie pour examen des questions de répartition des compétences entre les provinces, la Nouvelle-Calédonie et l'Etat en matière de garantie des libertés publiques, de droit pénal et de procédure pénale, de desserte maritime, de domanialité et de statut civil coutumier et de terres coutumières ci-après :
1° La délibération de l'assemblée de la province des îles Loyauté, n° 2020-46/API du 30 juin 2020 relative au code de l'environnement de la province des îles Loyauté, en tant qu'elle crée dans le code de l'environnement de la province des îles Loyauté les articles 232-2 (premier alinéa), 232-3, 232-5, 232-7 et 233-3, (alinéa 2), qui soumettent à déclaration ou autorisation la plupart des activités susceptibles d'être exercées sur le domaine public maritime de la province, méconnaît-elle la répartition des compétences entre l'Etat et les provinces résultant du I (1°) de l'article 21 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, en vertu duquel, l'Etat étant compétent en matière de « garantie des libertés publiques », les règles édictées par les provinces ne peuvent remettre en cause, notamment, les principes généraux du droit, parmi lesquels figure celui de la liberté d'aller et de venir sur le domaine public et celui de la liberté du commerce et de l'industrie ?
2° La même délibération, tant en ce qu'elle crée dans le code de l'environnement de la province des îles Loyauté les articles 235-1, 235-2 et 235-5 qu'en tant que son article 2 fixe sans autre précision l'entrée en vigueur des dispositions y annexées au 1er juillet 2021, méconnaît-elle la répartition des compétences entre l'Etat et les provinces qui résulte des articles 21 (I-2° et II-5°), 87 et 157 de la loi organique du 19 mars 1999 susmentionnée, d'une part, en édictant des règles relevant de la procédure pénale, telle que les modalités de constatation des infractions, et du droit pénal, telle que l'édiction d'une obligation de signalement, la création d'une incrimination pour rébellion et d'une peine complémentaire de confiscation, et, d'autre part, en omettant de reporter l'entrée en vigueur des dispositions prévoyant une peine d'emprisonnement à l'intervention, s'il échet, d'une loi d'homologation comme il est prévu à l'article 87 de la loi organique statutaire ?
3° Cette délibération, en tant qu'elle crée dans le code de l'environnement de la province des îles Loyauté les articles 232-2 (premier alinéa), 232-3, 232-5, 232-7 et 233-3, (alinéa 2), qui soumettent à déclaration ou autorisation l'accès des navires au domaine public maritime de la province, méconnaît-elle la répartition des compétences en matière de desserte maritime entre la Nouvelle-Calédonie et les provinces telle que déterminée par les articles 22 (31°), 45, 46 et 99 (7° et 10°) de la loi organique du 19 mars 1999 susmentionnée et par l'article 3 de la loi du pays n° 2001-017 du 11 janvier 2002 sur le domaine public maritime de la Nouvelle-Calédonie et des provinces ?
4° La même délibération, en tant qu'elle crée, dans le code de l'environnement de la province des îles Loyauté les dispositions des articles 232-7 (alinéa 2), 233-1 (alinéa 2 et alinéa 5 : « sur terres coutumières » ; alinéa 6) et 233-3, méconnaît-elle la répartition des compétences en matière de statut civil coutumier et de terres coutumières entre la Nouvelle-Calédonie et les provinces telle que déterminée par les articles 22 (5°) et 99 (5°) de la loi organique du 19 mars 1999 susmentionnée ?
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- l'accord sur la Nouvelle-Calédonie signé à Nouméa le 5 mai 1998 ;
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 ;
- la loi du pays n° 2001-017 du 11 janvier 2002 ;
- la loi du pays n° 2009-10 du 28 décembre 2009 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseillère d'Etat ;
- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public,
Rend l'avis suivant :
1. Aux termes de l'article 204 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : « I. - Les actes (…) de l'assemblée de province, de son bureau et de son président mentionnés au II sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie ou à leur notification aux intéressés, ainsi qu'à leur transmission au Haut-commissaire ou à son représentant dans la province, par le président du congrès, par le président de la commission permanente, par le président du sénat coutumier ou par le président de l'assemblée de province (…) : II. - Sont soumis aux dispositions du I les actes suivants : (…) / D. - Pour les assemblées de province : / 1° Leurs délibérations ou les décisions prises par délégation de l'assemblée en application de l'article 168 (…) ». L'article 205 de la même loi organique dispose : « Lorsque le tribunal administratif est saisi d'un recours pour excès de pouvoir ou d'un recours en appréciation de légalité dirigé contre les actes mentionnés aux (…) 1° à 3° du D du II de l'article 204 et que ce recours est fondé sur un moyen sérieux invoquant l'inexacte application de la répartition des compétences entre l'Etat, la Nouvelle-Calédonie, les provinces et les communes ou que ce moyen est soulevé d'office, il transmet le dossier sans délai pour avis au Conseil d'Etat, par un jugement qui n'est susceptible d'aucun recours. Le Conseil d'Etat examine la question soulevée dans un délai de trois mois et il est sursis à toute décision sur le fond jusqu'à son avis ou, à défaut, jusqu'à l'expiration de ce délai. Le tribunal administratif statue dans un délai de deux mois à compter de la publication de l'avis au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie ou de l'expiration du délai imparti au Conseil d'Etat ».
2. Après avoir annulé pour irrégularité le jugement par lequel le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a fait droit au déféré du Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie tendant à l'annulation de la délibération n° 2020-46/API du 30 juin 2020 relative au code de l'environnement de la province des îles Loyauté, qui y insèrent un Titre III au Livre II relatif à l'accès à la nature pour méconnaissance des dispositions de l'article 205 de la loi organique du 19 mars 1999, citées au point 1, la cour administrative d'appel de Paris a, en application de ces mêmes dispositions, sursis à statuer et transmis le dossier au Conseil d'Etat en lui posant des questions relatives à la répartition des compétences entre les provinces, la Nouvelle-Calédonie et l'Etat en matière de garantie des libertés publiques, de droit pénal et de procédure pénale, de desserte maritime, de domanialité et de statut civil coutumier et de terres coutumières.
Sur la saisine du Conseil d'Etat :
3. D'une part, les dispositions de l'article 205 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie précitées qui imposent au tribunal administratif de saisir le Conseil d'Etat, dans certaines conditions, d'une question relative à la répartition des compétences entre l'Etat, la Nouvelle-Calédonie, les provinces et les communes, doivent être regardées comme s'appliquant également à la cour administrative d'appel, qu'elle statue en tant que juge d'appel ou en qualité de juge de premier ressort. D'autre part, il n'appartient pas au Conseil d'Etat, qui doit seulement s'assurer que les conditions fixées par l'article 205 sont remplies, de se prononcer sur la régularité ou le bien-fondé de la décision juridictionnelle qui lui a transmis cette demande d'avis.
Sur la répartition des compétences :
4. Le point 1.1. du document d'orientation de l'accord de Nouméa stipule que : « (…) le statut coutumier distinguera les biens situés dans les « terres coutumières » (nouveau nom de la réserve), qui seront appropriés et dévolus en cas de succession selon les règles de la coutume et ceux situés en dehors des terres coutumières qui obéiront à des règles de droit commun ». Le point 1.4. du même document prévoit : « L'identité de chaque Kanak se définit d'abord par rapport à une terre./ (…) Les domaines de l'Etat et du territoire doivent faire l'objet d'un examen dans la perspective d'attribuer ces espaces à d'autres collectivités ou à des propriétaires coutumiers ou privés, en vue de rétablir des droits ou de réaliser des aménagements d'intérêt général. La question de la zone maritime sera également examinée dans le même esprit ».
5. Aux termes du premier alinéa de l'article 18 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : « Sont régis par la coutume les terres coutumières et les biens qui y sont situés appartenant aux personnes ayant le statut civil coutumier. Les terres coutumières sont constituées des réserves, des terres attribuées aux groupements de droit particulier local et des terres qui ont été ou sont attribuées par les collectivités territoriales ou les établissements publics fonciers, pour répondre aux demandes exprimées au titre du lien à la terre. Elles incluent les immeubles domaniaux cédés aux propriétaires coutumiers ». L'article 20 de la même loi organique prévoit : « Chaque province est compétente dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l'Etat ou à la Nouvelle-Calédonie par la présente loi, ou aux communes par la législation applicable en Nouvelle-Calédonie (…) ». L'article 21 de la même loi organique dispose : « I. - L'Etat est compétent dans les matières suivantes : / 1° (…) garanties des libertés publiques ; / 2° Justice ; (…) procédure pénale (…) / 6° La desserte maritime (…) entre la Nouvelle-Calédonie et les autres points du territoire de la République ; (…) statut des navires (…) / 12° Exercice, hors des eaux territoriales, des compétences résultant des conventions internationales, sous réserve des dispositions du 10° de l'article 22 relatives aux ressources de la zone économique exclusive (…) / (…) 14° Police et sécurité (…) de la circulation maritime sous réserve du III du présent article (…) / II. - L'Etat est également compétent dans les matières suivantes (…) : / 5° Droit pénal, sous réserve des dispositions prévues aux articles 86, 87, 88 et au deuxième alinéa de l'article 157 (…) / III. - L'Etat exerce également jusqu'à leur transfert à la Nouvelle-Calédonie, dans les conditions prévues à l'article 26, les compétences suivantes : / (…) 1° bis Police et sécurité de la circulation maritime s'effectuant entre tous les points de la Nouvelle-Calédonie ; sauvegarde de la vie en mer dans les eaux territoriales (…) ». Selon l'article 22 : « La Nouvelle-Calédonie est compétente dans les matières suivantes : / (…) 5° Statut civil coutumier ; terres coutumières et palabres coutumiers ; limites des aires coutumières ; / (…) 8° Desserte maritime d'intérêt territorial ; / (…) 10° Réglementation et exercice des droits d'exploration, d'exploitation, de gestion et de conservation des ressources naturelles, biologiques et non biologiques de la zone économique exclusive ; (…) / 31° Droit domanial de la Nouvelle-Calédonie et des provinces (…) ». L'article 45 prévoit que : « Le domaine public maritime des provinces comprend, à l'exception des emprises affectées à la date de la publication de la présente loi à l'exercice des compétences de l'Etat et sous réserve des droits des tiers, la zone dite des cinquante pas géométriques, les rivages de la mer, les terrains gagnés sur la mer, le sol et le sous-sol des eaux intérieures, dont ceux des rades et lagons, telles que définies par les conventions internationales, ainsi que le sol et le sous-sol des eaux territoriales. Les îles qui ne sont pas comprises dans le territoire d'une province ainsi que le sol et sous-sol du plan d'eau du port autonome de la Nouvelle-Calédonie font partie du domaine public de la Nouvelle-Calédonie ». Aux termes de l'article 46 : « Sous réserve des compétences de l'Etat mentionnées au 3° du I de l'article 21, les provinces réglementent et exercent les droits d'exploration, d'exploitation, de gestion et de conservation des ressources naturelles biologiques et non biologiques des eaux intérieures, dont celles des rades et lagons, de leur sol et de leur sous-sol, et du sol, du sous-sol et des eaux surjacentes de la mer territoriale. / Les provinces prennent, après avis du conseil coutumier concerné, les dispositions particulières nécessaires pour tenir compte des usages coutumiers ». L'article 86 dispose que : « En matière pénale, le congrès peut assortir les infractions aux lois du pays et à ses règlements de peines d'amendes qui respectent la classification des contraventions et délits et n'excèdent pas le maximum prévu pour les infractions de même nature par les lois et règlements de la République. Il peut assortir ces infractions de peines complémentaires prévues pour les infractions de même nature par les lois et règlements de la République. / Le congrès peut également prévoir des sanctions administratives en toutes matières (…) / Les agents assermentés de la Nouvelle-Calédonie, des provinces et des communes peuvent constater les infractions aux réglementations de la Nouvelle-Calédonie, des provinces et des communes dans les conditions fixées par la loi ». L'article 87 prévoit : « Sous réserve d'une homologation de sa délibération par la loi, le congrès peut assortir les infractions aux lois du pays et aux règlements qu'il édicte de peines d'emprisonnement qui respectent la classification des délits et n'excèdent pas le maximum prévu pour les infractions de même nature par les lois et règlements de la République. / Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi d'homologation, seules les peines d'amende et les peines complémentaires éventuellement prévues par la délibération sont applicables ». L'article 99 dispose : « Les délibérations par lesquelles le congrès adopte des dispositions portant sur les matières définies à l'alinéa suivant sont dénommées : « lois du pays » (…) ». Selon l'article 157 : « (…) Dans les matières de sa compétence, l'assemblée de province peut prendre les mesures prévues par les articles 86 à 88 ».
6. La préservation de l'environnement n'est pas au nombre des compétences attribuées respectivement à l'Etat ou à la Nouvelle-Calédonie par les articles 21 et 22 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie et aucune disposition de la législation applicable en Nouvelle-Calédonie ne confie cette compétence aux communes. Il s'ensuit que les provinces de Nouvelle-Calédonie sont compétentes pour édicter une réglementation qui tend à la préservation de l'environnement, sous réserve de ne pas porter atteinte à d'autres compétences attribuées à l'Etat, à la Nouvelle-Calédonie ou aux communes.
7. En premier lieu, alors même que l'Etat est seul compétent en matière de garanties des libertés publiques, en vertu du 1° du I de l'article 21 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, les provinces de Nouvelle-Calédonie, sont compétentes, en vue de la préservation de l'environnement, pour, le cas échéant, adopter une réglementation qui soumette certaines activités susceptibles d'être exercées sur le domaine public maritime, notamment à caractère économique, à un régime de déclaration ou d'autorisation.
8. En deuxième lieu, si l'Etat est compétent en matière de procédure pénale et en matière pénale, respectivement en vertu du 2° du I et du 5° du II de l'article 21 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, il résulte des dispositions des articles 86, 87 et 157 de la même loi organique qu'en matière de protection de l'environnement, les assemblées des provinces peuvent assortir les infractions à leur réglementation, d'une part, de peines d'amendes dès lors qu'elles respectent la classification des contraventions et délits et, d'autre part, sous réserve d'une homologation de leurs délibérations par la loi, de peines d'emprisonnement qui respectent la classification des délits. De surcroît, ces peines ne doivent pas excéder le maximum prévu pour les infractions de même nature par les lois et règlements de la République et s'agissant des peines d'emprisonnement, jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi d'homologation, seules les peines d'amende et les peines complémentaires éventuellement prévues par la délibération sont applicables. Par ailleurs, il est loisible aux provinces de rappeler que, conformément à l'article 86 de la loi organique, les fonctionnaires et agents assermentés des provinces peuvent constater les infractions à cette réglementation dans les conditions fixées par la loi sans préjudice du pouvoir général de constatation des infractions des officiers de police judiciaire et des agents de police judiciaire ou du pouvoir spécial de constatation des infractions douanières par les agents des douanes. Aucune disposition de la loi organique ne fait obstacle à la compétence des provinces pour instituer une obligation de signalement. Enfin, elles sont compétentes pour fixer la date d'entrée en vigueur de dispositions à caractère pénal, la circonstance qu'à la date prévue celles d'entre elles qui prévoient des peines d'emprisonnement n'aient pas été homologuées faisant simplement obstacle à ce qu'elles puissent être appliquées.
9. En troisième lieu, les règles du droit domanial des provinces, sous réserve de la compétence attribuée à l'Etat en matière de défense nationale, relèvent de la compétence de la Nouvelle-Calédonie et ressortissent des lois du pays délibérées par le congrès, en application du 31° de l'article 22 et du 7° de l'article 99 de la loi organique. Sur ce fondement a été adoptée la loi du pays n° 2001-017 du 11 janvier 2002 sur le domaine public maritime de la Nouvelle-Calédonie et des provinces. Par ailleurs, en application du 1er bis du III de l'article 21 et des articles 26 et 99 de la loi organique, la police et la sécurité de la circulation maritime s'effectuant entre tous points de la Nouvelle-Calédonie ainsi que la sauvegarde de la vie humaine en mer dans les eaux territoriales ont été transférées à la Nouvelle-Calédonie par la loi du pays n° 2009-10 du 28 décembre 2009. Son article 2 prévoit que, dans le respect de la répartition des compétences entre l'Etat, la Nouvelle-Calédonie et les provinces, la Nouvelle-Calédonie est notamment compétente pour réglementer la circulation maritime, entendue comme la navigation maritime, et assurer la police administrative spéciale destinée à assurer le respect de cette réglementation, définir les droits et les obligations des navires pilotés et fixer les règles relatives aux manifestations nautiques. Toutefois, dès lors que la détermination de l'autorité compétente pour édicter une réglementation dans un domaine dépend de la nature de la finalité qui lui est assignée, ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'une province édicte, à des fins de préservation de l'environnement, ou sur le fondement des compétences qu'elle tire des articles 45 et 46 de la loi organique en matière de conservation des ressources naturelles des eaux intérieures et des eaux surjacentes de la mer territoriale, une réglementation complémentaire soumettant à un régime de déclaration ou d'autorisation, selon qu'ils sont affectés à une activité de plaisance, de pêche ou de commerce, assorti de sanctions, l'accès des navires à son domaine public maritime, sous réserve que cette réglementation soit compatible avec les dispositions de la loi du pays n° 2001-017 du 11 janvier 2002 et de la loi du pays n° 2009-10 du 28 décembre 2009. N'y font pas davantage obstacle les dispositions du 10° de l'article 99 de la loi organique, qui fixent le principe selon lequel une loi du pays doit fixer les principes fondamentaux concernant le régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales.
10. En quatrième et dernier lieu, si la Nouvelle-Calédonie est compétente en matière de statut civil coutumier, de terres coutumières et palabres coutumiers ainsi que de limites des aires coutumières, en vertu du 5° de l'article 22 de la loi organique, en matière de détermination des principes directeurs du droit de l'urbanisme, sur le fondement du 21° de l'article 22 de la loi organique, ainsi qu'en matière de droit civil, compétence transférée par l'Etat à la Nouvelle-Calédonie, en application des articles 26 et 99 de la loi organique, par la loi du pays n° 2012-2 du 20 janvier 2012, ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'une province, en vue de préserver l'environnement dans le respect des usages coutumiers de jouissance, institue des servitudes écologiques et coutumières ayant pour objet de réglementer l'accès à la nature dans des zones situées sur le domaine public maritime ou sur des terres coutumières mises à la disposition de la province.
11. Le présent avis sera notifié à la présidente de la cour administrative d'appel de Paris, au président du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, au président de l'assemblée de la province des îles Loyauté, au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Il sera publié au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie.
Délibéré à l'issue de la séance du 1er juillet 2022 où siégeaient : M. Christophe Chantepy, président de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre ; Mme Nathalie Escaut, Mme Anne Egerszegi, M. Alain Seban, M. Thomas Andrieu, M. Alexandre Lallet, conseillers d'Etat et Mme Isabelle Lemesle, conseillère d'Etat-rapporteure.
Rendu le 18 juillet 2022.
Le président :
Signé : M. Christophe Chantepy
La conseillère d'Etat-rapporteure :
Signé : Mme Isabelle Lemesle
La secrétaire :
Signé : Mme Claudine RamalahanoharanaLiens relatifs
Avis n° 462438 du 18 juillet 2022